
Ce peut être un lundi matin. Ou en début d’année, voire après une nuit d’insomnie. Ce peut être n’importe quand. Mais la volonté de changer de poste et de décrocher une promotion doit se décréter. Puis se préparer.

« C’est une réflexion à mener dès son embauche, précise Éric Beaudouin, dirigeant du cabinet de conseil en carrière Oasys. Dans son travail, il faut tout de suite identifier ce qui est stratégique et prioritaire pour son employeur. À ce sujet, le décalage employé-dirigeant est fréquent. On doit donc toujours demander à sa direction si l’on est en phase, ce qu’elle...
Ce peut être un lundi matin. Ou en début d’année, voire après une nuit d’insomnie. Ce peut être n’importe quand. Mais la volonté de changer de poste et de décrocher une promotion doit se décréter. Puis se préparer.

« C’est une réflexion à mener dès son embauche, précise Éric Beaudouin, dirigeant du cabinet de conseil en carrière Oasys. Dans son travail, il faut tout de suite identifier ce qui est stratégique et prioritaire pour son employeur. À ce sujet, le décalage employé-dirigeant est fréquent. On doit donc toujours demander à sa direction si l’on est en phase, ce qu’elle attend de vous aujourd’hui, dans deux ans. Restera ensuite à communiquer essentiellement sur ces éléments prioritaires. »
Définir ses objectifs

« C’est donc une démarche de longue haleine, à concrétiser quand tout va bien, lorsque le gestionnaire de flotte atteint ses objectifs. Dans ce cas, il se met en ordre de bataille pour élargir son poste, aller sur des zones d’inconfort, développer de nouveaux projets, se faire mieux connaître. C’est essentiel », ajoute Joëlle Planche-Ryan, coach, responsable développement du pôle carrière des anciens des Arts & Métiers, et auteure de Boostez votre parcours professionnel avec le mind mapping (Eyrolles, 2014).
Mais sans demande explicite, pas de promotion. Les employeurs, toujours réticents à bousculer les organigrammes, ne s’intéresseront pas à des salariés passifs ; ils ont déjà assez à faire avec ceux qui manifestent un désir de changement…
Pour préparer sa promotion, le gestionnaire doit avant tout s’interroger sur ses objectifs. « Veut-il grimper le plus haut possible dans l’organigramme de sa société ? Finir directeur des achats ? Trouver un équilibre vie personnelle-vie professionnelle ? Changer de métier, de région ? S’expatrier ? Identifier son objectif est primordial ; bon nombre de salariés que je coache ne le connaissent pas. Ils travaillent pour faire plaisir aux autres, sont de bons soldats, de bons élèves. Il ne faut pas laisser sa carrière dans les mains d’un tiers. C’est le meilleur moyen de la sacrifier… », expose Hervé Bommelaer, associé du cabinet d’outplacement Enjeux-Dirigeants (voir aussi son témoignage).
Un peu d’introspection
Le gestionnaire doit aussi préparer un argumentaire. Celui-ci passe par des questions en forme de figures imposées. La première est celle de son image. Parfois désagréable mais indispensable : quelle est ma valeur perçue dans l’entreprise ? Suis-je bien considéré par mes pairs, mes supérieurs ? C’est la première étape et parfois la dernière. Si, sur une échelle de 0 à 10, la moyenne des réponses tend vers le négatif, la promotion ne sera pas pour tout de suite. Mais si le chiffre est améliorable, le gestionnaire passera à la deuxième phase de la préparation : son argumentaire objectif.

Un bilan professionnel est, en début d’introspection, à réaliser. « Le candidat à la promotion fait, en premier, un état des lieux de ses savoirs (sa formation), de son savoir-faire (ce qu’il a appris en travaillant) et de son savoir-être (le relationnel, l’écoute, le leadership) », énumère Priscilla Chazot-Magdelaine. Auteure de Mon bilan professionnel – Je redynamise ma carrière en 10 étapes (Dunod, 2017), cette coach met à disposition un site (www.akeen.fr) pour procéder à des bilans. Il est ici question de définir ses compétences transposables dans un autre poste et celles à acquérir pour obtenir le poste visé. Et cela aidera à mieux connaître ses valeurs et ses moteurs qui devront être en adéquation avec le prochain job. Si votre vie tourne autour de la famille, prendre un poste demandant 14 heures par jour reste difficile.
Un diagnostic à poser
« Il faut que le gestionnaire de flotte soit au clair avec lui-même mais aussi sur les avantages (travail plus intéressant, fonction enrichissante, salaire) et les inconvénients (surcroît de travail, inconfort, gestion des anciens collègues) qui vont découler de cette promotion », confirme Gérard Kirady, spécialiste des entretiens de recrutement (voir aussi son témoignage). Dans ce cadre, les questions à se poser sont nombreuses. Est-ce que je remplis mes objectifs ? Dans quelle mesure je les dépasse ? Est-ce que je parais engagé ? Suis-je quelqu’un que l’on a envie de promouvoir ? Suis-je apprécié de mon supérieur hiérarchique ? Qu’apprécie-t-il chez moi ? Ai-je le minimum d’ancienneté à mon poste ? Ces éléments de diagnostic sont à poser.
Il faudra aussi analyser le « timing » adéquat pour l’employeur. La santé financière de l’entreprise autorise-t-elle une promotion ? Ce n’est jamais le bon moment mais il faut bien en trouver un… Mon service est-il en sous-effectif et la promotion sera-t-elle alors plus difficile ? Ou en sureffectif et cela facilitera les choses ? Y a-t-il des postes à pourvoir ? Sont-ils vacants ?
Toutes les réponses à ces questions finissent par former un argumentaire. Le gestionnaire devra y ajouter, sur les douze derniers mois, le contexte économique de son employeur, sa part dans ce développement du chiffre d’affaires, les difficultés rencontrées. Il devra aussi évoquer ce qu’il aime faire, et ce qu’il n’aime pas. Ce qu’il a appris.
Se rendre visible

Cette réflexion s’achève avec une synthèse qui servira à convaincre son employeur du bien-fondé de sa démarche de promotion. Elle se conclut aussi par l’identification du poste visé et le discours montrant qu’il y a adéquation entre la promotion souhaitée et ses compétences acquises et démontrées.
« Connaître les compétences dont on manque doit aussi servir à les combler via une formation. Il faut donc repérer le bon cursus nécessaire à sa promotion », rappelle Florence Gillet-Goinard, consultante à la Cegos et auteure de La Boîte à outils de mon parcours professionnel (éditions Dunod, 2016).

En parallèle, cette démarche doit s’accompagner d’une série d’actions pour se rendre visible et lisible. « Le bon candidat à la promotion professionnelle doit à la fois s’interroger sur ce qu’il recherche et sur les intérêts de l’entreprise à le promouvoir, synthétise Pierre-Yves Sanséau, professeur de gestion des RH à Grenoble école de management. Ensuite, il faut contacter les bons interlocuteurs, son manager en tout premier lieu. Pour lui expliquer sa démarche, définir les contacts à prendre auprès de telle ou telle ressource de la société, lui montrer son intérêt à laisser partir son subordonné – un retour d’ascenseur est indispensable… Cela prend du temps et il est difficile de mener à bien cette stratégie des petits pas en moins de six mois. »
Il s’agira aussi de déjeuner avec des collègues, des fournisseurs, voire des concurrents. L’objectif : évaluer les postes importants et/ou susceptibles d’être ouverts. Cela va permettre aussi, puisque son histoire professionnelle est bien au point, de faire passer le message de ses réussites. On peut aussi faire passer ce message et recevoir de nombreuses informations autour de la machine à café ou d’espaces informels de ce type. Beaucoup de choses s’y trament… Et ce « tour de piste » aide à évaluer ses alliés, c’est-à-dire les personnes qui apportent des informations importantes ou qui peuvent devenir des ambassadeurs.
Faire passer le message
Ce sera aussi le moment d’imaginer un plan pour sa propre succession. Il est indispensable d’organiser son poste pour être facilement remplacé, en commençant par repérer et former quelqu’un en interne. C’est à ce moment, en phase ascendante, lorsque vous tenez à l’entreprise et que cette dernière compte sur vous, qu’il faudra demander sa promotion professionnelle.

Reste à analyser les postes possibles. « Pour qu’un responsable progresse professionnellement, il doit tout d’abord dépasser la seule gestion administrative du parc, souligne Baudouin de Mégille, ancien dirigeant de la flotte de Veolia Environnement et aujourd’hui consultant en gestion de parc. Il faudra ensuite évoluer vers l’analyse et la stratégie pour prendre en charge les achats, l’analyse des coûts et la responsabilité de la mobilité. C’est une manière de glisser vers les services généraux en gérant, par exemple, la partie voyages professionnels – le poste de travel manager – et d’autres matériels comme les téléphones, les ordinateurs et pourquoi pas l’immobilier. »
Pour cela, une compétence achats et contrôle de gestion est à démontrer ou à acquérir. « Les promotions passent par des propositions, ajoute Baudouin de Mégille. Il faut présenter des actions à mener, de nouvelles organisations, des missions transversales. Et on obtient l’écoute et la confiance de ses supérieurs qui ont en tête : on y va, on lui confie le projet. »
Travailler sa cible
Le gestionnaire se retrouve alors au cœur des métiers supports de l’entreprise. Il a devant lui la possibilité d’occuper une place dans les services mobilité des salariés, ce qui peut déboucher sur le poste de mobility manager.
« Ou de bifurquer vers des postes de responsable achats, des services généraux ou de l’environnement selon la dénomination à la mode dans des entreprises d’origine américaine. Le gestionnaire de parc est alors apprécié pour sa polyvalence alliant la négociation, la gestion d’appels d’offres ou la contractualisation. Certains pourront aussi évoluer vers la logistique et le transport », expose le recruteur Frédéric Rei, directeur senior chez Page Personnel, en charge de la division immobilier, construction et facilities management.
« Mais le gestionnaire devra se débrouiller pour caler une formation achats dans son cursus et travailler les compétences comportementales : relationnel, communication, capacité à négocier, synthétiser, analyser », complète Frédéric Rei.
Que faire ensuite concrètement ? Comment franchir le dernier mètre et divulguer ses envies professionnelles ? Il est impératif d’entamer la conversation avec son supérieur hiérarchique direct.
Franchir le pas
Il n’est pas possible de le contourner. Cette discussion doit avoir lieu lors d’un entretien formel, comme celui de l’entretien professionnel. Il faut alors signaler que l’on voudrait évoquer son évolution professionnelle en précisant, en préambule, que l’on apprécie son emploi actuel, qu’il a été générateur de beaucoup de bonheur et d’acquisitions de connaissances. Et que pour la prochaine année, on voudrait savoir comment on peut évoluer.
« Il faut, en face de son patron, inscrire cela dans un moment ritualisé, rappelle la coach Joëlle Planche-Ryan. S’assurer que le moment choisi est le bon, pas lors d’une sale journée, pas après un conflit, et lui repréciser alors vos arguments préparés en amont en lui indiquant ce que vous avez réalisé et les succès engrangés. » Il faudra enfin avoir en tête le poste en ligne de mire.
Avec cette recommandation de Gérard Kirady : « Un entretien de promotion débouche sur un succès s’il a été suffisamment préparé. Pour cela, il est notamment essentiel de s’entraîner pour améliorer son attitude face à un tiers. Ce qui amène aussi à réduire son stress face à des supérieurs hiérarchiques : plus on les rencontre, plus on les désacralise. On est alors plus convaincant. L’idée est de préparer toute l’année une ascension professionnelle à un poste supérieur. »
Prévoir la suite
Dans le meilleur des cas, la discussion débouche sur une promotion. C’est vrai pour Marie, « je ne souhaite pas que mon nom soit cité », gestionnaire de 550 véhicules. « J’ai débuté comme hôtesse d’accueil, puis j’ai été assistante des services généraux pendant plusieurs années. J’ai alors développé mes compétences en prenant doucement en main la gestion du parc auto et en remplaçant, de plus en plus, mon responsable. Ce travail de fonds m’a amenée à postuler, en externe, pour un poste plus développé dans une structure plus importante. Mon parcours a dû leur plaire car je n’ai pas de diplôme spécifique. »
Mais cela peut aussi ne rien donner. Il est donc important de définir, avant la négociation, un plan en cas d’échec. « Si la promotion ne vient pas, il faut savoir être patient et connaître le motif du refus, conclut Florence Gillet-Goinard pour la Cegos. Il faut oser demander pourquoi sa candidature n’a pas été retenue pour rebondir à la prochaine occasion : ces expériences ne doivent pas entamer la confiance en soi. »
Tout ce questionnement est à faire après la négociation, calmement. Bref, s’interroger pour pouvoir prendre la décision de rebondir en interne ou en externe.