Pénurie de semi-conducteurs : quel impact pour les flottes automobiles ?

En raison d’une pénurie mondiale de semi-conducteurs due à la pandémie de covid-19, la production de véhicules neufs a été ralentie en 2021. Les perturbations devraient se prolonger jusqu’en 2022, si bien que les gestionnaires de flotte sont encouragés à anticiper leurs commandes.
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Semi-conducteur fini et emballé
Semi-conducteur fini et emballé. Source : SIA

L’industrie automobile, comme bien d’autres secteurs, est dépendante des semi-conducteurs. Ces matériaux sont utilisés dans les circuits intégrés ou les puces électroniques. Ils sont donc essentiels pour la plupart des systèmes d’un véhicule : groupe motopropulseur, airbag, prétensionneur de ceinture, régulateur de vitesse, batteries, système d’info-divertissement, capteurs, etc.

Qu’est ce qu’un matériau semi-conducteur ?

En pratique, un matériau semi-conducteur possède des propriétés de conduction électrique qui varient entre celles des matériaux conducteurs (métaux) et celles des matériaux isolants. Une technique dite de « dopage » consiste à ajouter des impuretés dans le matériau pour déterminer précisément ses propriétés conductrices. Résultat : le matériau conduit l’électricité uniquement lorsqu’on lui apporte une certaine quantité d’énergie – par exemple de la chaleur, de la lumière ou un champ électromagnétique –, ce qui permet d’activer ou désactiver les circuits intégrés et ainsi d’effectuer des calculs informatiques.

Pourquoi y a-t-il une pénurie mondiale ?

Or, depuis le deuxième trimestre 2020, « une pénurie mondiale de certains semi-conducteurs a eu un impact sur le marché automobile, ralentissant la production de certaines voitures », rappelle l’Association de l’industrie des semi-conducteurs (SIA). En cause : d’importantes variations de la demande dues à la pandémie de covid-19 et l’utilisation accrue de semi-conducteurs dans les véhicules avancés.

« Les constructeurs automobiles ont, à juste titre, réduit leur production et leurs achats de puces alors que le virus se propageait dans le monde entier, explique la SIA. Les fabricants de puces, quant à eux, ont constaté une hausse de la demande de semi-conducteurs utilisés pour permettre les soins de santé à distance, le travail à domicile et l’apprentissage virtuel. Dans les mois qui ont suivi, la demande de semi-conducteurs automobiles s’est redressée beaucoup plus rapidement que la plupart des prévisions. »

Plus récemment, la pénurie a été aggravée par l’incendie de l’usine de Renesas à Naka (Japon) et par des tempêtes hivernales qui ont affecté les usines de NXP, Infineon et Samsung au Texas (États-Unis). Ces usines produisent des « wafers » : des plaquettes très fines de matériau semi-conducteur, utilisées notamment pour fabriquer des microcontrôleurs automobiles.

Quel impact sur le secteur automobile ?

Dans une note publiée le 19 août 2021, le cabinet d’études IHS Markit estimait ainsi à 5,69 millions le nombre de véhicules légers (VL) non produits depuis le début de l’année en raison des perturbations de la chaîne d’approvisionnement en semi-conducteurs. La perte est estimée à « 1,44 million d’unités au premier trimestre et à 2,60 millions d’unités au deuxième trimestre, indiquait alors Mark Fulthorpe, directeur exécutif chargé des prévisions mondiales en matière de véhicules légers. Les temps d’arrêt visibles au troisième trimestre s’élèvent maintenant à 1,60 million d’unités. »

Et les perturbations ne sont pas terminées. Même si les capacités de production se sont améliorées, les sites d’assemblage et de test sont situés dans des pays d’Asie où le covid-19 empêche encore un retour des activités à la normale, notamment en Malaisie. De plus, il n’y a tout simplement pas assez de semi-conducteurs disponibles.

L’IHS Markit prévoit ainsi que « les pénuries de semi-conducteurs dans le secteur automobile se prolongeront jusqu’au premier trimestre 2022, voire jusqu’au deuxième trimestre. » De plus, « Intel et Infineon ont tous deux averti que la situation pourrait persister pendant toute l’année 2022 », signale le cabinet d’études. Du côté des VL, « sur l’ensemble de l’année, en prenant les estimations pour les T3 et T4, en plus des pertes déjà identifiées au premier semestre, cela placerait le risque annuel associé aux pénuries de semi-conducteurs entre 6,3 millions et 7,1 millions d’unités au niveau mondial », annonce Mark Fulthorpe.

Ces estimations devraient être revues à la hausse suite aux annonces de plusieurs constructeurs ayant récemment dû fermer leurs usines du fait de la pénurie, tels Toyota et Stellantis. Des problèmes similaires touchent le marché des poids lourds. Le constructeur Scania a notamment annoncé le 30 août suspendre sa production de camions pendant une semaine en Suède, en France et aux Pays-Bas, puis en Amérique Latine, selon l’AFP.

Gestion de flotte : mieux vaut anticiper les commandes de véhicules

Face à cette situation, les gestionnaires de flotte doivent anticiper. Le loueur LeasePlan recommande ainsi de planifier à l’avance les acquisitions de véhicules pour compenser les retards dus à des délais de livraison plus longs. « Les constructeurs automobiles nous ont conseillé de passer nos commandes plus tôt que d’habitude », indique-t-il.

De même, le loueur Alphabet conseille de « commander très en amont les nouveaux véhicules, pour plus de garantie d’être livrés à la date souhaitée ». En cas de problème, il propose de « prolonger les contrats en cours, dans l’attente des véhicules en commande » et de « fournir un véhicule de transition de gamme équivalent jusqu’à la livraison ».