
Jamais la technologie ne s’est immiscée aussi loin entre la voiture et son conducteur. Depuis quelques années, les aides à la conduite déferlent dans les véhicules avec leur lot de puces électroniques, capteurs, caméras et autres algorithmes. Parmi ces systèmes, l’antiblocage de roue (le freinage ABS) et le contrôle de trajectoire (l’anti-dérapage ESP) sont les plus connus et anciens : l’alpha et l’oméga de la sécurité active en quelque sorte. Lancé pour la première fois en 1978 sur la Mercedes Classe S, l’ABS est obligatoire depuis 2006 et équipe maintenant la quasi- totalité du parc automobile. L’ESP, lui, sera monté en série sur tous les...
Jamais la technologie ne s’est immiscée aussi loin entre la voiture et son conducteur. Depuis quelques années, les aides à la conduite déferlent dans les véhicules avec leur lot de puces électroniques, capteurs, caméras et autres algorithmes. Parmi ces systèmes, l’antiblocage de roue (le freinage ABS) et le contrôle de trajectoire (l’anti-dérapage ESP) sont les plus connus et anciens : l’alpha et l’oméga de la sécurité active en quelque sorte. Lancé pour la première fois en 1978 sur la Mercedes Classe S, l’ABS est obligatoire depuis 2006 et équipe maintenant la quasi- totalité du parc automobile. L’ESP, lui, sera monté en série sur tous les véhicules particuliers ou utilitaires neufs à partir de 2012, conformément aux objectifs de l’Union européenne.
L’ESP obligatoire en 2012
À l’instar de la ceinture de sécurité et de l’airbag, ces deux technologies, généralement associées à l’anti-patinage (ASR), au répartiteur de freinage (EBV) et au régulateur de couple (MSR), ont largement contribué à faire reculer l’accidentologie routière ces dix dernières années. Selon une étude menée par l’université de Cologne datant de 2007, l’ESP permettrait de sauver 4 000 vies et éviterait 100 000 blessés en Europe chaque année (600 morts et 6 000 blessés en France). Et à ces équipements désormais incontournables vient s’ajouter aujourd’hui une foule de nouveaux dispositifs d’aide à la conduite susceptibles d’améliorer le confort et la sécurité. Un marché en plein boom où quelques grands équipementiers – Bosch et Valeo entre autres – alimentent une concurrence effrénée entre constructeurs, et pas seulement parmi les plus haut de gamme d’entre eux.
Précurseur dans ce domaine, Ford a frappé fort récemment avec un pack « sécurité intégrale », proposé sur la nouvelle Focus dans sa version Titanium et prochainement sur d’autres modèles (C-Max, S-Max et Galaxy). Au programme, entre autres, les systèmes anti-collision, l’alerte au franchissement de ligne, la reconnaissance des panneaux ou encore la détection d’angle mort. Le tout pour 1 200 euros ou 8 euros par mois en LLD (36 mois et 90 000 km) pour les entreprises. « Avec cette offre ultra compétitive, Ford prouve sa volonté de démocratiser ces équipements pour offrir au plus grand nombre une sécurité optimale, explique Philippe Flon, responsable des ventes sociétés chez Ford. Ce pack a une raison d’être toute particulière auprès de nos clients sociétés : les collaborateurs étant de gros rouleurs, ils sont donc plus exposés aux risques routiers. Les gestionnaires de flotte sont d’ailleurs de plus en plus sensibles à cet argument. C’est aussi une valeur ajoutée pour eux, une manière de se différencier par rapport à la concurrence. » Si l’offre ne représente pour l’instant que 12 % des ventes flottes, Ford vise à terme la standardisation de ces équipements. L’objectif est double : éviter la décote des options à la revente (environ un tiers du prix neuf) et optimiser la valeur résiduelle des modèles équipés.
Chez la concurrence, la stratégie diffère. Le meilleur de la technologie est généralement réservé aux modèles haut de gamme, mais les gammes dédiées aux professionnels ne cessent de s’enrichir en équipements. Chez Volkswagen, par exemple, les Polo, Golf et Passat Business intègrent toutes, dès le premier niveau de finition, un pack connectivité avec régulateur de vitesse, radar de stationnement avant et arrière, GPS et interface Bluetooth. Une dotation qui prend en compte les besoins essentiels des sociétés. À cela peut s’ajouter un pack supplémentaire « Drive Assist » sur la Passat, intégrant le nec plus ultra (Lane Assist, Front Assist, ACC, etc.).
Moins d’accidents et des primes d’assurance en baisse
« Le taux de monte reste encore faible pour ce type d’équipements du fait de leur surcoût, mais cela pourrait vite changer, estime Michel David, chef de gamme chez Volkswagen. Tout dépend de la politique des sociétés. Derrière l’aspect sécuritaire, les raisons économiques sont évidentes : moins d’accidents et de casse matérielle, cela signifie des frais de réparation en baisse et des primes d’assurance potentiellement réduites », souligne-t-il.
De son côté, Mercedes mise sur des systèmes de prévention de la baisse de la vigilance. Une cause majeure d’accidents chez les professionnels, avec 18 % des tués sur l’autoroute. Ainsi, la nouvelle classe B propose en série deux équipements sur toute la gamme : le Collision Prevention Assist, un système de détection des obstacles qui prévient le conducteur d’un danger imminent, et l’Attention Assist, qui détecte les signes de somnolence du conducteur en analysant son comportement. « Deux technologies vraiment utiles pour les gros rouleurs et qui ont le mérite de ne pas intervenir dans la conduite », note Frédéric Grandvoinnet, directeur des ventes sociétés Mercedes et smart. Pour les plus exigeants, le « Pack Innovation » ajoute le régulateur actif Distronic, l’alerte de franchissement de ligne et l’éclairage intelligent. « Libre au gestionnaire d’opter pour ces aides plutôt qu’un toit panoramique ou une sellerie cuir », complète Frédéric Grandvoinnet. À l’avenir, l’innovation devrait s’appuyer sur la connectivité et l’internet mobile. « Grâce à la géolocalisation, nous serons capables, d’ici deux à trois ans, de repérer à distance les véhicules aux intersections et d’anticiper les risques d’accident », prévoit Philippe Flon chez Ford.
Les systèmes de reconnaissance vocale embarqués sont également amenés à se développer pour aider le conducteur à gérer les différentes fonctionnalités du véhicule sans lâcher le volant : la téléphonie avec possibilité d’affichage et lecture des SMS, mais aussi la gestion des commandes audio ou GPS. L’idée est de pouvoir tout contrôler par la voix pour éviter de quitter la route des yeux.
Toujours plus d’intelligence avec la connectivité
Dans un futur plus lointain, « les assistances sauront mieux s’adapter aux besoins du conducteur, assure Philippe Bonnifait, professeur à l’université de Compiègne et chercheur au CNRS. L’emploi des caméras intérieures et autres capteurs pour analyser le comportement du conducteur ou son rythme cardiaque sont des scénarios actuellement étudiés en laboratoires, dans le but d’améliorer la relation entre l’homme et sa machine », ajoutet- il Un véhicule pourra adapter son comportement (suspension, freinage et puissance) en fonction du conducteur, de son style de conduite ou de son état physique (fatigue, stress, etc.). Des solutions plus contraignantes pourraient aussi être retenues comme le bridage des moteurs ou l’anti-démarrage, avec éthylotests obligatoires, en cas de taux d’alcoolémie excessif. « Nous serons en mesure de mieux paramétrer les systèmes pour les rendre plus intelligents et efficaces, quitte à y recourir dans une logique plus répressive pour l’usager », complète Philippe Bonnifait. Toutefois, cette explosion de l’offre d’aides à la conduite peut aussi mettre les clients dans l’embarras et les confronter à des choix difficiles. Comment s’y retrouver face à la surenchère d’équipements ? Comment distinguer le gadget de l’innovation utile ? Pour Philippe Brendel, directeur de l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE, Arval), l’abondance des systèmes actuels brouille les repères : « Pour les gestionnaires, rien n’est pire que de devoir arbitrer entre telle ou telle option. Mieux vaudrait rendre obligatoires les équipements les plus salutaires plutôt que d’allonger la liste à l’infini. »
La multiplicité des équipements complique les choix
L’autre problème, c’est la bonne utilisation de ces dispositifs, lesquels peuvent avoir des effets pervers. À force de se sentir assisté, le conducteur a tendance à relâcher son attention. C’est notamment vrai du régulateur de vitesse. « Le fait de confier des tâches à un automate dégage le cerveau d’une activité de régulation (action sur la pédale, surveillance des compteurs), ce qui peut accroître le risque de distraction, voire de somnolence, confirme Philippe Bonnifait, de l’université de Compiègne et du CNRS. C’est d’autant plus grave que ce dispositif implique des vitesses élevées et qu’il n’y a pas de contrôle monitoring de l’activité du conducteur, comme dans les trains par exemple. La multiplication des systèmes embarqués, signaux sonores et autre témoins, augmente aussi le risque de confusion et de conflits d’intention homme-machine », conclut-il. À suivre… de près.
Prise en photo en août dernier entre Munich et Nuremberg, cette BMW est pourvue de multiples outils d’aide à la conduite.
Au point de freiner, d’accélérer, de doubler et de s’adapter d’elle-même à la circulation.