
Il y a bientôt dix ans, le département des Yvelines innovait dans la mobilité électrique avec le projet SAVE pour Seine Aval Véhicules Électriques. Conduite avec Renault Nissan, cette expérimentation avait pour but de tester à l’échelle du département, sur un peu plus d’un an, l’usage professionnel de l’électrique : pour des livraisons, des déplacements, etc. 65 véhicules (Fluence et Kangoo Z.E., Leaf) avaient alors rejoint des parcs d’entreprises et de collectivités locales. Ils pouvaient s’alimenter lors de leurs trajets sur 130 bornes installées dans le cadre de ce projet. Guy Consumi, alors chef du service automobile du département, i...
Il y a bientôt dix ans, le département des Yvelines innovait dans la mobilité électrique avec le projet SAVE pour Seine Aval Véhicules Électriques. Conduite avec Renault Nissan, cette expérimentation avait pour but de tester à l’échelle du département, sur un peu plus d’un an, l’usage professionnel de l’électrique : pour des livraisons, des déplacements, etc. 65 véhicules (Fluence et Kangoo Z.E., Leaf) avaient alors rejoint des parcs d’entreprises et de collectivités locales. Ils pouvaient s’alimenter lors de leurs trajets sur 130 bornes installées dans le cadre de ce projet. Guy Consumi, alors chef du service automobile du département, interrogé dans nos colonnes, avait donné les premières estimations du coût d’usage de ces véhicules : alimentation électrique mais aussi infrastructures de recharge, location des batteries, etc.
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Jusqu’ici, ce projet n’avait eu que peu de répercussions sur l’électrification de la flotte du département. « Notre parc compte 1 000 véhicules et matériels dont environ 600 véhicules légers. Jusqu’à la fin 2019, 25 % environ étaient des véhicules GPL et une soixantaine, des Yaris hybrides livrées en 2019 », décrit Florence Duhamel, responsable flotte automobile. Mais la situation évolue rapidement cette année.
Département des Yvelines : vers une flotte 100 % électrifiée
Le département prévoit en effet qu’à l’avenir l’intégralité de sa flotte sera électrique ou hybride. « Nous avons une commande en cours de 185 véhicules électriques, uniquement des Zoé », reprend Florence Duhamel (voir notre article). « La direction générale veut investir pour s’engager vraiment, poursuit Christine Galland, directrice des moyens généraux du conseil départemental. Les véhicules électriques qui circulent sont aussi pour les habitants la garantie d’un meilleur environnement. »

Un engagement dont le département assume les coûts : la commande à l’Ugap des 185 Zoé atteint 4,5 millions d’euros. « Nous investissons pour être écoresponsables, ajoute Christine Galland. Nous achetons les véhicules y compris la batterie. » Mais si la collectivité peut envisager des économies sur le carburant, le prix des véhicules reste élevé : « En moyenne 34 000 euros avec l’achat de la batterie, sans la remise de l’Ugap et l’aide gouvernementale, contre 18 000 euros pour des modèles thermiques équivalents », détaille la directrice des moyens généraux. À ce coût s’ajoute celui des bornes, estimé à 3 000 euros l’unité. « Nous allons en installer 185 et poursuivre en 2020 », complète Christine Galland. Le coût total pour la recharge s’élève donc à environ 600 000 euros.
Si le budget n’est pas une contrainte, quelques écueils limitent la diffusion des véhicules propres dans la flotte. Comme pour nombre d’entreprises ou de collectivités, le basculement vers des modèles à motorisations propres reste soumis à l’offre des constructeurs. « Tous les véhicules n’existent pas en électrique comme les VU, dont ceux qui émettent de la signalétique grâce aux gyrophares », pointe Florence Duhamel.
Avec l’autonomie des modèles électriques plus particulièrement, leur attribution aux différents services du département est en outre soumise à l’amplitude des trajets effectués par les agents. « En général, nos véhicules roulent à 80 % à l’intérieur du département, pour un kilométrage moyen de 1 500 km par mois », avance Florence Duhamel.
Les limites de l’électrique

Autre contrainte : la disponibilité de la puissance électrique sur les sites, parfois insuffisante pour supporter la charge des véhicules. À défaut d’électriques, le département envisage donc l’intégration d’hybrides à l’horizon 2022. « Notre objectif est de généraliser le recours aux véhicules propres sur trois ans, aussi bien électriques qu’hybrides », rappelle Florence Duhamel.
Pour s’assurer de la bonne distribution des véhicules en fonction de leurs motorisations dans les services, le département affine sa connaissance des kilométrages parcourus par les agents. « Jusqu’à présent, les seules remontées kilométriques étaient celle des cartes carburant », indique Florence Duhamel. La récente installation d’armoires à clés complète désormais ce recueil d’informations.
La connaissance plus fine de l’utilisation des véhicules ne sert pas seulement à la future répartition des véhicules électriques. Elle se veut aussi utile à un autre objectif environnemental de taille, la diminution de sa flotte avec un objectif ambitieux : « Le parc de VL, soit 750 véhicules en 2018, doit passer à 400 véhicules à l’horizon 2021 », anticipe Florence Duhamel.
Mutualiser pour réduire
Pour y parvenir, les moyens mis en œuvre sont nombreux. « Comme dans beaucoup de départements, nous essayons de restreindre le nombre de véhicules en les employant mieux », résume Christine Galland, avec la transformation en pools de l’intégralité du parc. Une évolution qui demande plusieurs ajustements, à commencer par la familiarisation des agents avec ce type d’organisation. « La mutualisation est une initiative de conduite du changement menée avec la directrice des moyens généraux, Christine Galland, l’appui des autres directions et des RH, observe Florence Duhamel. Les agents ont compris que l’utilisation ‘‘individualisée’’ n’était pas adaptée à une bonne gestion de flotte. » Un règlement d’utilisation a été diffusé pour s’assurer que la mutualisation du parc est respectée. Un système de réservation élaboré en interne, puis plus récemment le système d’armoires à clés, contribuent aussi à structurer l’organisation de ces pools.
Ce passage aux pools concerne pareillement les VU : Kangoo, Trafic, Master, même si, précise Florence Duhamel, « pour des métiers du bâtiment, de l’informatique ou de la voirie, il est nécessaire de garder des véhicules spécifiques aux équipes, avec du remisage dans le cadre des astreintes. »
Alors que cette mise en pools entraîne une baisse du nombre de véhicules en parc, elle génère aussi mécaniquement une hausse de la proportion du nombre de modèles électriques, aux dépens des thermiques, y compris GPL. « De 150, le nombre de véhicules au gaz a été déjà limité à une centaine aujourd’hui. Plutôt qu’une mise aux enchères, nous avons prévu d’organiser des dotations au bénéfice des communes du département », note Christine Galland. La réussite de la mise en pools et de la réduction du parc associée passe enfin par une appropriation de l’électrique par les agents. « Ce sont des véhicules neufs, spacieux et réactifs. Les utilisateurs en tirent un bénéfice par rapport à des modèles plus anciens », argumente Christine Galland. Qui ne mise pas seulement sur ces qualités : dans chaque pool, des référents sont formés pour initier les agents à l’usage de ces véhicules.
Se familiariser avec l’électrique
« L’électrique fait toujours peur en raison du risque de panne. Mais la Zoé est dotée d’une autonomie de plus de 300 km, ce qui est important », complète Florence Duhamel. Autre atout : une appropriation plus aisée de l’électrique par rapport aux motorisations au gaz. « Nous avions jusqu’ici beaucoup de véhicules GPL. C’est aussi une source d’énergie dont les utilisateurs ont peur », ajoute Florence Duhamel. Dernier outil pour favoriser cette familiarisation avec l’électrique : des documents didactiques sont disponibles dans les habitacles et sur chaque borne de recharge des sites.
Pour diminuer le nombre de véhicules, le département compte sur d’autres initiatives. Dont le développement de la visioconférence : « Le règlement d’utilisation des véhicules mentionne qu’il faut prioriser la visioconférence plutôt que se déplacer », souligne Christine Galland. Autre dispositif : le télétravail. « Tous les collaborateurs ont la possibilité de télétravailler deux jours par semaine. C’est à leur manager de décider si le télétravail est adapté à la mission ou pas, détaille Christine Galland. Mais l’activité du département comprend énormément de travail de terrain ; les travailleurs sociaux ne peuvent par exemple pas s’affranchir de visites à domicile. »
D’autres pistes
Parmi les autres initiatives, le département a installé il y a plus de deux ans une flotte d’une trentaine de vélos, sans rencontrer le succès escompté. « Pour les vélos, il faut vraiment un porteur de projet sur les sites, sinon cela ne fonctionne pas », constate Christine Galland. Le vélo doit notamment être associé à la possibilité de trajets courts, une opportunité limitée dans les Yvelines. Reste que si ce mode de locomotion est peu employé, « le vélo est une idée récurrente, proposée par des collaborateurs », pointe Florence Duhamel. À l’occasion d’une consultation récente des agents, lors d’une journée consacrée aux initiatives pour améliorer leur quotidien, de nombreuses suggestions ont été faites autour du vélo électrique.
Autre idée à émerger lors de cette consultation, le covoiturage. Une initiative que le département avait initiée mais sans réels effets. « Cela demande de faire une croix sur certaines libertés individuelles et suppose aussi un territoire adapté », nuance Florence Duhamel. Là encore, l’étendue du département se prête mal à ce mode d’organisation. Mais pour répondre à la demande des agents, des initiatives autour du covoiturage ou du vélo électrique pourraient être (re)lancées. Après la crise sanitaire, s’il est peu probable que le covoiturage soit sollicité, il pourrait en être autrement des vélos électriques.