
Chaque jour, 23,2 millions de Français quittent leur domicile et se rendent sur leur lieu de travail par différents moyens de transport. Selon une étude de l’Insee publiée en février dernier, 70 % d’entre eux emploient leur voiture pour ces trajets du quotidien. Et dans les zones rurales (Cantal, Lozère, Vendée et Gers), plus de huit salariés sur dix ont recours à l’automobile pour rejoindre leurs bureaux. Dans leur grande majorité, ces conducteurs sont seuls au volant, pratique qualifiée d’autosolisme par les consultants et les professionnels de la mobilité.

Des chiffres...
Chaque jour, 23,2 millions de Français quittent leur domicile et se rendent sur leur lieu de travail par différents moyens de transport. Selon une étude de l’Insee publiée en février dernier, 70 % d’entre eux emploient leur voiture pour ces trajets du quotidien. Et dans les zones rurales (Cantal, Lozère, Vendée et Gers), plus de huit salariés sur dix ont recours à l’automobile pour rejoindre leurs bureaux. Dans leur grande majorité, ces conducteurs sont seuls au volant, pratique qualifiée d’autosolisme par les consultants et les professionnels de la mobilité.

Des chiffres que valide Thomas Luc, directeur stratégie automobile & mobilité d’Equancy Automotive, un cabinet de conseil qui accompagne les constructeurs automobiles dans la gestion de la mobilité. « Pour les trajets quotidiens domicile-travail, le taux d’occupation atteint seulement 1,1 passager par véhicule. En outre, les collaborateurs des entreprises doivent résoudre des problèmes d’accès au travail. Et avant tout, ils doivent affronter la congestion des voies de circulation : à Paris, ils perdent jusqu’à dix jours par an dans les embouteillages. Enfin, la pollution est un autre défi à relever », détaille ce consultant.
La mutualisation prête à décoller ?
Forte de ce constat, la mutualisation des véhicules devrait décoller dans les entreprises. « Cette clientèle représente 15 % des trajets réalisés en autopartage par les flottes équipées de nos technologies et cette part progresse fortement, confirme Grégory Ducongé, P-DG de Vulog, spécialiste des technologies de l’autopartage. Dans les grandes villes, les contraintes sont telles que le véhicule d’entreprise n’a pas de raison d’être. Dans ces conditions, les entreprises ont tout intérêt à réduire la taille de leur flotte et à adopter des solutions de mobilité comme l’autopartage. Autre avantage, l’autopartage est idéal pour l’électrique avec des trajets plus courts et un retour à la borne de recharge », argumente Grégory Ducongé qui défend son activité.
Mais pour certaines populations, les solutions de mobilité alternatives n’ont pas toujours d’intérêt. « C’est le cas des commerciaux pour lesquels l’automobile est un véritable outil de travail. Le covoiturage et l’autopartage intéressent avant tout les collaborateurs qui viennent au bureau au quotidien. Mais pour cette population, le covoiturage constitue-t-il une alternative pour diminuer le temps de voyage et se passer des transports en commun ? », interroge Thomas Luc.
Acticall Sitel France, prestataire de services dans le domaine de la relation-client, apporte une partie de la réponse. À la tête de douze sites en France, avec 150 à 800 collaborateurs pour chacun, l’entreprise s’est mise au covoiturage, entre autres à Clermont-Ferrand.
Des démarches au cas par cas
« Lorsque les bureaux sont excentrés, difficiles d’accès via les transports en commun, les collaborateurs viennent en voiture. Dans ce contexte, le covoiturage a plus de chance de se développer. À Rouen, nos collaborateurs privilégient le train qui s’arrête près de notre site. À Paris, ils font appel au transport en commun », observe Marianne Levisalles, responsable du développement RH d’Acticall Sitel France (voir le reportage).
Thomas Luc souligne d’ailleurs qu’à destination de leurs salariés, les entreprises cherchent à structurer leur offre de mobilité selon les différents types d’usagers et d’usages : utilisations professionnelles, trajets domicile-travail, etc. « Une seule solution dans sa singularité a du mal à trouver sa justification. Lorsque le client est mis au centre du service, l’enjeu est de lui simplifier le trajet de bout en bout. Or il est difficile d’y parvenir avec une seule solution et un seul partenaire. Pour accélérer le déploiement des nouvelles mobilités, il faut développer un ensemble de solutions », note ce consultant. Thomas Luc poursuit : « Aujourd’hui, les entreprises gèrent des coûts d’utilisation et le remboursement de notes de frais. Demain, avec la généralisation des crédits de mobilité, elles réfléchiront selon un coût de mobilité en positionnant l’employé au centre des solutions déployées : celui-ci adoptera un véhicule plus petit mais se verra attribuer un crédit de mobilité en contrepartie », conclut Thomas Luc.
Proposer un ensemble de solutions
Cet « ensemble de solutions » passera par des solutions internes à l’entreprise, mais aussi externes : avec le covoiturage, le véhicule n’appartient pas forcément à l’entreprise et la pratique dépasse le périmètre de sa flotte pour s’intéresser à la mobilité des salariés dans sa globalité. Sur ce sujet, la mise en place du covoiturage à Clermont-Ferrand se veut particulièrement exemplaire, partagée entre les collectivités territoriales, l’État, les entreprises et le prestataire impliqué (voir le reportage).
Des démarches que le lancement des plans de mobilité par certaines sociétés pourrait soutenir efficacement. Car pour une entreprise, déployer des solutions d’autopartage et/ou de covoiturage contribue à alimenter le plan de mobilité, à améliorer la qualité de vie de ses salariés et à préserver l’environnement. Tout en baissant les coûts dans l’idéal, ou tout du moins en évitant de les augmenter. Des gains notamment mis en avant par les prestataires de mobilité : « Chaque mois, le partage d’un véhicule économise quatre à cinq locations de courte durée, 21 courses de taxi ou sept trajets en indemnités kilométriques », fait valoir Olivier Emsalem, responsable des services connectés de Free2Move Business Solutions pour le Groupe PSA.
Partager pour réduire les coûts
Pour Thomas Luc, « l’autopartage se développera d’autant plus qu’un véhicule mutualisé se substitue à quatre ou six véhicules attribués et fait reculer le TCO de 30 %. » Avec cependant une nuance : « Même si des facteurs jouent en faveur du covoiturage et de l’autopartage, il faudra un intérêt économique fort pour que ces deux modes de déplacement se développent. À l’heure actuelle, le bénéfice perçu reste faible. Mais il existe au sein des entreprises une réelle volonté d’optimiser les voitures qui dorment au garage ou sur un parking et de mieux les employer », complète Thomas Luc.
Tout aussi motivés par le volet environnemental et le confort de travail, les collaborateurs auraient en parallèle tout intérêt à pratiquer le covoiturage pour limiter leurs dépenses automobiles. Selon Klaxit, l’un des acteurs du covoiturage domicile-travail, un automobiliste qui habite à 30 km de son travail dépense en moyenne 480 euros par mois pour ses trajets quotidiens. Par la pratique régulière du covoiturage, il diminue son budget de 25 % à 360 euros mensuels. S’il prend deux passagers, il ne lui en coûtera plus que 240 euros par mois, soit un budget divisé par deux. Et le gain se fait tout autant décisif pour un automobiliste qui abandonne sa voiture pour rejoindre un conducteur qui mutualise la sienne.
Mais pour que ces changements aient lieu, la motivation financière ne suffit pas : il faut aussi savoir faire passer le message.
Pas de covoiturage sans sensibilisation
Pour promouvoir le covoiturage et faire évoluer les comportements, Acticall Sitel France a ainsi mené plusieurs campagnes de communication avec différents supports : affichage, prospectus, envois de vidéos par e-mail, etc. Le message transmis met en avant les atouts environnementaux du covoiturage et Acticall Sitel France est allé encore plus loin en s’engageant à offrir les 20 000 premiers kilomètres réalisés en covoiturage à ses collaborateurs. Mais ce projet suppose de changer des habitudes bien ancrées et, à ce titre, demande un accompagnement pour atteindre ses objectifs. « Notre service de communication œuvre dans ce sens et Klaxit nous aide grâce à ses campagnes clés en main », précise Marianne Levisalles, la responsable du développement RH.
Pour Acticall Sitel France, le covoiturage constitue aussi l’un des outils de la direction des ressources humaines et contribue à son objectif de capitaliser sur l’humain en renforçant la proximité avec le collaborateur. « Nous présentons le covoiturage à chaque fois que nous intégrons un collaborateur. Sans sensibilisation, le covoiturage échoue », reprend Marianne Levisalles.
« Il faut réaliser un véritable travail au préalable et bien communiquer auprès de la population ciblée, confirme Thomas Luc pour Equancy Automotive. Cela suppose de faire preuve de pédagogie et de s’investir dans l’accompagnement des collaborateurs en leur montrant les gains économiques et environnementaux. À titre d’exemple, des ambassadeurs peuvent témoigner des gains obtenus. Il faut mener de véritables campagnes marketing en interne. Le coût n’est pas un frein pour réussir à développer le covoiturage ; la difficulté réside dans l’implication du collaborateur. Et le projet est d’autant plus efficace que le covoiturage s’inscrit dans une palette complète de solutions : covoiturage, autopartage, véhicule électrique, transports en commun, etc. », énumère Thomas Luc.
Comme pour chaque projet d’entreprise, la conduite du changement demeure le principal défi à relever. Aux dirigeants de faire preuve de talent pour impliquer leurs salariés et mener le projet à son terme avec succès.
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