
Disposer d’une solution de télématique embarquée, c’est en théorie s’appuyer sur des données précises et fiables de l’usage des véhicules, en premier lieu un kilométrage et une consommation de carburant évalués par un boîtier ou directement par l’ordinateur de bord du véhicule, et non plus sur une base déclarative ou sur des relevés mensuels.
Avant tout, obtenir des données fiables
« Nous voulions bénéficier de remontées automatiques sans avoir à contacter les utilisateurs, c’est-à-dire les soignants dont ce n’est pas le cœur de métier », confirme Frédéric Forsans. Ce responsable des achats de l’établissement public de santé (EPS) de Ville-Évrard...
Disposer d’une solution de télématique embarquée, c’est en théorie s’appuyer sur des données précises et fiables de l’usage des véhicules, en premier lieu un kilométrage et une consommation de carburant évalués par un boîtier ou directement par l’ordinateur de bord du véhicule, et non plus sur une base déclarative ou sur des relevés mensuels.
Avant tout, obtenir des données fiables
« Nous voulions bénéficier de remontées automatiques sans avoir à contacter les utilisateurs, c’est-à-dire les soignants dont ce n’est pas le cœur de métier », confirme Frédéric Forsans. Ce responsable des achats de l’établissement public de santé (EPS) de Ville-Évrard souhaitait aussi connaître le taux d’utilisation des véhicules : « Derrière le kilométrage global, a-t-on de nombreux petits trajets quotidiens ou des trajets plus longs mais moins fréquents, si bien que le véhicule ne roule pas pendant plusieurs jours ? », questionne-t-il (voir son témoignage).
Les objectifs de Frédéric Forsans : bénéficier de données pour préparer le marché 2021 et optimiser le parc. « Lorsque l’on évoque la réduction du nombre de véhicules avec les soignants et les médecins, ils sont forcément quelque peu réfractaires. Il nous faut des données fiables pour ne pas priver des services de véhicules essentiels, et réfléchir à des solutions alternatives pour les services où les véhicules sont peu employés », rappelle-t-il.
Mieux adapter le parc aux usages
L’enjeu reste semblable pour Laurent Blais, responsable du parc automobile de la mairie de Joué-lès-Tours (37), qui a commencé en 2017 à équiper en géolocalisation ses 86 véhicules, la plupart multiconducteurs, pour s’assurer que le dimensionnement du parc était adapté aux besoins.
« Nous souhaitions bénéficier d’un outil fiable pour apporter des informations claires et précises. Nous pouvons alors mieux connaître l’usage du parc alors que les véhicules sont dans les services et que nous n’avons que les remontées kilométriques traitées mensuellement. En effet, de nombreux agents se plaignent de ne pas avoir accès aux véhicules mutualisés faute de disponibilité », explique Laurent Blais.
Grâce à la télématique, Laurent Blais peut savoir combien de fois un véhicule est conduit par jour, par semaine mais aussi combien de temps, afin d’étudier les possibilités de mutualisation. « C’est ici que se heurtent un peu les intérêts des services qui veulent conserver leur véhicule pour plus d’autonomie, et ceux du gestionnaire de flotte qui veut optimiser son usage », note-t-il.
Signaler les anomalies
Des remontées de données fiables et instantanées facilitent en outre le calcul du TCO, comme le souligne Benoît Rousseau, responsable informatique du constructeur de maisons individuelles Maisons Socoren : « Nous allons pouvoir faire ressortir clairement et automatiquement les coûts de chaque véhicule afin de revoir la politique d’achat de la flotte si besoin » (voir son témoignage).
Ces données détaillées, la plupart des plates-formes de télématique se chargent de les analyser pour le gestionnaire de flotte. « Ce qui est bien avec ces outils, ce sont les tableaux avec des graphiques assez parlants. Nous visualisons l’activité, le kilométrage du parc ou les dérives par rapport aux contrats ; nous pouvons donc cibler les sujets », avance Frédéric Forsans pour l’EPS de Ville-Évrard. Et depuis peu, nous bénéficions d’une fonctionnalité d’export de tableaux de bord et de reporting automatique sur des indicateurs clés. »
Ces tableaux de bord vont signaler au gestionnaire de flotte des anomalies, comme des consommations de carburant trop élevées. « La télématique pose un garde-fou : les collaborateurs sont informés des possibilités de contrôle, avec un effet dissuasif. Ce cas de figure est le problème n° 1 de toutes les flottes qui recourent à des cartes carburant et sa résolution est essentielle pour la gestion financière », illustre Alain Motz, secrétaire général du spécialiste de la sécurité incendie Eurofeu, à la tête d’environ 750 véhicules (voir son témoignage). Autre bénéfice mis en avant par Alain Motz : « Avec la connexion aux données techniques du véhicule, nous allons pouvoir définir des zones d’alerte et être prévenus à l’avance, et suivre le carnet d’entretien du constructeur par message d’alerte. Cela fait gagner du temps à tous les niveaux. »
Désigner en quelques clics
Lorsque le boîtier de télématique est couplé à un système d’identification – par code, badge ou application smartphone – il peut indiquer au gestionnaire de parc qui conduit le véhicule. Une option bien pratique pour gérer les véhicules multiconducteurs, et notamment pour désigner le collaborateur responsable d’une infraction routière.
C’est la solution choisie par la mairie de Joué-lès-Tours en parallèle au déploiement du système de géolocalisation pour ses 86 véhicules. « La géolocalisation a été associée à un système de reconnaissance par badge pour désigner facilement les conducteurs en cas d’infraction, alors que la majorité de nos véhicules sont multiconducteurs. Même si nous n’avons eu que sept infractions en 2017, il était compliqué de retrouver le conducteur responsable », explique Laurent Blais, responsable du parc (voir son témoignage).
Le fonctionnement se veut semblable chez le constructeur de maisons individuelles Maisons Socoren, à la tête d’une soixantaine de véhicules : « Auparavant, les avis de contravention arrivaient chez l’assistante de direction qui devait rechercher le collaborateur associé au véhicule et responsable de l’infraction, lui envoyer un courrier pour le prévenir et qu’il accomplisse les démarches nécessaires, relate Benoît Rousseau, responsable informatique. Aujourd’hui, la plate-forme du télématicien offre une connexion directe avec le système de traitement automatisé des infractions de l’État : il nous suffit simplement de valider pour désigner le conducteur responsable. Le système gère en effet les véhicules vis-à-vis du SIV (système d’immatriculation des véhicules) et aussi les attributions des véhicules vis-à-vis de nos collaborateurs » (voir son témoignage).
Faciliter l’entretien
« Je ne peux pas faire confiance à 150 chauffeurs pour effectuer les maintenances et les vidanges toujours dans les temps, et je ne peux pas non plus les suivre un par un. Avec la télématique, l’application le fait pour moi en m’envoyant des rapports. C’est donc essentiellement un outil de vérification et de pilotage », synthétise Adrien Fombaron, responsable QSE d’APF Entreprises France Handicap – Vosges, réseau national d’entreprises adaptées et d’établissements et services d’aide par le travail (voir son témoignage).
Comme les tableaux de bord et les rapports sont généralement personnalisables, chacun peut définir des indicateurs selon sa typologie de parc et son activité. Par exemple, pour le gestionnaire de flotte en LLD, automatiser la remontée du kilométrage du véhicule en temps réel apporte la garantie de respecter au plus juste les contrats. « Nous sommes en contact avec notre loueur Public LLD pour réajuster le kilométrage en cours de contrat et revoir les mensualités du loyer », souligne Frédéric Forsans pour l’EPS de Ville-Évrard.
« J’arrive aussi à faire tourner mes véhicules en me basant sur le compteur kilométrique en temps réel, ce qui économise la flotte », complète de son côté Adrien Fombaron. Mieux, l’historique des données sur cinq ans lui permet de calibrer les futurs contrats au plus près de l’usage réel.
Mieux anticiper les renouvellements
« Sur cette expérience, je peux évaluer dès maintenant que la flotte parcourra environ 3 millions de kilomètres en 2018, ce qui contribue à anticiper les coûts. Le plan de remplacement des véhicules n’est pas sorti de nulle part : il a été défini après quelques années d’exploitation du logiciel de géolocalisation sur la base du nombre de kilomètres parcourus en moyenne chaque année », relate Adrien Fombaron.
Seul souci : il faut harmoniser les solutions télématiques dans les parcs mixtes, mêlant LLD et pleine propriété. Frédéric Forsans est justement en réflexion sur l’équipement des véhicules en propriété, notamment des véhicules techniques et de ceux effectuant des tournées logistiques (médicaments, repas, etc.) : « Cela optimiserait notre fonctionnement, estime-t-il. Mais nous nous posons la question de passer par un loueur ou un autre acteur du marché, avec pour enjeu la compatibilité de la solution télématique choisie avec celle des véhicules en location. En cas de changement de prestataire, comment pourrons-nous récupérer les données ? »
La télématique suppose aussi des gains administratifs et d’organisation, puisque les informations nécessaires à la prise de décision sont en théorie disponibles sans effort et à tout moment. « En remontant le kilométrage et l’utilisation réels, la télématique facilitera le travail des unités de soins, en supprimant des tâches de gestion grâce à un meilleur suivi de parc », constate Frédéric Forsans pour l’EPS de Ville-Évrard.
En identifiant les conducteurs, la télématique facilite aussi la désignation (voir l’encadré ci-dessus). « La télématique embarquée m’a fait économiser beaucoup de temps, je ne peux pas le mesurer mais c’est une certitude », confirme Adrien Fombaron pour APF Entreprises – Vosges, qui avoue ne plus pouvoir se passer du système.
Mais bien qu’un emploi judicieux des données de la télématique contribue à diminuer les coûts de la flotte, rares sont les entreprises et collectivités qui ont évalué les économies réalisées, faute justement d’indicateurs. « Nous n’avons pas calculé ce que la télématique nous rapporte, reconnaît Céline Commeureuc, directrice logistique de La Collecte Médicale, spécialiste de la collecte des déchets d’activités de soins à risques infectieux. En revanche, nous savons que l’outil Webfleet pèse moins de 0,40 % des charges du budget logistique. Et nous constatons que le nombre de kilomètres parcourus n’a pas augmenté alors que nous avons de plus en plus de clients, grâce à des tournées plus denses. Alors que le gazole a pris dernièrement 10 centimes et atteint 1,41 euro le litre, le système est tout de suite rentable si l’on parcourt moins de kilomètres. »
« La télématique représente toujours un coût supplémentaire pour la société – soit pour nous environ une quinzaine d’euros par mois et par véhicule –, mais elle éclaire certains points et offre une visibilité globale du parc », résume pour sa part Benoît Rousseau pour Maisons Socoren.

Évaluer le ROI de la télématique
Pour le moment, la mairie de Joué-lès-Tours ne mesure pas non plus le ROI de la télématique. « L’investissement n’est pas très important par véhicule et si l’on prend en compte les statistiques, on peut espérer des gains sur le carburant. Cependant, nous ne recherchions pas forcément à faire des économies directement en équipant les véhicules, si ce n’est via le dimensionnement du parc selon les besoins », commente Laurent Blais (voir son témoignage).
Constat semblable pour l’EPS de Ville-Évrard : « La télématique est plutôt un outil pour travailler sur l’avenir, déclare Frédéric Forsans. C’est la future optimisation du parc rendue possible grâce aux données qui va générer des économies. Et l’investissement vaut le coup, à 3 euros par boîtier et par mois, comparé au temps passé auparavant pour le suivi du parc. »
Reste qu’il n’est jamais évident de prendre en main un jeu de données et d’en tirer des enseignements lorsque l’on n’est pas « data scientist ». « Nous récupérons des données brutes et il faut un peu de temps pour les analyser, le traitement et le retraitement des informations restant assez chronophages », avertit Laurent Blais.
Utiliser toutes les fonctionnalités des outils
Il n’est pas non plus aisé d’identifier toutes les fonctionnalités des systèmes et d’en tirer rapidement parti. « Parfois, les entreprises achètent des solutions et les emploient peu, il faut donc les accompagner dans l’usage », remarque Annick Renoux, directrice commerciale du prestataire TomTom Telematics. « Il y a plein de fonctionnalités que nous n’employons pas, avalise Céline Commeureuc pour La Collecte Médicale. En tant que petite entreprise, nous allons à l’essentiel. C’est en discutant avec le fournisseur que l’on découvre des fonctionnalités qui pourraient être utiles. » C’est d’ailleurs l’une de ces discussions qui l’a décidée à instaurer un tableau d’honneur pour encourager l’éco-conduite.
Pour Karen Brunot, directrice marketing d’Arval France, l’analyse des données constitue une nouveauté dans le métier de gestionnaire de flotte. « L’accompagnement est donc l’un des éléments les plus importants pour accroître le taux de pénétration de la télématique », estime-t-elle. C’est pourquoi les prestataires proposent parfois des formations de mise en place de leurs outils.
Au préalable, se former à l’outil
« J’ai suivi une préformation chez mon prestataire dans le Sud de la France pour étudier toutes les possibilités de la télématique embarquée et élaborer un cahier des charges, relate Alain Motz pour le Groupe Eurofeu. Nous avons défini les éléments à afficher parmi ceux disponibles dans le système informatique, à la fois sur la plate-forme et sur le smartphone ou la tablette des conducteurs. Ainsi, conducteur et gestionnaire de flotte voient la même chose. »
« Mais aujourd’hui, nous devons déjà arriver à bien identifier l’utilisation complète de l’outil, en particulier pour la sécurité et la gestion financière de la flotte, poursuit Alain Motz. Le plus important, c’est de maîtriser le coût kilométrique des véhicules, sur lequel nous allons pouvoir désormais bien travailler. »
Comprendre comment fonctionnent les systèmes de télématique prend aussi plus d’importance parce qu’ils peuvent s’interfacer avec d’autres logiciels existant dans l’entreprise mais aussi avec des solutions tierces, ouvrant la voie à de nouveaux services (voir aussi l’article).
Dossier - Télématique embarquée : quel outil pour les flottes ?
- Télématique embarquée : un outil à tout faire
- Adrien Fombaron, APF Entreprises France Handicap – Vosges : « Je ne me passerais plus de la télématique »
- Benoît Rousseau, Maisons Socoren : « Mettre en place la connexion avec le CRM »
- Outils de gestion : une gestion embarquée
- Frédéric Forsans, établissement public de santé de Ville-Évrard : « Des données fiables sur l’utilisation des véhicules »
- Alain Motz, Groupe Eurofeu : « La télématique pour maîtriser les coûts de carburant »
- Véhicules connectés : vers la fin des boîtiers aftermarket ?
- Télématiciens : les données dans le viseur
- Laurent Blais, mairie de Joué-lès-Tours (37) : « Adapter la flotte aux besoins »
- Céline Commeureuc, La Collecte Médicale : « Rapprocher les données entre le réel et l’objectif »
- Jérémy Ghienne, JG Électricité : « La télématique pour le suivi de chantier »