Les achats automobiles des entreprises en baisse

Avec une baisse de - 15 %, les ventes de véhicules aux sociétés connaissent pour la première fois un déclin. Seule satisfaction, hors ventes aux loueurs courte durée, les ventes VP aux entreprises n’ont seulement baissé que de - 3 %.
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Les achats automobiles des entreprises en baisse

C’est dans la crise que le marché des ventes aux entreprises offre parfois un visage différent. Face à une baisse des ventes de – 15 %, chaque constructeur a mené une politique commerciale adaptée.

Renault, large n°1 sur ce secteur de vente a gagné près de 1 point de part de marché (voir plus loin). Peugeot, Citroën, Mercedes et VW ont plutôt joué la stabilité même si à cet exercice, Citroën gagne quelques points. Ford en revanche progresse de + 0,8 % et Fiat de + 0,6 %. Quant à Opel, confronté à un marché difficile et à un environnement incertain, la marque chute de 1,3 point. Dans le Premium, BMW, absente des ventes de véhicules utilitaires et peu impliquée auprès des loueurs courte durée, maintient sa part de marché avec 1,8 point de pénétration en 2009.

On l’aura compris, la comparaison d’une année sur l’autre des résultats des constructeurs sur le marché des entreprises, met clairement en valeur la chute des ventes de VU qui sont tombées à 310 370 unités contre 385 740 en 2008. De même qu’intervient fortement la baisse de la demande des loueurs courte durée qui est passée de 247 830 véhicules à 173 960 unités.

Citroën en hausse, Opel en large baisse

Pour Citroën, « le marché global automobile 2009 a été dopé par la prime à la casse au bénéfice des particuliers. Dans un contexte économique difficile, les entreprises ont réduit leurs acquisitions de véhicules ou décalé les renouvellements et le poids des ventes sociétés est passé en 2009 de 40 % à 30 % », explique Arnaud de Lamothe, Directeur de Citroën Business France. La marque est satisfaite de sa progression de 0,7 point. « Citroën a prouvé qu’elle avait tous les atouts pour affronter les périodes difficiles : des produits adaptés et attirants et une stratégie commerciale forte ». Chez Renault, qui rappelle que le marché a enregistré une baisse de -15,3%. la place de n° 1 des ventes aux entreprises a été maintenue avec 234 000 ventes et la part de marché a augmenté de 1 point de 27,9 % à 28,9 %.

Pour Opel, la difficile année 2009 se traduit par une baisse de 43 % des ventes avec 25 000 unités écoulées. Selon Philippe Peyrard, Directeur des ventes aux entreprises de la marque, « les caractéristiques du marché liées aux difficultés très médiatisées de GM et d’Opel ont créé un sentiment de manque de confiance envers nos produits ». Pourtant, note le responsable d’Opel, « les ventes de l’Insignia, malgré une introduction des versions avec faible CO2 en milieu d’année, ont pleinement répondu à nos attentes. »

2009, une année de crise

Volkswagen enregistre pour sa part une baisse d’environ – 10 %. « 2009 a été une année charnière, explique ce constructeur. La conséquence de la crise économique a été l’arrêt quasi immédiat des renouvellements de véhicules dans les entreprises, situation qui s’est débloquée progressivement sur le second semestre. A cela s’est ajouté une crise du véhicule d’occasion qui a conduit les loueurs longues durées à baisser fortement leurs valeurs résiduelles, prolonger les contrats existants et proposer des durées plus longues pour les nouveaux contrats. »

Dans ce contexte, se félicite VW, la marque a pu s’appuyer sur sa gamme de modèles. « nous avons augmenté nos ventes sur la famille Golf qui plus que jamais a joué son rôle de véhicule bénéficiant d’un atout économique en loyer (TCO), d’une image appréciée par les utilisateurs et d’une valeur sûre pour les loueurs. La Passat grâce à une dynamique de gamme liant les équipements et des taux de CO2 très bas s’est aussi très bien comportée. »

Chez Toyota, 2009 marque un retrait dans toutes les catégories de clients professionnels. Le recul des ventes est de – 45 % avec 17 213 immatriculations seulement, dû à une limitation de ses ventes aux loueurs courte durée (- 75 %), à la chute de ses ventes d’utilitaires (- 38 %) et à la baisse des commandes de la LLD (- 9 %). Seuls points positifs pour la marque japonaise, « la nouvelle Avensis et le nouveau Verso ont toutefois permis de maintenir nos volumes sur des segments en fort retrait (- 18 %). Par ailleurs, les ventes de Prius de 3ème génération ont doublé au cours du second semestre ».

La satisfaction est plus manifeste chez Volvo qui indique avoir stabilisé son volume de vente auprès des loueurs longue durée. « Nous avons enregistré une progression sur le marché des petites entreprises grâce à une stratégie de structuration des concessions en équipes dédiées aux ventes sociétés (+ 15 %) et nous avons volontairement réduit notre volume aux courtes durées (soit – 40 % en LCD). Notre marque a ainsi progressé de 9 % en 2009 en France », explique Nathalie Davenne. « Côté clients, nous avons vécu le gel des commandes dans certains grands groupes, le report de décisions, la tendance à la rationalisation qui était jusqu’à présent théorique, et qui s’applique réellement pour bénéficier des économies d’échelle. Les petites entreprises, quant à elles, ont fait face à un durcissement du cahier des charges pour les nouveaux investissements. Les constructeurs de ce fait sont allés vers un enrichissement des produits proposés pour rendre leur offre plus attractive en période de crise. »

Audi : le Premium à la hausse

Audi peut pour sa part savourer son succès. La marque aux anneaux a été la seule à progresser en volume sur le marché des entreprises l’an passé… avec Seat, Skoda et Dacia. Les raisons de ce succès tiennent à quelques chiffres que rappelle ce constructeur : « gamme A3 à partir de 99 g ; gamme A4 à partir de 119 g ; gamme A5 à partir de 134 g ; gamme A6 à partir de 139 g ; au total, 38 modèles Audi émettent moins de 140g»

Selon Kia, le recul des ventes aux sociétés est uniquement dû à la baisse des volumes vendus aux loueurs courte durée. « Tous les autres types de vente sont en forte progression par rapport à 2008, notamment les ventes à PME/PMI (+ 68 %). » Ainsi, la marque coréenne annonce des progressions de ses ventes aux flottes de + 67,7 % avec 624 unités et de + 24,5 % auprès des loueurs longue durée. Mais au total, la baisse de la marque sur ce segment de ventes est de 59 %. Chez ce constructeur, ce sont les Kia cee’d, Picanto et Kia Soul qui ont le mieux soutenu la marque l’an passé.

Pour Mazda aussi, la crise financière et la crise du VO ont largement influencé le marché «Fleet» en 2009. Mais d’autres phénomènes se sont renforcés tels que l’analyse TCO plus systématique, l’ouverture des clients à d’autres marques ou la volonté des sociétés d’élargir le choix à leurs collaborateurs sur des marques «alternatives». Pour Olivier Lécluse, responsable des ventes flottes de Mazda, ce sont surtout les Mazda2 107 g CO2/ km et Mazda3 119 g CO2/ km qui ont obtenu le plus de vif succès auprès des entreprises.

Seat, Skoda, la reconnaissance par les VR

Seat marque aussi sa satisfaction avec 2 190 véhicules immatriculés (hors loueurs courte durée), soit une progression de 31 % « due à une gamme adaptée et plus large et à une meilleure reconnaissance de la marque sur ce marché », indique Olivier Papritz, responsable des ventes sociétés.

Idem pour Skoda, au-delà de la baisse de 40 % de ses ventes aux loueurs courte durée, on retient surtout la hausse de 37 % de ses immatriculations auprès des loueurs longue durée. « Cette progression est le résultat d’un travail de plusieurs années sur les valeurs résiduelles. Ces valeurs sont aujourd’hui excellentes et permettent à des loueurs comme Arval de proposer Skoda comme une alternative, sans soucis de revente », indique la marque tchèque. C’est donc avec optimisme que Skoda envisage 2010 avec un « retour de l’investissement des flottes qui ne pourront pas indéfiniment prolonger leurs actuels contrats LLD .»

Quant à Seat, c’est une progression de 15 à 20 % de ses ventes que la marque envisage sur un marché en hausse espérée de 8 %. Face à la tendance des entreprises à renouveler leurs parcs en s’orientant vers des modèles de petits segments, Olivier Papritz indique « qu’on assiste effectivement à un downsizing des modèles en parc en raison l’impact de plus en plus important du bonus/malus et de la TVS. Cela se traduit par un choix de véhicules plus petits ou d’une marque alternative comme Seat avec les modèles de la gamme Ecomotive tels que la Leon 99 g, l’Ibiza 89 g ainsi que l’Altea et Altea XL à 119 g. »

Olivier Lécluse chez Mazda table sur une même évolution avec une progression du marché de + 10 % en 2010 : « la logique de prolongation des contrats a ses limites liées aux lois de roulage et les entreprises seront contraintes de renouveler leur parc pour poursuivre leur activité ou bien de s’exposer à des coûts de maintenance revus à la hausse. »

« Changer de voiture en fonction de son emploi du temps »

Chez Citroën par contre, on ne table pas sur une hausse des ventes sociétés de plus de 5 % en 2010. « L’un des critères de référencement dans les « car policies » depuis un an est le faible niveau d’émissions de C02, rappelle Arnaud de Lamothe. Pour répondre à ce critère, Citroën propose la gamme Airdream Business, notamment avec C5 HDi 110 FAP, C4 Picasso HDi 110 FAP ». Et DS3 viendra bientôt la compléter. Il est vrai que Citroën bénéficie d’une gamme de modèles très attractifs puisque comme le rappelle la marque, en 2010, « la nouvelle C3 sera aussi déclinée en version Airdream Business et disposera comme la DS3, d’une motorisation diesel émettant 99 g de CO2/km. Courant 2010, avec la nouvelle génération du Stop& Start, elles proposeront des versions à 95 g. » Mais surtout, Citroën multiplie les offres de services en direction des entreprises. La marque dévoilera ainsi dans les jours qui viennent un nouveau pack de mobilité : « changer de voiture en fonction de son emploi du temps ».

Chez Opel, la prévision de marché pour 2010 est aussi de + 5 %. Quant à la marque, ses objectifs se situent à 30 300 unités, soit une progression de 20 % par rapport à 2009. « L’arrivée de la nouvelle Astra en janvier et du nouveau Movano au printemps, alliée au succès de l’Insignia devraient nous permettre de remonter la pente », explique Philippe Peyrard. « Ce retour à la croissance s’appuiera aussi sur une nouvelle organisation puisque Opel va renforcer son programme Opel Entreprises qui se concentre sur les distributeurs à fort potentiel «Sociétés» et va relancer sa société captive de LLD : OBS en partenariat avec ALD. » Enfin, comme l’analyse Philippe Peyrard, face à l’évolution des ventes flottes, « nous avons atteint le point bas et la remontée des ventes devrait se faire sur le second semestre. Il n’y aura pas une grosse reprise mais une évolution lente. Les phénomènes de l’année 2009 devraient continuer en 2010 mais dans de moindres proportions. ».

Un mouvement structurel du marché ?

Pour Toyota, c’est une croissance du marché de + 17 % qui est attendue en 2010 (+ 6,5 % pour la marque). Mais ce constructeur entrevoit des changements dans la structure de ce marché. « Nous prévoyons un développement des ventes par rapport à 2009. Cependant, la rationalisation des flottes des entreprises ne permettra pas de retrouver les niveaux de ventes du passé. De même, le marché de la location courte durée va se reconstruire selon de nouveaux modèles économiques, avec des renouvellements moins fréquents. »

Même approche chez VW qui envisage une croissance du marché de l’ordre de 10 % en 2010. Mais à plus long terme, le constructeur se montre plus circonspect : « afin de conserver (voire de diminuer) le coût des loyers et compte tenu de la longévité toujours plus grande de nos voitures, nous constatons un allongement des durées de détention chez nos clients. C’est un mouvement structurel qui aura pour conséquence une baisse du marché entreprise sur une période assez longue. »

Des mouvements structurels que note également Nathalie Davenne. « Tout est remis à plat par nos interlocuteurs dans les entreprises, lesquels cherchent à optimiser les TCO. Il ne s’agit plus aujourd’hui simplement de proposer le CO2 attractif, la bonne consommation, la remise améliorée, mais aussi de présenter le véhicule le mieux équipé. D’autre part, on commence à voir apparaître dans les car policies des véhicules du segment inférieur, voire des véhicules de gamme qui n’étaient, jusqu’ici, pas considérés dans les appels d’offres pour des managers ». C’est cependant sur une croissance de + 5 % de ses ventes sociétés que table la responsable de Volvo, mais sur un marché stable…

« A force de prolonger les contrats, les véhicules en parc commencent à être fortement kilométrés, avec à la clef des frais additionnels. La tendance va être au renouvellement, d’autant que les loueurs misent plus sur le volume que la rentabilité cette année. Mais parallèlement à cela, nous assistons aussi à des démarches écologiques et économiques des entreprises, avec une gestion des déplacements qui ouvre la porte au télétravail, aux visioconférences. »

Alors, sans doute la crise traversée par chacun va-t-elle laisser des traces plus profondes qu’on ne pouvait le penser. Elle pourrait bien en tout cas accélérer les changements de la structure du marché des flottes et de la demande de véhicules développée par les entreprises.