Spécial TPE PME 2012 : des flottes sur mesure

Prévention routière : un enjeu de taille pour les PME

La route est à l’origine de près de la moitié des accidents de travail mortels. Pour enrayer ce fléau, un remède existe : la prévention. Les PME sont ainsi appelées à mieux entretenir leurs VUL ou à former leurs salariés. Un message qui passe de mieux en mieux.
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Prévention routière : un enjeu de taille pour les PME

Le risque routier est rarement identifié comme prioritaire par ceux dont le métier principal n’est pas la conduite. « Pourtant, le plus gros risque, ce ne sont pas les machines dans nos ateliers, mais la route », affirme Gilles Dufour, directeur général d’APC-Milpass, une société spécialisée dans la transformation de matières plastiques (voir le témoignage page xx).

En 2010, l’Assurance maladie a recensé 20 417 accidents routiers au travail (+ 4,9 %), 57 432 au cours du trajet domicile-travail (+ 0,8 %) et 404 décès (travail et trajets confondus), soit près de 50 % de l’ensemble des accidents du travail mortels. Or ce risque est souvent banalisé. « Quand un ouvrier tombe d’un échafaudage dans une région, tout le monde en parle, quand c’est un accident de la route, personne n’est au courant », souligne Gilles Dufour.

Évaluer le risque routier pour mieux le maîtriser

« Les accidents routiers peuvent se classer en deux grandes catégories. D’une part, les accidents liés à l’état des véhicules, notamment ceux qui vont sur des chantiers, au mauvais arrimage des marchandises transportées ou à la surcharge et, d’autre part, ceux liés à la vitesse ou à la fatigue, à la surcharge de travail », détaille Denis André, directeur du centre de formation Centaure Île-de-France qui accueille 4 800 stagiaires par an. Ce dernier note cependant « une nette amélioration de la prise de conscience de ces risques » qui coûtent cher à l’entreprise quand un véhicule est immobilisé, sans compter les 5,5 millions de journées de travail perdues chaque année.

En cas d’accident, le chef d’entreprise sera le premier au banc des accusés. Il doit en effet « prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé » de ses salariés (article L. 4121 du Code du travail). Sa responsabilité pénale pourra être engagée s’il est établi un défaut de mesures de prévention de sa part. Parmi ses obligations figure entre autres, quel que soit le nombre de salariés, la rédaction d’un document unique d’évaluation des risques professionnels qui doit intégrer analyse et solutions. « Or, dans environ 70 % des petites entreprises, soit le document unique n’existe pas, soit il n’intègre pas le risque routier », estime David Decourtye, président de l’Association de sécurité routière en entreprise de Loire-Atlantique.

« Tout doit apparaître dans ce document, y compris ce qui concerne les opérations de chargement et de déchargement, les produits transportés, leur arrimage, car ce sont souvent des éléments aggravants en cas d’accident routier. Le mieux est de rédiger ce document avec les salariés ou au moins de leur en faire prendre connaissance », précise Philippe Cornuché, responsable d’Adour Proximité et de Group’Adour. Pour ces petites entreprises de services à la personne basées dans les Landes, il rappelle aussi quelques règles de bon sens comme la vérification régulière des permis « et pas seulement, à l’embauche ! » .

Les accidents impliquant des VUL font aussi plus de victimes – 2,3 fois plus que les berlines, selon l’Assurance Maladie – et les autorités envisagent de créer un permis B renforcé pour les 4 millions de conducteurs qui recourent à ces véhicules.

Les utilitaires génèrent un risque supplémentaire

 « Ils sont toujours plus performants, entre autres pour la vitesse, mais freinent moins bien en raison de la charge et sont plus difficiles à maîtriser », souligne Jean-Marc Sangouard, directeur de l’Inserr (Institut national de sécurité routière et de recherches).

Et même si l’offre évolue, ces VUL sont aussi moins biens dotés en équipements de sécurité. « Dès que l’on demande des airbags latéraux, un GPS intégré ou des aides à la conduite de type ESP ou AFU, les délais s’allongent, s’insurge Gilles Dufour, d’APC-Milpass. Il y a deux ans, aucun limiteur de vitesse n’était disponible en série sur un VUL. » « Les constructeurs n’ont pas compris que leur intérêt est de proposer un pack global. Une standardisation des équipements fait reculer les coûts de revient. À eux de préconiser et de créer le besoin », résume Philippe Cornuché, pour Group’Adour. Celui-ci a équipé, entre autres, son dernier Jumpy d’une suspension hydro-pneumatique ajustable. « Ce qui améliore la sûreté du véhicule en charge et sa tenue de route », complète-t-il. De son côté, Gilles Dufour met aussi l’accent sur le confort, « la climatisation, le GPS et l’insonorisation de la cabine dans les VUL grâce à de simples plaques autocollantes. Le confort a un impact sur la fatigue et le stress, donc sur la sécurité. »

Pour donner un coup de pouce aux PME, lors de l’acquisition d’un VUL, une aide financière proposée par la branche Risques Professionnels de l’Assurance Maladie court jusqu’au 31 mai 2012 – il est question de la reconduire – et permet aux entreprises de moins de 50 salariés de bénéficier d’une aide de 3 000 euros pour l’achat d’un VUL équipé de six dispositifs de sécurité1, moyennant l’obligation de suivre une formation à l’usage professionnel d’un VUL. Une prime supplémentaire de 1 000 euros est accordée pour l’installation d’un détecteur de charge.

Un impératif : Sécuriser la charge des véhicules

Pour les utilitaires, les experts insistent aussi sur la nécessité d’installer une cloison de séparation pleine, ainsi que sur la qualité des points d’ancrage et des aménagements intérieurs afin d’éviter que les marchandises ou les outils ne se transforment en de dangereux projectiles en cas de coup de frein brusque. « À 50 km/h, le poids est multiplié par dix », explique Denis André, pour Centaure Île-de-France. « Certains se contentent de points d’ancrage sur le bois du sol ou des parois. En cas de choc, cela ne tient pas », remarque Philippe Cornuché. Pour les casiers de rangements, la sécurité de leurs fermetures et leur ancrage, mieux vaut donc passer par un équipementier agréé. Une fois équipé, le véhicule doit aussi être employé à bon escient : « Il faut penser à bien répartir les charges, en évitant de mettre le plus lourd à l’arrière. Cela joue sur la tenue de route, l’usure des pneumatiques et les distances de freinage », explicite Denis André.

Autre priorité : l’entretien et le suivi grâce à un carnet spécifique car le véhicule est souvent emprunté par plusieurs conducteurs. Le livre blanc « pour un VUL plus sûr », sorti en 2007, réclamait un contrôle technique annuel. Une préconisation devenue lettre morte. Les VUL sont néanmoins sous surveillance : en 2011 un VUL sur quatre a été retoqué au contrôle technique et a dû passer une contre-visite en 2011, essentiellement pour des anomalies liées aux fonctions « freinage », « éclairage-signalisation » et « liaisons au sol ».

« Le transport de charges a un impact sur l’usure des véhicules et, tout particulièrement, des pneumatiques. Les éclatements de pneus sont plus fréquents », précise Denis André. D’où « la nécessité de vérifier régulièrement la pression des pneus, sans attendre l’entretien périodique du véhicule. Avec les voyants d’alerte pour l’huile ou l’eau, les conducteurs ne pensent plus à effectuer eux-mêmes des vérifications de base et attendent la prochaine révision », déplore Frédéric Martino, responsable prévention du risque routier chez Arval. Pour inciter à des révisions régulières, le CNPA propose actuellement une visite gratuite des organes de sécurité des VUL.

Un outil extrêmement efficace : la formation

Mais le risque routier n’est pas qu’un problème de véhicule. « C’est aussi une question d’ergonomie au travail, d’environnement, de conducteur, etc. Cela nécessite des formations pour mettre en situation des conducteurs qui ont souvent passé leur permis du temps ou l’ABS n’existait pas », confirme David Decourtye. « Nous leur montrons l’intérêt des aides à la conduite mais aussi leurs limites. Nous leur montrons aussi que les distances sont écrasées par la vitesse et que leur perception est souvent faussée. Nous insistons sur l’entretien, notamment des pneumatiques et des feux, ou encore sur la propreté des vitres pour améliorer la visibilité », énumère Denis André, pour Centaure Île-de-France. Ce dernier accueille de plus en plus de stagiaires, venus souvent se former au départ à l’éco-conduite mais les modules de formation englobent ces deux thématiques de l’éco-conduite et de la sécurité.

L’éco-conduite, une démarche de longue haleine

« Au-delà de la formation, nous offrons un suivi car les chefs d’entreprise sont aussi démunis face au risque routier. Ils recherchent des solutions. Notre objectif est de les aider sur le long terme. Nos formations intègrent une réactualisation des connaissances au bout de trois ou quatre ans ainsi qu’une demi-journée de formation si le conducteur formé est impliqué dans un sinistre, au cours des deux ans suivant la formation, même s’il n’est pas responsable », ajoute Denis André.

L’essentiel, c’est de travailler sur les comportements. Apprendre à conduire, cela n’est pas suffisant. Il faut aussi savoir appréhender les risques pour mieux les gérer. Des formations qui porteraient exclusivement sur le renfort des capacités de conduite pourraient avoir un effet contraire à celui recherché. Le conducteur, estimant que ses compétences ont progressé, peut alors être enclin à prendre davantage de risques. « Il faut revenir sur la dimension psychologique de la conduite, les motivations du stagiaire, ses représentations de l’acte de conduire, à l’instar de ce qui se fait en matière d’éco-mobilité par exemple », note Jean-Marc Sangouard, de l’Inserr.

Pour les entreprises, la ligne blanche est souvent budgétaire. En effet, les formations à la sécurité doivent être prises en charge par l’entreprise et ne peuvent donc pas – en théorie – être financées dans le cadre de la formation professionnelle. Des organismes respectent cette règle drastique, d’autres pas. Les assurances commencent aussi à s’impliquer. Certaines proposent de baisser la prime d’assurance ou la franchise en cas d’accident si le conducteur a suivi une formation.

Cibler en priorité les gros rouleurs

« Outre l’écueil financier, les petites sociétés ne peuvent pas toujours se priver d’un collaborateur pour la durée d’une formation, pointe Frédéric Martino. Il est alors possible de cibler les besoins, ceux des gros rouleurs, ceux des collaborateurs qui ont le plus de sinistres, etc. Cela passe par une analyse des risques et des retours d’expérience. » Avec la sécurité, c’est avant tout l’efficacité qui prime.

Spécial TPE PME 2012 : des flottes sur mesure

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