Autopartage : la percée se confirme

Si le raz de marée annoncé n’a pas eu lieu, l’autopartage progresse lentement mais sûrement au sein des entreprises. Encore marginal dans les modes d’utilisation, il n’en donne pas moins lieu à de multiples initiatives de la part de start-ups spécialisées ou d’acteurs plus établis comme les constructeurs automobiles et les loueurs longue durée.
- Magazine N°218
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Autopartage

La dernière étude d’envergure sur l’autopartage BtoB date de février 2014, mais elle continue à donner du grain à moudre aux acteurs du marché. Lors de la présentation de son offre destinée aux entreprises, Zipcar est revenu sur ces chiffres publiés par Frost & Sullivan.

D’après cet institut, le nombre de véhicules partagés en entreprises s’établissait à 2 000 unités en 2013 et devrait atteindre entre 75 000 et 100 000 unités en 2020. Sur la même période, le nombre d’entreprises offrant l’autopartage à leurs salariés devrait passer de 200 à 4 000. Et si les prestataires d’autopartage n’étaient qu’une douzaine en 2013, ils devraient être 30 en 2020.

Des offres spécifiques pour les entreprises

Zipcar est l’un d’entre eux. En juin 2015, ce spécialiste a lancé une offre destinée aux professionnels. Baptisée Zipcar Pro, elle promet des gains de 30 % sur les coûts de taxi, d’indemnités kilométriques et de location courte durée. Pour stimuler l’intérêt, Zipcar rappelle une autre étude publiée par le Conseil National des Transports selon laquelle un véhicule reste 96 % de son temps dans un parking.

Zipcar s’appuie sur 70 emplacements à l’intérieur de Paris et dans le quartier de La Défense. Le prestataire annonce aussi une disponibilité prochaine des véhicules partagés dans 25 gares des 15 principales villes de France grâce un partenariat signé avec la SNCF.

Pour les professionnels, Zipcar Pro propose une formule d’abonnement sans engagement à 50 euros HT par an et des tarifs réduits la semaine à partir de 4,50 euros HT de l’heure. Ces tarifs incluent le carburant, l’assurance, la maintenance et 150 km par jour. La réservation s’effectue via un smartphone, le site Zipcar.fr ou encore par téléphone.

Si, à en croire les différentes études, l’autopartage BtoB est promis à un bel avenir, il tarde encore à décoller sur le sol français. Mais, sans attendre, les levées de fonds et les rachats vont bon train : Europcar a racheté la majorité du capital d’Ubeeqo et Zipcar, déjà filiale du groupe Avis Budget Group, a mis la main sur Local Motion.

De son côté, Vulog a annoncé en septembre 2015 une levée de fonds de 8,4 millions d’euros. Deux acteurs ont participé à cet apport : le fonds Écotechnologies géré par Bpifrance pour le compte de l’État dans le cadre des actions du programme d’investissements d’avenir confiées à l’Ademe, et le fonds de capital croissance Environmental Technologies basé à Londres.

Fondé en 2006 par deux ingénieurs, Vulog a doublé de taille en 2014 et compte déjà Transdev, TF1, PSA, Sixt, BCAA, la mairie de Paris et Communauto parmi ses clients. Avec un siège installé à Nice, Vulog possède des bureaux à Paris et à Vancouver.

Les prestataires partagent… les capitaux

Autre levée de fonds, MOPeasy a reçu 3,4 millions d’euros de la Caisse des Dépôts lors d’une augmentation de capital. Né en 2010, MOPeasy s’est spécialisé dans l’autopartage électrique, avec comme clients des entreprises et des collectivités (EDF, ERDF, Colas, GE, Nexans, l’université de Marne-la-Vallée, l’Olympique de Marseille, etc.).

Avec cette levée de fonds, la start-up entend développer sa plate-forme monautopartage.fr et renforcer son implantation auprès des entreprises, des collectivités et des gestionnaires d’habitats en France comme à l’étranger.

Autre initiative, RCI Banque, le spécialiste du financement et des services automobiles du groupe Renault, a décidé de créer une filiale à 100 % pour accélérer la commercialisation des services d’autopartage BtoB et de l’ensemble des services de mobilité liés à la voiture. Baptisée RCI Mobility, cette structure a racheté les activités d’autopartage BtoB de Nissan Europe commercialisées sous le nom de Nissan Car Sharing.

Constructeurs et loueurs à la manœuvre

Le groupe PSA multiplie aussi les initiatives. Après un partenariat signé avec Bolloré en 2015, le constructeur a participé à la levée de fonds de Koolicar, start-up dédiée à l’autopartage entre particuliers. Sur le front de l’autopartage BtoB, PSA est à la tête de 10 000 véhicules et entend atteindre les 100 000 d’ici à 2020. Le développement passe aussi par la mise en place d’un fonds d’investissement de 100 millions d’euros pour soutenir les start-ups spécialisées dans la mobilité.

Les loueurs longue durée s’active également autour de ce service aux marges de progression prometteuses. Quatrième loueur longue durée en France, Alphabet a commercialisé en juin 2015 une solution d’autopartage de véhicules électriques en entreprise.

Dénommée e-AlphaCity, cette offre s’appuie sur AlphaCity, service d’autopartage lancé en 2012, mais se concentre sur les véhicules électriques du groupe BMW. Ainsi, l’entreprise cliente pourra déployer des BMW i3 BEV 100 % électriques et des BMW i3 Rex équipées d’un prolongateur d’autonomie dans sa flotte mutualisée.

Pour sa part, Athlon a conclu en mars dernier un partenariat avec Mobility Tech Green. Désormais, ses clients bénéficieront de l’outil e-Colibri du prestataire breton dans le cadre de sa solution ACT ! (Applied Change in Thinkink) jusqu’ici opérée à travers les outils d’Ubeeqo.

De l’autopartage et de la communication

Le service d’autopartage d’Arval est exploité sur environ 350 véhicules utilisés chez une vingtaine de clients du loueur : des entreprises comme Carrefour, Kone, ERDF, ou des municipalités comme Bondy.Apparu en 2009, Mobility Tech Green multiplie les initiatives. Après avoir équipé les véhicules de la flotte en autopartage de Valberg, station de montage des Alpes du Sud, avec sa solution e-Colibri, ce spécialiste a décidé de déployer une offre découverte pour les entreprises et les collectivités.

Mobility Tech Green réalise un audit et déploie sa solution sur un ou plusieurs véhicules pour une durée de trois à six mois. Les entreprises hésitantes peuvent donc tester l’autopartage sans s’engager sur le long terme pour un tarif fixé à 290 euros par véhicule et par mois. Au passage, Mobility Tech Green annonce un périmètre de la flotte diminué de 30 % en moyenne et un prix de revient kilométrique global divisé par deux.

Si les services d’autopartage commencent à intéresser les entreprises, chaque nouveau déploiement fait l’objet d’une communication spécifique. En juin 2015, Vulog a annoncé avoir équipé la mairie de Paris. Avec 80 véhicules mutualisés sur plusieurs sites, la flotte en autopartage de la capitale serait la plus importante pour une collectivité française.

En phase avec sa volonté de limiter son impact sur l’environnement, la mairie de Paris a décidé d’équiper une grande partie de cette flotte en autopartage avec des modèles électriques. Pour ces véhicules, Vulog propose des de solutions pour notamment allouer les véhicules aux utilisateurs en fonction du niveau de charge des batteries. D’après Vulog, à la mi-2015, 1 000 véhicules étaient partagés dans les entreprises et les collectivités françaises.

Quant à Alphabet, chaque signature fait l’objet d’une annonce. Ainsi, le loueur a livré deux BMW i3 à Bouygues Immobilier lors du renouvellement de ses véhicules électriques en autopartage. Dès 2011, Bouygues Immobilier a proposé une solution d’autopartage électrique. Si le choix s’est d’abord porté sur des Citroën C-Zéro, le groupe les a remplacées par deux BMW i3 100 % électriques dans le cadre de l’offre Alphacity d’Alphabet.

Moins de véhicules mais partagés

De son côté, Ubeeqo vient d’implanter son offre Bettercar Sharing chez Allianz avant de renforcer sa présence auprès du groupe Safran. Après les 80 véhicules déjà déployés au sein de Snecma, Ubeeqo a mis à la route six nouveaux véhicules mutualisés pour le compte de Snecma Propulsion Electrique et treize pour Sagem, une autre filiale du groupe.

À court terme, la flotte en autopartage du groupe Safran devrait compter une centaine de véhicules. Grâce à ce service, l’équipementier aéronautique a déjà pu réduire le périmètre de sa flotte de plus de 40 %. En janvier dernier, Ubeeqo a lancé une offre destinée au grand public comme aux entreprises. Sous le nom de Matcha, ce système de voitures en libre-service et en boucle fermée permet d’accéder au véhicule à l’aide d’un badge ou d’un smartphone. À la fin de l’utilisation, le véhicule doit revenir à son emplacement de départ. Avantage, le conducteur bénéficie d’un parking assuré à son retour.

Ce service est accessible uniquement à partir de la plate-forme Ubeeqo, avec trois modes de transport : voitures en autopartage avec Matcha, VTC ou location en agences. Disponible à Londres et Paris, Matcha compte déjà une centaine de véhicules à Paris et devrait s’étendre à d’autres capitales européennes dans les mois qui viennent.

À l’image d’Ubeeqo, les acteurs du marché rivalisent d’ingéniosité pour promouvoir l’autopartage. Cela étant, si les chiffres avancés font état de 7 à 10 000 véhicules en autopartage dans les entreprises françaises, ce mode d’utilisation demeure marginal. Les loueurs longue durée géraient 1 546 374 véhicules au 31 décembre 2015. Et la LLD ne constitue qu’un seul mode de financement en concurrence avec l’achat. Face à ces volumes, l’autopartage n’est encore qu’une goutte d’eau.