
Le projet de loi de finances (PLF 2020) rectificative proposé en juin par le gouvernement officialise le financement du plan de soutien au secteur automobile à hauteur de 8 milliards d’euros. Dont près de 600 millions d’euros destinés aux dispositifs d’aide à l’acquisition de véhicules à faibles émissions : 228 millions d’euros au titre du renforcement exceptionnel du bonus pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables du 1er juin au 31 décembre 2020, et 395 millions d’euros pour financer 200 000 primes à la conversion.
Voir le texte amendé en première lecture par l’Assemblée nationale puis le Sénat
Un rapport sur la refonte des aides à l’acquisition
Les députés de l’Assemblée nationale veulent ainsi que le gouvernement remettent au Parlement un rapport portant sur une « refonte des incitations à l’acquisition de véhicules propres et à la mobilité propre ». Et ce, dans un délai de deux mois après la promulgation de ce PLF rectificatif (art. 17 quaterdecies).
En effet, selon les députés, les analyses existantes montrent que « les dispositifs actuels servent essentiellement de subvention au marché des véhicules électriques, sans pour autant décourager l’achat de véhicules très émetteurs ou favoriser l’accès à des véhicules faibles/zéro émissions à tous les ménages ; et ne contribuent pas non plus à l’évolution des pratiques de mobilité. »
Une vision partagée par les sénateurs : « Si bonus et primes à la conversion trouvent désormais leur public, ces dispositifs demeurent instables car modifiés quasiment tous les ans. Ils font en outre l’objet de nombreux débats sur leurs modalités et sur leur ciblage », jugent-ils.
Un tel rapport devrait permettre selon les sénateurs d’évaluer les avantages, les inconvénients et le coût de plusieurs hypothèses d’évolution proposées par les députés. A savoir mieux cibler les véhicules éligibles et renforcer les aides en faveur des ménages modestes, mais aussi atteindre l’objectif de fin de vente des véhicules à carburants fossiles en 2040, fixé par la loi d’orientation des mobilités ou encore ouvrir la prime à la conversion au développement de solutions de mobilité alternatives à la voiture individuelle.
Des mesures fiscales en faveur des motorisations alternatives
De son côté, le Sénat a ajouté en première lecture plusieurs mesures fiscales liées aux véhicules. Tout d’abord, les sénateurs proposent d’exonérer les véhicules essence équipés d’un boîtier de conversion au Superéthanol-E85 – dits « Flexfuel » – du paiement de la première composante de la taxe sur les véhicules de société (TVS) pendant douze trimestres, au même titre que les hybrides électriques-essence, électriques-E85, électriques-GNV, électriques-GPL, essence-GNV et essence-GPL, et ce lorsqu’ils émettent jusqu’à 120 g/km de CO2 en WLTP (art 2 bis Q).
Autre mesure en faveur de la transition énergétique du parc : les sénateurs proposent d’autoriser les salariés à demander un déblocage anticipé de leur épargne salariale jusqu’au 31 décembre 2020, dans la limite de 8 000 euros nets de prélèvements sociaux. Cette somme serait exonérée d’impôt sur le revenu à condition que le déblocage serve à l’achat d’un véhicule neuf électrique, hybride rechargeable ou thermique émettant jusqu’à 137 g/k de CO2 ; ou bien à la réalisation de travaux de rénovation énergétique de la résidence principale du bénéficiaire (art. 4 bis A).
À noter également que le Sénat veut débloquer des fonds pour renouveler et verdir les parcs automobiles de la police et de la gendarmerie nationales.
Un soutien au transport routier de marchandises
Concernant les poids lourds, les sénateurs souhaitent revoir le dispositif de suramortissement prévu pour l’achat d’un véhicule de 2,6 t ou plus utilisant une motorisation alternative. Actuellement, les entreprises peuvent déduire de leur impôt 20 % de la valeur du véhicule si le poids de celui-ci est compris entre 2,6 et 3,5 t, 60 % entre 3,5 et 16 t ou 40 % au-delà de 16 t, et ce jusqu’au 31 décembre 2021. Les sénateurs proposent de relever ces taux de déduction jusqu’à respectivement 30 %, 70 % et 50 % pour les véhicules acquis entre le 15 juillet 2020 et le 31 décembre 2021 (art. 2 bis B).
L’objectif : soutenir le secteur du transport routier de marchandises suite à la crise du covid-19 tout en accélérant sa transition énergétique, alors que les poids lourds seraient responsables de 22 % des émissions de gaz à effet de serre en France.
En parallèle, les sénateurs veulent également reporter au 1er janvier 2022 la diminution du remboursement de la TICPE applicable au secteur du transport routier de marchandises de 2 euros par hectolitre (0,02 euro/l), qui venait d’entrer en vigueur le 1er janvier 2020 (art. 2 bis P et 2 bis R). Ils proposent en outre d’instaurer un seuil de tolérance dans le calcul mensuel de la taxe spéciale sur certains véhicules routiers (TSVR) pour la période du confinement. Ainsi, « en deçà de cinq jours de roulement dans un même mois pour la période allant du 1er mars au 31 mai 2020 », une dispense de paiement de la taxe s’appliquerait sur ce même mois (art. 2 bis R).
Une déduction fiscale pour les infrastructures de recharge en carburants alternatifs ouvertes au public
Pour finir, les sénateurs s’attaquent aux infrastructures de recharge. Pour rappel, le texte initial fixe un objectif de déploiement de 100 000 bornes de recharge d’ici 2021. Or, « il est impératif d’aller plus loin pour développer la mixité des véhicules propres – en favorisant l’ensemble des carburants alternatifs – et garantir la couverture de tout le territoire – en mobilisant davantage les acteurs privés du réseau routier secondaire », estiment les sénateurs. Ces derniers proposent donc d’instituer une déduction fiscale sur l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu dans le cadre de « l’acquisition et l’installation d’infrastructures de recharge des véhicules terrestres en carburants alternatifs ouvertes au public » (art 2 bis G).
Cette déduction, applicable entre le 1er janvier 2021 et le 31 décembre 2022, concernerait l’achat ou la location d’une infrastructure de recharge pour véhicules électriques, hydrogène, GNV, GPL ou « toute autre énergie décarbonée » ; et ce à hauteur de 40 % de la valeur d’origine des équipements neufs, hors frais financiers.
En cas de location, cette déduction serait « répartie pro rata temporis sur la durée normale d’utilisation de l’équipement à compter de l’entrée en location, précise l’amendement. Si l’entreprise crédit-preneuse ou locataire acquiert l’équipement et en remplit les conditions, elle peut continuer à appliquer la déduction. En cas de cession ou de cessation du contrat de crédit-bail ou de location avec option d’achat ou de cession de l’équipement, la déduction n’est acquise à l’entreprise qu’à hauteur des montants déjà déduits du résultat à la date de la cession ou de la cessation, qui sont calculés prorata temporis. »
À noter que la déduction pourrait être pratiquée soit par le locataire soit par le prestataire. Dans le dernier cas, l’avantage en impôts en résultant doit être intégralement rétrocédé au locataire sous forme de « diminution de loyers accordée en même temps et au même rythme que celui auquel la déduction est pratiquée. »