
Lors du confinement du début d’année, les gestionnaires de flotte se sont retrouvés face à une situation inédite. Avec une majorité de véhicules immobilisés, la baisse des sinistres n’a jamais été aussi forte. Sur la période de la mi-mars à la mi-mai, « les courtiers en assurance, avec qui j’échange en tant que président de la commission automobile de l’Amrae (Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise), m’indiquent que ce recul est variable d’un client à l’autre en fonction de leurs activités.
Mais en moyenne, les sinistres, toutes catégories confondues, ont chuté de 70 % », expose Patrick Lacroix, par ailleurs...
Lors du confinement du début d’année, les gestionnaires de flotte se sont retrouvés face à une situation inédite. Avec une majorité de véhicules immobilisés, la baisse des sinistres n’a jamais été aussi forte. Sur la période de la mi-mars à la mi-mai, « les courtiers en assurance, avec qui j’échange en tant que président de la commission automobile de l’Amrae (Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise), m’indiquent que ce recul est variable d’un client à l’autre en fonction de leurs activités.
Mais en moyenne, les sinistres, toutes catégories confondues, ont chuté de 70 % », expose Patrick Lacroix, par ailleurs risk manager pour Idex, un spécialiste de l’efficience énergétique. Avec la flotte de son entreprise, ce responsable a pu constater un repli encore plus fort « de l’ordre de 85 % pour l’ensemble des sinistres : depuis le bris de glace et le vandalisme jusqu’aux accidents responsables avec tiers ou sans tiers. Sur les accidents responsables, le recul a atteint 90 % », constate-t-il.
Moins d’accidents mais plus graves
Mais ce bénéfice a été en partie obéré par la nature des accidents pendant cette période. Avec des routes moins encombrées, certains conducteurs ont pu ressentir un sentiment d’impunité. « Pendant le confinement, les causes des sinistres ont été nombreuses : du non-respect des stops aux grands excès de vitesse, avec pour résultat des pertes de contrôle du véhicule et des accidents corporels », souligne Patrick Lacroix. Résultat : un nombre d’accidents moins important pendant le confinement, mais d’une plus grande gravité, rappellent les spécialistes.
Dans son rapport annuel, le Forum international des transports de l’OCDE pointe ainsi qu’en avril, le trafic a diminué beaucoup plus vite que le nombre de tués sur les routes : de 75 % contre 56 %. Difficile pour l’instant d’apprécier l’impact du confinement sur l’accidentalité spécifique des entreprises. L’Onisr pointe dans son baromètre d’avril 2020 avoir recensé « peu de morts chez les usagers de véhicules utilitaires ou de poids lourds. »
Alors qu’elles ont immobilisé leur flotte pendant le confinement, des entreprises ont mis à profit cette situation pour revoir leurs contrats d’assurance et obtenir une baisse de leurs primes. « La proposition de la plupart des assureurs était de ne plus demander de garanties dommages pour les véhicules immobilisés. La prime a pu être supprimée pendant un mois et demi ou deux », retrace Christophe Giraud, directeur du département flottes automobiles et nouvelles mobilités du courtier Gras Savoye (voir le témoignage).
Mais des entreprises ont voulu pousser plus loin les négociations, « pour obtenir une réduction de prime sur la totalité des garanties, y compris la responsabilité civile, afin de limiter au maximum l’impact de la prime globale. De nombreuses entreprises ont aussi demandé des reports de paiement », complète Christophe Giraud.
Négocier avec les assureurs
Une minorité d’assureurs a joué le jeu pour les primes « mais la totalité ont accordé des reports de paiement », note ce responsable. Dans tous les cas, les baisses obtenues sont temporaires. « C’est in fine l’équilibre du contrat sur l’année qui permettra de renouveler les termes du contrat », reprend Christophe Giraud.
Mais une fois l’activité repartie, les sinistres sont eux aussi repartis. Et les entreprises semblent avoir contribué à ces mauvais résultats. « Certaines ont repris leur activité en juin-juillet et ont demandé aux forces commerciales de doubler leurs efforts ; on sentait qu’il fallait rattraper le temps perdu », observe le représentant de Gras Savoye. « Pendant le confinement, nous avons observé un recul du nombre des sinistres de l’ordre de 75 %. Après le confinement, quand nous comparons la sinistralité de chaque mois par rapport à l’an dernier, nous sommes revenus à des niveaux équivalents, voire plus élevés », conclut Christophe Giraud. Et la nature de ces sinistres a changé, impliquant plus souvent des tiers compte tenu de la reprise du trafic.
À l’instar des campagnes portées par la sécurité routière, des entreprises ont mis en place une communication de prévention en interne qui détaillait les bonnes pratiques au moment de reprendre la route. « Les conseils apportés concernaient l’état du véhicule : pression des pneus, niveau des liquides, etc. Nous avons aussi mis l’accent sur le respect des distances de sécurité. Un point important pour des conducteurs qui avaient pris l’habitude de rouler sans trafic et pouvaient avoir acquis de mauvais réflexes », détaille Patrick Lacroix pour Idex.
Et ces conseils ne s’adressaient pas seulement aux utilisateurs des véhicules de l’entreprise, mais aussi aux salariés pour leurs trajets domicile-travail. Car l’épisode de la crise sanitaire a eu un autre effet sur les trajets professionnels : celui d’accroître le recours à des moyens de transport alternatifs aux véhicules motorisés et aux transports en commun. « Avec le déconfinement, les deux-roues, vélos, trottinettes et autres engins de déplacement personnels (EDP) se sont multipliés », avance Patrick Lacroix. Des moyens de déplacement qui pourraient orienter les indicateurs d’accidents corporels à la hausse (voir l’encadré ci-dessous).
Et le reconfinement ?
Quelles seront les conséquences du reconfinement ? « Le nouvel épisode n’a rien à voir avec la première période puisque le travail est encouragé en respectant le protocole sanitaire, précise Patrick Lacroix. Les trajets ont continué pour les personnes qui ne peuvent pas télétravailler. Chez Idex par exemple, cela concerne l’ensemble des techniciens. Il y aura sûrement moins de monde sur les routes et on peut prévoir une légère diminution de la sinistralité, mais sans mesure avec ce que nous avons vécu il y a quelques mois », anticipe-t-il.
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