
L’hybride et surtout l’hybride rechargeable (PHEV) ont le vent en poupe. « Globalement, en France, 20 000 véhicules PHEV ont été immatriculés en 2019 et ce chiffre est passé à 75 000 en 2020, en grande partie grâce à l’accroissement du nombre de modèles. De plus, le PHEV n’est plus uniquement réservé aux véhicules très haut de gamme », expose Laurent Pichon, consultant senior en charge de la mobilité électrique chez LeasePlan.
« Entre octobre 2019 et octobre 2020, le nombre de nouveaux modèles hybrides est passé de 30 à 56, confirme Julien Chabbal, directeur ventes et marketing d’Alphabet. Les constructeurs mettent les bouchées doubles,...
L’hybride et surtout l’hybride rechargeable (PHEV) ont le vent en poupe. « Globalement, en France, 20 000 véhicules PHEV ont été immatriculés en 2019 et ce chiffre est passé à 75 000 en 2020, en grande partie grâce à l’accroissement du nombre de modèles. De plus, le PHEV n’est plus uniquement réservé aux véhicules très haut de gamme », expose Laurent Pichon, consultant senior en charge de la mobilité électrique chez LeasePlan.
« Entre octobre 2019 et octobre 2020, le nombre de nouveaux modèles hybrides est passé de 30 à 56, confirme Julien Chabbal, directeur ventes et marketing d’Alphabet. Les constructeurs mettent les bouchées doubles, entre autres sous l’effet des contraintes de la réglementation européenne CAFE qui limite à 95 g/km le taux moyen de CO2 émis par les VP neufs vendus par les constructeurs depuis le 1er janvier 2020. »
Le véhicule hybride s’impose
Un boom qui ne va pas sans conséquences pour les acteurs de la LLD. « La part de l’hybride simple dans les nouvelles immatriculations des loueurs est passée de 3,9 % à 8,8 % de fin février 2020 à février 2021. Pour le PHEV et l’électrique, ce chiffre est passé de 6,75 % à 11 % », ajoute Julien Chabbal. « En 2020, 15 % de nos commandes portaient sur des hybrides simples. Début 2021, nous sommes à 18 %. La croissance est encore plus forte pour le PHEV qui représente 21 % des commandes contre 15 % auparavant. Avec l’électrique, nous en sommes à environ 3 % contre 2 % en moyenne en 2020 », complète Guillaume Maureau, directeur général adjoint d’ALD Automotive France.
Les raisons de cette envolée sont nombreuses. Tout d’abord, la loi d’orientation des mobilités (LOM) stipule qu’au moins 10 % des renouvellements dans les flottes d’entreprise devront porter sur des véhicules à faibles émissions (VFE, moins de 60 g/km de CO2) à partir de 2022, puis 20 % en 2024, 30 % en 2027 et 50 % en 2030. « C’est un véritable accélérateur, tout comme la réglementation CAFE », souligne Cyril Châtelet, directeur commercial et marketing de LeasePlan.
L’obligation de réaliser 10 % des renouvellements en VFE « est un enjeu important. Il y aura des amendes pour les entreprises qui ne seront pas dans les clous mais les montants n’ont pas encore été communiqués. Par précaution, les gestionnaires de flotte font évoluer les car policies », valide Bertrand Goudard, directeur de la gestion et du service client pour le fleeteur Direct Fleet.
Fiscalité et réglementation
Autre contrainte : la création de zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m). « À Paris, on prévoit de premières exclusions en 2024 bien que rien ne soit encore arrêté. Les responsables de parc doivent donc s’y préparer dès maintenant car les contrats courent sur trois à quatre ans. Les nouveaux modèles essence et les PHEV (Crit’Air 1 pour les deux) devraient continuer à pouvoir rouler, à l’opposé des diesel », reprend Bertrand Goudard.
« Par ailleurs, des groupes se fixent des objectifs ambitieux en matière de CO2, note Guillaume Maureau pour ALD Automotive. Enfin, les collaborateurs poussent aussi dans ce sens. Ils sont toujours plus demandeurs d’énergie propre et veulent participer à ce mouvement de réduction des émissions. »
LeasePlan note pareillement cette évolution chez les conducteurs et la montée en flèche des avis favorables à la conduite en électrique et en hybride. « Un nombre record de 65 % des personnes interrogées déclarent à présent une opinion favorable sur la conduite électrique zéro émission », selon son dernier Rapport Mobility Insights sur 5 000 conducteurs dans 22 pays. « Et cela se vérifie quel que soit l’âge de la personne interrogée », précise Cyril Châtelet.
Mais cet engouement pour l’hybride va-t-il durer ? Sepur est déjà passé au 100 % électrique pour ses 183 véhicules de service et au PHEV pour ses 60 véhicules de fonction (18 électriques et 42 PHEV). Et ce spécialiste de la gestion des déchets et de la propreté urbaine se lance dans la phase suivante.
Le PHEV, motorisation de transition ?
« Le tout-électrique sera effectif également pour les véhicules de fonction en fin d’année avec le renouvellement de notre flotte qui arrive en fin de contrat. Le message adressé aux collaborateurs est clair : tous les renouvellements se font désormais en électrique, indique Philippe Crassous, directeur matériel et achats de Sepur, à la tête de 1 690 véhicules. C’est d’autant plus réalisable que nous sommes passés de 150 km d’autonomie à plus de 300 km et que les technologies pour les bornes et les batteries sont éprouvées » (voir le témoignage).
« Le PHEV représente une étape indispensable pour accélérer l’électrification des flottes, estime Guillaume Maureau pour ALD. Cela permet aussi aux collaborateurs de tester, d’appréhender de nouveaux comportements, avant de passer au tout-électrique. La croissance du 100 % électrique va se poursuivre, notamment avec les autonomies de véhicules comme le Kia e-Niro qui affiche 500 km, un chiffre supérieur à celui de bon nombre de thermiques essence. » Un avis partagé par Bertrand Goudard de Direct Fleet : « Quand les autonomies des véhicules électriques passeront à 700-1 000 km, les flottes se mettront majoritairement à cette solution. L’hybride se veut une transition vers l’électrique, puis ultérieurement vers l’hydrogène. »
Des freins au tout-électrique
Pour Cyril Châtelet de LeasePlan, « tout va dépendre de la volonté du gouvernement de privilégier l’électrique et de la maturité des réseaux de recharge. » Car le passage plus ou moins rapide vers l’électrique dépend de trois freins qui perdurent : « Le prix du véhicule électrique au départ, l’autonomie et les inquiétudes sur les possibilités de recharge », poursuit-il. « D’ici trois à cinq ans, les stations de recharge devraient se multiplier. Une fois le réseau devenu plus fiable, l’intérêt pour le PHEV sera sûrement revu à la baisse par rapport à l’électrique », prévoit Laurent Pichon, toujours pour LeasePlan.
« Mais tant que l’électrique n’affichera pas une autonomie proche des 1 000 km, il ne répondra pas à certains usages, nuance Julien Chabbal pour Alphabet. Les cycles de transition se succèdent : le diesel recule fortement au profit de l’essence et surtout de l’hybride qui a bondi. L’hybride devrait prendre sa place pendant un laps de temps, et quand les planètes seront alignées en faveur de l’électrique comme maintenant pour l’hybride, cette motorisation prendra sa part du marché », conclut-il.
Mais d’autres estiment que l’hybride a encore (quelques) beaux jours devant lui : « Il restera dans la car policy mais plusieurs offres comme l’hydrogène viendront à plus long terme compléter cette motorisation. Ce sont les usages qui définiront le choix du véhicule », avance Catherine Berthier, mobility manager chez Assystem, qui intègre depuis avril 2020 des hybrides simples, des PHEV et des modèles électriques dans sa car policy. Ce spécialiste de l’ingénierie et du conseil en innovation compte en parc 1 100 véhicules dont 10 % d’hybrides (voir le témoignage).
La recharge, nerf de la guerre
On s’en doute, la rapidité de cette transition dépend avant tout de la qualité des infrastructures de recharge. « Quand les infrastructures auront progressé, il sera plus facile d’accélérer le développement du 100 % électrique grâce à la multiplication des possibilités de recharge à domicile et sur le lieu de travail », souligne Guillaume Maureau pour ALD. « En revanche, pour les PHEV, l’infrastructure est moins coûteuse. La vitesse de recharge étant bridée, il ne sert à rien d’avoir des bornes rapides », rappelle Laurent Pichon pour LeasePlan.
Pour favoriser l’électrification, la mise en place des infrastructures, y compris parfois aux domiciles des collaborateurs, reste donc essentielle. C’est l’option choisie par Yves Rocher pour ses 380 véhicules dont 50 % de PHEV à fin 2020. Sur ses sites, ce spécialiste des cosmétiques a installé de nombreuses bornes. Il passe aussi par le prestataire Zeplug pour installer des bornes au domicile des collaborateurs et rembourse l’électricité consommée afin de maximiser le nombre de kilomètres en électrique. Une dépense compensée par le recul des consommations de carburant (voir Flottes Automobiles n° 264).
Pour Assystem, l’infrastructure constitue une question importante. « Tout d’abord, nous devons fournir des points de recharge dans l’ensemble des sites, explique Catherine Berthier. Ce qui est déjà le cas dans nos principaux sites avec une à deux bornes existantes. Nous devons aussi communiquer sur l’importance de recharger quotidiennement, au travers de newsletters ou encore de flashs. Nous commandons aussi d’emblée des câbles de recharge pour les PHEV car tous les constructeurs n’en fournissent pas. Enfin, avec la carte Total multi-énergies, nous saurons qui recharge et qui oublie de le faire », expose cette responsable.
Pour ceux qui ne disposent pas encore des infrastructures nécessaires, l’hybride non rechargeable peut être un bon compromis avant de passer au PHEV ou à l’électrique. D’autant que la micro-hybridation se diffuse largement sur le marché, avec des émissions inférieures à 120 g et à la clé une exonération de TVS sur trois ans.
Une question d’usages
Comme pour le diesel ou l’essence, l’hybride et le PHEV répondent à des usages différents. « Avant, quasiment tous les conducteurs roulaient en diesel sur la base de 36 mois/90 000 km. Ce n’est plus vrai aujourd’hui et il faut choisir la bonne énergie en fonction de l’usage, recommande Cyril Châtelet pour LeasePlan. Ainsi, une camionnette qui fait des tournées récurrentes avec un kilométrage relativement restreint peut passer à l’électrique. Mais un gros rouleur restera sur du diesel. Sous les 20 000, voire 25 000 km par an, et à condition de ne pas dépasser les 50-70 km au quotidien, le PHEV est adapté, l’hybride restant plutôt réservé pour des trajets urbains à petite vitesse », détaille ce responsable.
Pour Alphabet, Julien Chabbal met la barre de l’éligibilité du PHEV et de l’hybride sous les 18 000 à 20 000 km par an, pour des trajets quotidiens d’environ 30 km, « ce qui répond déjà à une grande partie des déplacements. Selon les usages quotidiens, sous les 12 000 km par an, les collaborateurs peuvent être aussi éligibles à l’électrique », poursuit-il.
« L’hybride est plutôt positionné sur les petits segments (A à C), tandis que le PHEV se retrouve surtout dans les segments du haut de gamme, des SUV, etc., du fait du prix de ces véhicules qui intègrent une double motorisation, observe Guillaume Maureau pour ALD. L’hybride simple est adapté pour ceux qui roulent moins de 15 000 à 20 000 km avec des rayons d’action limités au quotidien. C’est le véhicule idéal pour les soins ou l’aide à domicile, pour le monde associatif. Le PHEV se destine plutôt à des cadres et des professions libérales qui ne dépassent pas l’autonomie électrique d’un PHEV en moyenne, mais partent en week-end, en vacances », ajoute Guillaume Maureau.
Sélectionner les conducteurs
Bien cibler les collaborateurs éligibles demande aux gestionnaires de parc un important travail d’analyse et de diagnostic. « La télématique embarquée est un plus pour repérer ces collaborateurs et s’assurer qu’ils ont pris les bonnes habitudes de conduite. Le loueur a aussi un rôle d’accompagnement à jouer », affirme Laurent Pichon pour LeasePlan.
« Il est important de construire un questionnaire détaillé pour connaître les usages des collaborateurs, préconise de son côté Julien Chabbal pour Alphabet. Combien de kilomètres parcourent-ils par an, par jour ? Sur des trajets urbains ou semi urbains ? Font-ils régulièrement de longs trajets ? Ont-ils une possibilité de recharge à domicile ?, etc. »
Cette démarche a été menée au sein de Metro France. Ce grossiste en produits alimentaires et en équipements possède déjà six PHEV et un hybride simple parmi ses 900 véhicules, et souhaite en intégrer d’autres dans le cadre d’un appel d’offres en cours. « Pour développer le PHEV, nous avons lancé une enquête auprès des collaborateurs pour connaître leurs usages », relate Mélaine Pouchain, responsable mobilité de déplacement et environnement de travail. Qui rappelle avoir mis un véhicule PHEV dans la flotte d’autopartage de l’entreprise. « Cet essai n’a pas été concluant. L’autopartage concerne plutôt de petits trajets. Dans ce contexte, le PHEV n’a pas sa place », conclut-elle (voir le témoignage). Un exemple à suivre.
Dossier - Hybrides rechargeables : des véhicules de transition ?
- Hybrides rechargeables : des véhicules de transition ?
- Philippe Crassous, Sepur : « Le PHEV, transition vers le tout-électrique »
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