
Si certaines entreprises ont déjà largement engagé l’électrification de leurs flottes comme Orange, La Poste, Enedis ou Chronopost, jouant le rôle de précurseurs, les autres passent aussi à l’électrique… Et souvent très rapidement. « Nous intégrons désormais de nouveaux clients qui ont d’emblée une démarche ambitieuse », note Katia Lehnert, chef de projet mobilité responsable chez le fleeter Fatec Group. Ce qui justifie le bond de 84 % de l’électrification lors des cinq premiers mois de l’année, selon les derniers chiffres du marché des véhicules d’entreprise de l’Arval Mobility Observatory.
Ce boom s’explique aussi par « l’accélération...
Si certaines entreprises ont déjà largement engagé l’électrification de leurs flottes comme Orange, La Poste, Enedis ou Chronopost, jouant le rôle de précurseurs, les autres passent aussi à l’électrique… Et souvent très rapidement. « Nous intégrons désormais de nouveaux clients qui ont d’emblée une démarche ambitieuse », note Katia Lehnert, chef de projet mobilité responsable chez le fleeter Fatec Group. Ce qui justifie le bond de 84 % de l’électrification lors des cinq premiers mois de l’année, selon les derniers chiffres du marché des véhicules d’entreprise de l’Arval Mobility Observatory.
Ce boom s’explique aussi par « l’accélération des livraisons depuis six mois, alors qu’auparavant, il fallait parfois attendre un an pour recevoir son véhicule électrique », souligne Éric Place, directeur général de l’installateur de bornes ZEborne, en notant « un rythme très soutenu depuis le début de l’année avec de plus en plus de moyennes et petites flottes. » Arval constate pour sa part une généralisation de l’accélération et « un taux de pénétration important sur tous les segments ». « Certes, la conduite à mener est plus complexe pour une grande entreprise qui doit modifier sa stratégie, installer des bornes de recharge dans plusieurs sites, voire reconfigurer ses parkings. C’est plus long mais cela représente de gros volumes, avec souvent des objectifs RSE ambitieux », souligne Margy Demazy, directrice commerciale d’Arval France.
Entre réglementation…
Le parc de ce loueur est désormais électrifié à plus d’un tiers et, en 2022, les véhicules 100 % électriques en représentaient 9 %, « un chiffre désormais supérieur avec l’accélération enregistrée début 2023 », affirme Margy Demazy. Son concurrent Alphabet compte de son côté 24 % d’électriques et de PHEV dans les renouvellements et revendique également « une croissance forte », indique Julien Chabbal, directeur des ventes et marketing de ce loueur.
« Des réglementations comme la loi d’orientation des mobilités (LOM), avec des quotas de renouvellement en véhicules à faibles émissions (VFE, les émissions à l’échappement ne dépassent pas 50 g de CO2/km, NDLR), ou encore l’arrivée progressive des ZFE (zones à faibles émissions-mobilité) incitent nos clients à électrifier leur parc », souligne Pierre Marneffe, CEO et fondateur de Mob Box, spécialiste de l’accompagnement à la transition énergétique.
Mais la plupart des flottes visent aussi des objectifs de décarbonation et de baisse des émissions. « Les directions des entreprises sont de plus en plus conscientes des enjeux, et l’électrification progresse très rapidement quand celles-ci s’engagent », note Gilles Bellemere, directeur général de la nouvelle entité ALD Automotive/LeasePlan France. Exemple avec Acorus, groupe spécialiste de la rénovation, qui flirtera avec les 20 % d’électriques en parc fin 2023 : le président de l’entreprise n’a ainsi pas hésité à changer sa Lexus hybride pour une Zoé dès 2017. Et, en 2020, sept membres du comex sur neuf sont passés à l’électrique. À ce jour, le parc d’Acorus comporte 1 200 véhicules dont 110 électriques, 238 hybrides et cinq PHEV. Le groupe cible les 200 véhicules électriques à fin 2023.
… et exemplarité
« Souvent, la démarche de verdissement du parc émane de la direction, notamment dans les grosses structures soumises à la réalisation de bilans carbone et de plans de mobilité », confirme Katia Lehnert, pour Fatec. « L’électrification est aussi un élément de motivation pour attirer certains salariés », note Julien Chabbal chez Alphabet. Côté collectivités, la volonté d’être exemplaire et de suivre la stratégie politique nationale reste un moteur fort.
Autre facteur qui entre en jeu : « Les loueurs et les constructeurs ont chacun intérêt à favoriser le véhicule électrique », rappelle Régis Masera, directeur de l’Arval Mobility Observatory et Consulting France chez Arval. Concernant les premiers, ajoute-t-il, « ils cherchent à minimiser les risques lors de la revente et donc à mixer les énergies, ce qui nécessite de faire entrer une part non négligeable de véhicules électriques ». Quant aux constructeurs, la réglementation européenne les oblige notamment à ne pas dépasser un seuil d’émission moyen de CO2 pour les nouvelles immatriculations, fixé à 95 g. Enfin, « l’arrêt du diesel prévu pour 2030 et des véhicules thermiques en 2035 nécessite d’anticiper et d’avancer », affirme Régis Masera.
Sur le segment des VUL en particulier, l’électrification s’accélère fortement, et paradoxalement, du fait d’un certain retard. « Il y a une vraie percée et c’est nouveau, en lien avec un TCO qui devient plus favorable, notamment pour les petits VUL », souligne Margy Demazy, chez Arval.
VUL : une forte accélération…

D’ailleurs, certaines entreprises ont décidé d’électrifier la quasi-totalité de leurs VUL. C’est le cas de Carglass dont la flotte compte 400 VUL et 175 VP. « Avec l’électrification, nous sommes sûrs de ne pas être bloqués par l’entrée en vigueur des ZFE, appuie Mourad Fellah, responsable du parc automobile de Carglass. Mais ce n’est pas notre seule incitation à passer à l’électrique. Nous avons pour ambition de réduire de 50 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la flotte entre 2021 et 2025 et de 75 % à l’horizon 2030. Nous allons même diminuer de 95 % les GES de nos 400 VUL en passant la quasi-totalité à l’électrique. » À noter que Carglass comptait au début électrifier uniquement les VUL qui roulent en ZFE. « Mais la direction a décidé d’aller plus loin après avoir constaté, grâce à la télématique embarquée qui équipe tous les VU, que 96,8 % des trajets sont compatibles avec une seule recharge, précise Mourad Fellah. Nous ne transportons pas de charges trop lourdes et l’aménagement reste assez simple, ce qui ne nous fait pas trop perdre en autonomie. »
Cependant, des freins subsistent, à commencer par le prix des fourgons. « En dessous d’une loi de roulage de 100 000 km, le surcoût tarifaire du véhicule n’est pas compensé par les gains en énergie. Et l’effet fiscalité joue moins que pour les VP », commente Régis Masera, de l’Arval Mobility Observatory. D’où une part de marché de l’électrique sur le segment VUL encore faible, de 8 % contre 11,6 % pour les VP.
… bridée par les prix…
Par ailleurs, « de nombreux VUL ne sont pas en LLD mais en acquisition et les clients les gardent assez longtemps. Ils sont alors réticents à en changer prématurément pour des électriques, d’autant que les aménagements spéciaux à l’intérieur sont toujours très onéreux », avance Carla Passarelli, directrice de clientèle chez Fatec Group.

Pierre-Thomas Blaise, directeur du parc matériel de la métropole de Bordeaux, assure « regarder en priorité l’électrique dès que nous lançons un marché public ». « Côté VUL, nous avons intégré les Kangoo Z.E. et les Nissan e-NV200, détaille ce directeur. En revanche, l’offre reste faible avec les fourgons. Le Trafic par exemple demeure très cher alors qu’il ne dépasse pas les 80 km d’autonomie. » Toujours est-il que le parc de la métropole de Bordeaux se constitue à environ 20 % d’électriques, à la fois pour les VP et les VUL. « Et nous dépassons les quotas de la LOM en termes de renouvellement, se félicite Pierre-Thomas Blaise. Nous avons commencé à tester les premiers modèles il y a quinze ans. Au début, nous avons remplacé les petits camions bennes thermiques par des Goupil. Pour les parcs et jardins, c’est une vraie alternative avec des véhicules adaptés aux besoins et avec des coûts d’entretien réduits. Ensuite, nous avons lancé l’électrification avec les VP et les autres VUL. Avec les VP, l’autonomie n’est plus un frein et nous dépassons les 300 km pour les dernières Zoé qui composent désormais l’essentiel de notre parc de VP électriques. »
… et les autonomies insuffisantes
Si les autonomies des VP ne semblent plus inquiéter, on ne peut pas en dire autant des VU. « Tant que les VU n’auront pas une autonomie de 300 à 400 km, les électrifier sera difficile, estime Gilles Bellemere, d’ALD Automotive/LeasePlan France. Actuellement, passer des VUL à l’électrique implique de modifier l’organisation du travail car ces véhicules ne peuvent pas facilement bénéficier de recharges d’appoint durant la journée comme des VP. » « Si l’on augmente la charge, ces VU perdent en autonomie et dès que l’on met une grosse batterie pour augmenter l’autonomie, on perd en charge utile », souligne quant à lui Régis Masera pour Arval.
Le VUL constitue d’ailleurs la première problématique pour les collectivités, comme le rapporte Guillaume Cerdan, responsable du parc de la métropole lyonnaise. « Nous avons 299 camionnettes et 276 fourgons, indique Guillaume Cerdan. Quelques camionnettes et deux fourgons sont déjà passés à l’électrique. Le principal frein concerne le tractage de remorques. Pour l’instant, nous mettons nos quelques VUL électriques dans les secteurs adaptés à leur autonomie. Mais quand il s’agira de généraliser l’électrique, les autonomies et les temps de recharge vont poser problème. Il faudra donc adapter l’organisation interne des services pour prendre en compte la recharge en journée car ces VU font souvent les 2X8. À part l’ID.Buzz de Volkswagen qui annonce 300 km, l’autonomie est insuffisante avec les autres modèles, comme le Berlingo, le Kangoo ou le Master. Nous disposons par ailleurs de deux VUL avec prolongateur d’hydrogène, mais il y a une seule station dans la région et elle est en panne. Ils roulent donc sans prolongateur d’autonomie. »
Enfin, en plus de la question des autonomies, Guillaume Cerdan se trouve lui aussi confronté au casse-tête des prix, et donc du TCO. « Un fourgon électrique coûte deux à trois fois plus cher que l’équivalent thermique, soit environ 45 000 euros contre 20 000, chiffre ce responsable. Nous étudions la solution du rétrofit et nous allons la tester avec deux Trafic cette année. »
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