
Après une année 2020 particulièrement difficile, le bilan se fait nuancé pour le secteur de l’entretien et de la réparation. Comme l’ensemble de l’économie française, les enseignes ont vu leur activité ralentir très fortement suite au premier confinement à la mi-mars. Puis, à l’issue de ce confinement, elles ont connu une reprise franche, presque aussi forte que ce coup d’arrêt, et ainsi de suite jusqu’à la fin de 2020. « 2020 a été une année en dents de scie avec des moments très aigus et pointus, dans un sens comme dans un autre, des explosions d’activité succédant à de grands creux », commente Pascal Gradassi, directeur commercial de Point...
Après une année 2020 particulièrement difficile, le bilan se fait nuancé pour le secteur de l’entretien et de la réparation. Comme l’ensemble de l’économie française, les enseignes ont vu leur activité ralentir très fortement suite au premier confinement à la mi-mars. Puis, à l’issue de ce confinement, elles ont connu une reprise franche, presque aussi forte que ce coup d’arrêt, et ainsi de suite jusqu’à la fin de 2020. « 2020 a été une année en dents de scie avec des moments très aigus et pointus, dans un sens comme dans un autre, des explosions d’activité succédant à de grands creux », commente Pascal Gradassi, directeur commercial de Point S.
Pour la plupart des enseignes, 2020 s’est d’ailleurs conclue avec un recul de l’activité, les moments forts de l’année ne parvenant pas à effacer totalement les moments creux. Rare exception : Norauto affirme avoir progressé de 10 % sur le segment professionnel. Un chiffre que l’enseigne tient à comparer à des croissances de l’ordre de 30 % les années passées.
« Nous n’avons pas le droit de nous plaindre, estime cependant Pascal Audebert, directeur général de Profil Plus. Nous avons été considérés comme des commerces essentiels et de ce fait, nous avons pu continuer à travailler dans ce contexte difficile. » Les réseaux d’entretien et de réparation ont donc maintenu ouverts tout ou partie de leurs points de vente, à l’exception de quelques enseignes qui ont tout fermé au début du premier confinement, avant de rouvrir petit à petit face à la demande des activités considérées comme essentielles, dont les secteurs de la santé et de l’alimentaire.
Des bénéfices collatéraux
Mais de nombreux aspects difficiles de cette crise ont aussi généré des conséquences positives pour les enseignes. Un exemple tout simple reste celui des batteries des véhicules restés longtemps à l’arrêt. Il a fallu les vérifier, les changer si nécessaire quand l’activité a redémarré. Pareillement, une longue immobilisation des véhicules a parfois entraîné des décisions favorables à leur entretien. « Ils ne pouvaient pas rouler, beaucoup d’entreprises en ont donc profité pour les faire réviser », rapporte Pascal Gradassi pour Point S.
En parallèle, les difficultés subies par les loueurs longue durée, amenés à prolonger d’un an environ les contrats de location de certains véhicules, promettent à moyen terme de l’activité supplémentaire aux enseignes d’entretien et de réparation. Des véhicules conservés plus longtemps nécessitent de facto plus d’entretien.
Les nouvelles mobilités…
Parmi les nombreuses décisions prises par l’ensemble des flottes pour faire face à la situation totalement inédite de la crise sanitaire, un fil rouge apparaît : celui d’une mutation, déjà constatée auparavant, des comportements d’achat et d’usage. À commencer par la demande de nouvelles mobilités. Tout ce qui est convoyage, voituriers et autres services jockey a pleinement profité de la paralysie momentanée des flottes.
Certes, il ne s’agissait pas de favoriser la mobilité des conducteurs des clients comme auparavant, mais plutôt celles des enseignes vers ces clients. C’est ainsi que Feu Vert Entreprises a lancé son activité liée au service voiturier susceptible d’être fourni aux flottes. « Les centres auto du réseau peuvent désormais mobiliser des chauffeurs chargés de récupérer le véhicule du client à l’adresse de son choix, pour le conduire ensuite à l’atelier, expose Juliet Serghe-Bonnet, responsable marketing et expérience client de l’enseigne. Une fois l’entretien réalisé, la voiture est reconduite à son adresse. »
Feu Vert Entreprises a aussi lancé ses quatre premiers ateliers mobiles dans les agglomérations de Paris, Lyon, Marseille et Bordeaux, avant d’étendre ce service dans les deux prochaines années. Si ce type de service n’a rien de très novateur pour d’autres enseignes, il reste loin d’être pratiqué par toutes. « Ces camions ateliers étaient en projet : nous avons accéléré tant la demande a été exacerbée par la crise », précise Juliet Serghe-Bonnet.
Mais pour Profil Plus, Pascal Audebert tient à ramener le phénomène des nouvelles mobilités à ses justes proportions. « Oui, il y a une évolution, nous la prendrons en compte, mais il n’y a pas d’urgence absolue. Et il ne faut pas oublier que la crise sanitaire a aussi mis sous cloche certains services comme le covoiturage, pourtant devenu une véritable “tarte à la crème“ dans le BtoB. En effet, les conducteurs ne souhaitent dorénavant plus partager leur voiture », constate-t-il.
… et les véhicules électrifiés
Autre conséquence de la crise sanitaire, le développement de l’usage des deux-roues électriques, déjà manifeste avant 2020, s’est renforcé depuis. Pour Pascal Gradassi chez Point S, ce phénomène de micro-mobilité est appelé à être durable. « Les gens ont pris conscience de ces nouveaux moyens de déplacement. De plus, l’autonomie électrique s’accroît fortement et met en valeur ces nouvelles mobilités, un aspect que nous allons intégrer à notre concept », anticipe-t-il.
D’autres se montrent plus circonspects, à l’image de Rodolphe Noulin, directeur de Speedy. Pour ce dernier, ces véhicules électrifiés constituent des « micro-phénomènes limités à de grandes zones urbaines où cela peut avoir du sens. » L’enseigne préfère pour l’instant observer ces usages, mais elle est en revanche très impliquée dans l’entretien des voitures électriques et hybrides. « 2020 a eu un effet d’accélérateur sur les nouvelles motorisations. En outre, il y a toujours des besoins d’entretien sur ces véhicules, y compris sur les modèles électriques au niveau des pièces d’usure », rapporte Rodolphe Noulin. Et Speedy a décidé d’aller plus loin en équipant un certain nombre de ses points de vente de bornes de recharge électrique, soit bientôt un tiers de son réseau. « Cela compensera les difficultés observées sur les disponibilités de ces bornes dans les espaces publics », complète ce responsable.
Des échanges dématérialisés…
Autre conséquence de la crise sanitaire pour les enseignes, la dématérialisation des échanges s’est définitivement imposée pendant les confinements. « Nous avons dû nous adapter à la baisse drastique des rendez-vous physiques, ce qui est difficile pour les forces commerciales. Il a aussi fallu nous adapter à d’importants changements d’organisation dans les entreprises, avec des interlocuteurs parfois difficiles à contacter car surchargés de travail », évoque Jérôme Bonnaire, responsable commercial de Norauto Pro. L’enseigne note aussi une légère décroissance de la fréquentation dans les ateliers. Une fréquentation affectée par les mesures sanitaires qu’il a fallu prendre, « vitres de polycarbonate pour les véhicules, comme les taxis et les VTC, kits de désinfection », énumère Jérôme Bonnaire.
En parallèle, cette dématérialisation forcée des échanges a aussi favorisé les processus de numérisation. Il n’est rien de dire que le télétravail s’est imposé dans les entreprises, clientes ou prestataires. Un phénomène dont les conséquences ne sont pas forcément évidentes à appréhender pour les enseignes d’entretien et de réparation.
Pour Jean-Pierre Laur, directeur commercial de Profil Plus, « le télétravail va s’installer durablement. Cela signifie du kilométrage en moins, c’est sûr, mais dans quelles proportions ? Le télétravail implique avant tout des personnes qui habitent les grands centres urbains et prennent déjà beaucoup les transports en commun », note ce responsable. Mais qui dit moins de kilomètres parcourus, dit aussi moins d’entretien et de réparation des véhicules professionnels, et particulièrement des voitures de fonction.
… et des processus numérisés
Ces incertitudes quant à l’impact de ces nouveaux usages et comportements professionnels n’empêchent pas les enseignes de poursuivre leurs efforts en matière de numérisation. Comme avec la prise de rendez-vous en ligne, lancée notamment chez Feu Vert Entreprises. De son côté, Euromaster poursuit son concept de « One Stop Servicing » en proposant, sous sa seule facture, divers services amenés par ses partenaires dans les domaines où ce prestataire n’a pas d’offre spécifique : vitrage, petite carrosserie, convoyage, etc.
D’une manière générale, les prestataires insistent sur la volonté des gestionnaires de flotte de disposer de moyens adaptés pour leur faciliter la tâche. Un constat déjà bien connu et que la crise sanitaire n’a fait que souligner. Obligés comme nombre de professionnels de travailler de chez eux, ces gestionnaires ont demandé des outils adéquats pour bénéficier de la meilleure vue globale de leur flotte. « Nous sommes leurs yeux », revendique Aline Lojié, directrice marketing VL chez Euromaster.
Pour une vision budgétaire simplifiée, l’enseigne Profil Plus met ainsi en avant son service Optiparc, une formule de lissage des coûts à un rythme mensuel, avec des phases intermédiaires pour réajuster ces coûts en fonction de la consommation réelle. « C’est une question de gestion optimale, estime Pascal Audebert. Cela permet au gestionnaire d’avoir son budget au début de l’année et de pouvoir le suivre, avec une bonne vision de la flotte et des dépenses que cela va engendrer. »
Une vision budgétaire simplifiée
Euromaster compte lui emboîter le pas puisque l’enseigne a dévoilé récemment la dernière brique de son offre Master Control de gestion de flotte, Master Control Easilyss, une solution de mensualisation du budget des véhicules. « C’est un forfait coût entretien mensualisé, sur un engagement de 12, 24, 36 ou 48 mois, avec à la fin du contrat une régularisation en fonction du coût réel consommé, détaille Aline Lojié. Toutefois, si l’écart dépasse les 15 % dans un sens comme dans un autre, il peut y avoir régularisation plus tôt, au bout de deux ans. On ne change pas forcément les forfaits, on régule en fonction du réel consommé », poursuit cette responsable. Cette offre peut porter soit sur les pneus, soit sur les pneus et l’entretien courant. Seuls pour l’instant sont concernés la marque Michelin et les principaux fabricants du secteur pour les pièces détachées.
Ces formules de lissage budgétaire mensuel, même si elles portent le nom de forfaits, correspondent néanmoins à la nécessité de facturer au juste coût, soulignent en substance les deux enseignes Profil Plus et Euromaster. « Il ne s’agit pas d’opposer le forfait au coût réel, il faut rester pragmatique et facturer au juste coût », insiste Pascal Audebert pour Profil Plus.
La demande de simplification administrative revient souvent chez les gestionnaires de flotte. Mais dans cette optique, il est parfois nécessaire de dépasser la vision classique que l’on peut avoir des outils mis à leur disposition.
Du TCO au TCM
« Il est temps de sortir de la vision du TCO au profit d’une approche plus globale, celle du coût total de la mobilité (TCM) », préconise à ce propos Véronique Giraud, directrice marketing et commerciale de Best Drive. Une évolution qui commence en effet à faire son chemin (voir notre article « Entretien et réparation : un TCO complexe à optimiser » dans Flottes Automobiles n° 264). « Cette notion de TCM est certes plus complexe à appréhender car il faut intégrer plusieurs modes de transport, par exemple les transports partagés. Mais cela nous donne l’occasion d’offrir des services pour optimiser à la fois le temps du conducteur et l’exploitation du véhicule », ajoute Véronique Giraud.
Reste maintenant à sortir de la crise. Si certaines enseignes espèrent un retour au calme dans le courant du second semestre, beaucoup n’osent pas encore se prononcer quant à la façon dont va se dessiner l’ensemble de l’année 2021. À suivre…
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