
Les 17 et 18 octobre a eu lieu à Paris le salon Mobility for Business, dédié aux solutions de mobilité pour les professionnels. Avec une forte présence de spécialistes de l’optimisation des tournées, rendus incontournables par l’essor des smartphones et de la télématique embarquée.
Une conférence était ainsi consacrée à la transformation de la logistique du dernier kilomètre suite au développement de l’internet des objets (ou IoT pour Internet of Things). Par internet des objets, on entend la remontée d’informations par des objets physiques capables de communiquer avec le réseau internet. Une technologie qui permet désormais une traçabilité en temps réel des colis, mais aussi des véhicules et des conducteurs.
Estimer le temps exact d’arrivée
Le concept n’est pas jeune : « Nous avons des clients qui font de l’IoT depuis très longtemps, comme Sita (spécialiste de la gestion des déchets) pour connaître le remplissage de ses collecteurs ou encore Selecta (distributeur de boissons) », a rappelé Éric Lanzi, P-DG du spécialiste de l’optimisation géographique Geoconcept. Cependant, de nouvelles problématiques émergent avec l’arrivée de nouveaux acteurs.
« En logistique, on nous demande beaucoup de calculs d’Estimated Time of Arrival (ETA), notamment dans l’e-commerce pour la communication au client final, a indiqué Arnaud Lançon, business developer chez le concepteur de solutions mobiles Page Up. Cela passe par la collecte d’informations de géolocalisation les plus précises possibles. Dans les mois qui viennent, à la demande d’un client, nous serons en mesure de savoir où se positionne le véhicule sur une carte en temps réel et quand il va arriver. » L’enjeu est concurrentiel : il s’agit d’éviter de recevoir des avis négatifs sur internet.
Automatiser la planification des tournées
Si bien que les entreprises comptent de plus en plus sur l’IoT pour planifier automatiquement leurs tournées. « L’enjeu est à la fois de concilier la prise en compte de données de plus en plus en amont, comme la fréquentation saisonnière par exemple, tout en suivant le trafic en temps réel », a expliqué Arnaud Lançon. Cependant, le système a des limites : « L’automatisation obéit à la loi des 80/20, a estimé Éric Lanzi. Dans 80 % des cas, la planification automatique fonctionne et apporte des gains de fiabilité, de temps de réponse et de coût. Mais il y a toujours des cas particuliers qui demandent l’intervention d’un opérateur. »
Intégrer des motorisations alternatives
L’internet des objets soutient également la diversification des motorisations dans les flottes. « Afin d’éviter la peur de la panne sèche chez les conducteurs, nous faisons le pont entre l’optimisation et la planification, et construisons des tournées adaptées à une flotte de véhicules thermiques et électriques », a expliqué Marc Grojean, président de l’éditeur du logiciel d’optimisation de tournées Antsway.
Pour optimiser la tournée des VE, la société récupère les lois de roulage et les données ouvertes par Renault et Nissan sur des web-services, mais aussi la température extérieure ou encore la topographie du terrain. « L’IoT nous permet de prouver aux managers que l’électrique doit être utilisée pour être rentable », a commenté Marc Grojean.
Développer l’écoconduite
En parallèle, de plus en plus de solutions d’écoconduite sont mises en œuvre pour réduire la consommation de carburant ou l’accidentologie. « Des données comme les vitesses excessives et les freinages trop lourds sont remontées pour être analysées », a précisé Arnaud Lançon. Avec une nouveauté : l’essor des applications destinées aux chauffeurs et dispensant des conseils en temps réel. « Il y a une politique volontariste de la part des entreprises, avec notamment l’organisation de challenges pour récompenser les meilleurs conducteurs », a relevé ce business developper.
Suivi en temps réel : accompagner la résistance au changement
Reste à convaincre les collaborateurs d’utiliser ces outils. « De plus en plus d’informations sont disponibles pour une gestion des tournées en temps réel, mais les chauffeurs aiment se projeter sur leur journée », a fait remarquer Éric Lanzi. Pour Arnaud Lançon, « intégrer les chauffeurs dans la conception de l’outil permet d’ajouter des détails qui facilitent l’acceptation. »
« Bien souvent, c’est le management qui a peur d’un mouvement social bien plus que l’opérateur ou le chauffeur », a toutefois nuancé Marc Grojean. Pour faciliter la transition, « certaines entreprises font le choix de n’équiper que les nouveaux entrants, et les anciens finissent par demander les outils », a indiqué Éric Lanzi. Des outils qui évoluent rapidement, au point de laisser entrevoir un avenir où les livraisons se feront de manière autonome.
Vers la fin des tournées de véhicules ?
Les trois acteurs ne se sentent pour l’instant pas menacés par les expérimentations de drones ou de robots livreurs. « Je constate plutôt une réinternalisation de la livraison pour assurer l’expérience client », a témoigné Antsway. « Nous travaillons sur un projet de drones pour les forces de police et les pompiers, mais je ne crois pas à la livraison urbaine par drone en ville, parce qu’ils vont tomber », a déclaré Éric Lanzi.
« Ce qui est sûr, c’est que l’usage va évoluer en centre-ville. Si les véhicules sont interdits, cela va changer les problématiques de livraison : nous verrons peut-être le développement des vélos électriques avec de petites plateformes logistiques locales et l’éclatement des tournées », a conclu Arnaud Lançon.