
Face à la vague électrique, les infrastructures de recharge électrique doivent correspondre aux besoins immédiats mais aussi à long terme des conducteurs : des contraintes que nous prenons en compte dans ce guide des 12 étapes à suivre pour s’équiper en bornes de recharge.
Étape 1 : Connaître la réglementation
Avant toute installation d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE), « une étude technique et fonctionnelle préalable est obligatoire pour tout parking de plus de cinquante places », rappelle Philippe Callejon, directeur mobilités et nouvelles énergies de TotalEnergies.
Et les parkings des bâtiments à...
Face à la vague électrique, les infrastructures de recharge électrique doivent correspondre aux besoins immédiats mais aussi à long terme des conducteurs : des contraintes que nous prenons en compte dans ce guide des 12 étapes à suivre pour s’équiper en bornes de recharge.
Étape 1 : Connaître la réglementation
Avant toute installation d’infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE), « une étude technique et fonctionnelle préalable est obligatoire pour tout parking de plus de cinquante places », rappelle Philippe Callejon, directeur mobilités et nouvelles énergies de TotalEnergies.
Et les parkings des bâtiments à usage tertiaire doivent être en mesure d’accueillir l’installation de bornes ou disposer de 5 ou 10 % de places de stationnement pour véhicules électriques. En précisant que les immeubles recevant du public et les immeubles de grande hauteur sont soumis à des règles très strictes de sécurité incendie.
En outre, « l’Union Européenne préconise un point de recharge pour dix véhicules électriques, avec des puissances de recharge adaptées à la zone et à l’usage où les bornes sont installées », ajoute Philippe Callejon.
Étape 2 : Bien dimensionner sa flotte électrique
Toutes les entreprises ne passeront pas leur flotte à l’électrique au même rythme. Une entreprise dont les collaborateurs circulent dans un centre urbain ne rencontrera pas les difficultés d’une entreprise dont les collaborateurs se déplacent sur l’ensemble du territoire. Ces seconds conducteurs, à l’image des commerciaux, peuvent parcourir plusieurs centaines de kilomètres par jour. Ils ont donc souvent besoin d’une recharge en itinérance, sur la route ou à domicile.
Aussi, les agents d’une commune qui font appel à des véhicules de service sans remisage à domicile se mettront plus facilement à l’électrique que leurs homologues qui roulent dans un département montagneux. Cet état des lieux conditionnera le choix du type de recharge.
Enfin, il faudra aussi se poser la question des stratégies et des plans d’investissement de l’entreprise. Et cela dans le cadre plus large de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) par exemple. Le niveau d’équipement en bornes reste donc contraint par de nombreux facteurs avant de rédiger un cahier des charges. Le mieux reste de consulter d’abord un spécialiste. En effet, il pourra fournir un bilan personnalisé de la situation. Ainsi qu’ un état de l’art à l’instant T des technologies et de leur coût.
Étape 3 : Raisonner sur la durée
Autre élément, sans doute le plus important : l’électrification se veut une démarche de longue haleine. Il est donc important de bien définir les éléments qui dimensionnent la flotte à recharger. Non seulement dans l’immédiat mais aussi sur le long terme, en tenant compte des renouvellements à venir.
Ces renouvellements sont à relier à des attentes réglementaires tels que la loi d’orientation des mobilités (LOM), à la politique de l’entreprise, ou encore au passage à l’électrique des salariés pour leurs voitures personnelles. Sans oublier d’intégrer dans la démarche les hybrides rechargeables (PHEV). En effet, leurs besoins en recharge diffèrent des modèles 100 % électriques.
« Installer des bornes crée aussi de nouveaux besoins énergétiques », souligne Irina Khodossova, directrice générale de l’opérateur d’IRVE et de mobilité Mobilize Power Solutions (groupe Renault). Avec de fait un effet boule de neige pour l’adoption par les conducteurs de nouveaux usages. Selon cette responsable : « Il faut dimensionner un pré-équipement puis rester ouvert et souple sur l’équipement de recharge à compléter dans les 3 ou 4 années suivantes. »
Étape 4 : Analyser l’installation électrique en vue des bornes
Ensuite, il faut connaître les obligations réglementaires liées à la gestion du site ou des sites, et du ou des bâtiments concernés. Avec, au premier rang, les réglementations qui régissent l’ingénierie électrique. Et donc : réaliser un état des lieux en matière de puissance électrique disponible par rapport aux besoins estimés et attendus. Cela à moyenne ou longue échéance.
De fait, l’étude de la puissance électrique du site va conditionner la puissance des bornes à installer. Elle conditionnera également toute la partie génie civil (infrastructure, implantation de la borne et raccordement du site). Il faudra alors s’adresser à des entreprises de génie électrique et de génie civil. Ces démarches sont souvent effectuées par l’opérateur retenu avec le cahier des charges.
Irina Khodossova préconise une approche globale qui fait réfléchir à l’écosystème des nouveaux usages de la mobilité électrique. Cela comprend la production d’électricité avec des panneaux photovoltaïques sur les toits des parkings et des bornes. Un cercle vertueux à penser dès l’origine du projet.
Pour cela, dimensionner les équipements électriques pour répondre à une évolution en puissance et en distribution sur plusieurs années. On entend par là les câblages, les boîtiers techniques ou encore les transformateurs HT/BT. L’installation électrique doit donc rester ouverte et flexible. Cela fait partie de l’analyse des besoins, en anticipant la part croissante des véhicules électrifiés mis à la route.
Étape 5 : Bien comprendre la puissance de recharge électrique
Venons-en aux véhicules avec une explication technique. Les batteries des véhicules électriques fonctionnent toutes en courant continu DC, avec la même intensité et en permanence. C’est la technologie interne de charge propre à chaque véhicule qui s’adapte automatiquement aux bornes. La borne en courant alternatif AC fournit donc un courant alternatif au véhicule. Ce dernier le convertit en courant continu DC à l’aide d’un convertisseur embarqué. Cela explique en partie que la recharge soit plus lente qu’en courant continu.
En revanche, avec une borne en continu DC, la borne fournit logiquement du courant continu directement dans la batterie. Elle recharge donc le véhicule bien plus rapidement… mais toujours en fonction de la capacité de la borne de 50 à 350 kW.
Mais les constructeurs ne sont pas tous aussi performants dans le domaine de la sobriété de leur électronique de puissance. Par conséquent, le convertisseur/onduleur peut se montrer très consommateur d’électrons lors de la conversion AC/DC en charge. En plus, d’autres éléments peuvent entraver ou limiter la puissance de charge admise. Citons par exemple la capacité de la batterie, sa chimie et son refroidissement.
Sans oublier qu’il existe une différence importante entre la puissance de la borne et la puissance effective de la recharge. La puissance délivrée par la borne n’est en effet pas forcément celle transmise au véhicule lors de la recharge. Cela dépend de plusieurs facteurs. Tout d’abord, avec une puissance de la borne en 7 ou en 22 kW, la puissance de recharge disponible ne pourra pas excéder ces niveaux.
Autre illustration, avec un abonnement électrique pour une souscription de 18 kW, la recharge disponible sera limitée à ce niveau de puissance même sur une borne en 22 kW. Il ne faut pas négliger non plus les câbles qui n’acceptent pas de puissances supérieures à 15 kW. La recharge s’effectue alors avec cette puissance nominale maximale de 15 kW.
Étape 6 : Tenir compte de la puissance effective et du chargeur
Enfin, chaque véhicule, voire chaque modèle et version, possède ses propres caractéristiques de puissance maximale acceptée. Celle-ci est souvent proportionnelle à la taille de la batterie. Il va de soi que recharger une batterie de 100 kWh en 7 kW en AC est absurde. Il nécessiterait en effet une immobilisation inacceptable du véhicule.
Attention donc à bien choisir le chargeur DC, en général à partir de 50 kW et jusqu’à 150 kW actuellement. Mais la course à la puissance de charge en DC n’est pas une fin en soi. Un calcul doit être fait pour chaque modèle. Il sera fonction de sa capacité de batterie et de la puissance maximale fixée pour les bornes en DC.
Deux types de véhicules sont à distinguer dans une flotte électrifiée : les 100 % électriques qui nécessitent une recharge en AC à 22 kW au minimum ; les PHEV dont les batteries dépassent rarement les 20 kWh et qui peuvent donc facilement se recharger sur du 7 kW en AC – la recharge en DC étant de toutes les façons limitée par le chargeur embarqué. Le choix des modèles dépendra donc surtout de la politique d’électrification adoptée.
Pour les PHEV, il faut vérifier si les chargeurs embarqués en 11 ou 22 kW sont de série ou en option. Pour les véhicules électriques, les capacités des chargeurs sont en général au minimum à 22 kW en AC (optionnel ou de série). Ils passent, en DC, à 50, 85 et jusqu’à 130 kW pour les compactes et les SUV les plus répandus, Renault Mégane E-Tech (optionnel) ou VW ID.
Il serait fastidieux ici de lister l’intégralité des capacités des chargeurs embarqués des modèles. Mais il faut savoir que dans le haut de gamme et le premium allemand, au-delà des compactes, les valeurs sont au minimum de 130 kW et jusqu’à 350 kW chez Tesla.
Étape 7 : Choisir les bornes
L’entreprise doit donc choisir d’installer soit des bornes en courant alternatif AC en charge lente jusqu’à 7 kW ou 22 kW, soit des bornes en courant continu DC pour la charge rapide à partir de 50 kW. Au-delà de 100 kW et jusqu’à 350 kW, on parle de charge ultra rapide, de type Tesla et Ionity. « Mais dans ce dernier cas, les investissements sont bien trop élevés pour une entreprise dont le rôle n’est pas de commercialiser de l’électricité. Et le retour sur investissement nécessite souvent d’être lissé sur dix ans », prévient Irina Khodossova pour Mobilize Power Solutions.
Pour la plupart des entreprises, la recharge en AC jusqu’à 7 kW peut suffire. Avec un avantage important : une rotation correcte des véhicules à charger, pour un investissement total raisonnable et une gestion simplifiée. Qui plus est, la plupart des constructeurs n’équipent leurs modèles électrifiés que d’un chargeur embarqué jusqu’à 7 kW, les 11 et 22 kW restant en option.
« Les retours d’expérience des clients flottes aboutissent tous à cette recommandation : s’équiper en majorité de bornes en 7 kW en AC et, le cas échéant, d’une ou plusieurs bornes en 50 kW DC, voire d’une en 100 kW DC, indique Larissa van de Ven, manager du marketing pour l’Europe de l’opérateur d’IRVE ChargePoint. Et sur de longues distances, la recharge rapide sur autoroute peut alors être une solution tout à fait rationnelle. »
Tant en coûts, grâce à un abonnement, qu’en contraintes pour le conducteur. Sa recharge durera en effet dix ou vingt minutes, le temps de boire un café. Attention donc à ne pas céder aux sirènes de la recharge ultra rapide qui peut ne rien apporter à l’entreprise.
Étape 8 : Positionner les bornes
Tout le travail des sociétés de services comme Mobilize Power Solutions ChargePoint, ZePlug ou TotalEnergies se traduit par des « packages ». Ils incluent tous les services liés à l’installation de la recharge et tiennent compte de l’évolutivité de cette recharge. Ces packages comprennent donc la définition du positionnement des bornes et la rationalisation de leur répartition, en plus de leur puissance 7/22 kW en AC (courant alternatif) ou 50 kW et plus en DC (courant continu).
Pareillement, la protection des bornes des intempéries va aussi différer entre un parking extérieur non couvert ou couvert, a fortiori en souterrain où d’autres contraintes s’imposent pour les sous-sols et les bâtiments accueillant ou pas du public.
Longtemps, la logique d’installation a privilégié des emplacements câblés en bornes à proximité de l’entrée du bâtiment principal. Le but : récompenser les « conducteurs électriques » et/ou faire valoir auprès des visiteurs la politique environnementale de l’entreprise. Maintenant, c’est un peu passé de mode. L’équipement en bornes se généralise désormais sur toutes les places. Et même si certaines ne sont pas occupées par des véhicules électriques.
Étape 9 : Organiser la rotation
Mais quels que soient les places et « leurs besoins » ou pas en recharge, il faut établir une rotation fluide des véhicules électriques alors que leur nombre est appelé à augmenter rapidement. L’objectif est d’éviter les véhicules « ventouses » qui ne quittent pas leur place une fois rechargés.
Cette installation des bornes peut aussi se faire dans une logique qui réservera la recharge rapide ou ultra rapide en DC aux emplacements les plus facilement accessibles, et « repoussera » ceux en AC en 7/11 kW à la périphérie du site. On favorisera alors les utilisateurs de véhicules électriques par rapport aux conducteurs de PHEV qui n’ont pas d’obligation impérieuse de recharger pour repartir et rouler.
La démarche de positionnement des bornes se veut donc tout autant technique (distance par rapport au point de puissance) que « politique », en direction de l’entreprise comme de ses visiteurs (distance par rapport aux accès des bâtiments). Une réflexion à mener avec l’opérateur mais aussi, pour les grandes entreprises, avec les instances de représentation du personnel dans le cadre de la RSE.
Étape 10 : Suivre la recharge et les véhicules
Une fois les bornes installées, piloter efficacement la recharge constitue une nécessité et les infrastructures à déployer doivent offrir des solutions intelligentes pour l’optimiser. Globalement, la construction du cahier des charges repose sur la définition des éléments qui dimensionnent la taille des équipements, soit la puissance totale requise en fonction de l’importance de la flotte. On organisera ainsi la recharge avec des experts de manière à répondre à plusieurs variables.
La première consiste à réduire son coût en limitant la puissance souscrite ou en optant pour un contrat de fourniture d’électricité particulier avec des heures creuses. Il faut bien entendu disposer d’une puissance suffisante de l’infrastructure pour recharger opportunément la flotte. Il faut enfin s’adapter aux contraintes susceptibles de survenir dans le réseau électrique, avec un impact sur la recharge (pics de consommation, événements spécifiques, etc.).
Les opérateurs du secteur proposent en général un suivi de l’activité pour ajuster au mieux la consommation aux besoins, tout en optimisant le prix du kWh fourni. « Avec les fonctionnalités d’une plate-forme dédiée, le client bénéficie d’un monitoring complet de ses bornes afin de s’assurer en temps réel de leur bon fonctionnement », avance Philippe Callejon pour TotalEnergies.
Le temps de charge par point de recharge, le nombre de kWh délivrés, la localisation des bornes sur les sites, le détail de recharges par profil d’utilisateur et par cartes d’accès, etc., doivent aussi bénéficier d’un niveau de détail extrêmement précis pour un suivi au plus près des bornes.
Avec une solution basée sur la mise en réseau en AC ou DC, on peut facilement surveiller l’utilisation énergétique en temps réel, partager intelligemment la puissance disponible entre plusieurs bornes pour recharger plus de véhicules en employant moins d’électricité, définir un plafond pour éviter de lourdes dépenses, voire installer des emplacements de recharge supplémentaires qui dépassent la capacité électrique nominale.
Étape 11 : Associer des services
La mise en réseau peut également fournir des rapports automatisés sur la consommation et les dépenses énergétiques, mais aussi sur les émissions de gaz à effet de serre évitées, en vue de se conformer aux réglementations gouvernementales et d’atteindre les objectifs de l’entreprise en matière de développement durable au sein d’un PSE.
Chez Mobilize Power Solutions, « les bornes, les accès et les cartes de recharge sont gérés par le back office de MPS, mais aussi, si besoin, la monétisation des charges et la gestion des données en provenance des bornes et donc des utilisateurs », précise Irina Khodossova.
L’ouverture de l’infrastructure à des opérateurs de mobilité doit pareillement faire partie de la réflexion : ces derniers peuvent par exemple collecter une rémunération pour le service de recharge commercialisé auprès de personnes étrangères à l’entreprise, en reversant ensuite la part correspondante. La télémaintenance, la gestion des accès et des cartes partenaires, la monétisation et la gestion des flux financiers, la gestion énergétique et la politique de recharge sont les différents domaines (non exhaustifs) qui nécessitent de bien anticiper l’installation au-delà du simple équipement adéquat.
Étape 12 : Faire appel à un installateur agréé IRVE
Pour les travaux de raccordement et d’alimentation des points de recharge, il faut impérativement faire appel à des installateurs qualifiés IRVE (infra-structures de recharge pour véhicules électriques), spécialement formés à installer des bornes, quel que soit le fournisseur.
Autre étape essentielle, la maintenance sécurisée des points de recharge en entreprise, voire même chez les collaborateurs. Les équipes d’intervention et de maintenance doivent être également qualifiées IRVE pour parfaitement connaître les différentes bornes.
« Nos bornes connectées permettent un suivi en temps réel des infrastructures de recharge. Depuis l’espace client, de nombreux services sont accessibles pour une maintenance facilitée, argumente Philippe Callejon pour Total-Energies. Et nos équipes réalisent une maintenance préventive avec une visite de contrôle des bornes une fois par an. »