
Combien de points de charge par véhicule ? Quelle puissance adopter aux bornes pour quel type d’usage ? Ces questions sont devenues incontournables pour les gestionnaires de parc. Car sous la pression fiscale et réglementaire, le nombre de véhicules électriques ou hybrides rechargeables ne cesse de croître et devrait vite représenter une part importante du mix énergétique des flottes. Dans le cadre de la LOM (loi d’orientation des mobilités), les entreprises à la tête de plus de 100 véhicules auront de fait l’obligation, dès 2022, d’intégrer 10 % de véhicules propres, donc électrifiés, en renouvellement.
Or le déploiement de modèles zéro...
Combien de points de charge par véhicule ? Quelle puissance adopter aux bornes pour quel type d’usage ? Ces questions sont devenues incontournables pour les gestionnaires de parc. Car sous la pression fiscale et réglementaire, le nombre de véhicules électriques ou hybrides rechargeables ne cesse de croître et devrait vite représenter une part importante du mix énergétique des flottes. Dans le cadre de la LOM (loi d’orientation des mobilités), les entreprises à la tête de plus de 100 véhicules auront de fait l’obligation, dès 2022, d’intégrer 10 % de véhicules propres, donc électrifiés, en renouvellement.
Or le déploiement de modèles zéro émission ne peut se faire indépendamment d’une infrastructure de recharge ad hoc. En effet, 90 % des besoins de recharge sont d’ordre privé (travail ou domicile) et 10 % seulement relèvent du public. Les points de charge en voirie ou sur les aires d’autoroute restent donc des solutions d’appoint, entre autres pour l’itinérance. « Avant de déployer une infrastructure de recharge, il faut bien identifier ses besoins en mobilité. Pour les entreprises, nous conseillons d’engager une vraie réflexion sur les usages des véhicules électriques, actuels et à venir », prévient Clément Morion, délégué général adjoint de l’Avere-France, l’association nationale pour le développement de la mobilité électrique.
Comprendre l’entreprise et ses usages
Ce que confirme Jean-Baptiste Guntzberger, Country Manager France chez NewMotion, spécialiste des solutions de recharge pour les véhicules électriques et filiale du groupe Shell. « En tant que partenaire et conseiller, on se doit d’abord de bien comprendre chaque entreprise, ses différents métiers et sa stratégie en matière de mobilité électrique. Chaque client a ses spécificités et requiert un traitement particulier. Nous élaborons donc avec lui une solution en fonction de ses besoins, présents et futurs, en partant de l’existant. Il s’agit de s’adapter à la configuration électrique en place afin d’éviter de trop gros chantiers, inutiles et coûteux », expose ce responsable.
Avant tout déploiement de bornes, l’entreprise doit donc se poser plusieurs questions et y répondre le plus précisément possible : « Quel sera le nombre de véhicules rechargeables dans la flotte ? quel sera le type de véhicules retenus (100 % électriques ou hybrides rechargeables) et leur puissance de recharge acceptée, ainsi que leur destination ? quel sera le besoin de rapidité pour les temps de recharge (où quelle puissance adopter ?) ? quelle sera la fréquence des recharges (qui dépend du kilométrage quotidien des véhicules) », énumère Jean-Baptiste Guntzberger. Du côté de la SNCF, l’une des plus grosses flottes de France avec 18 000 véhicules au total, l’infrastructure de recharge est considérée comme « un maillon indispensable au développement de l’électromobilité et plus généralement à la mobilité durable, multimodale et connectée », selon Carlos Simoes, pilote national du parc automobile de SNCF Réseau.
Éviter la sous-utilisation
Dans sa réflexion, SNCF Réseau part du véhicule pour aller vers l’infrastructure : « Nous déployons les bornes et nous acquérons des modèles électriques simultanément, en adaptant l’infrastructure au véhicule, et pas le contraire. Notre crainte est d’avoir un trop grand nombre de bornes sous-utilisées », complète Carlos Simoes. À noter que SNCF Réseau compte plus de 500 points de charge pour 370 véhicules rechargeables, et vise à terme un point de charge installé pour un véhicule électrique acquis. L’entreprise a donc pris de l’avance et préparé le terrain en optant, lorsque c’était possible, pour des bornes doubles, dotées de deux points de charge. Un type d’installation qui nécessite d’avoir suffisamment d’emprise au sol à chaque fois pour deux places. « Il est certain que les véhicules électriques vont monter en puissance au sein de notre flotte, mais nous n’avons pas encore assez de visibilité pour estimer l’évolution du nombre de bornes », rappelle toutefois Carlos Simoes (voir le témoignage).
Pour sa part, le spécialiste des services numériques Atos veut disposer d’un point de charge pour dix véhicules électriques. Avec une exception pour son siège de Bezons (95) avec un point de charge pour cinq véhicules. Un ratio très différent de celui de la SNCF mais la flotte de l’opérateur de transport comprend très majoritairement des véhicules de service multi-conducteurs, employés de jour comme de nuit, alors que celle d’Atos se compose de 650 véhicules, soit 380 voitures de fonction et 170 véhicules de service. Un parc qu’Atos veut entièrement électrifier d’ici 2024 (voir le reportage).
Lente ou rapide ?
Il y a donc le nombre de bornes ou de points de charge à définir mais aussi les types de charge, lente ou rapide. En effet, les systèmes actuels offrent une palette de puissances allant de 3,7 kW à plus de 150 kW, ce qui autorise des usages très divers. Le choix de la puissance dépend de l’utilisation des véhicules, de leur kilométrage moyen journalier et notamment des plages d’utilisation. Si les véhicules restent stationnés la nuit au parking, la charge lente suffira. À l’opposé, plus le taux de rotation d’un véhicule est élevé, par exemple pour l’autopartage, plus la charge rapide a du sens.
« Les besoins ne recharge ne sont en effet pas les mêmes pour une flotte de véhicules de service, directement liée à l’activité de l’entreprise, ou un parc de véhicules de fonction pour les collaborateurs », valide Jean-Baptiste Guntzberger pour NewMotion. Selon ce dernier, la charge accélérée monophasée (7,4 kW) rassemble le plus gros de la demande pour les véhicules de collaborateurs. La recharge rapide (22 kW) convient à un usage plus intensif de la flotte (autopartage ou véhicules de service), mais nécessite de déplacer plus souvent les véhicules ou de débloquer la charge à distance pour libérer les bornes.
« Le nombre de points de charge par voiture doit également prendre en compte les fréquences de recharge. Nous préférons donc commencer avec un ratio raisonnable (un borne pour cinq véhicules), quittes à adapter la station après quelques mois d’utilisation », poursuit-il. Ce que Clément Morion reformule pour l’Avere-France : « Nous ne préconisons pas une solution plutôt qu’une autre. Il n’y a pas de règle ni de ratio minimum (nombre de véhicules électriques par point de charge). L’infrastructure doit être adaptée au cas par cas et en fonction des besoins spécifiques de chaque entreprise. »
Des aides pour les entreprises
Si l’Avere-France n’a pas encore publié de guide pour la recharge en entreprise comme elle l’a fait récemment pour les copropriétés, l’association est en revanche partenaire de cabinets de conseil spécialistes de ces questions. Elle apporte aussi une aide financière aux entreprises pour l’installation de bornes dans le cadre du programme Advenir. Créé en 2016 par le ministère de la Transition écologique et porté par l’AvereFrance en partenariat avec Eco CO2, la prime Advenir a été officiellement reconduite jusqu’en décembre 2023, avec à la clé une enveloppe budgétaire de 100 millions d’euros. L’objectif est de financer plus de 45 000 nouveaux points de recharge à cette échéance. Les entreprises, collectivités et professionnels y ont droit et en profitent de plus en plus : les demandes ont bondi de 169 % en 2019. Et en avril 2021, la prime Advenir avait déjà profité à quelque 8 200 entreprises pour installer leurs infrastructures de recharge.
Selon son baromètre IRVE (infrastructure de recharge de véhicules électriques) 2021, l’Avere-France constate que les entreprises sont très dynamiques pour l’installation de points de charge, bien plus que les collectivités ou les particuliers : il y a actuellement plus de 400 000 points de recharge dans le domaine privé (particuliers et sociétés confondues) pour 31 206 points de recharge publics. Plus précisément, 52 % du parc de bornes électriques (232 990) se trouvent en entreprise, 41 % (185 450) chez les particuliers. Les bornes publiques ne représentent que 7 % du parc français.
1 point de charge pour 1,17 véhicule
« Aujourd’hui, on observe une certaine adéquation entre le nombre de véhicules électriques et le nombre de points de charge », constate Clément Morion. De fait, 530 000 véhicules électriques ou hybrides rechargeables (371 000 BEV et 159 000 PHEV) sont en circulation en France, pour un total de 450 000 points de charge (privés et publics confondus). Le ratio national est donc de 1 point de charge pour 1,17 véhicule. Soit un parc de bornes largement suffisant pour supporter sans mal une augmentation du nombre de véhicules électriques en entreprise.
Avec cet autre constat, cette fois de Jean-Baptiste Guntzberger pour NewMotion : « Dans l’ensemble, nos interlocuteurs en entreprise, acheteurs et gestionnaires de parc, sont de mieux en mieux informés. Ils connaissement les problématiques de l’électromobilité et leurs usages en la matière. Type de charge, pilotage des bornes, services connectés, etc. : les projets se mettent en place bien plus rapidement qu’il y a cinq ans lorsque nous avons lancé NewMotion en France. Le marché s’est professionnalisé et il y a toujours plus d’appels d’offres. Une conséquence de la LOM qui a accéléré le déploiement des véhicules électriques dans les entreprises », pointe ce responsable. Et cela ne fait que commencer.
Dossier - Infrastructure de recharge : dimensionner au plus près des besoins
- Infrastructure de recharge : dimensionner au plus près des besoins
- Carlos Simoes, SNCF Réseau : « Nous recherchons avant tout de l’efficacité énergétique »
- Infrastructures de recharge : un chantier complexe
- Atos : objectif 100 % électrique d’ici 2024