
Si les motorisations alternatives prennent une place toujours plus importante sous les capots des véhicules des Français et, à plus forte raison, au sein de flottes soucieuses de leur impact écologique, les motorisations thermiques resteront, dans les décennies à venir, la technologie de propulsion dominante. C’est en tout cas ce qu’affirment l’ensemble des constructeurs, équipementiers et spécialistes du sujet interrogés par nos soins, à l’image de Dominique Herrier, directeur adjoint du centre de résultats transports de l’IFPEN. Cet organisme public de recherche, d’innovation et de formation est actif dans les domaines de l’énergie, du...
Si les motorisations alternatives prennent une place toujours plus importante sous les capots des véhicules des Français et, à plus forte raison, au sein de flottes soucieuses de leur impact écologique, les motorisations thermiques resteront, dans les décennies à venir, la technologie de propulsion dominante. C’est en tout cas ce qu’affirment l’ensemble des constructeurs, équipementiers et spécialistes du sujet interrogés par nos soins, à l’image de Dominique Herrier, directeur adjoint du centre de résultats transports de l’IFPEN. Cet organisme public de recherche, d’innovation et de formation est actif dans les domaines de l’énergie, du transport et de l’environnement.
Le thermique aura toujours la part belle
« Le thermique a encore de beaux jours devant lui. Seul, mais aussi de plus au plus souvent associé à des composants électriques afin de former des chaînes de propulsion hybride. L’objectif demeure bien de proposer dans l’avenir des chaînes de propulsion améliorées à l’heure où la chasse aux émissions de CO2 et à la consommation de carburant constitue la priorité numéro 1 », synthétise Dominique Herrier.
Un constat partagé par Sylvain Allano, directeur scientifique de PSA Peugeot Citroën, pour qui le futur de l’automobile passe par un parc diversifié de motorisations, mais encore largement dominé par le thermique. « Dans les centres urbains et péri-urbains, la mobilité électrique fait sens, souligne le responsable. C’est pourquoi nous nous engageons dans cette voie sans pour autant nous limiter, sachant qu’il existera encore nombre d’applications où le thermique sera nécessaire. Sans compter qu’il y a des marges de progression importantes avec le thermique, notamment dans l’architecture moteur. D’ici 2020, pas de doute : la très grande majorité du parc roulant sera encore thermique », conclut Sylvain Allano.
Dans ce contexte, le groupe PSA s’attache à travailler sur les motorisations thermiques avec un fil conducteur, produire des blocs capables de se conformer aux normes qui succéderont à Euro 7. Pour les moteurs essence, plusieurs leviers sont actionnés pour atteindre cet objectif, dont le downsizing : à performances identiques, les moteurs de demain seront plus petits. Une démarche de downsizing qui s’est déjà traduite concrètement sur le marché avec, par exemple, des véhicules de motorisations 2 ou 3 cylindres. Ce procédé permet de diminuer les pertes par frottement, les pertes thermiques et de transvasement, et donc de limiter la consommation. Une consommation également tirée vers le bas par la suralimentation, technologie émergente sur les moteurs essence turbo-compresseurs.
Objectif : l’accroissement du rendement
« Du côté des blocs essence, nous avons depuis les années 2000 emboîté le pas au diesel avec le développement de la suralimentation et de l’injection directe », confirme Jean-Daniel Mettetal, responsable de l’activité essence pour Bosch. Il ne sera ainsi pas rare de voir dans les prochaines années des moteurs essence avec une pression d’injection de 350 bars, au lieu des 200 bars actuels.
« Ces moteurs essence toujours plus efficaces joueront à l’avenir un rôle prédominant à l’échelle mondiale », prédit Dominique Herrier. Avec des effets déjà perceptibles sur la composition du parc automobile français. « Nous nous situons actuellement dans une période de transition, avec une disparition progressive des diesels sur les segments A et B. Même si les constructeurs continuent de proposer les deux types de motorisations pour les modèles des segments C et supérieur, il n’est pas impossible que le diesel se fasse supplanter à l’avenir sur les gammes moyennes », poursuit le représentant de l’IFPEN.
Cette évolution se situe à la conjonction de deux phénomènes : d’une part, comme expliqué précédemment, du fait des améliorations de rendement encore possibles sur les moteurs essence, ce qui les aidera à se positionner face aux diesels les plus vertueux. Et d’autre part, du fait du renchérissement inévitable des dispositifs de dépollution dont devront se doter les futurs diesels pour se conformer aux objectifs toujours plus drastiques de réduction des émissions de polluants imposés par l’Europe.
Une tendance d’ores et déjà confirmée par les données fournies chaque mois par le CCFA : si, en 2012, la proportion des diesels atteignait 73 % du marché VP, ce pourcentage a reculé à 59 % pour les premiers mois de 2015. Un mouvement plus timide dans les flottes, toujours très majoritairement tournées vers le diesel, bien plus avantageux fiscalement.
Le match essence-diesel est-il déjà joué ?
Mais cette donne fiscale serait sur le point d’évoluer. La nouvelle a été relayée il y a quelques mois lors du point presse annuel de la Collective du bioéthanol : le rééquilibrage des TVA du diesel et de l’essence pour les professionnels pourrait donc intervenir en 2015, selon Sylvain Demoures, secrétaire général du Syndicat national des producteurs d’alcool agricole (SNPAA). « Nous avons obtenu un engagement ministériel sur cet alignement. Cette mesure pourrait figurer dans le projet de loi de finance publié d’ici la fin de l’année », avait-il alors expliqué. À voir. Avec la fiscalité du véhicule d’entreprise, la prudence s’impose.
Ce rééquilibrage est déjà préconisé par le Comité pour la fiscalité écologique (CFE) qui a rendu l’an dernier son rapport d’étape au gouvernement, avec un programme articulé autour de deux axes : la baisse de l’avantage fiscal accordé au diesel et la mise en place d’une taxe carbone. Le CFE préconisait alors une hausse de la TIC de 0,4 centime sur le gazole, puis une diminution de 1 centime par an de l’écart de taxation entre essence et diesel. À ce rythme, l’écart de fiscalité entre les deux carburants rejoindrait la moyenne européenne en 2018.
Attention ! Le diesel n’a pas dit son dernier mot
Pour compenser cette augmentation de la taxation du diesel, le CFE suggère que les entreprises, à la tête de parcs très majoritairement diésélisés, bénéficient d’un financement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) afin de baisser leurs coûts salariaux.
Dans ce contexte, certains verraient déjà la disparition d’ici quelques années du diesel dans le parc français et les flottes. Un propos que nuance Antonio Balboa, responsable de l’activité diesel pour Bosch : « Déjà, dans les années 95, certains prédisaient la fin du diesel en évoquant les contraintes liées aux émissions de NOx et aux particules. Aujourd’hui, l’histoire se répète mais la technologie, elle, ne cesse d’évoluer et les gains en CO2 sont aussi au rendez-vous. »
Le diesel n’est donc pas au point mort, avec un rendement qui pourrait encore s’améliorer d’au moins une dizaine de pourcents. Et ceci, par plusieurs biais sur lesquels réfléchissent les acteurs de l’industrie automobile. Amélioration de la qualité de pulvérisation du carburant dans la chambre de combustion grâce à l’injection très haute pression de 2 500 bars ou plus, suralimentation du moteur combinée au recyclage des gaz brûlés et, enfin, travail sur la diminution des frottements, autant de pistes étudiées pour améliorer le rendement des blocs diesel.
Aller plus loin avec l’hybridation
L’IFPEN teste par ailleurs des systèmes plus en rupture pour faire varier le rapport volumétrique du moteur et ajuster ainsi la performance pour toutes les conditions d’usage. Avec à la clé un rendement adapté de façon optimale. « De manière globale, les diesels ont déjà beaucoup évolué, avec des niveaux d’émissions et de consommation tout à fait acceptables. Ils peuvent encore prétendre à des améliorations, mais l’évolution sera probablement plus modérée que ce qu’elle a déjà été », tempère Dominique Herrier.
Parmi les pistes efficaces pour optimiser les motorisations thermiques essence ou diesel, l’électrification de la chaîne de propulsion se pose aux premiers rangs. Celle-ci permet notamment de faire en sorte que le moteur thermique fonctionne sur sa zone de rendement optimal le plus souvent possible. Et elle donne la possibilité de récupérer les pertes inhérentes au freinage. Enfin, autre argument qui motive les constructeurs, le rendement intrinsèque des motorisations électriques s’avère nettement plus élevé que celui des motorisations thermiques, avec des niveaux entre 85 et 90 %, un pourcentage qui pourrait passer à 95 % dans les prochaines années.
Le constat est donc limpide : l’avenir de l’automobile passe par l’hybridation des chaînes de traction, et dans une moindre mesure par les modèles électriques purs pour certains usages dans l’état actuel des technologies.
Pour le moment, les ventes d’hybrides demeurent cependant restreintes dans un contexte où les motorisations essence et diesel répondent aux exigences européennes anti-pollution. Mais il y a fort à parier que les constructeurs n’auront d’autre choix que de miser sur l’hybridation pour se conformer aux législations à venir. En effet, si l’objectif de 95 g/km de CO2 à l’horizon 2020 n’inquiète pas la plupart des constructeurs, les futurs seuils potentiellement fixés entre 75 et 80 g d’ici 2025 pourraient leur donner davantage de fil à retordre et les obliger à diversifier leur mix de production.
Les modèles hybrides s’imposent peu à peu
« L’hybridation va se développer plus rapidement que l’électrique pur car cette technologie ne se heurte pas à la double problématique du coût des batteries et de l’autonomie. Les technologies d’hybridation légères (mild hybrid) jusqu’aux technologies d’hybridation plus poussées (full hybrid), voire rechargeables (plug-in hybrid), couvriront largement l’ensemble des besoins avec un bon compromis entre coût de la technologie et performances », argumente Dominique Herrier. L’IFPEN prédit ainsi une montée en puissance significative de l’hybride : d’ici 2025, la moitié du mix de production de certains constructeurs pourrait être hybride Et pour aller plus loin encore dans l’électrification des chaînes de traction, la majorité des constructeurs se concentrent maintenant sur l’hybride essence rechargeable. « L’hybrid plug-in s’avère être un bon compromis pour gérer la transition entre thermique et électrique. Proposer un véhicule qui garantisse 50 km d’autonomie électrique avec un coût de l’énergie moindre que le pétrole constitue un argument de choix », confirme Dominique Herrier.
Après le relatif échec de l’hybride diesel, PSA Peugeot Citroën souhaite d’ailleurs se réorienter en lançant une gamme hybride essence rechargeable à partir de 2019. « L’hybride seul ne suffit plus, l’hybride plug-in s’impose comme une nécessité dans les années à venir, souligne Sylvain Allano. Les consommateurs attendent de pouvoir parcourir davantage de kilomètres en 100 % électrique, entre autres pour faire face aux futures restrictions de circulation dans les centres des villes. ».
L’hybride rechargeable, technologie du futur
Toyota se veut plus prudent : « Nous avons déjà vendu près de 70 000 Prius hybrid plug-in et nous sommes prêts à offrir davantage d’hybrides rechargeables si nous constatons une réelle demande. Ce qui n’est pas encore le cas du fait de plusieurs facteurs comme le surcoût, la nécessité de brancher le véhicule, la disponibilité des bornes, le temps de charge », justifie Jean-Yves Jault, directeur de la communication de Toyota Europe. L’actualité récente confirme cette position : Toyota vient d’annoncer la fin de la production de sa Prius plug-in rechargeable, en attendant la seconde génération. En matière de motorisations, l’avenir reste à écrire.
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