Avant de choisir et d’installer des bornes de recharge, les gestionnaires de flotte doivent réfléchir à l’impact de ces bornes sur le réseau et aux outils de suivi. « Ils doivent ainsi prendre en compte les réflexions autour des services de charge et de mobilité (gestion de contrôle d’accès, suivi de l’état technique des bornes, etc.) », conseille Jean-Marie Racine, directeur commercial de Freshmile. Cet opérateur de recharge pilote et exploite les bornes (coordination de la maintenance, gestion de la monétisation des charges, etc.). En tant qu’opérateur de mobilité, il fournit aussi le pass Freshmile qui rassemble les consommations de recharges publiques et privées sur une seule plate-forme.
Comme pour les véhicules, les flottes doivent donc étudier les moyens de superviser les bornes afin de limiter les coûts et de gérer les recharges des collaborateurs. « Cette supervision est un réel atout dans les grands sites car elle renseigne sur l’état de la borne et permet d’établir un système logistique d’accès aux employés afin de suivre leurs consommations. Avec notre système de supervision, nous mesurons, remontons puis répartissons les charges associées aux consommations électriques des conducteurs à partir du point de livraison d’électricité d’un bâtiment ou d’un parking d’entreprise », avance Bastien Batt, directeur général de l’opérateur Borne Recharge Service.
Trouver la bonne solution
« La plupart de nos homologues fournissent une solution basique de suivi technique des infrastructures de recharge, c’est-à-dire une plate-forme de supervision en complément de la fourniture et de la pose de bornes. D’autres commercialisent des systèmes de supervision plus performants mais sans assistance pour la gestion du parc de bornes. Pour notre part, nous développons l’intégralité de nos solutions informatiques et proposons notre savoir-faire pour aider à leur utilisation. Pour offrir un service de recharge complet, acheter un logiciel de gestion de bornes ne suffit pas ! », défend Jean-Marie Racine de Freshmile. Ce prestataire accompagne ses interlocuteurs avec un support client et une assistance téléphonique 24 h/24, 7 j/7.
Et la situation se complique car l’installation de bornes suppose aussi de faire attention à la capacité électrique du bâtiment et-ou du site concernés. « Si la disponibilité électrique totale de l’immeuble est de 160 kVA mais que 110 kW sont déjà pris par la climatisation, l’informatique, l’éclairage, etc., seuls 50 kW sont potentiellement utilisables pour les bornes. Et si vous devez installer dix bornes, elles ne pourront pas être toutes réglées à 22 kW. À noter qu’en fonction du type de réseau électrique, nous parlons plutôt de kVA ou de kW mais cette unité représente la même valeur », complète Cyril Malinvaud, chef de produit pour le fabricant Hager.
Tenir compte de la capacité du réseau
Cyril Malinvaud poursuit : « En fonction de son parc, une entreprise peut acheter des Witty Park de 22 kW et les brider à un seuil minimum, puis rehausser leur puissance délivrée au fur et à mesure de l’évolution des besoins. » Ce délestage électrique (modulation de la charge) peut se faire par le biais des compteurs Linky d’EDF et du signal TIC (télé-information client), par la limitation de la puissance d’entrée de la borne ou encore via le véhicule.
« Une borne peut être raccordée à l’interface TIC du compteur électrique afin de rendre la recharge plus “intelligente” en local. Ce système autorise le pilotage et la gestion dynamique du flux de recharge en fonction de la consommation d’électricité quotidienne des autres équipements du bâtiment afin d’éviter de dépasser l’abonnement électrique », explique Sylvain Lecaplain, directeur technique pour l’installateur ZEborne. Cette gestion dynamique de l’énergie peut être nécessaire avec un parc important de bornes.
« La borne EVBox BusinessLine est notre best-seller. Elle permet par exemple une gestion intelligente et adaptée de l’énergie lorsque plusieurs points de charge sont installés sur site. Ces bornes connectées par connexion filaire constituent de véritables stations de recharge. Dans une station, une seule borne possédera le modem et la carte SIM. Elle sera chargée de réceptionner et de remonter les données de l’ensemble des bornes vers un cloud. La mise en place de bornes en station est donc plus efficace techniquement et économiquement », avance Corinne Frasson, directrice France du fabricant EVBox.
D’autres dispositifs sont parfois à installer pour piloter la recharge. « Notre boîtier modulaire Nemo sert à faire remonter des données des bornes sur notre plate-forme de supervision. Il ajuste la puissance des bornes à partir du compteur d’énergie et en fonction des appels de puissance des véhicules », précise Olivier Toggenburger, directeur commercial de l’opérateur Park’n plug.
Des bornes communicantes
Mais ce pilotage n’est possible que si les bornes possèdent le moyen de fournir leurs données. La plupart des chargeurs communiquent via le protocole OCPP 1.6. « Cet élément est indispensable à la supervision future de la borne. Certains fabricants n’ouvrent pas leur protocole, ce qui empêche les bornes de communiquer avec la plupart des logiciels de supervision », note Sylvain Lecaplain pour ZEborne.
Si la majorité des fabricants mettent à disposition les données de leurs bornes, peu fournissent des systèmes de supervision, tandis que d’autres, comme Hager, facilitent la mise en service des bornes avec des applications (interaction avec les chargeurs via Bluetooth) à destination des installateurs. « Nos gammes Witty Park et Premium se déclinent en deux versions, comme la borne XEV600 et sa version communicante XEV600C (généralement 500 euros plus chère). Cette dernière possède une carte réseau ethernet afin d’envoyer des données au système de gestion du bâtiment ou vers la plate-forme de supervision d’opérateurs de service tels que Freshmile, Chargemap, Chargeguru », expose Cyril Malinvaud pour Hager.
Les gestionnaires de flotte devront aussi surveiller l’évolution de ces normes techniques. « Notre industrie et ses normes changent rapidement. Le protocole OCPP aujourd’hui en version 1.6 sera bientôt remplacé par la version 2.0. Mieux vaut donc prévoir plus large pour son infrastructure afin d’anticiper les usages de demain, les batteries et les autres évolutions à venir », conclut Corinne Frasson d’EVBox.
Anticiper les évolutions
Avec un atout cependant : le changement des bornes devrait s’opérer moins fréquemment que le renouvellement des véhicules. « Si les entreprises changent leurs véhicules en fonction des contrats de location (36 mois généralement en électrique), elles changeront leurs bornes seulement deux à trois fois dans les prochaines décennies », pronostique Frédéric Renaudeau, président de l’installateur de bornes Zeplug.
Par ailleurs, la plupart des acteurs préparent déjà les prochaines nouveautés. « Le fabricant Schneider Electric va ainsi sortir une gamme de bornes communicantes, munie de la dernière version de l’OCPP que nous allons intégrer dans nos systèmes de gestion », anticipe Olivier Toggenburger pour Park’n plug (voir aussi l’article sur le V2G).