
Dans le cadre du pacte vert pour l’Europe et du plan d’actions pour l’économie circulaire, la Commission européenne souhaite moderniser la législation sur les batteries. En effet, la dernière directive relative aux batteries date de 2006. Or, « la demande globale de batteries devrait être multipliée par quatorze d’ici 2030 par rapport à 2018, principalement en raison du développement des transports électriques, et l’Union européenne pourrait représente 17 % de la demande mondiale », estime la Commission.
Une demande de batteries multipliée par 14 entre 2018 et 2030
En conséquence, l’UE aurait besoin de cinq fois plus de cobalt et 18 fois plus de lithium en 2030 ; et jusqu’à quinze fois plus de cobalt et soixante fois plus de lithium en 2050. Le nombre de batteries lithium prêtes à recyclés serait de fait multiplié par 700 entre 2020 et 2040.
La Commission a donc publié le 10 décembre 2020 une nouvelle proposition de règlement regroupant treize mesures. Celles-ci établissent d’une part des exigences de durabilité, de performance et de sécurité pour les batteries avec des obligations d’étiquetage et d’information ; et d’autre part des règles concernant la gestion de la fin de vie des batteries, à savoir la collecte, le recyclage et la valorisation des matériaux. Ces mesures seront adoptées à l’échelle de l’UE et juridiquement contraignantes. Seules les batteries les respectant bénéficieront du principe de libre circulation sur le marché unique (art. 3).
Une catégorie pour les batteries de véhicules électriques et hybrides
Nous nous sommes penchés sur les mesures destinées aux batteries de véhicules électriques et hybrides. La Commission propose justement de créer une nouvelle catégorie spécifique aux batteries conçues pour la traction des véhicules électriques et hybrides pour le transport routier (art. 2). L’enjeu est de les différencier des batteries automobiles (utilisées pour le démarrage, l’éclairage ou l’allumage), des batteries portables (pesant moins de 5 kg) et des batteries industrielles qui comprennent notamment les systèmes de stockage stationnaire.
Une empreinte carbone à limiter dès le 1er juillet 2027
Dès le 1er juillet 2024, les fabricants de batteries industrielles et de VE auront l’obligation de calculer et déclarer leur empreinte carbone (art. 7). Puis, dès le 1er juillet 2026, ces batteries seront soumises à une classification en fonction de leur performance. Et dès le 1er juillet 2027, des seuils maximaux de carbone à ne pas dépasser entreront en application en tant que condition de mise sur le marché de l’UE. Ces informations seront disponibles via un QR Code apposé sur la batterie (art. 13).
Des objectifs d’intégration de matériaux recyclés
Les fabricants devront aussi déclarer obligatoirement dès 2025 les taux de matériaux recyclés valorisés dans leurs batteries neuves de VE, industrielles et automobiles. Pour les batteries qui contiennent du cobalt, du plomb du lithium ou du nickel, cette information devra figurer dans la documentation technique dès le 1er janvier 2027 (art. 8).
Par la suite, les fabricants auront de plus des niveaux minimaux à respecter : 85 % de plomb, 12 % de cobalt, 4 % de lithium et 4 % de nickel devront provenir du recyclage à partir du 1er janvier 2030 ; puis 20 % de cobalt, 12 % de nickel et 10 % de lithium à partir du 1er janvier 2035. Là encore, ces informations seront disponibles via un QR Code apposé sur la batterie (art. 13).
Les fabricants devront également fournir des informations sur la manière dont leur approvisionnement en matériaux répond aux critères de responsabilité sociale (art. 39). La Commission prévoit ainsi un contrôle préalable de la chaîne d’approvisionnement en matières premières pour les batteries industrielles et de VE, qu’elle souhaiterait obligatoire.
Une information obligatoire sur les performances et la durabilité
En parallèle, la Commission veut fixer à court terme des exigences en matière d’information sur les performances et la durabilité des batteries de VE rechargeables et industrielles (art. 10). « Cela contribuerait à harmoniser le calcul et la disponibilité des caractéristiques de performance et de durabilité des batteries et permettrait ainsi aux consommateurs et aux entreprises de prendre des décisions en connaissance de cause », estime-t-elle.
Pour aller plus loin, la Commission souhaite mettre en place dès le 1er janvier 2026 un système d’échange électronique et un système de « passeport des batteries » afin d’accroître la transparence du marché et la traçabilité de ces grandes batteries tout au long de leur cycle de vie.
Un cadre réglementaire pour la seconde vie des batteries de VE
De plus, ces mêmes batteries devront inclure un système de gestion de batterie (BMS) (art. 14). Celui-ci stockera les données permettant de déterminer l’état de santé et la durée de vie prévue de la batterie. L’accès à ces données sera accordé sur une base non discriminatoire « à la personne physique ou morale qui a légalement acheté la batterie ou à tout tiers agissant en son nom, à tout moment, pour évaluer la valeur résiduelle de la batterie ; faciliter la réutilisation, la reconversion ou le reconditionnement de la batterie ou bien mettre la batterie à la disposition d’agrégateurs indépendants exploitant des centrales électriques virtuelles sur les réseaux électriques », précise la Commission.
Un cadre facilitera la réaffectation des batteries de VE afin de leur donner une seconde vie (art. 59), « par exemple en tant que systèmes de stockage d’énergie par batteries stationnaires ou par leur intégration dans les réseaux électriques en tant que ressources énergétiques », illustre la Commission.
Une réglementation de la collecte des batteries
La totalité des batteries automobiles, industrielles et de véhicules électriques devra être comptée, suivie et déclarée, puis collectée en fin de vie et recyclée. Les fabricants pourront organiser la collecte de manière individuelle ou par le biais d’une organisation de responsabilité des producteurs (art. 49). « La collecte doit être gratuite et sans obligation pour l’utilisateur final d’acheter une nouvelle batterie », spécifie la Commission.
La Commission veut mettre un place un nouveau système de déclaration dans le but d’augmenter le taux de collecte. Elle envisage de définir des cibles de collecte pour les batteries alimentant les véhicules de transport léger, voire des objectifs explicites de collecte.
Des taux de recyclage et de valorisation des matériaux
Côté recyclage, les batteries lithium-ion devront avoir un rendement minimal de recyclage de 65 % d’ici 2025 et 70 % d’ici 2030 (art. 57). La Commission propose en outre des taux de récupération des matériaux de 35 % pour le lithium et 90 % pour le cobalt, le nickel et le cuivre en 2025, puis respectivement 70 % et 95 % en 2030. Les batteries plomb-acide devront quant à elles atteindre un rendement de recyclage de 75 % d’ici 2025 puis 80 % d’ici 2030, avec des taux de récupération du plomb de 90 % en 2025 et 95 % en 2030.
Ce cadre juridique prévisible « encouragerait les acteurs du marché à investir dans des technologies de recyclage qui, autrement, ne seraient pas développées parce qu’elles ne sont pas compétitives en termes de coûts par rapport à la production de matières premières primaires », argue la Commission.