
« La crise a fragilisé les petites entreprises. Entre 2010 et 2012, un certain nombre d’entre elles ont disparu. Mais ce phénomène s’est ralenti l’an dernier. Le coût du risque de défaillance s’est un peu réduit », pointe Thibault Paland, directeur général délégué de Diac Location, la captive de Renault, lorsqu’il évoque les PME. De quoi rassurer concessionnaires et acteurs de la LLD.
La crise a aussi favorisé l’essor de la LLD : « Les PME ont été incitées à regarder leurs coûts de plus près, à éviter d’utiliser leur trésorerie et à chercher des solutions pour externaliser. Ces entreprises se sont aussi mises à la recherche de solutions plus flexibles », estime Pascal Vanbeversluys, directeur marketing de GE Capital Fleet Services.
L’achat et la LOA toujours au premier rang
« Majoritairement, les PME choisissent toujours les modes de financement classiques comme l’achat sur fonds propres, à crédit ou encore la LOA. Le réflexe traditionnel de nombre de petites organisations est de rester propriétaires des véhicules. En dessous d’une quinzaine, avec une gestion de “bon père de famille“ et la trésorerie adéquate, cela demeure gérable », note Maxime Sartorius, consultant chez Direct Fleet, spécialiste de la gestion des flottes.
Le crédit-bail a aussi renforcé sa part de marché auprès des PME, du fait « des taux bas du crédit notamment, qui rend ce mode de financement plus compétitif », indique Thibault Paland. « Fiscalement, le crédit-bail permet d’optimiser la situation comptable en imputant les loyers en charges déductibles. En outre, il n’y a pas d’immobilisation de capital et cela au bénéfice de la capacité d’emprunt pour d’autres investissements », explique Baptiste Brebion, responsable des ventes sociétés pour les réseaux Citroën. Le crédit-bail se veut particulièrement intéressant pour les utilitaires. « Sur 48 et 60 mois, l’entreprise a la possibilité d’exercer une option d’achat. Et si le véhicule a été bien entretenu, il a encore une certaine durée de vie », avance Thibault Paland. « Auprès des PME, le crédit-bail est passé de 9 % en 2009 à 18 % sur 2015 », confirme Baptiste Brebion. Sur le long terme, la LLD poursuit cependant sa croissance – de l’ordre de 2 à 3 % par an – auprès des PME, selon Diac Location. Dans ce cadre, la taille du parc se veut déterminante. « 44 % de ses ventes sur les parcs inférieurs à 10 véhicules se font en LLD contre 73 % sur les parcs de 50 à 300 véhicules. Ce financement pèse désormais 53 % des ventes pour les flottes de 1 à 300 véhicules, contre 29 % en 2009 », détaille pour sa part Baptiste Brebion.
Autre élément qui milite en faveur de la LLD dès que la taille du parc s’accroît : la revente. « Plus de véhicules veut aussi dire plus de véhicules à revendre en fin de vie », rappelle Thibault Paland. Avec deux ou trois, cela reste gérable ; avec dix fois plus, cela devient chronophage.
La LLD : une tendance qui s’installe
« Et avec la LLD, l’entrepreneur échappe aux risques inhérents à la revente. L’argument porte essentiellement pour les VP. Pour les VU, la crainte des frais de restitution freine encore l’extension de la LLD », complète Baptiste Brebion. Sur ce sujet, Pascal Vanbeversluys, de GE Capital, voit la photo-expertise comme un moyen de rendre moins sensible ce problème lors des restitutions.
Autre élément à prendre en compte dans ce glissement vers la LLD : souvent, avec l’augmentation de la taille de l’entreprise, le nombre de sites croît également. « Dans une PME mono-site, le dirigeant voit tous les jours les véhicules sur le parking. Mais il aura tendance à passer à la LLD dès qu’il y a plusieurs sites et que le pilotage devient plus compliqué », souligne Maxime Sartorius. « Par ailleurs, l’évolution de la législation sur le crédit (loi Lagarde), en rendant plus contraignante toute publicité sur le crédit, incite les constructeurs à plus communiquer sur la LLD au travers de leurs captives », signale Ferréol Mayoly, directeur général d’Arval SME Solutions. Pour ce dernier qui défend son métier, des facilités de la LLD peuvent intéresser des PME qui ont besoin de flexibilité ou connaissent des pics saisonniers. C’est vrai de la location au kilomètre ou de la possibilité de s’engager sur une durée et non un kilométrage – les factures différant alors mensuellement selon le kilométrage. Contrairement aux grands groupes, les PME ont aussi généralement une moins bonne maîtrise du suivi du kilométrage et ne peuvent procéder à des échanges de véhicules entre salariés pour mieux s’adapter au contrat. Et qu’il s’agisse de LOA ou de LLD, le responsable d’Arval estime que ces deux modes de financement représentent 50 % des solutions choisies par les PME.
Des kilométrages toujours difficiles à suivre
Après une période critique entre 2008 et 2010 où les loueurs ont rallongé les contrats de LLD et cherché à limiter le nombre de véhicules d’occasion à revendre sur un marché en crise, la période actuelle est à la stabilité. Mais le léger recul des kilométrages, enregistré chez les grands comptes pour des raisons financières et écologiques, ne touche guère les plus petites structures. « En effet, les artisans, commerçants et petites entreprises roulent en fonction de leurs besoins commerciaux », précise Thibault Paland. Chez Diac, les couples kilométrage-durée se situent à environ 36 mois et 90 000 km pour un VP, et 44 mois et 110 000 km pour un VU. Pour Arval, Ferréol Mayoly remarque une hausse moyenne de la durée des contrats d’environ un mois par an, en partie du fait de la fiabilité accrue des véhicules. GE Capital Fleet Services et Arval notent aussi un essor de la location moyenne durée. Pour Pascal Vanbeversluys, de GE Capital, « les PME ont souvent besoin de flexibilité pour faire face à un pic d’activité, à une clientèle en dents de scie ou à des contrats de travail plus courts. » Pour répondre à ces besoins, Arval s’appuie sur sa marque Arval moyenne durée qui permet par exemple de ne pas s’engager en LLD pendant la période d’essai d’un collaborateur, ou d’éviter l’attente d’un véhicule neuf en LLD.
Mais vendre les services de la LLD aux PME n’est pas toujours simple. « En dessous de 10 véhicules, l’entrepreneur se situe moins dans l’anticipation et cherche moins à mutualiser le risque et à éviter les surcoûts », observe Thibault Paland. Des surcoûts qui progressent en fonction du nombre de véhicules. « Ainsi, les petits parcs choisissent rarement l’option du véhicule de remplacement », poursuit-il.
Les services : un besoin de simplification
Car les PME subissent une contrainte majeure qui les incite à privilégier certains services : elles ont besoin de se faciliter la vie pour se concentrer sur leur activité, d’autant qu’elles ne disposent pas de responsable de flotte. « Nous avons lancé un certain nombre de prestations à la demande, comme le nettoyage ou le convoyage du véhicule que nous pouvons aller chercher sur le site ou au domicile du salarié pour l’amener en entretien et éviter une perte de temps », avance Ferréol Mayoly pour Arval.
Un point de vue avalisé par Baptiste Brebion : « Les PME cherchent aussi à lisser les dépenses pour éviter les à-coups de gestion et les mauvaises surprises. Pour la partie services, 80 % de nos financements sont associés à une maintenance incluant l’entretien, la garantie et l’assistance. L’option véhicule de remplacement est retenue dans 20 % des financements, énumère ce responsable de Citroën. Toutefois, le lien entre l’entreprise et le concessionnaire en local demeure important et souvent, ce dernier trouvera une solution lors de l’immobilisation d’un véhicule », ajoute t-il.
Pour sa part, Diac Location estime que 50 % des ventes en crédit-bail sont désormais associées à des contrats d’entretien. Une option quasi systématique en LLD mais loin d’être prioritaire auparavant pour les autres modes de financement. Autre service proposé aux PME, le recours à la carte de carburant se fait nettement moins systématique dans les petites structures que dans les grandes.
La gestion des données, une difficulté majeure
« Mais la situation évolue en raison de la facilité du suivi. La carte se montre aussi plus pratique pour récupérer la TVA, plutôt que d’aller rechercher les chiffres, note de frais par note de frais », argumente Pascal Vanbeversluys, pour GE Capital.
De fait, la gestion des données demeure souvent une difficulté pour les PME. « À partir d’une cinquantaine de véhicules, l’entreprise qui opte pour la LLD choisit souvent deux loueurs à mettre en concurrence. Avec un seul interlocuteur, elle peut toujours se débrouiller avec l’intranet du loueur. Mais quand il est question d’agréger des données, cela se complique. Ce problème se pose aussi quand l’entreprise préfère sortir certains services comme la carte de carburant ou le véhicule de remplacement », illustre Jean-Charles Martin, responsable du développement chez GAC Technology, un éditeur de logiciels et de solutions pour la gestion de parcs automobiles.
Défendant son métier, Jean-Charles Martin souligne aussi qu’avec un parc au-delà d’une vingtaine de véhicules, le système des fichiers Excel pour suivre les véhicules et les conducteurs montre ses limites. « D’autant qu’une grosse PME, à partir de 50 ou 100 véhicules, commence à avoir les mêmes besoins qu’une flotte plus importante en matière de suivi et de gestion. Mais contrairement aux très grandes sociétés, elle n’a pas les moyens d’allouer une personne experte », constate-t-il.
Le marché change pour accompagner les PME
Cependant, la donne évolue. Les petites entreprises ont pris conscience du poids de la flotte dans leurs dépenses et de la nécessité de réduire les coûts. Un constat qui n’a pas échappé aux acteurs de la LLD, avec de nouvelles approches qui viennent bouleverser le marché. « C’est le cas avec l’apparition de sites marchands en ligne qui permettent de comparer rapidement les prix en LLD », évoque Maxime Sartorius, pour Direct Fleet. Cette approche commence à se substituer au démarchage commercial classique. Pour les PME, cela passe souvent par un courtier qui fait ensuite plusieurs offres, « alors que la PME a souvent besoin de réponses rapides. Face à la difficulté de faire un choix en LLD, elle se rapproche donc plus facilement de son concessionnaire pour obtenir au plus vite un véhicule », conclut le consultant. La bataille des PME ne fait que commencer.
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