

C’est le quotidien du métier mais aussi l’envers de son décor : les tâches d’un gestionnaire de parc sont multiples. Véritable touche-à-tout, ce spécialiste se retrouve devant une montagne de micro-tâches. Les sollicitations, très chronophages, viennent de la hiérarchie qui a besoin d’un tableau de bord, des collaborateurs qui veulent changer un pneu, ou encore des fournisseurs qui tentent de vendre leurs produits.
« Cela nécessite d’être hyper réactif, souligne Dominique Rolland, responsable des 400 véhicules de la flotte de Nokia. Sinon, on est vite débordé et on prend un retard qui va ensuite...

C’est le quotidien du métier mais aussi l’envers de son décor : les tâches d’un gestionnaire de parc sont multiples. Véritable touche-à-tout, ce spécialiste se retrouve devant une montagne de micro-tâches. Les sollicitations, très chronophages, viennent de la hiérarchie qui a besoin d’un tableau de bord, des collaborateurs qui veulent changer un pneu, ou encore des fournisseurs qui tentent de vendre leurs produits.
« Cela nécessite d’être hyper réactif, souligne Dominique Rolland, responsable des 400 véhicules de la flotte de Nokia. Sinon, on est vite débordé et on prend un retard qui va ensuite s’accumuler. Bref, quand un problème arrive, il faut le traiter rapidement et, tout au moins, engager immédiatement une action corrective. »
Le poids des petites tâches
Un état de fait qui suppose de mettre en place une méthode. « Les gestionnaires de parc sont tous débordés car assaillis de petite tâches. Il y un sentiment d’urgence permanent. Pour contrer cela, il faut automatiser et standardiser les modes opératoires à outrance », avance Philippe Crassous. Directeur matériel pour le collecteur de déchets Sepur, ce dernier gère un parc de 1 500 véhicules dont près de 1 100 camions.

Pour un meilleur travail des gestionnaire de flotte, le formateur Xavier Delengaigne préconise la technique de gestion du temps appelée GTD ou Getting Things Done. « Ce procédé consiste à regrouper les tâches similaires pour les réaliser en même temps. Le cerveau n’est pas multitâche. Regrouper les e-mails pour les traiter à une heure donnée fait gagner beaucoup de temps », expose Xavier Delengaigne, par ailleurs auteur de 101 astuces pour mieux s’organiser : Mind mapping, ToDo list, GTD, tous les outils de ceux qui gagnent du temps ! (Éditions Eyrolles, 2014).
Cette démarche conduit donc à programmer sa semaine et lister des travaux pour le lundi, pour le mardi, etc. Il s’agira, en fin de semaine, en fin de mois et en fin d’année, de mesurer comment et pourquoi la méthode a fonctionné ou dysfonctionné. Ce qui amène à intégrer un cercle vertueux d’amélioration continue. Pour aller plus loin, l’inventeur de la méthode, David Allen, a concentré ses idées dans son ouvrage S’organiser pour réussir : Getting Things Done (Éditions Alisio, 2015). Ces techniques contribuent à éviter l’emballement du système. Mais comment faire quand les soucis s’accumulent et que toutes les demandes deviennent importantes ?
Construire une car policy
Pour gérer au mieux son temps, la recommandation première vise à circonscrire les problèmes et à les anticiper. C’est la partie stratégique du métier. « Dans cet objectif, l’élément essentiel est la construction d’une car policy, conseille Maxime Sartorius, président du fleeteur Direct Fleet. Avant de se lancer dans l’action, un bon gestionnaire de parc doit bâtir une organisation expliquant à chacun les règles du jeu. »
On précise alors quel véhicule correspond à quel salarié, quelles règles sont à suivre. Au départ, la création de cette car policy prend un à deux mois car il faut « décortiquer » l’ensemble du mode de fonctionnement de la flotte. Et il est aussi indispensable de discuter et d’obtenir l’accord de la direction générale, de la direction administrative et financière et, enfin, des ressources humaines.
Pour bien faire, le mieux reste de décrire, noir sur blanc, l’ensemble des processus : comment se passent la gestion du parc, le déroulement d’une commande, qui la signe, quel document est nécessaire lors de la livraison d’une voiture, comment commande-t-on un pneu.
Formaliser les règles par écrit
« En général, poursuit Maxime Sartorius, le monde des gestionnaires de flotte fournit peu d’écrits. Pourtant, se pencher de très près sur ces divers processus aide à les optimiser et donc à gagner du temps. »
Par la suite, en régime de croisière, cette politique flotte est à amender tous les ans. Elle doit aussi être complétée par une charte du conducteur et un guide du conducteur à mettre à disposition des collaborateurs, par exemple sur un intranet.
La charte du conducteur définit ce qui est interdit, ce qui est possible, ce qui est autorisé. Ainsi, la charte autorisera le conjoint ou l’enfant d’un salarié à conduire une voiture de service. Sous forme de réponses aux questions les plus courantes, le guide du conducteur donne, lui, des indications précises. Ce qui va éviter au gestionnaire de parc d’être sans arrêt interrompu par un salarié en recherche d’un garage, d’une assurance, d’un spécialiste du bris de glace ou d’une précision sur une amende à payer. Entre une car policy rigoureuse et une absence de politique flotte, on passera, pour livrer un véhicule à un collaborateur, de cinq minutes à trois heures si les règles sont peu claires et la négociation d’un véhicule possible.
Définir clairement les processus
« Une car policy contraignante et directive évite de perdre du temps. S’il est prévu un seul véhicule par type de collaborateur, le choix prendra cinq minutes. Si le salarié peut opter entre trois fournisseurs et six modèles, cela demande 18 devis et au moins six interactions avec le collaborateur. La méconnaissance de ces coûts invisibles par le management provoque des décisions non éclairées qui font perdre beaucoup de temps… et d’argent », confirme Robert Maubé, consultant et formateur spécialiste en gestion de flottes automobiles pour le cabinet RRMC.
La deuxième grande activité du gestionnaire de parc reste la gestion technique. Ce qui suppose de réserver des véhicules, d’en donner les clés et d’en effectuer l’entretien, d’assurer le lien avec les loueurs ou, si le parc est possédé en propre, de revendre les voitures. La gestion de flotte se constitue en effet de « mini-moments », d’une multitude de petites tâches journalières que l’on a vite fait d’oublier.
Suivre de près les véhicules

« J’ai trois impératifs principaux : le reporting des relevés kilométriques, le relevé des sinistres et les analyses de consommation pour mesurer les écarts et les éventuelles surconsommations. Ensuite, mais c’est moins important, je traite les amendes et les remets aux contrevenants concernés », relate Mohamed Amrane, responsable des 230 véhicules et de la supply chain pour Château d’Eau, un distributeur de fontaines à eau auprès des entreprises. Pour se faire épauler, Mohamed Amrane fait appel aux services d’un loueur et à un logiciel de gestion de flotte. Cet outil émet une alerte sur les surconsommations de carburant, les problèmes d’assurance, les sinistres. « En un clic, je visualise l’ensemble des reportings, je sais qui emploie telle ou telle carte, et nous évitons les dérives », ajoute-t-il.
Pour ces travaux répétitifs et méticuleux, les outils de gestion se montrent des aides efficaces. Ils éditent des « to do list » pour savoir dès le matin ce que l’on a à faire : renouvellements, restitutions, commandes, listes de rappel, etc.
« Je conseille de s’équiper d’un de ces logiciels lorsque sa flotte dépasse les 100 véhicules, note Robert Maubé pour le cabinet RRMC. Mais attention : l’outil ne fait pas l’expert, il faut se former pour en tirer tout le parti. » Ce qui signifie que le gestionnaire doit être moteur dans l’utilisation de ces services informatiques. Trop de gestionnaires, à qui l’on a imposé sans trop d’explications ces outils, s’en servent a minima… Ces aides peuvent pourtant faire gagner un temps précieux (voir aussi notre article).
Maîtriser la partie administrative
Vient enfin la partie administrative, la plus chronophage : il va s’agir de formaliser des demandes, ou de gérer les contacts avec les loueurs ou les constructeurs. Une tâche longue et complexe. « Un travail de fourmi que l’on commence à automatiser grâce aux outils informatiques, les “big data“, et avec l’aide des loueurs. On est alors très proche d’un métier de gestionnaire de bases de données ou de la logistique », commente Philippe Crassous pour Sepur.
Illustration : un responsable de parc basé à Marseille, dont l’un des collaborateurs a besoin d’une voiture à Lille, devra organiser la livraison du véhicule dans le Nord de la France, faire venir la carte grise, l’assurance, la carte carburant, le badge pour les péages ou l’abonnement pneus. Il faut alors tout synchroniser… Il est aussi impératif de contrôler la facturation mensuelle, les différents litiges, la renégociation de certains contrats et la restitution, voire même la revente de la voiture. Sans oublier la gestion des amendes qui prend beaucoup de temps alors qu’en moyenne un véhicule reçoit 2,5 contraventions par an. Pour faire face, « à ce stade, deux points sont importants, explique Hervé Coudière, coach et directeur de la société de conseil Hommes et Coopération.
Avant tout, se garder du temps
Le premier est de prévoir des temps d’indisponibilité d’environ 20 % de son temps de travail, une plage consacrée aux tâches importantes qui demandent de la concentration. On ne répond alors ni au téléphone ni aux e-mails. »

« Le second point est de communiquer sur cette pratique. L’entreprise, les dirigeants, les collaborateurs et les prestataires doivent savoir quel est le temps de réactivité du gestionnaire de flotte, les moments où il ne faut pas le déranger », reprend Hervé Coudière, également auteur de l’ouvrage Gestion du temps pour managers et professionnels débordés (Gereso Édition, mai 2018). Bref, il faut éduquer son environnement pour faire en sorte que tout se fasse de façon fluide.
« Ces moments de concentration sont à réserver au matin, complète Pascale Bélorgey, formatrice à la Cegos et auteure de La boîte à outils de la gestion du temps. 72 outils et méthodes (Dunod, mars 2018). Pour la chronobiologie, les horaires de pleine concentration débutent à 9 h 00 pour se terminer vers 11 h 00 ou 12 h 00. Un dossier complexe est donc à traiter pendant ce laps de temps, en prenant soin de le préparer le soir pour que ce moment le plus productif soit exploité pleinement. »
Sur ce sujet de l’organisation du temps de travail, Hervé Coudière suggère la répartition suivante : « 20 % du temps du gestionnaire de flotte doit être consacré aux tâches importantes. 20 % doit être destiné aux imprévus, 10 % à la planification et 50 % aux travaux planifiés donc non urgents », énumère-t-il (voir aussi notre article sur la matrice d’Eisenhower).
Dans ce cadre, de nombreux intermédiaires comme les loueurs peuvent faire gagner du temps. « Entre un véhicule acheté et loué, le temps économisé en travaillant avec un loueur est de l’ordre de 20 % », évalue Robert Maubé pour le cabinet RRMC.
Savoir déléguer
« C’est difficile à quantifier mais j’estime pour ma part que le gain de temps généré par le recours à un loueur est de 40 à 50 %. En outre, la LLD permet aux gestionnaires de flotte de mieux s’organiser, d’externaliser une fonction qu’ils n’ont pas besoin d’internaliser, et de se concentrer sur leur vraie valeur ajoutée : la stratégie, l’analyse financière globale de leur parc », conclut Olivier Monot, président du SNLVLD, le syndicat des loueurs, qui défend son activité (voir aussi notre article). À bon entendeur…
Dossier - Gestionnaire de flotte : comment mieux gérer son temps
- Gestionnaire de flotte : comment mieux gérer son temps
- La LLD pour gagner du temps ?
- Une matrice pour gérer son temps
- Des outils pour gagner du temps ?