
Renault élu constructeur le moins polluant d’Europe : tel est le résultat du tout nouveau classement des bilans carbone des 300 plus grandes entreprises européennes réalisé en avril par Environmental Investment Organisation (EIO), un institut de recherche britannique spécialisé dans les investissements verts. Toutes activités confondues (cosmétiques, banques, etc.), le constructeur arrive au septième rang français (42e européen), bien qu’il fasse partie d’une industrie peu réputée dans ce domaine. Même les allemands, à la fibre écologique bien connue, ne se positionnent qu’au 65e rang avec Volkswagen. Quant à PSA, il n’arrive que 221e.
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Renault élu constructeur le moins polluant d’Europe : tel est le résultat du tout nouveau classement des bilans carbone des 300 plus grandes entreprises européennes réalisé en avril par Environmental Investment Organisation (EIO), un institut de recherche britannique spécialisé dans les investissements verts. Toutes activités confondues (cosmétiques, banques, etc.), le constructeur arrive au septième rang français (42e européen), bien qu’il fasse partie d’une industrie peu réputée dans ce domaine. Même les allemands, à la fibre écologique bien connue, ne se positionnent qu’au 65e rang avec Volkswagen. Quant à PSA, il n’arrive que 221e.
Réduire les consommations d’eau et d’énergie
Pourtant, chez Renault comme chez PSA, 100 % des usines sont certifiées ISO 14001. Cette norme atteste d’une bonne gestion de l’environnement. Elle garantit la réalisation d’économies en matière de consommation d’eau et d’énergie, de diminution des nuisances visuelles et sonores, d’émissions atmosphériques et de déchets lors de la production. Et pour parvenir à ce « bon management », les constructeurs ont mis en place des équipes dédiées dans les usines, chargées de sensibiliser les collaborateurs aux notions environnementales. Elles facilitent ainsi la mutualisation des bonnes pratiques, en échangeant les informations ou les innovations entre les sites.
Les premiers programmes d’économies d’énergie et d’eau ont été un succès. En dix ans, Renault a enregistré une baisse de 28 % de la consommation d’énergie par véhicule et de 63 % de la consommation d’eau, « soit l’équivalent de 5 000 piscines olympiques », souligne le constructeur. À Pitesti par exemple, où l’usine roumaine était dans un état déplorable, les émissions de CO2 ont été réduites de 81 % par voiture fabriquée, les consommations d’eau et d’énergie ont reculé de respectivement 92 et de 80 % depuis 2003.
Chez PSA, les résultats sont à la hauteur des attentes : depuis 1995, la consommation d’eau sur l’ensemble des sites mondiaux a chuté de 40 %, soit une baisse de 60 % par voiture produite. Le groupe s’est aussi attaché au traitement des eaux usées, en dotant son usine d’une station d’épuration comme à Rennes, ou bien en collaborant avec les collectivités locales comme à Sevelnord où l’usine a participé financièrement à la modernisation de la station communale.
Le second défi a porté sur la réduction des émissions atmosphériques. Préserver la qualité de l’air induit de diminuer fortement les rejets de polluants, tels que l’oxyde de soufre émis par les chaufferies, les poussières des fonderie ou les composés organiques volatils (COV) dégagés par les solvants des peintures. Sur ce dernier point, l’industrie automobile a suivi plusieurs pistes : l’emploi de peintures contenant moins de solvants et le traitement de l’air des cabines. Alors qu’une peinture classique contient 75 % de solvants organiques issus du pétrole, une peinture hydrodiluable n’en contient plus que 12 %. Pour les apprêts, la proportion passe de 50 à 8 %.
Pour un bon usage de ces produits, il a fallu concevoir différemment les ateliers de peinture. Rien qu’à Poissy chez PSA, l’investissement s’est élevé à 176 millions d’euros. Lorsqu’une réorganisation totale n’est pas possible, les constructeurs aménagent des dispositifs de traitement d’air des cabines qui aspirent les solvants et les condensent pour les incinérer. Ces solutions ont permis de diviser par deux le taux de composés organiques volatils chez Peugeot Citroën. Les sites du groupe en rejettent en moyenne 4,88 kg par véhicule, contre 8,33 kg auparavant. Et PSA s’est donné comme objectif d’atteindre 4,4 kg par véhicule à moyen terme. Chez Renault, les rejets de COV ont chuté de 40 %.
Améliorer durablement la qualité de l’air des usines
Pour les poussières de fonderie, les constructeurs travaillent simultanément à deux niveaux. D’une part, ils cherchent à circonscrire les émissions à la source, en adoptant des équipements de haute technologie comme la torche à plasma. D’autre part, ils tentent de perfectionner les techniques de dépoussiérage, en recourant à des filtres secs.
Enfin, la qualité de l’air peut aussi être améliorée dans les installations de combustion. À la faveur de la modernisation des chaufferies, les constructeurs remplacent le fuel par du gaz. PSA Peugeot Citroën a ainsi réussi à diviser par dix les émissions de dioxyde de soufre entre 1995 et 2006 ; sur la même période, celles de dioxyde d’azote ont été réduites de 30 %. Chez Renault, l’ensemble de ces démarches s’insèrent dans une politique de longue haleine qui a débouché sur la mise en oeuvre d’une démarche baptisée « 4R » : Réduire, Réutiliser, Recycler et Récupérer de l’énergie. L’usine pilote de cette politique est celle de Tanger au Maroc, qui démarrera ses activités en 2012 et bénéficiera des expériences déployées depuis quelques années dans les sites du groupe. À Tanger, les émissions de CO2 seront réduites de 98 % par rapport à une usine équivalente d’une production de 400 000 véhicules, soit 135 000 tonnes de CO2 en moins par an, grâce à l’optimisation des consommations d’énergie et l’utilisation des énergies renouvelables.
Toyota Parts Centre Europe (TPCE), centre logistique situé en Belgique, a installé 80 000 m2 de panneaux solaires, pour un coût de 7 millions d’euros. 15 à 20 % des besoins d’électricité de TPCE sont ainsi couverts.
Pour y parvenir, Renault et Veolia Environnement ont oeuvré ensemble à la diminution de la consommation du site. Les process de peinture, en particulier pour les phases de cuisson, ont été réinventés en combinant des technologies innovantes et de meilleures pratiques en termes de récupération énergétique. À lui seul, le département peinture consomme 70 % de l’énergie thermique de Tanger. Et ces solutions ont abaissé de 35 % les besoins totaux en énergie thermique de l’usine par rapport à une usine équivalente en capacité de production.
Tanger se veut l’usine modèle de Renault
D’autre part, des chaudières biomasse fourniront l’eau surchauffée (à haute pression) nécessaire aux étuves du process en peinture, à l’alimentation du chauffage des process industriels et à la ventilation de l’air des bâtiments. Renault fait aussi appel aux énergies renouvelables : l’Office national d’électricité (ONE) du Maroc fournira 100 % des besoins en électricité du site grâce aux installations hydraulique ou éoliennes.
Enfin, l’usine de Tanger n’émettra aucun rejet industriel liquide et réduira de 70 % ses prélèvements en eau pour les process industriels par rapport à une usine équivalente en capacité de production. Grâce au recyclage interne, ce seront au total l’équivalent de 175 piscines olympiques (437 500 m3) qui ne sera pas prélevé sur le milieu naturel chaque année.
Toyota Motor Manufacturing France (TMMF), le site d’Onnaing du constructeur japonais, a mis en place des équipements comme ces cartouches de peinture qui limitent l’usage des solvants au sein des ateliers.
Cette démarche n’est pas exclusive à Renault et les énergies renouvelables commencent à percer ici ou là. Toyota dispose de capteurs photovoltaïques installés sur le toit de l’usine pour alimenter en électricité le pôle administratif d’Onnaing, près de Valenciennes. Le site valorise lui aussi 100 % de ses déchets depuis 2007 et est devenu la plus propre des usines Toyota dans le monde. Plus largement, cette mise en oeuvre d’une production plus respectueuse de l’environnement constitue l’aboutissement d’une démarche entamée il y a près de vingt ans. Chez PSA, la première pierre a été la mise en place de l’Observatoire de l’environnement industriel, en 1989, pour mesurer l’impact de ses usines. Et l’ensemble des constructeurs ont démarré leur programme dans les années 1990 pour anticiper les directives européennes. Pour les constructeurs, le dernier pilier de la politique de développement durable consiste à valoriser les déchets de production. Les usines du groupe PSA génèrent en moyenne 700 000 tonnes de déchets métalliques par an.
Réduire les déchets mais aussi mieux les valoriser
Ceux-ci sont valorisés, c’est-àdire réutilisés, en sidérurgie et en fonderie. Les autres déchets représentent 376 000 tonnes et leur élimination nécessite des filières spécifiques multiples. Respectivement, les filières de valorisation absorbent 88 % des déchets et seuls 12 % sont mis en décharge. Si l’on intègre les déchets métalliques, le taux de valorisation ressort à 96 %. Chez Renault, l’objectif est de compter six sites industriels avec zéro rejet en décharge l’an prochain.
Ces objectifs sont directement influencés par les directives européennes, et notamment celle sur le recyclage des véhicules hors d’usage adoptée en 2000 à l’échelon européen et transposée quelques années après en droit français. Cette démarche suit deux pistes complémentaires : prévenir la création de déchets en améliorant la conception des véhicules, et développer la réutilisation de certains déchets. Surtout, elle enracine durablement la responsabilité des producteurs : constructeurs, équipementiers, fournisseurs de matériaux. À eux de réduire l’usage de substances dangereuses, de concevoir des véhicules qui facilitent le démontage ou la valorisation, et de développer l’utilisation de matériaux recyclés. Objectif imposé : un recyclage de 85 % du poids du véhicule en 2015.
Au départ, il s’agit donc d’employer des matériaux qui facilitent la gestion de la fin de vie des véhicules. On est encore loin du concept de matériaux verts. Les constructeurs avaient des obligations en matière de gestion des huiles usagées, des piles, des accumulateurs… Ils savaient recycler les métaux. Mais pour les polymères, le problème devenait plus complexe. D’autant que tous les plastiques ne se recyclent pas pareillement. Du coup, les constructeurs ont privilégié les matériaux homogènes et limité le nombre de familles utilisées.
Travailler à l’écoconception en amont
Ainsi Toyota a-t-il choisi de faire appel au même type de résine pour les tableaux de bord, les canalisations, la climatisation, les plaquettes d’isolation. Depuis douze ans, le japonais recourt au polymère super-oléfinique, une résine thermoplastique hautement recyclable présente dans les pare-chocs de la Corolla ou de la Yaris. Renault a suivi une logique semblable lors de la conception de la Modus, pour la composition de la planche de bord. Cette pièce, récompensée en 2005 par le ministère de l’écologie et du développement durable, a été imaginée en collaboration avec l’équipementier Visteon et le recycleur C2P. Elle intègre la plus importante quantité de matière recyclée utilisée sur une pièce plastique dans l’automobile : la moitié de son poids total.
L’ensemble du véhicule incorpore 18 kg de matière plastique recyclée dans plusieurs éléments : les écrans de passage de roue, le ski sous moteur, les carénages de train arrière et de roue de secours. Depuis, les plastiques recyclés ne cessent de gagner du terrain. Alors qu’ils pesaient pour 16 kg dans la Mégane II, ils sont passés à 23 kg dans la Mégane III, soit 12 %. Mieux, ils représentaient 18 kg dans la Scenic II, mais 34 kg dans la Scenic III, soit 13 %. L’objectif est d’atteindre 20 % en 2015.
Construire et déconstruire les véhicules
Chez PSA, le but est de porter ce taux à 30 % au même horizon. Lorsque le programme a été lancé en 2007, la moyenne était de 6 %. Dans la dernière C3 Picasso, le taux est monté à 12 %, facilité aussi par les différents modules – plus nombreux – qui peuvent recevoir le plastique recyclé : tablettes arrières, accoudoirs… Enfin, l’éco-conception doit faciliter le démontage. Toyota privilégie désormais la pose des pièces par ultra-son plutôt qu’à l’aide de vis ou de clips métalliques. Pour aller plus vite, Renault conçoit des réservoirs à essence qui offrent la possibilité d’être percés pour une vidange rapide, ou des canules pour vider ceux des lave-glace. Le constructeur au losange est aussi celui qui a poussé le plus loin l’intégration du recyclage en créant une filiale Renault Environnement, en 2008. Il s’est associé à Sita pour former une joint-venture qui a pris le contrôle d’Indra Investissement.
Le constructeur au losange a créé Renault Environnement en 2008. Il s’est associé à Sita, spécialiste du recyclage, pour former une joint-venture qui a pris le contrôle d’Indra Investissement, spécialiste de la déconstruction automobile.
Le premier est le leader français du recyclage, le second spécialiste de la déconstruction automobile. L’entreprise formée par les trois entités doit permettre d’accroître les taux de réutilisation des produits et matières premières dans les procédés déjà existants, de développer de nouveaux procédés de recyclage et de remonter les informations aux sous-traitants qui élaborent certaines pièces du véhicule. Renault envisage de développer des projets de ligne de déconstruction dans certains sites, comme à Flins (Yvelines). Ainsi, il crée un cercle vertueux qui conduit à réutiliser la matière. Et il fait d’une pierre deux coups. Il devient exemplaire sous l’angle écologique et gagnant sur le plan économique.
Un principe : faire du neuf avec du vieux
D’ores et déjà, le constructeur a organisé une vaste filière avec son réseau commercial qui « réceptionne » les produits hors d’usage, avec des recycleurs qui les transforment en matière première, et des équipementiers qui emploient cette matière première pour fabriquer de nouvelles pièces. En Europe, les ateliers du réseau récupèrent 1 million de batteries par an, 600 000 boucliers en polypropylène et 100 000 pots catalytiques. Ces pièces usagées sont envoyées sur une plateforme à Flins pour les trier. Certaines sont remises à neuf dans des installations spécialisées : les moteurs et les boîtes de vitesses mécaniques à Choisy-le-Roi, les boîtes de vitesses automatiques dans l’usine mécanique de Ruitz ; d’autres éléments sont confiées à la vingtaine de sites de rénovateurs sélectionnés en Europe, en Turquie et au Maroc. Là, ces pièces sont démontées, triées, rénovées. Les pièces défaillantes sont éliminées, les pièces d’usure remplacées par des pièces neuves d’origine. Le tout est nettoyé, remonté, contrôlé.
Ces éléments refaits à neuf sont ensuite proposés aux propriétaires de véhicules anciens à un prix inférieur de 30 à 50 % au prix des pièces neuves correspondantes. Ce système d’échange standard séduit une clientèle propriétaire d’un véhicule âgé de sept ans qui a parcouru en moyenne 100 000 km. Il offre une gamme de 2 600 références réparties en quatorze familles de produits mécaniques (moteurs, boîtes, culasses, démarreurs, alternateurs, pompes d’injection, turbo-compresseurs, radiateurs, embrayages, transmissions, directions, étriers de frein, compresseurs de climatisation, etc.). Ces organes bénéficient en outre d’une garantie de douze mois, avec kilométrage illimité.
Florence de Goldfiem
Constructeurs - Vers un véhicule 100 % vert
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