Électrification : les prestataires mènent la recharge

Au-delà de déterminer les véhicules susceptibles d’être remplacés par des versions électriques, les études et conseils des prestataires spécialistes des flottes veulent aider les entreprises clientes à mieux anticiper leurs infrastructures de recharge. À commencer par l’évaluation du nombre de bornes à installer pour répondre aux besoins d’un futur parc carburant aux électrons.

Pour les recharges sur site, cette évaluation tient compte de la puissance électrique disponible dans le bâtiment de l’entreprise. « Des audits sont menés en amont de l’électrification pour anticiper la manière dont les véhicules pourront se recharger. Et lorsque le client possède des dépôts, nous menons pareillement des audits des bâtiments pour la future installation des points de charge », décrit Pierre-Yves Le Berre, vice-président stratégie et marketing de Watèa by Michelin, spécialiste de l’écosystème du VUL électrique.

Positionner les bornes

En se basant sur les données récoltées sur les déplacements des véhicules, les télématiciens peuvent aussi signaler aux entreprises les positionnements les plus efficients pour les futurs équipements de recharge. « Nous indiquons où installer au mieux les bornes sur un site ou plusieurs, afin qu’elles servent à l’ensemble des conducteurs d’une entreprise », illustre Annick Renoux, directrice des régions France et Benelux du télématicien Webfleet.

Parmi les outils commercialisés par les prestataires pour les flottes électriques, les différents indicateurs de suivi de la recharge des véhicules se veulent incontournables. Chez Geotab, ils visent à optimiser les recharges sur le site de l’entreprise. « Le fait de savoir comment sont employés les véhicules amène aussi à connaître où ils stationnent le plus souvent. Nous pouvons alors prévoir quand ils vont se recharger sur le site de l’entreprise ou chez le collaborateur », complète François Denis, directeur général France du télématicien Geotab.

Prioriser la recharge

Qui poursuit : « La télématique est importante pour connaître l’état de charge des véhicules. Et quand il y a plusieurs bornes et véhicules, nos outils peuvent prioriser ceux qui ont besoin de plus de recharge. Un tel suivi est impossible sans la télématique », souligne François Denis.

Pour la recharge à domicile, Traxall s’appuie sur son protocole Energy Manager d’électrification d’une flotte. Dans ce cadre, ce fleeter demande au prestataire installateur de bornes retenu par son client de réaliser une évaluation technique des domiciles des salariés. « Il lui revient alors de vérifier l’éligibilité des salariés à avoir une borne chez eux, résume Audrey Martin, consultante flotte automobile de Traxall. C’est à cette condition seulement que la commande du véhicule électrifié est validée afin de sécuriser le processus », insiste cette responsable. Pour cette offre de services, Traxall collabore entre autres avec l’installateur de bornes Zeplug.

Équiper les domiciles des salariés

Alors que la recharge à domicile se généralise, surtout pour les voitures de fonction, les prestataires développent aussi les remontées d’informations sur l’utilisation par le salarié de ce point de charge « personnel ». « La télématique reste le seul moyen de rembourser les consommations électriques pour la recharge d’un véhicule au domicile, avance François Denis, pour le prestataire télématicien Geotab. L’employeur sait alors quelle quantité d’électricité le véhicule a chargée, et donc combien rembourser précisément au salarié. »

La connaissance des trajets des véhicules sert aussi à évaluer les possibilités de recharge en itinérance. Ainsi, Watèa by Michelin anticipe si les véhicules pourront se recharger pendant leurs trajets en cas de besoin. « Nous vérifions également la compatibilité des places disponibles en itinérance avec les futurs véhicules, précise Pierre-Yves Le Berre. En raison de leur taille, certains utilitaires ne peuvent en effet pas recharger sur des espaces le plus souvent prévus pour des véhicules particuliers. »

Suivre les conducteurs

Toujours dans cette logique d’optimisation de la recharge, les prestataires développent des outils pour suivre les conducteurs et leurs pratiques. Selon des données de Webfleet citées par Annick Renoux, dans plus de 45 % des sessions de recharge, les conducteurs des entreprises européennes rechargent leurs véhicules électriques à plus de 90 % de la capacité de la batterie. « Il faut les accompagner pour qu’ils ne rechargent pas à plus de 80 % et que la charge de leurs batteries ne descende pas au-dessous de 20 %, au risque de voir la durée de vie des batteries diminuer », avertit Annick Renoux.

Sur ce sujet, Webfleet rappelle que si les batteries LFP (lithium-fer-phosphate) ont évolué, le maintien d’un état de charge élevé peut encore avoir un effet négatif sur la longévité de la plupart des batteries. « Mais ce qui est encore plus important, note ce télématicien, c’est que les vitesses de charge ralentissent considérablement lorsque la batterie atteint 80 %. Cela signifie que les entreprises ont la possibilité d’économiser de l’argent et d’augmenter leur productivité en apportant quelques changements simples et intelligents à leurs habitudes de recharge. » À méditer !

Toujours selon ces données de Webfleet, la majorité des recharges ont lieu pendant la journée, et les sessions de recharge démarrent, pour le plus grand nombre, entre 12 h 00 et 15 h 00, soit généralement lors des heures de pointe avec des tarifs d’électricité plus élevés.

Rationaliser les recharges

« Le plus souvent, les conducteurs chargent en pleine journée, lors des pics de consommation. Il faut les accompagner pour les inciter à préférer la recharge nocturne », préconise Annick Renoux. L’outil de Webfleet procède d’ailleurs à des alertes quand les niveaux de batterie sont faibles, il propose aussi des statistiques sur les durées et les horaires de recharge. Car au-delà de la longévité de la batterie, le bon usage de la recharge reste aussi central dans l’équation financière des véhicules électriques.

Toujours dans un objectif d’optimisation de la recharge, Watèa by Michelin étudie la possibilité de développer des outils pour ses clients, cette fois pour les recharges effectuées lors des déplacements. « Nous travaillons à récupérer les données de toutes les bornes en itinérance pour indiquer par exemple si le coût de la recharge inclut le prix du parking », décrit Pierre-Yves Le Berre.

Rappelons enfin que, dans l’entreprise, le gestionnaire n’est pas le seul concerné par les données et les indicateurs liés à son parc. « L’électrification de la flotte reste une démarche globale », constate Audrey Martin, pourTraxall. Au-delà de ce gestionnaire, les services RH sont par exemple intéressés par ces données, pour toutes les questions en lien avec la recharge à domicile : processus d’installation de l’équipement, remboursement des recharges effectuées, etc.

Une entreprise impliquée

« Le service juridique est aussi sollicité pour valider des sujets d’avantages en nature ou d’assurance, illustre encore Audrey Martin. Et pour installer les bornes sur les sites des entreprises, il faut aussi mobiliser les services généraux. De plus en plus souvent, des responsables RSE prennent aussi part aux réflexions pour que l’électrification du parc progresse au plus vite », conclut Audrey Martin. Et l’électrification n’en est qu’à ses débuts…