Pour les constructeurs spécialistes des véhicules utilitaires, l’année 2021 n’a pas été simple pour le marché. Paul de Saxcé, directeur Véhicules Utilitaires pour MAN France, analyse ce marché 2021 en deux temps : un premier semestre très dynamique, avec un fort niveau de commandes lié à la reprise économique en sortie de crise sanitaire ; et un second semestre déjà perturbé par les premiers effets de la pénurie de composants électroniques, qui a tiré vers le bas la production.
« Au final, le marché a atterri un peu en dessous de 2019, mais à un étiage élevé. Pour 2022, la demande est toujours là mais elle reste plus forte que l’offre de véhicules neufs et le marché va être perturbé par les problèmes de production que nous rencontrons tous », anticipe Paul de Saxcé.
Chez Ford par exemple, les performances ont été contraintes par les difficultés de production l’an dernier, même si la dynamique de commandes est au rendez-vous. Le Ford Transit Connect a ainsi connu un tassement de ses immatriculations, principalement dû aux difficultés de production, malgré un carnet de commandes important, notamment pour la motorisation E85 qui représente quasiment une commande sur deux. De son côté, le Transit Custom a gardé la tête du segment des fourgons compacts en marque importée et le Transit 2T a très légèrement amélioré sa part de marché avec une croissance de 0,3 point, malgré quelques difficultés de production.
« Le marché en 2022 devrait être assez stable en volume par rapport à l’an dernier. 2021 a été marqué par la crise sanitaire, 2022 risque d’être principalement touché par la pénurie de semi-conducteurs, associée à la raréfaction des matières premières et à l’augmentation de leurs prix. La conséquence directe se traduit par un allongement des délais de livraison et une répercussion sur les tarifs des modèles », souligne-t-on chez Ford.
Une stabilité du marché attendue
Un constat validé par Volkswagen Véhicules Utilitaires : « Dans un marché des véhicules utilitaires en hausse de 2,89 % à 379 137 unités en 2021 par rapport à 2020, une année difficile en raison du contexte sanitaire, la marque a immatriculé 15 313 véhicules (VP + VU), principalement sur le marché des véhicules utilitaires (14 596), en recul de – 4,32%. Sur les seuls VU, cette baisse a atteint 4,39 %, expose le constructeur allemand. Cette performance inférieure à celle du marché s’explique essentiellement par la pénurie de semi-conducteurs et d’équipements qui handicape tout particulièrement notre marque et génère d’importants retards de livraison. »
Et l’année 2022 ne s’annonce pas sous de meilleurs auspices. Toujours selon Volkswagen VU, le marché demeure très instable en raison des incertitudes liées à la situation sanitaire et à la crise ukrainienne « qui a un impact direct sur nos productions, tant pour les véhicules que les composants divers. Le marché reste estimé à environ 400 000 immatriculations, avec 17 915 immatriculations pour Volkswagen VU », note le constructeur.
Quelle année 2022 ?
Sachant que dans ce contexte pour le moins perturbé, la prévision est un art difficile. « Pour 2022, il est compliqué de proposer des estimations au vu des incertitudes globales. Nous travaillons sur une prévision de marché à environ 400 000 unités, avec une seconde partie d’année moins affectée par les problèmes de production », avance-t-on chez Citroën. Ce que confirme Iveco : « Le marché en France à fin février 2022 pointait à – 15 % par rapport à 2021. Il demeure très incertain. Nous espérons une reprise au second semestre avec l’amélioration de la situation liée aux semi-conducteurs. Mais dans le contexte actuel de guerre, il est difficile de faire des prévisions », commente le constructeur italien.
Pour 2022, Guillaume Barbet, directeur des ventes de Nissan, estime que la crise des semi-conducteurs est toujours d’actualité, avec un impact sur les plannings de production de toute l’industrie. « Cette situation influe naturellement sur les délais de livraison. Année d’élection présidentielle oblige, il y a en outre, comme de coutume dans pareil cas, une forme de latence sur les premiers mois de l’exercice. Malgré cela, la reprise économique semble se confirmer et nous prévoyions une année 2022 en progression à environ 402 000 unités, soit + 2,8 % par rapport à 2021. Malheureusement, l’actualité rebat les cartes et il semble compliqué d’entrevoir un atterrissage très clair », complète Guillaume Barbet.
Des prises de commandes
Avec cependant une nuance que souligne Volkswagen Véhicules Utilitaires en revenant sur ses chiffres de ventes pour 2021 : « Cette performance moyenne en immatriculations masque un impressionnant portefeuille de commandes clients, équivalent à six mois de ventes non immatriculées pour les raisons évoquées ci-dessus. Et ces modèles ne pourront être livrées qu’en 2022 ou 2023, selon les circonstances », rappelle le constructeur. « Cette crise des semi-conducteurs influe sur le marché des véhicules utilitaires légers, mais la dynamique de prise de commandes reste excellente, avec à la clé des portefeuilles de commandes historiquement élevés pour Renault », avalise Thibaut Macé, responsable marketing VU France.