
Au-delà du choix des modèles, la car policy doit intégrer des règles d’utilisation strictes. En contact direct avec les conducteurs, le gestionnaire de flotte doit user de diplomatie pour faire respecter ces règles, sans s’attirer les foudres des collaborateurs. En première ligne face aux mécontentements, il acquiert aussi une expertise sur les véhicules et leur utilisation et peut orienter le choix des décideurs lors de la constitution de la car policy. Encore faut-il que son autorité soit suffisamment reconnue par sa hiérarchie pour que sa voix porte et que ses préconisations occupent une place privilégiée dans le choix des marques...
Au-delà du choix des modèles, la car policy doit intégrer des règles d’utilisation strictes. En contact direct avec les conducteurs, le gestionnaire de flotte doit user de diplomatie pour faire respecter ces règles, sans s’attirer les foudres des collaborateurs. En première ligne face aux mécontentements, il acquiert aussi une expertise sur les véhicules et leur utilisation et peut orienter le choix des décideurs lors de la constitution de la car policy. Encore faut-il que son autorité soit suffisamment reconnue par sa hiérarchie pour que sa voix porte et que ses préconisations occupent une place privilégiée dans le choix des marques et des modèles.
Gestionnaire de flotte, un rôle central
L’avis du gestionnaire est d’autant plus précieux en amont qu’il lui revient aussi de faire vivre la car policy. À titre d’exemple, si les règles d’utilisation ne sont pas clairement rédigées, les conducteurs lui téléphoneront pour un oui ou pour un non. Le temps consacré à répondre aux uns et aux autres et à rappeler les processus établis sera perdu pour mener le travail d’analyse, véritable valeur ajoutée de sa fonction.
Olivier Rigoni est consultant au sein du cabinet Cogecar qu’il a créé. Ses missions le conduisent à accompagner les entreprises dans la définition et l’évolution de leur politique automobile. Cogecar réalise ainsi une vingtaine de missions de ce type chaque année. Le consultant a pu appréhender les pratiques d’entreprises de toutes tailles, aux parcs de 100 à plusieurs milliers de véhicules.
Cogecar assure aussi la gestion de quelques flottes. À travers ces deux métiers, Olivier Rigoni dispose d’une vision globale des pratiques en matière de définition des car policies et des conséquences sur l’évolution des budgets. « Les règles divergent d’une société à l’autre, explique-t-il. Avant 2006, les entreprises référençaient des diesels classiques. Mais avec la TVS indexée sur les émissions de CO2 puis le système du bonus-malus écologique, l’écosystème a énormément changé et l’offre évolue sans cesse. » En réponse à la pression environnementale, les constructeurs ont revu de fond en comble leurs gammes pour baisser les émissions des véhicules. Les départements de recherche et développement ont dégagé de nouvelles lignes budgétaires pour travailler sur ce sujet et les véhicules ne cessent d’enregistrer des progrès. Et parallèlement aux avancées sur le thermique, les technologies électriques et hybrides arrivent sur le marché
depuis un an.
Pour conserver son expertise, le gestionnaire de flotte doit donc se livrer à une véritable veille en suivant l’actualité. Sinon, il sera à la merci des conseils de ses prestataires, sans véritablement estimer l’implication de ses décisions. Pour mesurer l’ampleur de cette veille, deux chiffres sont particulièrement probants : en 1995, les constructeurs commercialisaient 150 à 160 modèles ; aujourd’hui, ce nombre est passé à plus de 500 ou 600.
« ADP a commandé 200 Kangoo Z.E., observe Olivier Rigoni. Pour déployer une telle flotte électrique, il faut étudier l’autonomie, la possibilité d’installer des infrastructures de recharge performantes, etc. » Face à cette complexité grandissante et à cette course à l’innovation, les entreprises doivent faire vivre les car policies en permanence pour optimiser les coûts et limiter les dérives budgétaires.
Ne pas faire de sa car policy une usine à gaz
Autre casse-tête, définir le nombre de niveaux de la grille sera d’autant plus difficile à résoudre que l’entreprise fonctionne avec un organigramme complexe. Le véhicule devient un élément de différenciation en interne. Des métiers comme la banque de détail multiplient les niveaux hiérarchiques, constate Olivier Rigoni. Les chefs de secteur cohabitent avec les chefs de zone, de région, de département… La car policy se transforme en véritable usine à gaz. Dans d’autres métiers, comme les sociétés de service, la politique automobile est davantage lisible avec la direction générale et trois catégories. Plus la grille d’attribution est simple, plus l’entreprise optimise facilement les coûts.
Les entreprises ont aussi tendance à ouvrir les car policies en fixant un budget par catégorie et en laissant le choix aux collaborateurs. Ces derniers choisissent dans un panel de marques référencées au préalable et peuvent passer d’une catégorie à l’autre ou obtenir des équipements supplémentaires en assumant le surcoût sur leurs propres deniers. « J’ai travaillé avec une entreprise qui avaient négocié des prix attractifs avec trois marques et proposaient uniquement cinq modèles, se souvient Olivier Rigoni. C’est une erreur fondamentale car très vite, les modèles référencés sont devenus obsolètes et peu séduisants et ne remplissaient plus leur fonction d’outil de motivation. »
En première analyse, diversifier les marques et les modèles devraient entraîner les coûts à la hausse puisque la concentration des achats sur un nombre limité de fournisseurs permet de négocier des tarifs plus attractifs. Pour Olivier Rigoni, ce raisonnement ne résiste pas à une réflexion plus approfondie. L’une des principales difficultés des loueurs longue durée consiste en effet à bien revendre leurs véhicules d’occasion.
Un choix de plus en plus ouvert pour les salariés
Des volumes importants du même modèle dépassent la demande et les prix de revente chutent. Dans ces conditions, lorsque les car policies se diversifient, les valeurs résiduelles n’en pâtissent pas forcément. Et c’est le principal avantage de la participation financière, car le surcoût, s’il existe, est supporté par le collaborateur. Cela étant, la latitude laissée aux salariés peut être encadrée par des règles : tout en donnant le choix de la marque et du modèle, l’entreprise fixe des seuils de CO2 ou/et des critères minima de sécurité. Elle peut interdire les boîtes automatiques qui accroissent les émissions. Autre possibilité, si le collaborateur dépasse le seuil de CO2 fixé pour sa catégorie, l’entreprise peut lui imputer le surcoût fiscal. À titre d’illustration, dans un segment donné, nombre d’entreprises laissent le choix de la carrosserie : selon ses besoins personnels, le collaborateur opte pour une berline, un monospace ou encore un break.
Ouvrir la car policy satisfait les collaborateurs et ne génère pas de surcoût. En revanche, la mission du gestionnaire de flotte est encore plus complexe. Piloter une flotte qui compte une trentaine de modèles de marques hétérogènes s’avère plus compliqué que gérer quinze modèles de deux marques. Dans ces conditions, les règles d’attribution prennent une importance capitale. Elles doivent être suffisamment précises et strictes pour simplifier la tâche du gestionnaire de flotte. Et un système de pénalisation et/ou de gratification peut être établi pour inciter les collaborateurs à conduire leurs véhicules en bons pères de famille.
Des règles claires d’attribution et d’utilisation
« Dans certaines entreprises, au deuxième sinistre responsable, le collaborateur paie la franchise. Au troisième, cette franchise est majorée. Au quatrième, la berline est remplacée par une citadine. A contrario, si le collaborateur s’est bien comporté tout au long de la durée du contrat de location, que son véhicule est en bon état à la restitution, il peut être surclassé lors du renouvellement », détaille Olivier Rigoni.
LeasePlan France a créé un service d’audit et de conseil pour aider les entreprises à optimiser le coût de leurs flottes. En 2011, ce département a reçu davantage de demandes pour comparer les avantages et les inconvénients de la LLD et du système des indemnités kilométriques. « Parmi nos clients et nos prospects qui remboursent des IK à leurs collaborateurs, la LLD a tendance à se généraliser », souligne Bruno Ricci, responsable commercial grands comptes.
Le loueur pointe une autre évolution. Si la voiture de fonction était auparavant l’apanage du top management, elle devient un mode de rémunération prisé par les cadres intermédiaires et les autres collaborateurs. « Alors que l’augmentation de salaire est diminuée d’un impôt sur le revenu plus élevé, le véhicule est plus intéressant financièrement, poursuit Bruno Ricci. C’est un choix gagnant-gagnant puisque, pour l’entreprise, le véhicule de fonction mobilise un budget inférieur à une augmentation de salaire équivalente. »
Selon LeasePlan France, la majorité des sociétés ont pris conscience de l’importance du budget automobile. Ce coût doit être maîtrisé et les véhicules choisis et entretenus avec soin pour éviter les dérives. Le comportement des conducteurs est primordial et les entreprises cherchent à imposer des règles de bonne conduite.
Moins de catégories et davantage de simplicité
« Plus l’entreprise est petite et plus le coût de la flotte revêt une importance particulière », affirme Bruno Ricci. Des règles d’utilisation sont formalisées dans un document qui répertorie tous les événements et démarches à accomplir. Néanmoins, LeasePlan France reconnaît que les entreprises n’ont pas encore toutes mis en place un tel document. Parmi les clients du loueur, les niveaux de la grille d’attribution des véhicules correspondent aux niveaux hiérarchiques et à l’ancienneté. En moyenne, ces clients définissent entre cinq et six catégories. Dans neuf cas sur dix, ils cherchent à concentrer leurs achats sur quelques marques pour obtenir des remises intéressantes. « La tendance va vers une simplification des car policies avec une diminution du nombre de catégories, observe Bruno Ricci. Plus une catégorie rassemble de conducteurs, plus la flotte est optimisée. Notre préconisation : attribuer un TCO à chaque catégorie. »
Contrairement à Cogecar, LeasePlan France n’observe pas d’évolution quant à la participation financière des collaborateurs pour bénéficier de véhicules de gamme supérieure. Pour Bruno Ricci, ce type de pratique comporte des inconvénients pour la paix sociale. Rouler dans un véhicule de gamme supérieure peut susciter la jalousie en interne.
TVS et TCO : le poids déterminant de la fiscalité écologique
La fiscalité environnementale joue un rôle primordial. Il y a cinq ou six ans, le TCO a commencé à servir d’unité de valeur pour analyser l’évolution de la flotte. Depuis l’apparition de la TVS indexée sur les émissions de CO2 et l’instauration du bonus-malus écologique, cette tendance s’est renforcée. « Avant, les car policies étaient construites en fonction des prix affichés dans les catalogues des constructeurs, rappelle Bruno Ricci. Ensuite, le loyer financier a pris le pas sur ce critère et, désormais, les entreprises définissent leurs grilles d’attribution en fonction du TCO. » Autre phénomène, les entreprises cherchent de plus en plus à maintenir ou améliorer la qualité des véhicules proposés aux collaborateurs sans que le coût ne s’en ressente. « En général, nos clients font évoluer leur car policy tous les six mois ou tous les ans, note Bruno Ricci. Notre rôle est de les aider à l’optimiser. Nous disposons d’outils spécifiques qui nous permettent d’appréhender l’influence de l’évolution de la car policy sur les coûts à deux ou trois ans. »
Le choix d’un modèle peut être pertinent à un instant T, mais, avec la multiplication des marques, des équipements et des nouveautés, il perd rapidement sa pertinence. Dans un monde automobile en perpétuel changement, les car policies doivent coller à l’actualité.
Car policy : allier la motivation et l’optimisation
- Car policy : allier la motivation et l’optimisation
- « La voiture de fonction porte une forte charge symbolique » : Arnaud Duchemin, Citroën Business France
- « Le véhicule de fonction, un avantage économique pour les collaborateurs » : Alain Motz, Eurofeu