
La volonté de passer par des négociations tripartites provient à la fois des clients et des constructeurs, rappelle Guillaume Maureau, directeur général adjoint d’ALD Automotive : « Les grands comptes souhaitaient avoir la main sur la négociation des remises, sans dépendre de celles obtenues par les loueurs. Et les constructeurs étaient intéressés par la possibilité de discuter avec les clients finals pour mieux maîtriser les enjeux de volume et de durée. Ils se montrent alors plus motivés car ils savent à quels clients s’appliqueront les remises, contrairement à celles accordées aux loueurs. »
« Ce fonctionnement amène à respecter une certaine...
La volonté de passer par des négociations tripartites provient à la fois des clients et des constructeurs, rappelle Guillaume Maureau, directeur général adjoint d’ALD Automotive : « Les grands comptes souhaitaient avoir la main sur la négociation des remises, sans dépendre de celles obtenues par les loueurs. Et les constructeurs étaient intéressés par la possibilité de discuter avec les clients finals pour mieux maîtriser les enjeux de volume et de durée. Ils se montrent alors plus motivés car ils savent à quels clients s’appliqueront les remises, contrairement à celles accordées aux loueurs. »
« Ce fonctionnement amène à respecter une certaine équité, à savoir si le client final n’est pas une entreprise avec laquelle nous travaillons par ailleurs. Quant au client, il maîtrise toute la chaîne des négociations et est assuré d’une transparence sur les prix », confirme pour sa part Hugues de Laage de Meux, directeur de PSA Corporate Sales France.
Des grands comptes aux comptes moyens
Si les négociations tripartites ne se pratiquaient qu’avec les grands comptes il y a dix ans, elles se sont généralisées pour les comptes moyens. « Et des flottes de quelques dizaines de véhicules s’y mettent désormais. 80 % des véhicules que nous louons en LLD ont fait l’objet d’accords tripartites », rapporte Guillaume Maureau. Un chiffre élevé dû au poids des volumes chez les grands comptes.
« C’est devenu un standard, complète Vincent Muyllaert, directeur des opérations et de l’informatique chez Alphabet. Dès que le parc compte plus de 10 véhicules, nous pouvons être amenés à proposer au client des négociations tripartites, surtout s’il s’adresse à une marque premium. Pour négocier avec un constructeur généraliste, la flotte doit déjà être plus importante. Cela dépend aussi du potentiel du client, de la croissance de son parc, de ses besoins spécifiques, de sa fidélité à une marque, etc. De fait, les constructeurs apprécient d’avoir une visibilité sur ce potentiel. »
Un potentiel qui intéresse aussi Volkswagen : « Nous menons des négociations tripartites avec des parcs en général supérieurs à 50 véhicules et avec des volumes annuels d’achat de 15 à 20 véhicules, mais il y a toujours de la souplesse, précise Olivier Dupont, chef du service ventes aux entreprises. »
La remise, mode d’emploi
Pour le Groupe PSA, Hugues de Laage de Meux se montre plus restrictif : « Entre 10 et 50 véhicules, les négociations tripartites demeurent exceptionnelles. Avec les PME, il est souvent plus simple de s’adresser à un seul interlocuteur. »
Les règles du jeu se veulent apparemment simples : le client négocie une remise auprès du constructeur. Le loueur l’applique ensuite en construisant son loyer sur cette base. « Pour les loueurs, l’impact est neutre, estime Guillaume Maureau pour ALD : la négociation tripartite fait surtout peser la pression sur le constructeur qui accorde la remise. Pour notre part, nous l’appliquons, ce qui touche ensuite les loyers qui seront plus faibles. Mais nous n’intervenons pas dans les négociations entre le client et le constructeur pour l’obtention de remises et de primes de volume. »
Des négociations parallèles
Les deux négociations ne se font cependant pas successivement mais plutôt en parallèle. « Le client peut être un client régulier mais il peut aussi être amené par le loueur qui nous demande de l’accompagner », souligne Olivier Dupont pour Volkswagen.
« Nous sommes à l’initiative d’un grand nombre de contrats tripartites, sauf chez les grands comptes qui les pratiquent déjà et possèdent leurs propres contacts, note Vincent Muyllaert pour Alphabet. Notre intérêt, c’est de faire bénéficier le client de conditions supplémentaires et donc d’un loyer moins élevé. En tant que loueur, nous l’accompagnons et pouvons faire la demande auprès des constructeurs, mais nous ne négocions pas pour lui. » Parmi les conseils donnés par Vincent Muyllaert : « Il peut être préférable de privilégier trois marques plutôt que six pour atteindre un certain volume, et de concentrer ses demandes dans le temps afin de négocier un accord sur un plus grand nombre de véhicules. »
Avant tout, satisfaire le client
« Le client arrive avec des modèles qu’il souhaite référencer et un budget, explique Olivier Dupont pour Volkswagen. Nous pouvons aussi être force de proposition. C’est à nous, loueur et constructeurs, de trouver ensemble la solution et de voir ce qu’il est possible d’optimiser. Suggérer par exemple une peinture gris métallisé plutôt que rouge, ou bien une motorisation pour accroître la valeur résiduelle. » Olivier Dupont poursuit : « Si la cible budgétaire n’est pas atteinte, nous pouvons mettre en avant d’autres versions ou modèles. En tant que constructeur, nous pouvons revoir nos conditions commerciales ou le loueur peut voir ce qu’il peut apporter en plus. Avec un objectif commun : répondre aux attentes du client. Cela fonctionne en bonne intelligence sur la base de la confiance et nous avons des relations étroites avec tous les loueurs. »
Il existe donc tous les cas de figure, y compris des tours de table à trois et des appels d’offres très différenciés, avec les constructeurs d’un côté et les loueurs de l’autre.

de flotte, Konica-Minolta
« Je travaille avec deux loueurs que je mets systématiquement en concurrence dans le cadre de tripartites mises à jour tous les ans », relate Pascal Gouaillier pour Konica-Minolta. À la tête d’une flotte de 1 082 véhicules (60 % de VP, 40 % de VU), ce gestionnaire a opté pour des contrats sur trois ans. Il négocie avec les constructeurs en amont, une fois par an, avec à la clé des remises de 20 à 30 %, « parfois plus ».
Pour Pascal Gouaillier, les remises ne constituent qu’un point de départ : « La VR va jouer sur le loyer et varie selon les loueurs. Certains cherchent à valoriser plus un modèle qu’un autre et feront des efforts. Certains apportent aussi une aide complémentaire, comme une remise obtenue auprès du distributeur. Sur les volumes négociés, grappiller un demi-point de plus avec le loueur a un impact. »
La remise n’est pas le seul élément déterminant pour calculer le loyer, ce dernier fluctuant en fonction des VR et de taux bancaires actuellement très bas. « L’ancienneté du modèle a aussi un impact fort : la remise sera moindre avec un modèle comme notre dernière Citroën C4 Cactus qui va sortir sous peu, mais la VR sera plus élevée. Le loyer ne sera donc peut-être pas plus cher que pour un ancien modèle bénéficiant d’une meilleure remise. Le client doit donc s’assurer auprès des loueurs de la validité de ses choix sur les loyers », rappelle Hugues de Laage de Meux pour le Groupe PSA. D’où la nécessité pour le client de procéder à des simulations avec les loueurs, d’autant que tous n’appliquent pas une VR identique. Ce qui nécessite des allers-retours entre client et constructeur, client et loueur. Et les constructeurs connaissent leurs atouts (ou leurs faiblesses) en matière de VR.
Entrer dans la cible budgétaire
« La remise n’est qu’une partie de l’équation, affirme Olivier Dupont pour Volkswagen. L’objectif reste d’entrer dans une cible budgétaire. La force dans ces négociations, c’est une VR robuste pour optimiser le TCO. Nous recherchons toujours une solution, en jouant sur les versions, les motorisations, les équipements. Mais si nous ne rentrons pas dans le budget, nous l’assumons dans la mesure où nous ne souhaitons pas faire de surenchère destructrice pour les VR dans la durée. »
« Constructeurs ou loueurs, l’important, c’est de travailler ensemble pour offrir la meilleure offre et la meilleure solution. Il y a presque toujours un échange pour optimiser les paramètres car le TCO regroupe un ensemble de données : le prix du véhicule, la remise, la VR, les taux, les services, etc. Il n’y a pas de règles gravées dans le marbre », résume Olivier Dupont.
« La négociation tripartite est un travail collectif entre client, loueur et constructeur. En fonction des modèles choisis et des remises accordées, l’objectif reste d’optimiser le loyer. En tant que constructeur, nous nous assurons que les conditions que nous offrons aux clients sont traduites de façon optimale dans les loyers. Notre positionnement en dépend », confirme Hugues de Laage de Meux pour le Groupe PSA.
L’objectif : optimiser le loyer et le TCO
Car le client, en fin de compte, ne se décide pas en fonction de la remise mais du loyer et du TCO. « Le client doit valider avec nous que ses choix et les remises obtenues vont l’amener à obtenir un meilleur loyer et surtout un meilleur TCO », confirme Guillaume Maureau pour ALD. Et avec le TCO, de nombreuses données sont à prendre en compte. Obtenir une forte remise sur un véhicule très émetteur de CO2, voire un loyer tiré vers le bas, n’a pas d’intérêt : cet avantage sera largement compensé par le coût du malus et de la TVS. Un constat validé par Pascal Gouaillier pour Konica-Minolta : « Dès que j’ai les propositions des constructeurs, je fais réaliser des simulations chez les loueurs et je construis des grilles de comparaison sur la base du TCO.
En effet, selon le modèle, la motorisation, les émissions de CO2 et les prix remisés, l’impact sur la fiscalité peut changer. Les avantages en nature et donc les charges sociales sont par exemple calculés sur les prix remisés. Cela a aussi un impact sur les amortissements non déductibles. Et je regarde de près le CO2. » Cas typique : « La Peugeot 508 ne se fera plus qu’en 180 ch, les motorisations 120 et 150 ch disparaissant temporairement. Je sais déjà que je vais devoir abandonner ce modèle dont le TCO va trop augmenter », ajoute Pascal Gouaillier.
Les remises obtenues ont aussi un impact sur les car policies, même si les clients arrivent avec des demandes très précises. « Un choix peut entraîner l’entrée ou la sortie d’un modèle », fait remarquer Guillaume Maureau pour ALD.
Illustration avec Konica-Minolta qui prend 80 % de ses véhicules auprès du Groupe PSA : « Avec une car policy assez stricte et précise, nous disposons de peu de marge de manœuvre. Les remises n’influent donc pas trop sur les choix. Mais nous avons dû sortir le 3008 lors de l’arrivée du dernier modèle : il est devenu plus cher et les remises moins élevées. Nous l’avons remplacé par le Kadjar », explique Pascal Gouaillier.
Un impact direct sur les car policies
« Au-delà des remises, échanger avec les constructeurs sur les modèles et les sorties contribue à faire évoluer la car policy et à anticiper, à trouver des modèles cohérents avec les besoins des conducteurs et les budgets. Pour chaque catégorie de collaborateurs, la limite est basée sur les prix catalogues ; mais le loyer et le TCO sont calculés sur la base du prix remisé », souligne Pascal Gouaillier.
« La négociation tripartite demeure un enjeu commercial et contribue aussi à affiner une car policy, indique Vincent Muyllaert pour Alphabet. L’offre de véhicules se fait toujours plus riche. Il faut trouver le bon produit, adapté aux besoins et au budget du client. Ce qui n’est pas toujours facile. Travailler la copie avec le constructeur aide à peaufiner et rationaliser une car policy. » Vincent Muyllaert poursuit : « En tant que loueur, nous orientons le client. Le choix de la finition et des équipements est très souvent déterminant. Ainsi, pour avoir le bluetooth, le radar de recul et l’assistance freinage, il suffit de retenir une gamme standard chez un constructeur ; chez un autre, il faut passer en business. Et nous conseillons au client des solutions alternatives quand nous savons qu’un modèle sera bientôt en fin de vie, afin qu’il puisse commander toute l’année dans le respect de sa car policy. »
Des relations sur la durée
« Au-delà de 50 véhicules et plus la taille du parc progresse, plus les dossiers se font complexes. Négocier en direct nous permet d’apporter un conseil : il n’y a pas que les prix mais aussi le service. Et l’échange aide à mieux répondre aux besoins car toutes les négociations se font sur mesure. Il faut entendre les besoins et nous adapter, travailler avec le client sur le choix du véhicule pour apporter une valeur ajoutée. L’accompagnement est central dans le cadre d’une stratégie de fidélisation des grands comptes », détaille Hugues de Laage de Meux pour le Groupe PSA.
De fait, le client peut avoir besoin de finitions business sur des VP mais d’équipements spécifiques sur des utilitaires, il peut privilégier des motorisations essence pour des raisons de développement durable, etc. Dans le cadre de négociations tripartites, constructeur et loueur ont alors un rôle de conseil.
Un rôle de conseil pour les prestataires
Pour Olivier Dupont de Volkswagen, au-delà des besoins et attentes du client, l’important reste aussi de satisfaire des collaborateurs valorisés par le véhicule. « Le véhicule demeure un sujet délicat car il constitue un outil de management. La relation avec le client aide à mieux le connaître, à savoir comment il gère son parc et emploie ses véhicules, quels sont ses besoins et ses contraintes mais aussi ce qu’attendent les collaborateurs. Il faut que le client et le conducteur s’y retrouvent. D’où la nécessité de ne pas faire de propositions de court terme, de ne pas mettre en avant un modèle alternatif qui ne satisferait pas les collaborateurs et donc le client, bien qu’il corresponde au budget. Cela fragiliserait la relation à long terme », pointe Olivier Dupont.
« Le client peut aussi avoir des besoins en nouvelles mobilité ou en véhicules connectés. C’est à nous d’apporter la bonne réponse au bon endroit. Nous l’aidons à affiner sa car policy, à faire évoluer la flotte en fonction de ses objectifs financiers et RH. Le conseil et le service sont aussi des sources d’optimisation budgétaire », complète Olivier Dupont.
Répondre aux besoins émergents
Le Groupe PSA aligne ainsi des services connectés : « Cela facilite le suivi kilométrique, ce qui a un impact sur le respect des contrats avec les loueurs, et le suivi des consommations », argumente Hugues de Laage de Meux. D’autant que Free2Move Lease, qui remplace l’ancienne captive de PSA, multiplie les offres de solutions connectées, d’autopartage et de nouvelles mobilités. Des choix qui peuvent aussi avoir un impact sur les remises finales…
Autre élément essentiel : la rapidité et la réactivité du constructeur. « Aujourd’hui, tout s’accélère. Si le constructeur n’est pas assez rapide, il peut laisser échapper un accord », conclut Vincent Muyllaert pour Alphabet. À bon entendeur…
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