
C’est pour tester la résistance des 336 kWh des batteries de son eActros 300 au froid et à 44 t que Daimler Truck a organisé un parcours hivernal sur une longue distance de 3 000 km, entre Stuttgart et Rovaniemi sur le cercle polaire, une route empruntée par les transporteurs. Rechargeant trois fois par jour en des points préétablis, le poids lourd électrique a fait le trajet en six jours.
« Malgré nos 220 km d’autonomie, nous avons prudemment planifié des étapes de 150 km, rapporte Marc Schniederjan, le chef d’équipe Mercedes-Benz qui a supervisé le voyage. Mais la perte d’autonomie était limitée, même à – 25 ° C. Et la recharge et la récupération d’énergie cinétique à 80 km/h ont bien fonctionné. La cabine s’est réchauffée assez rapidement. »

3 000 km sans filet
En janvier, c’est pour ramener 20 t d’oranges de son client espagnol Casa des Mas que le transporteur zurichois Krummen Kerzers a lancé son Volvo FH Electric dans un aller-retour Zurich-Valencia. Rappelons que ce modèle dispose de 350 km d’autonomie. Néophyte en électromobilité mais bon conducteur, Balint Schnell a conduit en respectant la réglementation. Et ce, sans autre aide que l’éco-conduite, sa planification des points publics de recharge et le suivi à distance de son patron.

Ainsi, le conducteur a su gérer son stress. « Le voyage de Kerzers à Barcelone était faisable, mais les 450 km jusqu’à Canals n’offraient que quelques bornes peu accessibles, rendant le projet « impossible », selon nos collègues espagnols, rapporte Peter Krummen, co-dirigeant du transporteur. Balint Schnell n’a été vraiment nerveux que lorsqu’il a atteint des points de charge en toute fin de batterie et alors que plus rien ne fonctionnait dans le cockpit. »

Une expérience concluante
Le conducteur s’est donc arrêté vingt fois pour recharger ses batteries, parfois durant trois heures au lieu d’une lorsque d’autres véhicules électriques partageaient la recharge. Le trajet retour Zurich-Valencia a ainsi duré sept jours. Le transporteur est néanmoins satisfait de la gestion de cette longue distance par le poids lourd électrique. « Ce voyage a permis d’économiser 3 t de CO2 et d’acquérir des connaissances importantes sur l’usage des camions électriques dans le trafic longue distance, confie Peter Krummen. Désormais, le cap est fixé : avec l’expansion des bornes de recharge électrique sur les autoroutes européennes et les progrès des batteries, les camions électriques joueront un rôle important dans le transport longue distance. »

Relais en borne à borne
Sur internet, plusieurs transporteurs ont salué le succès de l’électrique sur les longues distances. « Une semaine, cela n’a rien d’insurmontable, il faudra juste s’habituer à attendre plus longtemps son colis », écrit un transporteur. Mais le réalisme prévaut. Ainsi, « le principal souci est le coût du chauffeur qui, au lieu de deux courses, n’en fait plus qu’une », écrit un autre transporteur.
Tariel Chamerois, directeur RSE de DB Schenker France ajoute : « Ces démonstrations ne correspondent pas à nos cas d’usage. Avec 120 véhicules électriques sur 3 000 véhicules, nous choisirons les trajets les plus simples, pratiques et rentables. C’est une question de gestion ». Un autre transporteur internaute, Brett Chandler, y voit néanmoins une piste : « Cela ressemble à un échec lorsqu’un voyage de quatre jours est étendu à sept, mais les camions pourraient circuler de borne à borne et se passer la remorque pour accélérer le voyage. » Un projet déjà porté par Ceva Logistics, Engie et Sanef.