Prévue le 15 octobre 2020, l’édition lyonnaise des Rencontres Flotauto a dû être reportée. Parmi les conférences programmées, voici l’essentiel du contenu de celle sur l’intégration de véhicules électrifiées dans les flottes.
« Depuis le passage au WLTP en mars, nous observons une envolée des locations d’hybrides rechargeables essence et diesel qui représentent quasiment 20 % de notre portefeuille de commandes », constate d’emblée Gérard de Chalonge, directeur commercial et marketing du loueur Athlon. De même, la filiale d’EDF spécialiste de la recharge Izivia est sollicitée par des clients historiques qui accroissent la taille de leur parc...
Prévue le 15 octobre 2020, l’édition lyonnaise des Rencontres Flotauto a dû être reportée. Parmi les conférences programmées, voici l’essentiel du contenu de celle sur l’intégration de véhicules électrifiées dans les flottes.
« Depuis le passage au WLTP en mars, nous observons une envolée des locations d’hybrides rechargeables essence et diesel qui représentent quasiment 20 % de notre portefeuille de commandes », constate d’emblée Gérard de Chalonge, directeur commercial et marketing du loueur Athlon. De même, la filiale d’EDF spécialiste de la recharge Izivia est sollicitée par des clients historiques qui accroissent la taille de leur parc électrifié, et par de nouvelles flottes.
« Au-delà de la réduction de l’empreinte carbone du parc dans une démarche RSE et de l’enjeu économique, l’objectif est de respecter la loi, qu’il s’agisse de la circulation dans une ZFE ou des quotas définis par la LOM », pointe Pauline Bovyn, directrice marketing, mobilité et nouvelles énergies chez Total Mobility.
Les flottes se mettent au vert
Le Groupe ABB, spécialiste des technologies de l’électrification, de l’automatisation, de la robotique et de la digitalisation, verdit depuis 2019 son parc de 500 véhicules, principalement de fonction. « Nous avons fait évoluer le catalogue avec 30 % de modèles électriques ou hybrides rechargeables sur les douze proposés pour chaque catégorie de conducteurs », relate Lucie Roiron, business partner en charge de la gestion du parc. Aujourd’hui, les commandes de véhicules électrifiées arrivent de manière régulière, majoritairement en hybride rechargeable, mais aussi pour des Tesla sur la plus haute catégorie. « Nos collaborateurs sont satisfaits de respecter un engagement de développement durable personnel et d’avoir un bel outil de travail », se félicite Lucie Roiron.

« La direction doit suivre et soutenir le projet afin qu’il n’y ait pas de débat continu sur le “pourquoi” mais plutôt sur le “comment”. Et il faut mener ce changement en parfaite adéquation avec la culture de l’entreprise. »
Lucie Roiron, business partner en charge de la gestion du parc, Groupe ABB
Autre catégorie d’entreprise : la SARL clermontoise Les Colis Verts a été créée il y a deux ans et demi pour assurer le dernier kilomètre en véhicule décarboné. Elle compte trois vélos-cargos à assistance électrique et un Renault Kangoo Maxi Z.E. H2. Ce véhicule hydrogène a été financé dans le cadre du projet Zero Emission Valley. « Les conducteurs trouvent ces véhicules très intuitifs, accessibles et confortables », note Erwan Carré, le cofondateur. Qui n’a pas fait le choix de l’hybride rechargeable : « Je ne considère pas cette motorisation comme propre et l’autonomie en tout-électrique ne suffit pas. »
Le TCO et l’autonomie pour critères
Mais comment savoir si son activité est adaptée à la mobilité électrique ? « Le choix se fera selon trois critères principaux : le rapport autonomie/temps de recharge, la capacité de se charger à l’extérieur et le TCO », résume Pauline Bovyn pour Total Mobility. « Le TCO est notre premier critère pour un véhicule “propre” ou diesel dans une catégorie de conducteurs, corrobore Lucie Roiron d’ABB. Cela limite le choix des modèles électriques ou hybrides car ils sont plus chers que les thermiques et la fiscalité ne compense pas tout. » Pour Erwan Carré des Colis Verts, « le gros avantage du Kangoo hydrogène par rapport à un Kangoo électrique, c’est l’autonomie supplémentaire de 150 km qui permet d’avoisiner les 350-400 km, contre 200 km en tout-électrique. »

« Avec une analyse de la flotte et des véhicules éligibles, il n’y a pas d’obstacle à l’électrification. Mais les gestionnaires de parc ne savent pas par où commencer ni vers qui se tourner, ce qui peut constituer un frein. »
Pauline Bovyn, directrice marketing, mobilité et nouvelles énergies
« En pratique, la première étape consiste à auditer le parc en captant les données des trajets et de localisation des véhicules, conseille Pauline Bovyn. Nous estimons qu’un véhicule qui parcourt entre 12 000 et 15 000 km par an peut potentiellement passer à l’électrique. »
Lisser le coût de la transition
Le passage aux véhicules électrifiés implique une bonne analyse financière. « Il y a un surcoût à l’achat du véhicule, autour de 30 % actuellement », confirme Pauline Bovyn pour Total Mobility. Et ce surcoût n’est pas forcément compensé par une fiscalité avantageuse. Athlon a donc défini des pentes de valeur résiduelle différentes pour les modèles électriques en fonction de leur autonomie, avec un seuil à 350 km en WLTP : « Selon la durée du contrat, on peut avoir des VR comparables à celles des thermiques dès quatre ans et 15 000 à 20 000 km par an », note Gérard de Chalonge.
Il est aussi nécessaire d’investir dans la recharge. « Le coût de déploiement des bornes est très variable selon la configuration des sites et notamment lorsque l’installation électrique est vieillissante, signale Félix Wilmet pour Izivia. Le prix varie aussi selon la puissance délivrée par la borne et sa capacité à communiquer, sans oublier un léger surcoût pour de l’électricité d’origine verte. » Mais cet investissement serait rentable grâce aux aides comme le programme Advenir. « Pour une offre autour de 2 000 euros qui comprend l’installation et une borne, l’amortissement peut se faire en deux ans pour une flotte peu mobile parcourant environ 60 km par jour », indique Félix Wilmet.
« Enfin, l’entretien d’un véhicule électrique est moins onéreux que celui d’un thermique et l’électricité coûte moins cher que le carburant, à raison d’environ 1,50 euro ou 2 euros pour 100 km, si bien que le véhicule va coûter moins cher à l’utilisation », conclut Pauline Bovyn pour Total Mobility.
Adapter la motorisation à l’usage
Il faut ensuite veiller à choisir les motorisations les plus adaptées à chaque usage. « L’électrique concerne plutôt les petits VP ou bien les petits VU circulant uniquement en centre-ville, l’hybride, les véhicules de fonction, dépeint Gérard de Chalonge pour Athlon. Nos clients partis sur de l’électrique, plutôt en pool, ont tendance à y rester et nous pensons qu’ils continueront compte tenu de l’évolution des gammes et de la technologie, précise-t-il. Nous constatons surtout une détention beaucoup plus longue car les véhicules électriques roulent moins. »

« Aujourd’hui, nous ne recommandons pas de faire du 100 % électrique, 100 % plug-in ou 100 % diesel. L’idée est vraiment de choisir la meilleure motorisation en fonction de l’usage, avec un mix de solutions. »
Gérard de Chalonge, directeur commercial et marketing, Athlon
Si les avantages de l’hybride rechargeable sont conditionnés au comportement de conduite et de recharge du conducteur, « cette motorisation est mise en avant pour rassurer et laisser un choix plus large aux conducteurs, et ainsi faciliter la transition », constate Pauline Bovyn. C’est le choix de Total et du Groupe ABB.
Avec l’électrique, la recharge est aussi déterminante : « Installer des prises renforcées ne suffit pas, on ne parle pas de recharger des téléphones portables, mais des batteries de taille importante, avertit Félix Wilmet, chef de projet pour Izivia. Cela nécessite un budget d’investissement et la clef est de bien définir son besoin. » Et cela prend du temps : « Il faut quelques semaines pour auditer et remettre une offre. Puis, après signature, il faut quelques semaines pour les travaux. »

« Dans la majorité des flottes, nous déployons des bornes de puissance modérée d’environ 7 kW avec des prises de type 2 en courant alternatif. Et nous anticipons l’évolution du parc pour limiter les travaux par la suite. »
Félix Wilmet, chef de projet, Izivia
Anticiper la recharge
La question de la supervision des bornes est aussi importante, surtout pour répartir la charge entre les véhicules. Et il faudra peut-être définir une politique de recharge : les bornes sur site seront-elles ouvertes aux véhicules personnels des salariés et visiteurs ? Si oui, à quel prix et comment sera gérée cette monétisation du service ? Parfois, il faudra installer des bornes au domicile du collaborateur. Enfin, le choix d’une carte de recharge sera à décliner en fonction des collaborateurs. « Nous n’avons qu’une seule station hydrogène à Clermont-Ferrand, il faut donc l’intégrer dans un planning, confirme Erwan Carré pour Les Colis Verts. Il y aussi des craintes liées à l’hydrogène, note-t-il. Certains ne veulent pas monter dans le véhicule. Nous leur répondons que les pompiers en Normandie roulent en Kangoo hydrogène H2 ! »

« Nous n’avons qu’une seule station hydrogène à Clermont-Ferrand, il faut donc l’intégrer dans un planning. Et face aux craintes liées à l’hydrogène, nous répondons que les pompiers en Normandie roulent en Kangoo H2 ! »
Erwan Carré, cofondateur, Les Colis Verts
« Mais il faut avant tout que les interlocuteurs aient vraiment envie de réaliser un projet de transition de la flotte. Les projets sont rapides dans les entreprises qui s’appuient sur une politique RSE globale », rappelle Félix Wilmet. « Il faut s’assurer que la direction suive et soutienne le projet, afin qu’il n’y ait pas de débat continu sur le “pourquoi” mais plutôt sur le “comment”, valide Lucie Roiron pour ABB. De plus, comme dans toute gestion de projet, il faut mener ce changement en parfaite adéquation avec la culture de l’entreprise. »
Susciter l’adhésion
Il est aussi important d’obtenir l’adhésion des collaborateurs. « Sans quoi, la transition énergétique du parc ne fonctionnera pas, assure Gérard de Chalonge pour Athlon. Des incitations financières semblent une bonne stratégie. » Chez ABB, la participation est moins élevée pour un véhicule de fonction en électrique qu’en thermique. ABB a également misé sur des outils pédagogiques pour expliquer le fonctionnement de la recharge à ses collaborateurs. « L’humain arrive très vite à intégrer les sujets liés à la recharge, comme le vocabulaire sur la puissance et les types de prises. Ce n’est pas plus compliqué que de comprendre la différence entre les types de carburant, uniquement une question d’habitude », conclut Félix Wilmet pour Izivia.
Et les vélos électriques ?
Parmi les véhicules électrifiés, n’oublions pas les vélos. La flotte des Colis Verts compte trois vélos-cargos à assistance électrique, avec une autonomie de 100 km. « Nous avons choisi une assistance électrique pour livrer des palettes, un travail qui reste assez difficile, explique Erwan Carré. À noter que la batterie doit souvent être changée à mi-journée. » Un vélo-cargo à assistance électrique est plus coûteux qu’un vélo mécanique. « Mais ce surcoût est intégré dans les coûts horaires et donc amorti. Livrer plus vite grâce aux vélos nous permet d’être rentables et nous avons au final les mêmes coûts qu’un transporteur traditionnel. » À noter qu’un équipement est nécessaire avec un casque et des vêtements techniques pour les intempéries. « Nous sommes intransigeants sur la vérification du matériel, de l’éclairage ou de l’état des pneus, comme pour un véhicule classique », précise Erwan Carré.