
Sur le front du financement des flottes, 2020 aurait pu bouleverser la donne. Le contexte s’y prêtait : avec la mise en place du WLTP particulièrement, les entreprises ont été amenées à revoir les mix énergétiques de leur parc. Et le diesel n’y est dorénavant plus incontournable : « Nous sommes passés du “tout diesel“ à un mix énergétique varié qui dépend des lois de roulage et de l’utilisation des véhicules », résume Guillaume Maureau, directeur général adjoint au commerce chez ALD Automotive.
La transition en marche
« Le passage au WLTP mais aussi la loi LOM ou la réglementation européenne “CAFE“ ont accéléré la transition énergétique des...
Sur le front du financement des flottes, 2020 aurait pu bouleverser la donne. Le contexte s’y prêtait : avec la mise en place du WLTP particulièrement, les entreprises ont été amenées à revoir les mix énergétiques de leur parc. Et le diesel n’y est dorénavant plus incontournable : « Nous sommes passés du “tout diesel“ à un mix énergétique varié qui dépend des lois de roulage et de l’utilisation des véhicules », résume Guillaume Maureau, directeur général adjoint au commerce chez ALD Automotive.
La transition en marche
« Le passage au WLTP mais aussi la loi LOM ou la réglementation européenne “CAFE“ ont accéléré la transition énergétique des flottes, confirme Gérard de Chalonge, directeur commercial et marketing d’Athlon. Ces mesures poussent les entreprises à réfléchir aux meilleures motorisations en fonction des usages. » Et pour leur part, les constructeurs se sont adaptés en diversifiant leurs gammes ou en revoyant leurs motorisations.
Une transition actée par Thierry Fristot, directeur du pilotage des 408 véhicules de la flotte automobile, au sein de la direction des moyens généraux du département de la Moselle : « À fin 2019, avec 92 % de VP et 8 % de VUL, nous avions 56 % de motorisation essence, 35 % de diesel, 5 % de GPL et 4 % de véhicules électriques, avec une moyenne de 120 g de CO2 et dix ans de vétusté. Notre programme d’acquisition pour 2020 respectera les dispositions réglementaires de la LOM avec 16 VL B2 électriques, 25 VL B2 essence et 5 VUL diesel – des achats répartis entre l’Ugap et de nouveaux marchés. Ces acquisitions succéderont aux véhicules diesel et GPL en fin de parcours », décrit ce responsable (voir le témoignage).
Spécialiste du transport scolaire d’enfants en situation de handicap, le Groupe MyMobility ne dit pas autre chose : « Nous sommes partis de 100 % diesel il y a trois ans pour arriver désormais à 85 % et bientôt 80 %. Nous sommes en pleine transition énergétique. Dans notre parc, nous avons introduit des véhicules au GNV qui font appel à la bioénergie, mais pour l’instant, seul Seat nous propose cette motorisation sur des véhicules de tourisme (voir aussi l’article). Nous avons aussi des véhicules électriques et des hybrides, et avons accru le nombre de motorisations essence », relate Jean-Charles Houyvet, son directeur général adjoint à la tête de 3 900 véhicules.

Des loyers en hausse
Mais cette transition vers les nouvelles énergies a eu une répercussion sur le financement : les prix des véhicules ont augmenté et les observateurs constatent aussi une hausse des loyers des véhicules en LLD. « En 2019-2020, nous avons vu baisser les valeurs résiduelles des modèles thermiques d’environ 5 %, ce qui s’est mécaniquement traduit par une hausse des loyers financiers en LLD, pointe Robert Maubé, directeur consultant du cabinet RRMC, spécialiste de la gestion des flottes d’entreprise. Et à voiture égale, à loi de roulage égale, à valeur investie égale et TAEG (taux annuel effectif global) égal, un recul de 5 % des VR se traduit par une augmentation de 8 % des loyers financiers. »
Chez les gestionnaires de flotte, on constate aussi cette inflation. « Récemment, nous avons noté une orientation des loyers à la hausse pour un même modèle de voiture, sur une même loi de roulage », valide Nicolas Gomez, responsable du parc automobile pour PharmaField, un spécialiste de la délégation de personnel dans le domaine médical, à la tête de plus de 300 véhicules. Dans ce contexte, Nicolas Gomez rappelle la nécessité de rester attentif à l’évolution des prix des loueurs : « Ils doivent être mis en concurrence tous les six mois, voire tous les ans. Aujourd’hui, tout évolue très vite dans tous les secteurs. Le monde des flottes ne doit pas y déroger, d’autant plus avec les trois mois de perte d’activité liés au confinement », conclut ce responsable (voir le témoignage).
Les explications à cette hausse des tarifs sont nombreuses. Les prix des modèles augmentent en raison du nombre croissant des équipements d’aides à la conduite qui les équipent. L’entrée en vigueur du WLTP, qui a demandé aux constructeurs d’investir pour rendre leurs motorisations plus efficientes et refondre leurs gammes, a pareillement contribué à faire monter la facture. Et cette augmentation des tarifs se répercute logiquement sur les loyers des véhicules en LLD. Mais d’autres facteurs sont avancés par les spécialistes pour expliquer la hausse des loyers en LLD. Dont le manque de visibilité sur les futures valeurs de revente des motorisations, comme sur celles du diesel. Avec des restrictions d’accès aux centres-villes envisagées dans de nombreuses villes, mais aussi après une campagne de dénigrement médiatique avancent certains, les valeurs de revente des diesel restent incertaines sur le marché de l’occasion. Résultat : les loueurs anticipent des VR moins élevées et orientent leurs loyers à la hausse.
La question des VR
La logique serait semblable avec les motorisations dites « propres » : compte tenu des évolutions technologiques constantes qui accroissent l’autonomie des batteries par exemple, la perte de valeur des modèles plus anciens et dotés de moins d’autonomie est rapide sur le marché VO. Et avec les motorisations essence, pourtant peu susceptibles de voir leurs valeurs résiduelles se dégrader sur le marché VO, des spécialistes estiment que les loyers sont maintenus à des niveaux élevés par les loueurs pour compenser les incertitudes financières autour des motorisations propres ou diesel…
Autant d’évolutions qui faisaient prédire en début d’année que 2020 pourrait voir les choix de mode financement des flottes d’entreprise évoluer. Fortes du constat que les loueurs ne s’engagent pas suffisamment sur les VR et que les loyers augmentent, des entreprises auraient pu décider de délaisser la LLD pour financer elles-mêmes leurs véhicules. Elles préféreraient alors acquérir leurs véhicules en achat, quelle que soit la motorisation, et négocier ensuite leur revente par leurs propres moyens et optimiser ainsi la gestion de leur parc.
Une situation illustrée par le transporteur de personnes Titi Floris dont l’activité s’élargit, pour des raisons financières, à la mise en location et à la revente des 1 400 véhicules en parc, acquis en propriété ou en LOA. Dans cette entreprise, le recours à la LLD reste donc exceptionnel. « Nous l’avons pratiquée avec un lot de véhicules électriques pour lequel nous n’avions pas une assez bonne visibilité des valeurs de revente. Pour un lot de Citroën C3, nous avons aussi préféré la LLD afin d’assurer la croissance du parc sans risque financier », explique François-Xavier Dugué, responsable gestion flotte de véhicules (voir le reportage).
Changer de mode de financement ?
Mais quelle que soit la volonté de changer les modes de financement, la crise sanitaire a suspendu l’activité pendant plus deux mois. « Il est donc difficile de voir des évolutions dans les pratiques de financement des entreprises », note Robert Maubé. L’épisode de crise liée à l’épidémie de covid-19 a de fait entraîné une baisse des kilomètres parcourus, et par ricochet amené à prolonger les contrats. Et de nombreuses commandes ont été suspendues le temps d’un retour à une situation plus « normale ».
Chez les loueurs, malgré ces conjectures autour de l’évolution des choix de financement, on reste confiant dans l’attractivité d’un mode de financement qui a fait ses preuves sur l’ensemble des motorisations. « Notre métier, c’est d’être capables d’accompagner nos clients en gardant la stabilité des prix sur l’ensemble des motorisations, y compris le diesel, rappelle Gérard de Chalonge pour Athlon. Malgré le “diesel bashing“ depuis quelques années, Athlon est resté très conservateur sur les valeurs de revente de ces motorisations indispensables pour certains usages. »
Pour sa part, Guillaume Maureau d’ALD réaffirme le soutien du loueur à l’ensemble des motorisations : « Si sa part de marché diminue, le diesel n’est pas fini. Il reste une alternative crédible pour les gros rouleurs et les longs trajets. Dans nos commandes de VP, le diesel représente environ 47 %, contre 51 % pour l’essence, l’hybride et l’hybride rechargeable, et 2 % pour le 100 % électrique en forte progression. »
Des loueurs confiants
Quant aux motorisations alternatives, notamment électriques, les loueurs interrogés affirment leur soutien au marché via les VR proposées. Chez ALD, Guillaume Maureau met en avant les moyens déployés pour assurer les reventes de ces motorisations : « Le remarketing de ces véhicules électriques s’organise via nos plates-formes de revente VO groupe et nous avons acquis un réel savoir-faire pour la location-gestion de ces véhicules, entre autres par le biais de partenariats avec de grands clients comme Orange et Engie », détaille ce responsable. En rappelant que son enseigne a été récemment retenue par Tesla pour développer son offre de LLD. Chez Athlon également, Gérard de Chalonge souligne la maîtrise du marché VO de l’électrique : « Nous bénéficions des connaissances de nos collègues aux Pays-Bas où Athlon a déjà acquis une expérience dans la revente de ces véhicules et de leurs VR. »
La carte de l’électrique
Du côté des entreprises, Jean-Charles Houyvet directeur général adjoint du Groupe MyMobility, spécialiste du transport scolaire d’enfants en situation de handicap, tend à confirmer cet engagement des loueurs sur le marché de l’électrique. « En LLD, les constructeurs commencent à avoir des offres de véhicules électriques mais le choix demeure encore restreint. Et s’ils n’ont pas de mal à fournir le marché des particuliers, nous constatons qu’ils ont plus de mal à répondre à des sociétés comme la nôtre, avec des véhicules en plus grande quantité et des loyers attractifs. À l’opposé, le financement proposé par les loueurs généralistes nous est apparu plus intéressant », avance Jean-Charles Houyvet qui gère 3 900 véhicules, à 90 % en LLD et 10 % en LOA (voir le témoignage).
Mais chez les loueurs, la confiance dans l’attractivité du financement en LLD ne tient pas seulement dans la capacité à soutenir les VR des différentes motorisations, en développement comme l’électrique ou en repli comme le diesel. « Le produit LLD est bien souvent plus économique, avec de nombreux services additionnels qui facilitent la vie du conducteur. Et avec les grandes entreprises, la LLD poursuit sa croissance, de l’ordre de deux ou 3 % par an », se félicite Guillaume Maureau d’ALD en annonçant un taux de progression de l’ordre de 25 % avec les TPE et PME. Ce responsable insiste aussi sur les avantages des contrats de LLD par rapport à d’autres financements comme la LOA : des remises plus intéressantes, l’absence de dépôt de garantie ou de premier loyer majoré, etc.
Chez Athlon, au-delà de l’argumentaire sur les avantages de la LLD par rapport aux autres modes de financement, on avance aussi des arguments conjoncturels pour expliquer l’attrait de cette solution de financement. « La LLD est un produit qui supporte bien la crise : à chaque fois qu’il y a une crise, les entreprises veulent soulager leur trésorerie, estime Gérard de Chalonge. Après la crise de 2008, on s’est rendu compte que le financement en LLD est resté stable en 2009 alors que tous les autres modes de financement et l’achat comptant avaient fortement reculé », poursuit-il. Un constat à vérifier dans les mois qui viennent.
Dossier - Financement : les flottes dans l’incertitude
- Financement : les flottes dans l’incertitude
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