Le temps de la récolte est arrivé. C’est le constat fait par Pascal Gradassi, directeur commercial de Point S. Pour ce dernier, les grandes entreprises se lancent enfin dans l’externalisation de l’entretien courant, à l’image de ce qui se pratique déjà beaucoup avec les pneumatiques.
Depuis des années, les prestataires indépendants labourent le terrain pour convaincre ces clients de sauter le pas. Mais liées par leurs relations avec les loueurs longue durée et toujours fidèles aux réseaux des constructeurs, ces grandes entreprises hésitaient à se lancer dans l’externalisation de l’entretien courant. C’est chose faite aujourd’hui, si l’on en...
Le temps de la récolte est arrivé. C’est le constat fait par Pascal Gradassi, directeur commercial de Point S. Pour ce dernier, les grandes entreprises se lancent enfin dans l’externalisation de l’entretien courant, à l’image de ce qui se pratique déjà beaucoup avec les pneumatiques.
Depuis des années, les prestataires indépendants labourent le terrain pour convaincre ces clients de sauter le pas. Mais liées par leurs relations avec les loueurs longue durée et toujours fidèles aux réseaux des constructeurs, ces grandes entreprises hésitaient à se lancer dans l’externalisation de l’entretien courant. C’est chose faite aujourd’hui, si l’on en croit donc Pascal Gradassi.
Un recours accru aux enseignes
Un constat partagé par Didier Di Meglio, Key Account Manager clients stratégiques & LLD d’Euromaster : « C’est vrai que la tendance est en train de s’inverser », estime-t-il. Mais pour Didier Di Meglio, les loueurs sont aussi concernés dans la mesure où ils s’adressent plus volontiers aux prestataires indépendants que par le passé. Et que ce soit au travers des loueurs ou en direct, ces compétences sont désormais recherchées par de nombreuses grandes entreprises. Directeur commercial de Feu Vert Entreprises, Laurent Decallonne apporte une nuance : « Oui, les grands comptes cherchent toujours à réduire leurs coûts, ils ont envie de travailler avec les réseaux indépendants. Quelques-uns le font, notamment ceux qui sont en location financière sans prestations de services. Mais pour les loueurs, cela reste encore difficile à mettre en œuvre. » Cette « conversion », relative, des grandes entreprises aux services des réseaux d’entretien et de réparation indépendants serait un des signes d’une recherche encore accrue d’optimisation des coûts. En face, les enseignes nouent donc des partenariats pour répondre à ces attentes à grande échelle.
Le plus récent est le regroupement Fleet Partner, mené par le pneumaticien Continental. Celui-ci associe ses deux réseaux, BestDrive et Eurotyre, à un troisième, indépendant celui-là, Feu Vert Entreprises. L’objectif : offrir aux grands comptes des économies d’échelle en centralisant des prestations, à commencer par la facturation.
« C’est devenu quasiment un passage obligé, commente Jean-Marc Assael, directeur général de BestDrive. Les grandes entreprises ont besoin de visibilité sur ces coûts et ne veulent plus avoir à gérer des factures disséminées un peu partout. » Mais la démarche ne s’arrête pas là : Fleet Partner cherche aussi à harmoniser les services commercialisés par les trois réseaux.
Les enseignes se regroupent
À noter que BestDrive, propriété de Continental, s’est constitué en un réseau qui a commencé à se former à partir de 2010 grâce à la fusion de plusieurs groupes familiaux. Présent auprès des flottes industrielles, des parcs de poids lourds ou dans le monde agricole, BestDrive s’est doté d’une organisation commerciale spécifique depuis le début de l’année pour cibler les flottes plus larges, y compris donc les véhicules de tourisme et les utilitaires.
Ce regroupement autour de Fleet Partner ressemble à celui qui a suivi, Eurofleet Tyres & Services, lancé en septembre 2018, cette fois sous la houlette de Bridgestone et ses trois filiales, Speedy, Côté Route et FirstStop. La ressemblance tient d’abord à la taille : les deux regroupements tournent autour des 800 points de vente. Et ensuite aux profils de leurs membres : avec d’une part des enseignes qui jouissent d’une forte notoriété, Speedy et Feu Vert, et d’autre part des membres plus orientés vers les secteurs industriels.
Pareillement, Eurofleet Tyres & Services met en avant la centralisation de différents services, toujours la facturation, mais aussi le reporting et les rendez-vous en ligne, etc.
Point S et Siligom se sont aussi engouffrés dans cette voie en créant Viasso en 2016, leur structure commune pour précisément répondre aux questions que leur posent les grandes entreprises. « Viasso, c’est un seul point de facturation, un seul système informatique, un seul interlocuteur pour négocier, pour se plaindre, etc. », énumère Pascal Gradassi pour Point S.
Les grandes flottes en ligne de mire
À quels profils de grandes entreprises s’adressent ces structures ? Pas question de définir un seuil comme le nombre de véhicules d’une flotte, répond Benjamin Filippi, directeur d’Eurofleet Tyres & Services : « Pour nous, la condition sine qua none que l’on demande, c’est d’être multi-sites. Une entreprise qui aurait un grand nombre de véhicules sur un seul site n’est pas pour nous », souligne-t-il.
Ces regroupements visent aussi à densifier le maillage géographique pour les grands clients. « Les réseaux peuvent s’appuyer sur de nombreux centres, mais ce n’est pas encore assez », explique Laurent Decallonne pour Feu Vert Entreprises. D’autant que les réseaux constructeurs misent sur une couverture très complète du territoire. Et encore faut-il que ce maillage soit basé sur une réelle complémentarité.
Densifier le maillage des réseaux
« C’est notre cas : Speedy est bien implanté dans les centres urbains, First Stop, avec ses spécificités industrielles, l’est surtout dans des zones péri-urbaines et rurales », argumente Benjamin Filippi.
En outre, ces regroupements doivent centraliser un certain nombre de tâches, mais sans toucher aux spécificités de chacune des enseignes. Un exercice pas toujours facile. « Nous n’intervenons pas dans la politique générale des réseaux », précise Benjamin Filippi pour Eurofleet Tyres & Services. Mais il faut du temps pour parvenir à coordonner les services pour le compte de ces regroupements. Benjamin Filippi rappelle qu’Eurofleet Tyres & Services est encore en phase de développement : « Nous allons maintenant renforcer notre offensive. »
Les contraintes sont semblables pour Fleet Partner : ce regroupement a coordonné les services de ses trois membres autour des pneus, mais cette démarche reste à faire pour l’entretien courant, selon Laurent Decallonne. La demande des grandes entreprises pousse aussi les enseignes indépendantes à sortir de leur cœur de métier pour commercialiser des services connexes et complémentaires. Et quand ces partenaires ne peuvent pas proposer ces prestations par eux-mêmes, ils le font par le biais de… partenariats.
Norauto a par exemple multiplié les accords avec d’autres enseignes spécialisées, Carglass pour le vitrage, Parkopoly pour le convoyage automobile, Sineo pour le nettoyage, Carméléon pour la carrosserie légère, et bientôt un nouveau partenaire dans le domaine de la mobilité – un des grands sujets d’actualité pour de nombreuses entreprises dont les collaborateurs circulent beaucoup en milieu urbain (voir aussi notre article).
Encore plus de partenariats
Élargir l’offre reste également une priorité pour de nombreux prestataires d’entretien et de réparation qui commercialisent désormais une offre de vitrage. « C’est un sujet qui intéresse un peu tout le monde et la demande est assez importante », note Pascal Gradassi pour Point S. Mais en faisant le choix de développer cette activité en interne, Point S a pris le contrepied de ses concurrents qui ont passé des accords avec des enseignes spécialisées : Norauto avec Carglass bien sûr, mais aussi Euromaster avec France Pare-Brise.
Pour Norauto ou Euromaster, il est préférable d’aller chercher les compétences là où elles se trouvent, d’autant que dans le vitrage, elles sont très techniques. Pour Point S, la proximité demeure un atout essentiel : ces compétences doivent se trouver dans les centres où les conducteurs ont l’habitude de se rendre. Mais cela ne risque-t-il pas de représenter un investissement trop important ? Pascal Gradassi balaie l’argument : « Sur un marché très agressif, il faut investir, sinon la marge baisse tous les ans. »
Large choix ou proximité ?
Investir conditionne l’avenir. Une réalité déjà bien ancrée pour les prestataires dont les compétences n’ont cessé de s’élargir au fil des ans sous la pression d’un marché en pleine transformation. Tout du reste n’a pas été que défis à surmonter : des opportunités sont venues aussi faciliter la tâche des enseignes. Pascal Gradassi rappelle ainsi combien l’Union Européenne a libéré l’accès aux données des constructeurs, permettant aux enseignes d’intervenir sur un périmètre beaucoup plus vaste de véhicules. Les constructeurs n’ont qu’à bien se tenir.
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