L’Ifpen prépare une Vignette Crit’Air connectée

L’IFP Énergies nouvelles (Ifpen) a présenté un concept de vignette Crit’Air connectée, prenant en compte l’impact du comportement du conducteur sur les émissions du véhicule grâce à une application smartphone.
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vignette Crit’Air

Pour comprendre la différence entre valeurs homologuées et usage réel, l’Ifpen a réalisé un test de qualification de style de conduite. « Nous nous sommes aperçus que le conducteur avait un rôle majeur sur l’utilisation des technologies de réduction des émissions », a déclaré Gaëtan Monnier, directeur du centre de résultats transports de l’Ifpen.

Les émissions de NOx majorées jusqu’à 400 % selon le style de conduite

Deux véhicules de segment C ont parcouru un même trajet périurbain avec 5 euros de carburant. Le premier était soumis à une conduite agressive, le second a une conduite anticipé, c’est-à-dire en évitant les accélérations et décélérations rapides, et en favorisant une vitesse constante. Bilan : un comportement optimal peut réduire de 45 % les émissions de Nox et de 10 % celles de CO2. « Bien que les cycles de vitesse ne paraissent pas si différents, il y a pourtant un vrai effet sur les émissions », a commenté Gaëtan Monnier. Autre constat : « une conduite agressive utilise le moteur en dehors du cycle WLTP, tandis qu’une conduite optimale reste quasiment tout le temps dans la situation du cycle. »

Conduite nominale Conduite optimale Gain (%)
NOx (mg / km) 289 158 45
CO2 (g / km) 137 123 10
Source : Ifpen

L’institut a ensuite poussé plus loin son investigation en effectuant des tests avec 7 véhicules diesel et essence et 36 conducteurs en « conduite habituelle » sur un trajet urbain. Là encore, « à même véhicule et même trajet, nous avons observé des variations de NOx jusqu’à 400 % et de CO2 jusqu’à 20 %, a indiqué Gaëtan Monnier. Quelqu’un qui n’a pas la chance de pouvoir changer de véhicule et de s’équiper des dernières technologies peut donc tout de même être bien positionné en termes d’émissions. »

ifpen qualification style conduite protocole 2
Le style de conduite est un levier majeur pour la réduction des NOx : à même véhiocule et même trajet, les émissions de NOx peuvent varier jusqu’à 400 %, et celles de CO2 jusqu’à 20 %. Source : Ifpen

Une notation qui évolue selon le comportement du conducteur

C’est pourquoi l’Ifpen a déposé un brevet de vignette Crit’Air connectée. Le système repose sur l’application smartphone Geco Air, développée par l’Ifpen en partenariat avec l’Ademe et qui se veut un « thermomètre personnel de pollution ». L’application est capable d’estimer les émissions polluantes d’un trajet à partir de sa trace GPS (et parfois de l’accéléromètre et du magnétomètre). Ainsi, grâce à une connexion bluetooth avec le smartphone du conducteur, la vignette pourra prendre en compte l’usage et non plus seulement la technologie du véhicule dans sa notation.

L’institut a imaginé adjoindre une lettre pour évaluer le comportement du conducteur : selon les taux de polluants émis lors des trajets précédents, lettre et couleur de la vignette évolueraient grâce à un affichage LED. En parallèle, la vignette sera capable de communiquer avec les infrastructures, via une connexion RFID, pouvant à mener une réglementation des accès dans les zones à circulation restreinte (ZCR) ou des parcmètres, comme c’est déjà le cas à Londres ou Copenhague.

Un projet de science citoyenne pour alimenter les politiques publiques

Actuellement en cours de design, un premier prototype est prévu pour la fin du premier trimestre 2018. « L’enjeu est de s’assurer que la vignette consommera très peu d’énergie, et que son coût sera restreint pour favoriser une diffusion large et massive. Car les données récoltées par Geco Air permettent de suivre précisément la pollution et de faire des simulations quant à la restriction d’accès à certaines catégories Crit’Air. C’est à la fois un outil de prédiction des émissions et d’aide à la décision pour les politiques de mobilité des territoires, comme par exemple lors de l’établissement des plans de circulation », a commenté Gilles Corde, responsable du programme logiciels et mobilité connecté à l’Ifpen.

À l’heure actuelle, l’application ne compte que 200 à 300 utilisateurs récurrents. Mais l’objectif est de la diffuser au plus grand nombre pour récolter des données collectives fiables sur les émissions polluantes du parc automobile français. Elle servira notamment lors du prochain challenge inter-entreprises du Grand Lyon qui aura lieu dans quelques semaines.