
La définition des accidents en chaîne
Un accident en chaîne est un accident dans lequel les voitures circulaient sur la même voie, dans le même sens, lorsqu’à la suite d’un ralentissement ou d’un arrêt, l’une percute celle qui la précédait, entraînant derrière une ou plusieurs collisions. Les chocs sont donc plein arrière pour le premier, avant et arrière pour ceux qui suivent, et avant pour le dernier. Toute autre configuration (exemple : implication d’un véhicule venant en sens inverse) est qualifiée de carambolage.
Remplir le ou les constats
Si vous étiez en première position, un seul constat est vraiment nécessaire avec celui qui vous a heurté à l’arrière, mais un constat avec celui placé en troisième position est utile, ne serait-ce que pour avoir ses coordonnées et celles de son assurance. Placé en position intermédiaire, il vous faut remplir deux constats, l’un avec celui qui vous précédait, le second avec celui qui vous suivait.
Celui placé en queue ne complète de constat qu’avec le conducteur le précédant, sa position lui conférant une responsabilité totale. Si des circonstances particulières lui permettent de réduire sa faute, il peut avoir intérêt à échanger avec la tête de file pour obtenir son témoignage.
Sur le formulaire, il ne faut pas omettre de signaler qu’il y a plus de deux véhicules (rubrique 4) et la présence de blessés le cas échéant (rubrique 3). Les cases pouvant être cochées sont nombreuses selon le mode de circulation :
- Pour le premier : 3 (prise d’un stationnement en marche avant), 5 (entrée dans un parking), 7 (sens giratoire), 12 (virait à droite), 13 (virait à gauche).
- Pour celui qui heurte la voiture qu’il suivait : 8
Les points de choc (rubrique 10) ne doivent pas faire apparaître de collision latérale même arrière. Enfin, il est conseillé de dessiner tous les véhicules (s’ils ne sont pas trop nombreux) sur le croquis (rubrique 13) afin qu’apparaissent tous les intervenants et que la typologie de l’accident soit avérée.
Projection ou pas
La position intermédiaire dans la file est inconfortable car, outre d’avoir des dommages avant et arrière, il y a en plus le doute sur les circonstances exactes de l’accident. Soit la voiture est entrée en collision avec le véhicule la précédant pour être ensuite heurtée par le suiveur, soit elle a été projetée par ce dernier et dans cette hypothèse, le fait qu’elle était à cet instant immobilisée est malaisé à prouver.
La projection peut être démontrée par la reconnaissance du fait par le suiveur sur le constat (rubrique 14), ou par le témoignage du conducteur de tête qui, dans ce cas, n’a ressenti qu’un seul choc, encore que la simultanéité des collisions autorise rarement cette démonstration. Dans ce type d’accident, la clé est de savoir qui a commis un défaut de maîtrise (art. R413-17 Code de la route).

Accident en chaîne : qu’en dit la Convention IRSA ?
Elle consacre tout un chapitre (titre 4) à ce type d’accident et les grands assureurs dédient un service entier à gérer ce cas de figure. Constatant que la démonstration de la projection était souvent impossible, ils ont décidé de l’ignorer en statuant sur les droits à indemnisation selon la place tenue dans la file :
Chaque assureur supporte le recours (dommages arrière et, s’il y a lieu, avant) de celui couvrant le véhicule qui précédait en fonction de ces responsabilités.
La Convention ne liant que les assureurs, ce système de partage n’est normalement pas opposable aux automobilistes. Si le dernier d’entre eux doit indéniablement avoir une responsabilité sanctionnant son manque de maîtrise ou son non-respect des distances de sécurité, celui ou ceux en position intermédiaires ne devraient être pénalisés que si une faute est démontrée à leur endroit (L. 5 juillet 1985 dite Loi Badinter). La lecture des forums internet montre que l’IRSA prévaut souvent pour l’indemnisation comme pour le recours entre assureurs.
Exemple :
Quelques cas particuliers
Les véhicules sont partiellement dans le prolongement les uns des autres :

L’IRSA reste applicable pourvu que les dommages soient bien placés à l’arrière du véhicule qui précède. Ainsi dans l’exemple ci-dessus :
- Les assureurs de A et B exercent chacun un recours total contre C.
- L’assureur de C réclame 50 % des dommages de son assuré à D.
- L’assureur de D n’a aucun recours et son assuré n’est indemnisé que s’il a une garantie « dommages accidentels ».
Pareillement, si les véhicules en fin de file (C et D) sont côte à côte et ont embouti B, seul au milieu de la file. Leurs assureurs subiront chacun un recours de 25 % des dommages de B. Ce mode de règlement n’est retenu que si les véhicules impliqués circulant l’un à côté de l’autre ne se sont pas heurtés. Dans cette dernière hypothèse, les assureurs considèrent qu’il s’agit d’un carambolage passible d’un autre type de gestion.
L’un des véhicules n’est pas assuré :
Prenons l’exemple de l’accident en chaîne impliquant trois voitures et supposons que B n’est pas assuré ou est garanti par l’État ou est couvert par un assureur non-adhérent à l’IRSA (une compagnie étrangère par exemple). Il n’est pas possible d’appliquer la Convention à celui-ci ou à son assureur non-adhérent. Pourtant, il faut bien indemniser A.
C’est l’assureur de C qui subit le recours de A (100 %). Cet assureur exerce ensuite un recours contre B sur la base du Code de la route (puisque l’IRSA ne s’applique pas entre eux) pour récupérer, au moins partiellement, ses débours mais il doit aussi, sur les mêmes bases, accueillir le recours de B pour les dommages subis par celui-ci. Généralement, une âpre discussion s’instaure alors quant à savoir s’il y a ou non projection (voir le schéma ci-dessous). Dans les cas plus complexes où il y a plusieurs assureurs IRSA derrière le véhicule B, ceux-ci se partagent la charge des dommages de A et l’indemnisation éventuelle de B.
Si le véhicule non assuré à un adhérent de l’IRSA est placé en fin de file et est responsable selon le Code de la route, l’IRSA s’applique entre les assureurs adhérents qui disposent d’un recours contre lui, ce que le visualise le schéma ci-dessous. Compte tenu de la complexité et des aléas d’un tel recours, il est fréquent que certains assureurs attendent que leur réclamation contre le non-assuré soit validée avant de régler leur assuré du montant du recours perçu, sauf à ce que celui-ci ait souscrit une garantie « dommages accidentels ».
Responsable pour excès de lenteur
Si l’excès de vitesse est une faute pouvant entraîner une responsabilité, une vitesse anormalement trop faible en est également une.
Un automobiliste circulait ainsi à vitesse réduite sur une voie rapide (vitesse limitée à 110 km/h), ne voulant pas manquer une sortie sur sa droite. L’usager qui le suivait freine brusquement pour éviter la collision mais celui-ci est heurté par un troisième véhicule, lui-même percuté par une autre voiture. L’accident se solde par un mort et deux blessés graves.
Le conducteur, cause initiale de l’accident, souligne qu’il n’est pas fautif de diminuer son allure pour l’adapter à une manœuvre imminente autorisée. Il n’en est pas moins condamné pour homicide et blessures involontaires du fait d’un manquement à l’obligation de prudence et de sécurité visé à l’article R 413-19 du Code de la route.
Certains autres protagonistes sont condamnés pour défaut de maîtrise de leur véhicule ou pour insuffisance des distances de sécurité (Cass. Crim., 11 janvier 2011, n° 10-80550). L’IRSA n’a sans doute pas retenu l’implication du conducteur lent et donc sa responsabilité car il n’a pas été heurté et la faute qu’il a commise n’est pas visée par le barème de la Convention.
On peut en déduire que si le conducteur de tête avait été heurté à l’arrière, il aurait supporté une part importante de responsabilité car son comportement était volontaire, alors que les autres automobilistes pouvaient arguer de la surprise. Toutefois, l’application de l’IRSA, en considérant que tous les véhicules se trouvaient l’un derrière l’autre, l’aurait absout de toute responsabilité.
Un accident en chaîne est-il scindable ?
Fréquemment, l’accident en chaîne présente plusieurs phases : un groupe de véhicules entrés en collision forme un obstacle causant un nouvel accident à partir d’un véhicule arrivé sur les lieux mais ayant su s’arrêter. La justice considère généralement qu’il s’agit d’un accident unique, qualifié de « complexe », la seconde collision étant la suite de la première.
Ainsi, sur une route nationale, une voiture percute un chien en divagation et s’immobilise. Derrière elle, un autre usager parvient à s’arrêter mais il est heurté par un scooter sur lequel le conducteur et sa passagère sont blessés. Les magistrats écartent la prétention de l’assureur de responsabilité du propriétaire du chien qui considérait qu’il y avait deux accidents distincts, ce qui l’affranchissait d’avoir à participer à l’indemnisation des deux blessés, sa responsabilité se bornant alors aux dommages à la voiture ayant percuté l’animal (art. 1385 Code civil).
Les juges relèvent que le choc avec le chien était la cause première de l’accident impliquant la moto et qu’en conséquence, il fallait considérer un seul accident dont ils partageaient la responsabilité à 50 % entre le propriétaire du chien et le conducteur du scooter pour défaut de maîtrise (CA Bastia, 2 décembre 2015, n° 14/00512).
L’application de l’IRSA conduit à distinguer deux accidents : le choc avec le chien qui relève du droit commun puisqu’il n’y a qu’une voiture impliquée, la collision entre la moto et la seconde voiture qui était parvenue à s’arrêter et donc n’avait commis aucune faute. Le deux-roues est alors responsable à 100 % (cas 10 du barème).
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