Loi de mobilités : l’État annonce les futures mesures contre la pollution de l’air

Les ministres Nicolas Hulot et Élisabeth Borne ont présenté ce matin les mesures de la future loi de mobilités. Elles visent à atteindre les objectifs du Plan Climat, soit la neutralité carbone à l’horizon 2050. Et la plupart d’entre elles auront un impact sur les flottes publiques comme privées.
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Loi d'orientation des mobilités LOM
© Ministère de la transition écologique et solidaire

« Face à la pollution de l’air, nous voulons changer de paradigme et faire la démonstration que la voiture individuelle peut être remplacée, dans de nombreux cas, par les mobilités douces comme le vélo, le covoiturage et bien sûr les transports en commun », a déclaré Nicolas Hulot ce vendredi matin, présentant la future loi de mobilités (LOM) aux côtés de la ministre des transports Élisabeth Borne.

Les zones à faibles émissions généralisées

Et la mesure phare de la LOM concerne le déploiement de zones à faibles émissions (ZFE), basées sur le système des vignettes Crit’Air et actuellement en service à Paris et Grenoble. « La loi demandera à toutes les agglomérations de plus de 100 000 habitants d’évaluer l’opportunité de mettre en place une telle zone », précise le gouvernement. Or, la perspective des ZFE influence fortement les politiques d’achat des flottes.

Les 15 villes et métropoles les plus polluées seront invitées à signer une charte d’engagement le 8 octobre prochain, visant à déployer de premières ZFE d’ici fin 2020 sur leur territoire. Ce seront les collectivités qui détermineront le périmètre géographique, les catégories de véhicules et les classes horaires concernées, ainsi que les dérogations et la progressivité des règles.

En retour, l’État s’engagera à fournir les outils réglementaires nécessaires. Ces derniers permettront d’expérimenter les dispositifs de « péage positif » ; de mettre en œuvre des tarifs de congestion modulables selon des critères environnementaux ; d’instaurer des licences pour les services de location de véhicules en libre-service sans station ; et de déployer des systèmes d’information permettant aux usagers de comparer différents modes de transport, voire de faciliter l’achat de billets.

Des objectifs de ventes de véhicules à faibles émissions

Pour compenser ces restrictions de circulation, la LOM doit en outre favoriser le développement des véhicules à faibles émissions pour respecter les objectifs récemment fixés par l’État. Pour rappel, le Plan Climat vise la fin des ventes de voitures neuves émettant des gaz à effet de serre en 2040. L’État s’est en outre engagé aux côté de la filière automobile à multiplier par 5 les ventes de VE entre 2017 et 2022, et par 15 celles de PL à faibles émissions entre 2017 et 2025 ; ainsi qu’à introduire 5 000 VUL et 200 PL hydrogène d’ici 2023. En conséquence, de nombreuses mesures incitatives, fiscales et réglementaires, sont au programme de la LOM.

Le seuil du malus abaissé à 116 g/km de CO2

Le seuil de déclenchement du malus sera ainsi abaissé de 3 g de CO2 par kilomètre en 2019, soit 116 g/km au lieu de 119 actuellement (voir notre fiche Flottes Expert sur le malus). Et ce seuil baissera de nouveau « sur la même tendance après le passage à la nouvelle norme WLTP », ajoute le gouvernement. En parallèle, le bonus sera maintenu jusqu’à la fin du quinquennat. L’État poursuivra en outre la promotion de la prime à la conversion dans le but de renouveler le parc français.

Côté PL, le dispositif du suramortissement sera renforcé pour les petits poids lourds et prolongé jusqu’en 2021. Actuellement réservé aux PL utilisant du bioGNV et à l’ED95, il sera de plus étendu à l’électricité et à l’hydrogène. Le tarif de la TICPE sera quant à lui gelé pour le GNV au tarif actuel (5,8 euros/100 m3) jusqu’en 2022.

Et les deux-roues n’ont pas été oubliés. Outre la mise en place d’une étiquette énergie et d’une fiscalité incitative, l’État veut en effet instaurer des règles minimales d’achat public pour les deux et trois-roues motorisés à faibles émissions.

Entreprises : l’avantage en nature revisité

À l’échelle des entreprises, les dispositifs de remboursement des frais de déplacement domicile-travail, obligatoires pour les transports en commun et facultatifs pour le vélo, seront facilités et étendus au covoiturage. En outre, « la recharge électrique fournie à titre gratuit par une entreprise à ses salariés ne sera plus considérée comme un avantage en nature et donc non fiscalisée », annonce le gouvernement. De même, le barème de l’avantage en nature sera adapté pour favoriser les VE par rapport aux véhicules thermiques.

À travers la LOM, l’État veut également inciter les entreprises à s’investir en faveur d’une « mobilité plus propre au travail », en renforçant les plans de mobilité employeurs et en demandant aux autorités organisatrices des mobilités (AOM) de créer des « comités de partenaires ».

Pour les flottes publiques, la LOM doit mettre en place un dispositif de transparence, basé sur deux indicateurs : la proportion de véhicules à faibles émissions acquis ou utilisés lors du renouvellement du parc, et celle de véhicules électriques ou hybrides. En outre, « des travaux sont initiés sur les modalités pratiques d’acquisition des véhicules électriques d’occasion par l’État. »

Faciliter l’implantation de stations

Pour accompagner le déploiement des véhicules faibles émissions, l’État a également une stratégie pour les réseaux de stations-service. Du côté des bornes de recharge, la prise en charge financière du raccordement passera de 40 à 75 % au sein du budget des réseaux de distribution ; le droit à la prise sera simplifié dans les copropriétés ; et des bornes seront installées sur les autoroutes et routes nationales. Le dispositif des certificats d’énergie servira en outre à financer des bornes privées ouvertes au public, comme dans le cadre du programme Advenir.

La LOM facilitera aussi le raccordement des stations GNV aux réseaux de transport de gaz naturel pour en diminuer les coûts. Cette mesure bénéficiera aux 100 stations qui doivent être implantées dans les quatre prochaines années. Et un nouvel appel à création de stations sera lancé en 2018.

La LOM contribuera également au déploiement du Plan hydrogène qui vise à construire 100 stations d’ici 2023, et entre 400 et 1 000 à l’horizon 2028. Un arrêté ministériel doit de plus paraître ce mois-ci pour encadrer l’installation d’hydrogène dans les stations-service.

Favoriser covoiturage et autopartage

Enfin, l’État prévoit d’expérimenter des voies réservées aux véhicules en covoiturage dès 2019, potentiellement partagées avec les transports en commun ou les véhicules à faibles émissions. De même, des places de stationnement seront réservées au covoiturage et à l’autopartage. Les utilisateurs du covoiturage pourront en outre avoir accès à des subventions publiques via une « plate-forme numérique de preuve ».

Du côté des collectivités, le label autopartage sera actualisé pour qu’elles puissent accorder des avantages aux utilisateurs de services sans abonnement ou sans station. Et après les personnes, c’est le « cotransportage » des colis que le gouvernement encouragera en l’encadrant.

Et à l’échelle européenne ?

Cette stratégie de verdissement sera aussi portée au niveau de la Commission européenne. Le gouvernement français a ainsi déclaré qu’il soutiendrait la proposition de règlement de la Commission européenne fixant des valeurs limites d’émissions de CO2 pour les PL, ainsi que la « fixation d’obligations minimales d’achats publics ambitieux au plan européen en matière de véhicules à faibles émissions. »

Enfin, la France encouragera la Commission à renforcer sa future législation sur les normes d’émissions des véhicules légers : elle souhaite que le seuil d’émissions maximal soit réduit jusqu’à 40 % pour les VP et qu’un « mécanisme incitatif » soit mis en place pour promouvoir la mise sur le marché de véhicules zéro émission.

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