
L’État et son administration montrent la voie : pour tous leurs prestataires directs, la facturation électronique sera obligatoire pour les plus grandes entreprises à partir de 2017, de 2018 pour les établissements de taille intermédiaire (ETI), de 2019 pour les PME et de 2020 pour les TPE.
« La facture électronique est le principal chantier des acteurs de la dématérialisation, elle constitue un enjeu stratégique sur lequel il est primordial de communiquer en interne », estime Sylvain Ducrocq, consultant en dématérialisation au sein de Comarch, spécialiste des solutions informatiques pour les entreprises.
Si, du côté des consommateurs, les...
L’État et son administration montrent la voie : pour tous leurs prestataires directs, la facturation électronique sera obligatoire pour les plus grandes entreprises à partir de 2017, de 2018 pour les établissements de taille intermédiaire (ETI), de 2019 pour les PME et de 2020 pour les TPE.
« La facture électronique est le principal chantier des acteurs de la dématérialisation, elle constitue un enjeu stratégique sur lequel il est primordial de communiquer en interne », estime Sylvain Ducrocq, consultant en dématérialisation au sein de Comarch, spécialiste des solutions informatiques pour les entreprises.
Si, du côté des consommateurs, les achats se dématérialisent massivement avec le développement de l’e-commerce et des services en ligne, les entreprises peinent encore à automatiser ces échanges en interne et avec les organisations extérieures. Les technologies de GED (gestion électronique des documents) et d’EDI (échange de données informatisées) se sont démocratisées mais ces outils ne prennent pas assez en charge les opérations de facturation.
La facturation attend sa dématérialisation
« Seules 5 % des factures établies par les entreprises françaises le sont de façon dématérialisée, explique Sylvain Ducrocq. Malgré ce chiffre modeste, l’optimisme est de rigueur avec l’évolution de la législation qui devrait contribuer à amplifier le mouvement. » Pour le moment, le ministère de l’économie accepte encore d’assimiler une facture papier numérisée à une facture électronique, mais cette tolérance prendra fin progressivement entre 2017 et 2020.
Si la dématérialisation des factures avance difficilement, des progrès incitent à l’optimisme. Ainsi, l’encadrement des envois de factures électroniques entre les entreprises a franchi un cap. Aujourd’hui, une dizaine de solutions ont obtenu la certification nécessaire pour que les factures traitées par leurs soins obtiennent une réelle valeur légale.
« Cet agrément est le bienvenu, se félicite Sylvain Ducrocq, car le principal frein à la dématérialisation des échanges reste la crainte que ce système ne soit pas reconnu légalement ou considéré comme une preuve moins fiable en cas de litige entre deux entreprises. »
Au-delà des freins psychologiques liés à sa valeur légale, la facture électronique rencontre d’autres obstacles. La dématérialisation des factures demande une réelle conduite du changement et une remise à plat des modes de transmission des documents entre services. « Des formations doivent être mises en place à chaque nouvelle étape pour les services juridiques, opérationnels et techniques », recommande Sylvain Ducrocq.
Le consultant ajoute : « Si la dématérialisation des flux n’en est qu’à ses balbutiements, que des obstacles sont encore nombreux, le jeu en vaut la chandelle avec à la clé des gains de productivité, la réduction des erreurs par l’automatisation mais aussi des coûts en baisse. »
Une économie substantielle pour l’entreprise
ALD Automotive propose la dématérialisation de ses factures depuis décembre 2014 ; 80 % de ses clients y ont recours avec une facture PDF validée par un tiers de confiance.
« Cette organisation représente un premier pas vers la dématérialisation fiscale, processus beaucoup plus complexe et pour l’instant réservé aux grands comptes avec des développements informatiques qui mobilisent les équipes du loueur comme du client pendant des mois », décrit Jérôme de Retz, directeur marketing d’ALD Automotive France.
Le loueur longue durée estime que l’enregistrement d’une facture papier coûte entre 15 et 80 à 90 euros quand le système de validation doit passer par l’étranger. Quant au traitement et à la saisie d’une facture électronique, elle n’entraîne que 2 à 4 euros de frais.
« De plus, la dématérialisation permet de vérifier la facture et de détecter les anomalies plus rapidement, souligne Jérôme de Retz. Le contrôle de gestion devient plus facile. » Une fois la facture transformée en document numérique, les outils informatiques l’analysent et la contrôlent automatiquement. Pour basculer vers la dématérialisation, ALD Automotive a décidé d’agir pas à pas en déployant des plans spécifiques pour accompagner ses clients.
À l’heure actuelle, le loueur envoie ses flux de factures à un tiers de confiance qui les contrôle et les valide, les lui renvoie, avant qu’ils ne soient transmis automatiquement à ses clients. Pour devenir tiers de confiance, ces entreprises doivent recevoir un agrément de la part de l’administration fiscale. Pour sa part, ALD fait appel à Cegedim pour contrôler et valider les factures. « Pour passer à la dématérialisation, affirme Jérôme de Retz, il faut affronter des difficultés dans la définition des procédures et dans l’harmonisation des systèmes informatiques. »
Pour accepter les échanges de flux informatiques, les systèmes logiciels doivent être compatibles et conçus en conséquence. Un travail sur les formats informatiques et sur le codage doit être réalisé avant de déployer la facture électronique. Mais, dès que ces procédures sont en place, le système s’impose à la majorité des entreprises. 95 % des nouveaux clients d’ALD acceptent la dématérialisation. L’archivage des factures électroniques se fait dans un coffre-fort numérique logé sur le serveur ADL NET du loueur où elles sont conservées pendant la durée légale, soit dix ans.
Des freins encore à lever
Seuls 20 % des clients d’ALD en France n’ont pas basculé vers la dématérialisation des factures. Pour certains d’entre eux, cette avancée technologique les obligerait à se séparer de collaborateurs employés à la gestion des factures sous format papier ou à les affecter à d’autres tâches.
Mais avec la LLD, la démarche de dématérialisation n’est pas si simple. « Nos clients qui ont déployé l’EDI pour les factures liées à leur métier ont tenté de dupliquer ces procédures pour les frais généraux, mais ils sont confrontés à la facturation complexe de notre secteur d’activité », constate Jérôme de Retz.
Une démarche complexe avec la LLD
Ainsi, une entreprise qui achète une palette de boulons ou une chaudière émet un bon de commande dont le numéro est communiqué à son fournisseur pour que ce dernier l’inscrive sur la facture. À la réception de la marchandise, le bon de livraison est confronté au bon de commande ; si aucun écart n’est identifié, la facture est acceptée sans validation comptable.
Avec la LLD, une partie fixe et une partie variable coexistent sur la facture. Lorsque le client valide un devis, il émet un bon de commande en s’appuyant sur le loyer précisé sur le devis et calculé sur la durée totale du contrat. Ce bon de commande prend en compte les mouvements financiers attendus autour du véhicule sur l’ensemble des mois du contrat.
Or, dès la première facture apparaît une anomalie : le premier loyer comporte le prorata temporis du premier mois auquel est ajouté un mois complet, le bonus-malus et d’autres prestations fournies une seule fois. En raison de l’erreur, la facture est rejetée et donne lieu à un traitement manuel. La situation est semblable lorsque le loueur refacture, lorsque survient un sinistre, une modification de contrat, etc. Les clients n’appréhendent pas et n’anticipent pas cette part variable du métier de la LLD.
Des détails à prendre en compte
Pour renforcer la difficulté, de nombreux clients font appel à des solutions EDI simplifiées pour supprimer les coûts de traitement liés aux différents détails de la facture. En ne s’intéressant qu’à l’en-tête et au pied de facture, les financiers de l’entreprise ne prennent donc pas en compte ces détails, perdent du temps à les obtenir et à gérer des litiges qui n’en sont pas. « C’est pourquoi ALD France met à disposition de ses clients une équipe dédiée pour les accompagner dans l’installation d’une solution de dématérialisation en EDI », précise Jérôme de Retz.
Spécialiste du nettoyage industriel, Onet est à la tête d’une flotte de 3 650 véhicules composée à 75 % de VUL et à 25 % de VP. Avec son ancien loueur Arval, Onet avait déjà mis en place la dématérialisation des factures et a reconduit l’opération avec LeasePlan. Le groupe reçoit 3 000 factures par mois pour la gestion de sa flotte.
Parallèlement, Onet englobe 50 sociétés et 250 centres de profit auprès desquels sont rattachés les véhicules. Après avoir signé en 2008 avec LeasePlan, l’entreprise et son loueur ont travaillé pendant un an à dématérialiser les factures avant d’inaugurer le système en 2010. « Nous avons rédigé un cahier des charges qui a été remis à LeasePlan, explique Véronique Eyraud, responsable de la comptabilité et des projets. Avec notre service informatique, nous avons détaillé point par point le mode de fonctionnement. »
Onet, l’illustration par l’exemple
Plus précisément, avec 250 agences, le groupe a dû décrire précisément les éléments présents sur la facture pour la traduire en un fichier informatique capable d’être transmis dans l’ensemble de ses entités comptables.
« La difficulté réside dans l’établissement d’un référentiel client par LeasePlan, fait remarquer Véronique Eyraud. Les procédures d’échange doivent être rodées pour maintenir ce référentiel à jour avec des agences qui évoluent en permanence. »
Chaque centre de profit est codé et LeasePlan doit vérifier l’adéquation entre le code et l’agence. « Ce point est particulièrement important, complète Régine Boishus, responsable du service client de LeasePlan France, car chaque entreprise fonctionne selon une organisation qui lui est propre. »
Un projet d’entreprise
Avant que la dématérialisation ne soit effective, les systèmes informatiques doivent pouvoir correspondre entre eux. Coûteux, le projet de dématérialisation d’Onet a duré un an et a impliqué de nombreuses personnes. « Heureusement, sept ans après, les mêmes personnes sont encore en poste, se félicite Véronique Eyraud. Grâce à cette stabilité, le système fonctionne encore mieux. »
Pour Onet, les avantages de la dématérialisation sont multiples. Tout d’abord, les données comptables et fiscales sont fiables. « La fiscalité des flottes est très compliquée, constate Véronique Eyraud. Nous avons 250 comptables mais ils n’ont pas tous des compétences de fiscaliste. À titre d’exemple, des difficultés peuvent surgir pour récupérer la TVA sur le carburant. Aujourd’hui, avec la dématérialisation, le système est sécurisé à 100 %. Nous avons eu un contrôle fiscal et nous n’avons eu aucune remarque de la part de l’administration », se réjouit la responsable.
Des gains multiples pour Onet
Autre bénéfice, toutes les factures apparaissent désormais dans le système informatique. Auparavant, les agences devaient stocker des documents papiers dont certains pouvaient compter jusqu’à trente pages. Dorénavant, le fournisseur a la certitude que la facture est intégrée dans les logiciels de son client et qu’il sera payé en temps et en heure sans contestation préalable. La dématérialisation dégage également des gains de productivité. Les calculs et les opérations fastidieuses pour récupérer la TVA sont maintenant automatisés. « Aucune secrétaire ne voudrait revenir en arrière ! », s’enthousiasme Véronique Eyraud.
Onet réfléchit aussi à l’opportunité de faire transiter les flux informatiques issus de la dématérialisation vers son logiciel de gestion de flotte développé par GAC Technology.
LeasePlan continue d’envoyer à Onet les factures sur un support physique pour être en conformité avec l’administration. Prochaine étape, la dématérialisation fiscale. « Les entreprises vont être obligées de le faire, constate Véronique Eyraud. Mais avant d’y arriver, des mises en forme doivent être déployées. Les PDF signés doivent être transformés en fichiers selon des règles précises. »
La dématérialisation fiscale oblige les PME à passer par un intermédiaire, soit une plate-forme qui bénéficie d’un agrément et renchérit le coût de traitement des factures. De plus, ces plates-formes ne descendent pas à un niveau de détail nécessaire à la gestion d’une flotte.
L’étape de la dématérialisation fiscale
Pour les factures de carburant, Onet reçoit de LeasePlan des informations sur les volumes enlevés, la capacité du réservoir, l’heure de la prise, etc., or une plate-forme ne s’intéresse pas à ces informations.
« L’État va nous obliger à accepter les factures en PDF, rappelle Véronique Eyraud. Or, nous hésitons à les ouvrir pour ne pas être confrontés à des spams ou à des virus. Avant de généraliser cette procédure, les problèmes de fraude devront être réglés. »
Quoi qu’il en soit, Onet joue le rôle de « bêta-testeur » pour le système Chorus Pro, portail de l’État sur lequel doivent être déposées les factures de ses fournisseurs selon un protocole précis. La dématérialisation est en voie de banalisation et annonce une économie entièrement digitalisée.