
Sur l’île de La Réunion, l’autopartage a déjà permis de baisser considérablement la taille de la flotte, de 590 véhicules en 2018, à 472 aujourd’hui. « Depuis 2019, nous rajeunissons le parc, note Olivier Clotagatide, gestionnaire de la flotte du département. Nous retirons les modèles les plus anciens et les plus polluants. Avec l’autopartage, nous avons optimisé le nombre de véhicules et leurs motorisations selon les besoins des agents. En cinq ans, nous avons réduit la flotte de 20 %. »
« L’enjeu désormais est de trouver le moyen de déplacement le plus adapté aux besoins, appuie Olivier Clotagatide. Ainsi, nous calons le type de moyen de transport sur les besoins, entre autres en fonction de la distance parcourue. » Ce sont donc la mixité énergétique et la typologie de véhicules qui orientent chaque agent vers le véhicule partagé le plus adéquat pour ses trajets.
De l’autopartage sur mesure
« Par exemple, pour un trajet de 3 à 4 km, le gestionnaire de prêt va plutôt orienter l’agent vers un véhicule électrique ou un scooter électrique : il s’agit d’une courte distance, ce n’est donc pas la peine de prendre une voiture diesel », illustre Olivier Clotagatide.
Une trentaine de gestionnaires de prêt assurent le bon fonctionnement du système d’autopartage, chacun étant chargé de gérer un pool de véhicules et d’en valider les réservations. Parmi ces gestionnaires de prêt, cinq emploient un carnet de bord électronique où sont remontées les données de la télématique. En effet, pour faciliter la gestion de l’autopartage au sein de la flotte, la télématique s’est imposée. « Nous avons lancé en 2022 une consultation auprès de trois fournisseurs locaux. Une entreprise locale qui développe la solution de télématique, GMINI, a remporté le marché, se remémore Olivier Clotagatide. Nous avons pu adapter cet outil à nos activités sur l’île. Maintenant, ce logiciel de télématique et de carnet de bord électronique est présent dans une cinquantaine de véhicules et il devrait en équiper une centaine fin 2023. À terme, la totalité de la flotte devrait en bénéficier. » Et le nombre de gestionnaires de prêt employant le carnet de bord électronique va évoluer en fonction du déploiement.
Tout une logistique
Un protocole régit le recours à l’autopartage, et ce de la réservation jusqu’au remisage. « Nos agents ont le choix : soit ils bénéficient déjà d’un véhicule mis à disposition en interne par leur direction, soit ils piochent dans le pool d’autopartage », résume Olivier Clotagatide. Si l’agent doit opter pour l’autopartage, il doit alors se connecter à l’intranet. « Il pourra, dans une rubrique spécifique, réserver le véhicule le plus proche en fonction aussi du créneau horaire, poursuit le responsable. Ensuite, les gestionnaires de prêt prennent la main pour traiter et valider les demandes. » Ils aiguillent donc l’agent vers le mode de transport et le véhicule les plus adaptés à son déplacement.
Si un agent prend souvent des véhicules en autopartage, il possédera un badge attitré. « Mais il devra passer par le gestionnaire de prêt, indique Olivier Clotagatide. Quant aux agents moins réguliers, ils ont des badges temporaires à rendre une fois le déplacement terminé. Plus tard, nous aimerions nous équiper d’armoires à clés en libre-service, des armoires préférablement intelligentes. Mais nous n’y sommes pas encore. Pour l’instant, le gestionnaire de prêt consigne tout sur une fiche de prêt qui sera bientôt associée au carnet de bord électronique : il fait le tour du véhicule avec l’emprunteur afin de contrôler et signaler un éventuel incident, etc. » « Ces pools d’autopartage représentent actuellement 30 % de la flotte », souligne David Checkouri, directeur des moyens généraux de La Réunion. Et le déploiement de ce service se fait progressivement.


Un déploiement progressif
« Au siège, à Saint-Denis, nous faisons de l’autopartage depuis quatre à cinq ans, rappelle pour sa part Olivier Clotagatide. Et nous avons déployé cette pratique en 2021 dans le reste du territoire. L’équité compte beaucoup pour nous : nous ne voulons pas que des territoires soient favorisés. Nous avons alors essayé de déployer l’autopartage dans nos sites principaux, sachant que nous avons au total 400 sites sur l’île, détaille ce responsable. Certaines directions, qui n’ont pas encore de flotte en autopartage, ont gardé des véhicules attitrés. Mais cette mutualisation continue à s’étendre dans tous les territoires et dorénavant, nous mutualisons plus que nous n’attribuons. L’autopartage concerne une dizaine de sites dans tous les territoires de l’île. À Saint-Denis, nous avons deux pools de quinze véhicules chacun, rassemblant vélos, VP et VU », complète Olivier Clotagatide. Les territoires d’action sociale de La Réunion possèdent chacun un pool d’autopartage.
Pour Olivier Clotagatide, la mise en place d’un système d’autopartage est importante « pour des questions de traçabilité et de transparence. Avant l’autopartage, nous n’utilisions que de carnets papier. » Avec le système d’autopartage et de carnet de bord électronique, David Checkouri affirme que le département a pu limiter « considérablement » le taux de sinistralité de la flotte, « autrefois très élevé ».
Des économies
« L’autopartage a aussi contribué à générer des économies, car nous avons optimisé les moyens d’une part, et d’autre part, les trajets des agents sont mieux suivis, constate encore David Checkouri. Mais l’autopartage a obligé les agents à modifier leurs habitudes. » Avec un autre obstacle, cette fois culturel : le tout-voiture, ancré dans la société réunionnaise. « À La Réunion, tous les ménages disposent d’une ou deux voitures, continue David Checkouri. Et cela s’accompagne d’habitudes de fonctionnement, notamment professionnelles : après avoir déposé les enfants à l’école en voiture, on arrive au travail et on prend le véhicule de service. Une routine ancienne ».
Pour encourager les agents à adhérer à ce nouveau mode de fonctionnement, un accompagnement s’est donc imposé. « Nous menons des formations sur la conduite du changement, sur la dématérialisation et sur la mobilité douce, énumère David Checkouri. Nous collaborons dans ce sens avec les organisations syndicales. De fait, quand une collectivité décide des changements, il y a quelques étapes à passer. »
Accompagner le changement
Des agents ont ainsi préféré ne pas utiliser le véhicule partagé : « Ils pensaient que nous pouvions savoir exactement où ils se situaient à l’aide de notre outil de télématique, alors que la géolocalisation est un outil que nous n’exploitons que très occasionnellement, uniquement en cas d’accident ou de vol », reprend David Checkouri. Un point bloquant qu’il a donc fallu démystifier. « Nous avons alors évoqué la sécurité : quelques véhicules sont volés et la traçabilité, maintenant assurée par la télématique, offre de bénéficier d’un parc suivi. Et la traçabilité aide pareillement à savoir où se trouve le véhicule lors d’un accident afin de lui venir en aide », illustre ce responsable.
« Pour inciter les conducteurs à changer leurs habitudes, poursuit David Checkouri, nous leur avons aussi parlé de contraventions : quand nous avions du mal à retrouver les conducteurs concernés, la direction était pénalisée. » Enfin, certaines données collectées permettent au département de déclencher des formations d’aide à la conduite afin de promouvoir l’éco-conduite auprès des agents.
Dossier - La Réunion : une flotte en pleine transition
- La Réunion : une flotte en pleine transition
- La Réunion : une flotte en autopartage