
Pour certains cabinets de conseil, l’optimisation des car policies figure à l’ordre du jour des entreprises. « Nous sommes extrêmement sollicités sur ce sujet, reconnaît Mathilde Hillebrand, directrice générale d’Aficar Mobility. Neuf de nos clients sur dix font face à une problématique de ce type. »
Dans ce contexte, si elles veulent maîtriser leur fiscalité, les entreprises sont poussées dans ce sens par le passage au WLTP qui réduit le nombre de véhicules éligibles dans les flottes. De plus, avec la loi d’orientation des mobilités (LOM), elles seront à terme dans l’obligation de référencer des véhicules à faibles émissions, ce qui...
Pour certains cabinets de conseil, l’optimisation des car policies figure à l’ordre du jour des entreprises. « Nous sommes extrêmement sollicités sur ce sujet, reconnaît Mathilde Hillebrand, directrice générale d’Aficar Mobility. Neuf de nos clients sur dix font face à une problématique de ce type. »
Dans ce contexte, si elles veulent maîtriser leur fiscalité, les entreprises sont poussées dans ce sens par le passage au WLTP qui réduit le nombre de véhicules éligibles dans les flottes. De plus, avec la loi d’orientation des mobilités (LOM), elles seront à terme dans l’obligation de référencer des véhicules à faibles émissions, ce qui revient ni plus ni moins à baisser les émissions de CO2 de leurs car policies.
Le consultant Olivier Rigoni, directeur de Cogecar, pointe de fait un environnement légal toujours plus contraignant : « Déjà 6,4 millions de véhicules sont concernés par les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) en France. Leur nombre va passer d’onze aujourd’hui à 45 d’ici 2025. 8,7 millions de véhicules vont devoir s’adapter rapidement et 13,1 millions dans les quatre ans. Nous menons de nombreux chantiers sur ce sujet », souligne ce consultant. En précisant que, de façon générale, « toutes les entreprises sont dans une optimisation constante de leurs car policies. »
WLTP, fiscalité et LOM
« Avec la LOM et la loi Climat et Résilience, les entreprises orientent leurs achats vers les véhicules électriques et hybrides, valide le consultant spécialiste des flottes Robert Maubé. Or, le verdissement d’un parc entraîne un surcoût de 20 à 30 %. La question se pose : comment limiter ces coûts ? Réponse : soit en diminuant la taille des véhicules, soit en diminuant le périmètre de la flotte, résume-t-il. Un commercial réalise 30 000 km par an en moyenne, reprend Robert Maubé. Il doit continuer à visiter ses clients. » Et alors que les coûts des véhicules vont croissant, s’attaquer à la car policy devient inévitable. « Mais rien ne se passe car les entreprises n’en ont pas conscience. Et les personnes qui s’en rendent compte se heurtent aux RH et aux opérationnels, et doivent faire face à une levée de bouclier de la part des collaborateurs », poursuit Robert Maubé.
Face à une attente écologique forte, la dimension économique reste donc au cœur de la réflexion des entreprises qui cherchent à optimiser les usages et les coûts. Une conciliation qui n’est pas toujours simple. « Les entreprises sont tiraillées entre la volonté de verdir leur parc et l’obligation de référencer des modèles au coût le plus juste, alors même qu’elles doivent investir dans la recharge électrique. Elles sont à mi-chemin entre volonté et réalité. Cela étant, l’offre des constructeurs évolue vite et l’écart va s’atténuer dans les mois et les années à venir », observe Mathilde Hillebrand pour Aficar Mobility.
Pas de baisse des car policies
Mais verdir une flotte ne signifie pas nécessairement limiter la car policy. « Les entreprises ne restreignent pas leur car policies, avance pour sa part Cyril Châtelet, responsable commercial de LeasePlan France. Le véhicule fait partie de la rémunération et des avantages dont bénéficient les collaborateurs, il incarne la reconnaissance de l’employeur. » Ce loueur réalise quatre études par an sur ce thème. Au sortir du deuxième confinement, 67 % des salariés interrogés rejetaient ainsi les transports en commun et 76 % déclaraient vouloir continuer à bénéficier d’une voiture.
« Nous ne constatons pas de mouvement à la baisse des car policies, confirme Erwan Matte, directeur des nouvelles mobilités chez Athlon France. Nous sommes sur une ligne de crête entre attractivité et coût. » Pour ce loueur et face à des vents contraires (LOM, ZFE-m, fiscalité), les entreprises ne cherchent pas à tirer vers le bas leurs catalogues mais à les adapter. Le mouvement d’électrification est enclenché et se fait en cherchant en parallèle à équilibrer les coûts.
Pour l’entreprise, réviser à la baisse la car policy ne constitue en effet pas un exercice des plus aisés. « Il est compliqué de se défaire d’un avantage quand il s’agit d’une voiture de fonction, ou d’un outil de travail quand il s’agit d’un véhicule de service, estime Erwan Matte. Dans le contexte d’une reprise économique où les entreprises ont du mal à recruter, un véhicule attractif peut faire la différence avec la concurrence. »
La question de l’attractivité
Pour certaines entreprises, restreindre la car policy revient à actionner un levier pour réduire les coûts alors que la flotte reste le deuxième ou le troisième poste de dépenses des achats généraux. « Mais, prévient Olivier Rigoni pour Cogecar, plus la grille est avantageuse, plus elle motive les collaborateurs et plus il est délicat d’y toucher. » Pour les commerciaux, le turnover risque donc de s’accélérer et les ventes vont s’en ressentir. Dans les laboratoires pharmaceutiques, les représentants quittent ainsi leurs employeurs pour bénéficier de grilles de véhicules plus généreuses. « Ce n’est pas une tendance mais une constante », insiste Olivier Rigoni. Et le plus souvent, lorsque la grille de véhicules est revue à la hausse, les résultats de l’entreprise suivent. Dans ces conditions, tirer vers le bas la car policy n’est pas forcément la bonne décision sous l’angle économique.
Supprimer le véhicule de fonction ?
Limiter le nombre de collaborateurs éligibles à un véhicule de fonction semble pareillement complexe car ce véhicule est intégré au contrat de travail. « Si l’entreprise le supprime et le remplace par un autre avantage social, les gains fiscaux vont reculer, avertit Cyril Châtelet pour LeasePlan. Et les collaborateurs sont attachés à l’automobile. » Sans oublier que limiter le nombre de collaborateurs éligibles à une voiture de fonction devient impossible avec des représentants du personnel dès que le nombre de salariés dépasse les cinquante. Quand le bénéfice d’un véhicule de fonction a été institué, les instances du personnel peuvent s’opposer à sa suppression. À moins d’être dans de grandes difficultés économiques, il faut compenser cette perte.
Dans ce contexte, le crédit mobilité peut se poser en alternative. « Mais il ne se développe pas encore car l’administration n’a pas précisé son statut fiscal », note Laurent Pichon, consultant véhicules électriques chez LeasePlan France. De son côté, Mathilde Hillebrand d’Aficar Mobility conseille de mettre en avant d’autres solutions comme le crédit mobilité justement, ou l’autopartage, la bicyclette et les transports en commun. « Au lieu de supprimer le véhicule complètement, on peut proposer un modèle électrique au cours de la semaine et un thermique le week-end et quinze jours ou trois semaines dans l’année », suggère-t-elle.

Le crédit mobilité en alternative
De fait, éligibles à la voiture de fonction, certains salariés acceptent de passer au crédit mobilité. Habitant à Paris ou en région parisienne, ces conducteurs n’ont pas au quotidien l’usage d’un véhicule. Pour cette population, le crédit mobilité peut s’affirmer en alternative crédible. Et les nouvelles générations sont d’autant plus favorables à ce type d’évolution que, pour elles, la voiture ne revêt plus la même importance. Pour ces jeunes générations, disposer d’un véhicule plus petit pendant la semaine et d’un modèle plus attractif le week-end et les vacances améliore le service rendu. Troquer son véhicule de fonction contre des taxis, VTC, scooters ou de l’autopartage peut aussi constituer un plus.
Pareillement, si la recharge amène une contrainte, les conducteurs peuvent retirer des avantages des véhicules électrifiés. Tout d’abord, ils y gagnent en confort et en agrément de conduite ; et ils éprouvent la fierté d’appartenir à une entreprise qui se soucie de l’environnement.
« L’un de nos clients avait une grille d’attribution pour le “middle management“. Nous avons consulté les collaborateurs et ceux-ci nous ont expliqué qu’ils n’avaient pas besoin de voiture de fonction. À quelques exceptions près, à la place, nous avons opté pour des packs de mobilité », relate Olivier Rigoni pour Cogecar. Parfois, les RH peuvent aussi laisser le choix aux collaborateurs de prendre ou non un véhicule. Enfin, pour les véhicules de service, le bon sens prévaut : l’entreprise fait évoluer les processus et procède à une réorganisation. Pour des véhicules de service peu employés, il est possible de développer la mutualisation sans que les missions en pâtissent.
Équilibrer contraintes et priorités
Il n’existe pas de réponse unique pour toutes les entreprises. Chacun des collaborateurs a ses contraintes et chaque entreprise a ses priorités. « La dynamique du changement doit se faire selon le principe de l’adéquation aux besoins, assure Mathilde Hillebrand pour Aficar Mobility. Tout le monde ne peut pas rouler avec des motorisations limitées. En ville et en montagne, en péri-urbain ou dans un environnement rural, les besoins varient. » Avant de référencer des véhicules électriques, hybrides et hybrides rechargeables, les usages doivent donc être passés au crible.
Les cabinets de conseil développent des solutions personnalisées pour chaque entreprise, avec du sur mesure pour chaque collaborateur. « Pour ce dernier, estime Mathilde Hillebrand, la fluidité de ses déplacements quotidiens se veut une contrepartie à l’optimisation de la car policy. Mais les contreparties salariales restent de véritables casse-têtes comptables. »
D’une entreprise à l’autre, l’optimisation de la flotte influera donc différemment sur la grille de véhicules. Si les kilométrages sont élevés et que l’entreprise s’aperçoit que les emplois du temps ne sont pas correctement organisés, l’évolution va être plus importante. Quoi qu’il en soit, segment par segment, l’entreprise va étudier les référencements et peut décider, dans certains cas, de revoir l’attribution à la hausse ou à la baisse. Tous les schémas cohabitent. « Nous posons l’équation avec les entreprises, détaille Laurent Pichon. Nous les questionnons avant de déployer une phase pilote. Nous travaillons de concert avec les constructeurs dont les offres et les technologies varient et nous étudions la fiscalité, avec à chaque fois du sur mesure. »
Du sur mesure pour les collaborateurs
Si les directions financières se montrent favorables à la baisse de la car policy, les directions des achats, de leur côté, ont des marges de manœuvres étroites dans les négociations : les constructeurs substituent en effet aux véhicules thermiques des modèles électriques et hybrides rechargeables dont les prix sont plus élevés. « Pour toutes ces raisons, je ne connais pas d’exemple de downsizing de la car policy, observe le consultant Robert Maubé. En revanche, je vois des entreprises qui massifient leurs achats pour diminuer les coûts. D’autres mutualisent les véhicules de service avec l’autopartage. Mais on n’ose pas toucher aux voitures de fonction. Parfois, pour les collaborateurs aux kilométrages faibles, l’entreprise peut proposer un crédit mobilité », résume-t-il.
La solution ? Miser sur le véhicule adapté à chaque utilisation. Simple dans son énoncé, cette règle doit évoluer dans le temps. Sachant que la vérité du jour n’est pas celle du lendemain.
Dossier - Car policy : verdir en réduisant les coûts ?
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