
Ce n’est toujours pas le grand soir pour le véhicule électrique. Certes, constructeurs et loueurs longue durée ont mis les bouchées doubles pour sortir de nouveaux modèles, conseiller les clients, affiner leurs contrats de location, déployer des systèmes de recharge adéquats. Certes, la France est restée, pour la troisième année consécutive, le premier marché européen pour l’électrique avec 13 954 immatriculations, contre 9 314 en 2012.
Mais en immatriculations, les résultats des quatre premiers mois de 2014 prouvent qu’il y a encore du chemin à parcourir. 3 514 modèles électriques (VP et VUL) ont ainsi été mis à la route sur cette période,...
Ce n’est toujours pas le grand soir pour le véhicule électrique. Certes, constructeurs et loueurs longue durée ont mis les bouchées doubles pour sortir de nouveaux modèles, conseiller les clients, affiner leurs contrats de location, déployer des systèmes de recharge adéquats. Certes, la France est restée, pour la troisième année consécutive, le premier marché européen pour l’électrique avec 13 954 immatriculations, contre 9 314 en 2012.
Mais en immatriculations, les résultats des quatre premiers mois de 2014 prouvent qu’il y a encore du chemin à parcourir. 3 514 modèles électriques (VP et VUL) ont ainsi été mis à la route sur cette période, contre 4 968 il y a un an, selon les chiffres du CCFA et de l’Avere, l’association nationale pour le développement de la mobilité électrique. Un sérieux revers donc pour la filière, avec un repli de – 29,27 % des ventes. Dans le détail, 2 354 VP ont été immatriculés sur le quadrimestre, contre 3 188 pour la même période de 2013 ; pour les VUL, les chiffres s’élèvent à 1 160 pour 2014, contre 1 780 en 2013. Les ventes ont cependant rebondi en mai.
Pour expliquer ce décalage, l’Avere met en avant le changement de la fiscalité du bonus depuis fin 2013. Selon la nouvelle formule de calcul, le montant du bonus pour un véhicule électrique loué pourrait parfois se révéler inférieur aux 6 300 euros obtenus pour un véhicule acheté. Or, la LOA et la LLD pèsent plus de 40 % des immatriculations du segment électrique. Cet état de fait devrait évoluer prochainement.
Pour expliquer ce retrait, Didier Blocus, responsable du véhicule électrique chez ALD Automotive, note parallèlement que la base de comparaison n’est pas favorable au marché électrique : « En 2013 il y a eu la sortie de la Zoé qui a porté les ventes. Mais nombre d’observateurs s’accordent à dire que les chiffres ne sont pas ce qu’ils devraient être. »
Le marché de l’électrique ne décolle pas
« Nous croyons à l’électrique dans un processus global de mobilité, plus qu’à l’électrique comme une réponse aux demandes des entreprises. C’est essentiellement l’outil du dernier kilomètre. Il ne s’agit pas de rêver que les commerciaux roulent avec en province », précise Gérard de Chalonge, directeur commercial d’Athlon Car Lease. Le loueur estime à 0,01 % la part de l’électrique dans son parc de 15 000 véhicules au total en France. « Lorsque nous signons un ou deux contrats par mois, nous sommes contents », admet-il. En février, Athlon a communiqué sur la livraison d’une Tesla Model S au PDG d’Aon France, Robert Leblanc.
Essayer le véhicule électrique pour l’adopter
ALD Automotive, filiale de la Société générale, revendique un parc d’environ 3 500 véhicules électriques, à comparer à environ un millier d’hybrides. La Poste constitue toujours la plus large part de cette flotte avec 3 200 véhicules en fleet management, via l’appel d’offres de l’Ugap. En location longue durée pure, entre 350 et 400 véhicules ont donc été mis à la route par ALD pour des entreprises ou des collectivités, avec des modèles loués dans le cadre de l’auto-partage ou bien attribués à des collaborateurs.
Comme d’autres loueurs, ALD multiplie les initiatives pour faire mieux connaître les atouts du produit électrique et propose aux entreprises ALD experienze, un centre d’essais itinérant pour présenter l’intégralité de l’offre électrique. « Nous expliquons à nos prospects que l’électrique ne peut remplacer le thermique car il n’est pas capable de remplir les mêmes fonctions. Or en entreprise, les véhicules servent à certains usages. Nos équipes évaluent donc si les modèles électriques à disposition sont compatibles ou non avec les usages des collaborateurs », poursuit Didier Blocus.
Et quoi qu’il en soit, le TCO reste le nerf de la guerre des directions des achats et la donne verte n’y change rien. « Nous arrivons à convaincre nos clients car les tarifs des constructeurs ne sont plus aujourd’hui au stade de l’expérimentation. Ils ont réalisé de gros efforts en la matière, mais de là à dire que l’électrique a des coûts utiles identiques à ceux du thermique, je n’irai pas jusque-là », conclut Didier Blocus.
Depuis septembre dernier, Alphabet (groupe BMW) a aussi déployé sa solution AlphaElectric à destination des entreprises. « Nous accompagnons l’électrification des flottes via une démarche en trois étapes », pointe Cédric Marquant, directeur marketing et business development.
Sélectionner les modèles selon les besoins
Alphabet procède d’abord à l’analyse du parc pour dimensionner en quelque sorte la flotte électrique potentielle de l’entreprise. La typologie des trajets quotidiens ou les caractéristiques d’utilisation sont étudiées à ce moment-là. Le loueur offre ainsi d’installer des systèmes de capteurs GPS pendant un ou deux mois sur les véhicules pour analyser les kilomètres parcourus et les temps moyens d’arrêt afin d’affiner au mieux les préconisations.
La seconde étape vise à choisir et installer l’infrastructure de recharge adaptée. « C’est un moment très délicat et le groupe s’est associé avec Schneider Electric pour cette étape qui passe notamment par l’audit des bâtiments », souligne Cédric Marquant. Selon les solutions retenues, les coûts vont de 450 à 20 000 euros.
La troisième étape consiste à implanter le véhicule électrique au sein de l’entreprise, avec le cas échéant, des services complémentaires tels que les cartes de recharge sur les bornes publiques. Alphabet a aussi sélectionné Green Park Solutions comme prestataire pour la carte d’accès universel, qui a signé un accord avec Vinci. « Nous avons donc des relais pour nos clients en dehors de leur propre système de recharge et des bornes publiques », avance Cédric Marquant. De l’avis de ce dernier, l’accueil est plutôt positif. « Nous menons une dizaine d’analyses de flottes à travers l’Europe dont trois en France.
Plus généralement, le loueur compte 300 véhicules électriques en portefeuille, pour une cinquantaine de clients. Et commercialise aussi un forfait dit « découverte », pour des périodes de deux à six mois et un tarif plus proche de la location courte durée, avec une borne de recharge temporaire.
Les constructeurs multiplient les modèles
Signe de l’engagement de toute la filière automobile en faveur de l’électrique, les constructeurs adaptent peu à peu leur offre de départ. Chez Renault par exemple, les équipes ont réglé le problème de la recharge occasionnelle sur prise domestique pour la Zoé. Avec la solution Flexi Charger, il est désormais possible de recharger ce véhicule sur une prise domestique de 220 volts, ce qui n’était pas le cas auparavant.
Les constructeurs ont aussi fait évoluer leurs contrats de location. À l’instar de Renault qui a fait le premier le choix de rester propriétaire de sa batterie et d’en fixer un loyer distinct, ce qui garantit une qualité de fonctionnement quel que soit l’âge du véhicule.
D’autres constructeurs, dont Citroën, ont procédé de façon similaire. Le client peut soit acheter le châssis au comptant, soit le financer en crédit-bail ; il peut aussi décider de le louer en LLD. Quant à la batterie, il la loue en fonction de ses perspectives de détention et d’usage sur des durées et des kilométrages qui peuvent s’ajuster tout au long du contrat.
Les gammes se sont aussi élargies, y compris dans l’utilitaire où le Kangoo Z.E. bénéficiait jusqu’alors d’un beau monopole, avec l’arrivée du Berlingo et du Partner électriques chez PSA, et de l’e-NV 200 de Nissan. Et avec les véhicules particuliers, les offres se multiplient.
Mais l’une des clés de l’électrique, et pas seulement dans les entreprises, reste le déploiement des bornes de recharge publiques. Un enjeu crucial, tellement crucial que le gouvernement entend doubler les infrastructures ouvertes pour passer à 16 000 bornes d’ici 2016 contre 8 000 actuellement. Avec, on peut l’espérer à terme, un effet d’entraînement.
Pour sa part, le conseil régional d’Île-de-France a récemment débloqué une enveloppe pour installer sur son territoire quelque 40 000 bornes d’ici 2020. Chez les constructeurs, Nissan s’est associé à Auchan pour implanter 130 points de recharge rapide sur les parkings de l’enseigne. Des bornes compatibles avec 98 % des modèles électriques. Vinci Park pour sa part va équiper une partie de ses parkings avec les bornes installées par Sodetrel, la filiale spécialisée d’EDF.
Tous les opérateurs de bornes (Sodetrel, Legrand, Schneider Electric, Spie, etc.) admettent que les entreprises se posent de nombreuses questions sur les technologies disponibles. Avant de débloquer des investissements dans la mobilité électrique, elles veulent avoir l’assurance que leurs véhicules pourront se recharger sur n’importe quelle borne, même si, comme le rappelle EDF, seules 5 % des recharges sont réalisées sur des bornes publiques.
La grande question de la recharge publique
Les opérateurs travaillent donc, le plus souvent, sur des systèmes de supervision intégrant toutes les nouvelles bornes, quelles que soient les marques. Les acteurs de la mobilité électrique œuvrent aussi à un badge de recharge unique ; les constructeurs quant à eux généralisent la fourniture de câbles et de prises pour que les véhicules puissent se brancher partout en mode de charge dite normale.
Du côté des loueurs longue durée, la stratégie consiste aussi à se rapprocher des installateurs de bornes afin de faciliter les démarches des clients. Outre Alphabet qui collabore avec Schneider Electric, ALD Automotive va prochainement annoncer un partenariat avec Spie et Sodetrel. Rendez-vous en 2015 pour un bilan plus prometteur ?
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