
Les gestionnaires de flotte peuvent-ils être séduits par des offres ou des produits d’entretien innovants ? La réponse est, bien sûr, positive. À une condition : que ces produits ou services fassent également baisser les coûts d’entretien ou, tout du moins, ne les augmente pas. C’est ainsi que d’écologiques, les préoccupations liées à l’innovation évoluent vite vers l’économique. À commencer par l’usage des carburants, poste de dépenses majeur d’une flotte.
De ce point de vue, l’expérience de Saint-Quentin, dans l’Aisne, est intéressante. Sur les quelque 270 véhicules du parc automobile, plus de la moitié, soit 143, roulent au diester. « Ce...
Les gestionnaires de flotte peuvent-ils être séduits par des offres ou des produits d’entretien innovants ? La réponse est, bien sûr, positive. À une condition : que ces produits ou services fassent également baisser les coûts d’entretien ou, tout du moins, ne les augmente pas. C’est ainsi que d’écologiques, les préoccupations liées à l’innovation évoluent vite vers l’économique. À commencer par l’usage des carburants, poste de dépenses majeur d’une flotte.
De ce point de vue, l’expérience de Saint-Quentin, dans l’Aisne, est intéressante. Sur les quelque 270 véhicules du parc automobile, plus de la moitié, soit 143, roulent au diester. « Ce carburant intègre 30 % de colza, ce qui signifie 30 % de réduction des gaz à effet de serre », explique Daniel Dagnicourt, directeur du centre technique de l’agglomération.
Diester : des avantages mais aussi des inconvénients
Pour l’instant, l’impact sur les coûts reste difficile à mesurer et Saint-Quentin attend de s’équiper d’un nouveau logiciel de gestion, l’année prochaine, pour procéder à une évaluation précise. Mais passer au diester ne se limite pas à changer de carburant : « Le diester est moins lubrifiant que le gasoil. Cela peut avoir un impact sur la longévité des moteurs, analyse Daniel Dagnicourt. Pour l’instant, nous n’avons pas connu de problème, mais nous avons mis en place un additif pour éliminer toute trace d’eau dans le carburant. Nous devons aussi lutter contre le développement des bactéries car ces matières organiques peuvent nuire aux moteurs. D’où l’usage d’un traitement assurant une bonne lubrification des moteurs ». L’équation environnementale n’est jamais simple…
Pour le conseil général de la Moselle, le diester est aussi une piste de diversification des carburants, avec un projet en cours. Pour Thierry Fristot, chef de la division des achats et de la logistique, les avantages de ce carburant sont nombreux. « La consommation est réduite d’environ 15 à 20 % sur un véhicule utilisant du diester par rapport au même segment en motorisation essence. Le diester rejetterait moins de CO2 et son usage est sans impact sur le fonctionnement de la flotte et des véhicules », souligne-t-il. En parallèle, la diésélisation du parc a déjà progressivement abaissé de 3,1 % les volumes de consommation de carburant de 2009 à 2010. « Et nous pouvons faire mieux que cela », conclut Thierry Fristot.
Le conseil général de la Moselle opte pour le diester
Thierry Fristot, chef de la division des achats et de la logistique, conseil général de la Moselle
Le choix du diester est aussi lié au contexte local : la Moselle produit du colza et abrite des infrastructures pétrolières. Le diester offre aussi l’avantage de pouvoir s’intégrer rapidement et sans difficulté technique dans les véhicules à motorisation diesel. Et 43 % des quelque 500 véhicules de la flotte de l’agglomération roulent au diesel, souligne-t-on du côté du conseil général. Avec un élément important : la consommation de carburant représente la moitié du budget de fonctionnement du service du garage départemental, d’où l’intérêt porté aux différentes possibilités de la maîtriser.
Dans d’autres domaines, les produits verts génèrent des économies encore plus flagrantes. C’est vrai du nettoyage et du lavage par exemple, avec des innovations pour réduire plus que sensiblement la consommation d’eau. « Environ 200 litres d’eau sont nécessaires pour le lavage traditionnel d’un véhicule », remarque Jérémy Richard, fondateur et directeur du réseau Ecolave. Un gaspillage énorme que l’enseigne propose d’éviter en employant des nettoyants à base végétale (du Colza pour l’essentiel), sans eau donc, et sans produit chimique.
L’éco-lavage pour réduire la consommation d’eau
Comme souvent pour les entreprises dont le credo est le respect de l’environnement, l’offre se doit d’être complète, sans laisser une partie de la prestation en dehors de ces principes. Ecolave propose donc aussi des lingettes constituées de microfibres et réutilisables plus de 300 fois, assure Jérémy Richard, à condition de les laver. « Il suffit alors de recourir à des lessives éco-labellisées et de bien gérer le lavage ».
David Allouch, président de Nestor Wash
Autre procédé mis au point cette fois par Nestor Wash, d’abord dans les milieux hospitaliers puis transposé dans l’entretien automobile, l’usage de la vapeur d’eau. « Nous l’utilisons pour remplacer les détergents : l’apport de la chaleur dégagée libère une pression et une énergie pour nettoyer en profondeur dans des endroits parfois difficiles d’accès », justifie David Allouch, président de l’entreprise. Pas d’investissement dans une aire de lavage, pas d’usage de consommables, et un seul litre d’eau employé. « Certes, pour une flotte d’entreprise, la question de l’aire de lavage ne se pose pas. Mais ce système permet aux différents utilisateurs de véhicules de gagner du temps puisque le nettoyage a lieu sur place, effectué par Nestor Wash», précise David Allouch. Ce qui économise du même coup un temps souvent précieux pour les employés comme pour les cadres.
Euromaster a lancé un nouveau modèle pour ses ateliers mobiles de réparation. Celui-ci ne fonctionne plus avec un compresseur à fuel mais électrique. De taille plus basse, ce véhicule intervient dans les parkings souterrains.
L’eau, première cible des mesures d’économie
Sans aller jusqu’à ces nouveautés, certaines collectivités locales et territoriales ont réfléchi à des processus innovants pour diminuer la consommation d’eau. C’est le cas de la mairie de Saint- Quentin qui dispose dans son garage en régie d’un rouleau et de six pistes à haute pression pour les véhicules légers et les utilitaires. « Nous avons un projet de système de récupération des eaux de pluie, note Daniel Dagnicourt, et d’autres projets relatifs à la récupération de sortie des stations d’épuration ». Lourds en investissements, de tels projets bénéficient de subventions de l’Ademe et généreront une baisse de 30 à 40 % de la consommation d’eau. Pour sa part, le conseil général de la Moselle a préféré une autre solution, moins ambitieuse certes, mais aux effets plus immédiats. Pour le portique à rouleaux qu’il possède, il préconise des produits biodégradables en lieu et place des traditionnels détergents chimiques. Avec les pneumatiques, l’équation semble assez équilibrée entre les coûts et les enjeux techniques et environnementaux. « Les fabricants apportent l’innovation et réduisent ainsi l’usure du roulage, souligne Christophe Rollet, directeur général de Point S France. Ils travaillent aussi sur le renforcement des pneus et le roulage à plat, et Michelin fait notamment des efforts significatifs sur le pneu écologique ».
Pour éviter le gaspillage d’eau lors du lavage des véhicules, Ecolave propose des nettoyants à base végétale, sans eau et sans produit chimique, ainsi que des lingettes constituées de microfibres et réutilisables plus de 300 fois.
Diminuer encore l’usure des pneumatiques
Parmi les équipements des véhicules, les pneumatiques sont les premiers à être mis en avant pour leur contribution à la réduction des consommations de carburant et donc à la diminution des émissions de CO2.
Un pneumatique qui roule plus longtemps sera moins vite dans le circuit du recyclage, avec des gains à la clé. Sauf que pour Pascal Valaize, responsable marketing au sein du conseil administratif de Roady, l’enseigne d’entretien automobile des Mousquetaires (Intermarché), les pneus ont, au contraire, perdu en durée de vie sur une période plus longue. « Il y a une dizaine d’années, un pneu se changeait tous les 50 000 km environ. Actuellement, le chiffre est plutôt de l’ordre de 20 à 30 000 km, détaille-t-il. Les pneus s’usent plus qu’avant du fait de véhicules plus puissants et plus techniques ».
Arbitrer entre impératif de prix et environnement
Mais que ce soit pour les pneus ou le reste de l’entretien des véhicules, il existe une vraie volonté de respecter l’environnement, « mais cette volonté s’arrête aux prix. Dans la conjoncture actuelle, nombre de clients ne sont pas prêts à payer plus cher des produits ou des prestations », regrette Christophe Rollet, de Point S France. Un constat approuvé par Pascal Valaize : « L’innovation a beaucoup évolué ces dernières années et le parc automobile s’est profondément transformé. Mais en dépit de ces innovations, les clients veulent toujours un prix. Pour eux, investir, ne serait-ce que dans des pots catalytiques, reste très difficile ».
Autrement dit, dès que l’innovation n’apporte pas d’économies, elle n’attire pas les clients. Finalement, la responsabilité n’incomberait- elle pas aux fabricants et aux prestataires de services de séduire et convaincre ces clients ? « Oui, il y a en quelque sorte un « forcing d’influence » à faire, reprend Pascal Valaize, mais nous n’avons pas vraiment les moyens de les éduquer ». Et encore faut-il distinguer la clientèle classique de celle des flottes automobiles, mieux structurée. « Mais le comportement est le même dès lors qu’il s’agit de coûts », estime-t-il.
Environnement : la responsabilité des enseignes d’entretien
Pascal Valaize, responsable marketing au sein du conseil administratif de Roady
Cette situation n’empêche pas les enseignes d’assumer des prestations plus conformes au respect de l’environnement. « Nous préférerons réaliser nous-mêmes la vidange de véhicules plutôt que de vendre des lubrifiants aux clients. Au moins, nous sommes sûrs que les choses seront faites pour le recyclage des lubrifiants », poursuit Pascal Valaize. Ces enseignes travaillent aussi avec des sociétés spécialisées dans l’environnement et le recyclage, comme Veolia, Chimirec, Aliapur, FRP, etc. « Mais nous sommes plus suiveurs que décideurs, pointe Christophe Rollet, de Point S France. Les manufacturiers investissent beaucoup, des économies d’énergie jusqu’au lavage sans eau, en passant par la qualité des huiles. Mais pour notre part, nous ne pouvons pas trop nous diversifier, des choix sont à faire ». Des choix par définition stratégiques et lourds d’investissements. D’autant que dans un avenir proche, des décisions délicates sont à prendre autour du véhicule électrique. « Son arrivée va affecter de nombreux aspects de l’entretien automobile, prédit Christophe Rollet, de la carburation jusqu’à certaines pièces détachées. Cela va nous obliger à modifier notre offre de services ».
En attendant cette ère nouvelle, les enseignes de réparation automobile travaillent parfois sur des innovations ponctuelles relatives à leurs prestations. Euromaster, qui propose depuis plus d’une dizaine d’années des ateliers mobiles de réparation pour intervenir directement chez les clients, a lancé un nouveau modèle. Celui-ci ne fonctionne plus avec un compresseur à fuel mais électrique. De taille plus basse, ce véhicule permet à l’enseigne d’intervenir dans des parkings souterrains, ce qui n’était pas possible jusqu’à présent. « C’était une véritable attente des clients », conclut Alain Gallot.