
Choix des modèles, des prestataires, arbitrage des contrats de location : les leviers sur lesquels agir sont nombreux pour optimiser une flotte. Mais un poste de coûts demeure difficilement maîtrisable par le gestionnaire de parc : celui des dégradations commises par les conducteurs sur les véhicules. Et si ces dommages ne peuvent pas être imputés à ce responsable, les frais facturés lors de la restitution pèsent sur son budget … et sur l’appréciation de sa bonne gestion.
À défaut de prendre le volant à la place de ses collègues, reste à ce responsable la possibilité de mobiliser les outils pour prévenir ces dégradations. Par exemple en...
Choix des modèles, des prestataires, arbitrage des contrats de location : les leviers sur lesquels agir sont nombreux pour optimiser une flotte. Mais un poste de coûts demeure difficilement maîtrisable par le gestionnaire de parc : celui des dégradations commises par les conducteurs sur les véhicules. Et si ces dommages ne peuvent pas être imputés à ce responsable, les frais facturés lors de la restitution pèsent sur son budget … et sur l’appréciation de sa bonne gestion.
À défaut de prendre le volant à la place de ses collègues, reste à ce responsable la possibilité de mobiliser les outils pour prévenir ces dégradations. Par exemple en améliorant l’information des conducteurs sur les conséquences des dommages commis sur les voitures. Car si les frais de restitution constituent une évidence pour le gestionnaire, ils ne sont pas forcément bien appréciés ni connus des autres salariés.
Communiquer auprès des conducteurs
Une communication soutenue s’impose donc auprès des conducteurs pour mieux les informer des conséquences des dégradations. Des informations peuvent passer par la rédaction d’une charte à leur usage : « Il faut leur indiquer qu’ils disposent d’un véhicule pendant une durée déterminée et qu’ils en ont la responsabilité jusqu’à la restitution », préconise Pascal Pilleyre, directeur commercial chez le fleeteur Fatec.
Une démarche à laquelle s’est attelée Ludivine Nzuzi. Cette gestionnaire est à la tête d’une flotte d’environ 200 véhicules, des VP essentiellement, employés par la population parisienne du siège du spécialiste de l’hôtellerie Accor.
« Je demande aux collaborateurs de veiller à garder le véhicule en bon état mécanique et de carrosserie tout au long de sa vie », indique Ludivine Nzuzi. Une requête transmise via un « guide de la restitution » que cette responsable a rédigé. « Les conducteurs peuvent y prendre connaissance de ce qui est toléré ou non par le loueur lorsqu’ils rendent les véhicules », complète cette responsable.

Plus en amont, quand un collaborateur entre chez Accor et qu’un véhicule lui est attribué, il est formé au processus automobile propre à l’entreprise. « La flotte lui est présentée avec des explications sur son fonctionnement. Cela concerne l’assurance du véhicule et les outils avec lesquels celui-ci est livré comme la carte Total et les réseaux Euromaster et Carglass pour la prise en charge des réparations », expose Ludivine Nzuzi. Qui constate ainsi des différences entre les dommages subis par les voitures des Parisiens intra-muros et ceux qui habitent à l’extérieur : « Les premiers ont plus de rayures et je leur conseille donc d’éviter de se garer trop près d’un autre véhicule sur la voie publique. »
Prévenir plutôt que guérir
Pour ses clients, le fleeteur Fatec double la charte de ces entreprises d’un « dossier conducteur » rédigé par ses soins avec des rappels sur les notions d’utilisation du véhicule. Les loueurs participent aussi à cette démarche de responsabilisation avec des documents didactiques sur la restitution à remettre aux conducteurs. « Pour nous, le principe de base est le suivant : le véhicule est un outil de production qui engage l’image de l’entreprise », résume Laurent Petit, chef du département marketing d’Alphabet.
Chez le spécialiste des services à la personne O2, Juliette Beffy ne procède pas autrement pour ses 1 000 véhicules. « Nous anticipons les frais de restitution avec un travail important sur la prévention des sinistres. Nous avons rédigé un petit fascicule qui détaille les dix commandements d’un bon conducteur. Le conducteur peut aussi y trouver qui contacter en cas de sinistre. Ce document lui est remis avec les clés du véhicule. À l’avenir, nous aimerions étoffer ce livret d’une vidéo d’e-learning », détaille cette responsable des achats et des services généraux groupe.
Autant de démarches qui vont répéter le même message, un impératif pour Pascal Pilleyre de Fatec : « Afin de réduire le nombre des dommages, il faut rabâcher les messages de prévention. Sans cela, on est à peu près sûr que le conducteur ne sera pas attentif à l’état de sa voiture. » Et ce message se veut d’autant plus efficace qu’il s’adresse aux bonnes personnes. Nos interlocuteurs sont d’ailleurs nombreux à évoquer la règle des 80/20 pour décrire la situation des entreprises : 20 % des conducteurs occasionnent 80 % des frais de restitution d’une flotte.
Identifier les conducteurs à risque
L’identification de ces conducteurs « à risque » peut passer par une analyse des dépenses. « Nous tenons des réunions avec les gestionnaires de flotte tous les mois pour constater l’état des dépenses et identifier les auteurs de dérives en matière de consommation ou de sinistres », note Pascal Pilleyre. Pour atteindre ces objectifs, la télématique peut se révéler pertinente pour faire évoluer les comportements : les conducteurs savent qu’ils sont suivis et cela les incite à changer et à devenir moins accidentogènes.
Certes, une grande partie des frais de restitution restent liés à des négligences au quotidien, comme des fautes d’inattention en ne respectant pas la règle simple de se garer systématiquement en marche arrière pour éviter tout accrochage en repartant. Mais les dommages interviennent aussi souvent sur des véhicules dont les conducteurs ont des comportements à risque comme freiner au dernier moment.
Ne pas relâcher l’attention
À défaut de prévenir les dommages, le suivi régulier du parc peut aussi avoir pour bénéfice des réparations régulières qui évitent la dégradation des véhicules (voir aussi notre article). « Le conducteur est très attentif à sa voiture au début, puis une première rayure apparaît au bout de trois ou quatre mois. Il faut alors veiller à ce que l’état du véhicule ne continue pas de se dégrader », prévient Olivier Bach, responsable marché flottes d’entreprises de FullCar Services, un prestataire de services spécialiste de l’automobile.
En effet, laisser traîner les réparations n’a pas pour seul inconvénient de contribuer à relâcher l’attention du conducteur sur l’état de son véhicule : c’est aussi la quasi-assurance d’une augmentation des frais de réparation. « Plus un dommage est faible et plus il est réparé vite, moins il coûte cher. Prise en charge rapidement, une petite rayure peut être réparée en “smart repair“ (voir notre article). Mais deux ans après, il faudra passer chez le carrossier », estime Olivier Bach. Pour cette raison, les prestataires incitent à ne pas laisser en l’état une voiture endommagée. « Les assurances sont là pour prendre ces réparations en charge. Quand les travaux supposent des coûts inférieurs à la franchise, nous préconisons de les effectuer auprès d’un carrossier », souligne Laurent Petit pour Alphabet.
Informer ses conducteurs
Pour une prise en charge rapide des dommages, les conducteurs doivent aussi savoir où et comment réparer les véhicules. « Souvent, ils ne connaissent pas le fonctionnement de la prise en charge des dommages et ils ne font pas faire les travaux nécessaires », explique Pascal Pilleyre de Fatec. Afin de leur simplifier la tâche, ce fleeter a référencé à l’échelle nationale un réseau de carrosserie auprès duquel il a négocié des tarifs pour ses clients. Et pour la prise en charge des sinistres sans tiers, Fatec met à la disposition des conducteurs l’application monfatec pour géolocaliser directement les carrossiers (voir l’article).
Connaître son parc
Mais c’est bien sûr au gestionnaire de flotte qu’il revient de veiller à l’état de ses véhicules et d’arbitrer les réparations, notamment avant la restitution (voir à ce sujet le témoignage de Ludivine Nzuzi d’Accor). Mais pour un tel arbitrage, encore faut-il être informé de l’état de son parc. Des audits réguliers sont alors indispensables. « Nous recommandons de les mener une fois par an », préconise Olivier Bach pour FullCar Services. Des audits sont ainsi réalisés par ce prestataire à partir de l’outil WeProov qui se présente comme une solution d’inspection digitale tiers de confiance. « Nous donnons au responsable de flotte des photos des dommages sur les voitures et nous établissons un classement des véhicules selon trois catégories d’urgence : vert, orange et rouge », expose Olivier Bach (voir aussi l’article).
À défaut d’effectuer régulièrement un état des lieux de la flotte et de déclencher les réparations au fur et à mesure, certains gestionnaires choisissent la pré-restitution pour limiter les frais. Celle-ci est mise en avant par des loueurs comme Athlon : « Depuis 2008, nous la proposons aux clients », indique Gérard de Chalonge, directeur commercial d’Athlon en France. Mais là encore, ce loueur préfère orienter les entreprises vers des actions ciblées. De fait, il est inutile de procéder à des pré-restitutions pour l’ensemble du parc.
Faire appel à la pré-restitution
« Nous ne préconisons pas de pré-restitutions systématiques pour toutes les voitures du parc mais pour celles dont les conducteurs font état du plus grand nombre de frais de sinistres et plus généralement de la consommation la plus importante. Ce sont aussi souvent des conducteurs qui ne font pas à temps leur entretien », pointe Gérard de Chalonge. Un ciblage d’autant plus pertinent que le recours à un expert pour réaliser le bilan de pré-restitution a un coût, soit « une centaine d’euros par voiture », poursuit ce responsable.
Mais d’autres pistes sont possibles pour baisser les frais de restitution. O2, un spécialiste des services à la personne, offre par exemple à ses salariés de racheter les voitures en fin de contrat (voir le reportage).
Autre idée à creuser par le gestionnaire de flotte : sélectionner en amont les « bons » véhicules dans la car policy. « Parfois, les frais de restitution sont élevés en raison d’une car policy mal construite », confirme Laurent Petit pour Alphabet. Pourtant, un véhicule adapté aux usages suppose bien souvent moins de frais liés aux dommages. « Pour un VU qui se déplace sur les chantiers, pourquoi opter pour un Trafic L1H1 sans surélévation alors que l’on sait qu’il va y avoir des frottements sur les chantiers du fait des chemins d’accès, et qu’il faudra plusieurs allers-retours parce que la capacité d’emport ne suffit pas ? », interroge Laurent Petit.
Choisir des véhicules adaptés
Ce levier de l’adaptation concerne toutefois plus les utilitaires que les VP, bien que pour ces derniers des solutions existent aussi. Ainsi, pour diminuer le risque de sinistralité, les entreprises peuvent introduire les aides à la conduite dans les car policies.
Enfin, à défaut de prévenir les dommages ou de les prendre en charge avant la restitution, reste la solution des assurances sur les dommages. « Nous commercialisons un produit d’assurance avec lequel toutes les voitures sont facturées 500 euros pour leurs frais de restitution. Nous réalisons ensuite une mutualisation des frais sur l’année pour l’ensemble du parc. Si le montant moyen constaté est supérieur, nous prenons en charge la différence, s’il est inférieur, nous remboursons le client », détaille Gérard de Chalonge pour Athlon. Une solution valable pour les petites flottes comme pour celles des grandes entreprises. Mais que d’aucuns jugeront inefficace à responsabiliser les conducteurs.
Dossier - Restitution : les pistes d’amélioration
- Optimisation : une pédagogie de la restitution
- Ludivine Nzuzi, Accor : « La responsabilité des conducteurs est engagée »
- Restitution : le « smart repair » pour baisser les coûts
- O2 : La restitution sous tous les angles
- Remise en état : des factures à surveiller de près
- Outils et applications : suivre les véhicules et les coûts
- Technologies : au service des restitutions
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