
Si la plupart des sites d’informations de carrière préconisent l’obtention d’un bac professionnel maintenance automobile pour parvenir au poste de gestionnaire de flotte, la réalité prouve qu’aucun cursus n’est particulièrement recommandé. En l’absence d’écoles ou de cursus spécialisés après le bac pour former à ce métier, le profil du gestionnaire au sein des entreprises recouvre une diversité surprenante. Univers de la logistique, des finances, de l’administration, des achats ou encore des ressources humaines, autant de domaines dont ce responsable est susceptible de provenir. Et l’apprentissage sur le tas semble bel et bien le...
Si la plupart des sites d’informations de carrière préconisent l’obtention d’un bac professionnel maintenance automobile pour parvenir au poste de gestionnaire de flotte, la réalité prouve qu’aucun cursus n’est particulièrement recommandé. En l’absence d’écoles ou de cursus spécialisés après le bac pour former à ce métier, le profil du gestionnaire au sein des entreprises recouvre une diversité surprenante. Univers de la logistique, des finances, de l’administration, des achats ou encore des ressources humaines, autant de domaines dont ce responsable est susceptible de provenir. Et l’apprentissage sur le tas semble bel et bien le seul élément commun à la profession.
Une diversité illustrée par le parcours des gestionnaires de flotte interrogés dans ce dossier. À l’image d’Olivier Fricaudet, responsable du parc de Coca-Cola depuis quelques mois, à la tête de 340 véhicules de société, 200 utilitaires légers, 500 voitures de fonction et 35 poids lourds. Employé depuis vingt ans dans l’entreprise, Olivier Fricaudet a occupé pendant plus de 17 ans des fonctions commerciales, avec en dernier poste la coordination des outils CRM destinés aux forces de vente. Jusqu’à ce que se présente l’opportunité d’occuper le poste de responsable de parc.
Des profils variés pour des parcours divers
« Sans expérience dans la gestion de flotte, j’ai pourtant voulu me réorienter dans cette voie. J’ai suivi une formation avec ma prédécesseure et j’apprends chaque jour grâce notamment aux participations à des agoras et des tables rondes, et au contact de mes prestataires », relate Olivier Fricaudet.
Sur ce point, signalons que depuis plus de vingt ans, Flottes Automobiles forme gestionnaires de flotte et acheteurs.
« Les gestionnaires proviennent d’univers variés et n’ont parfois suivi aucune formation sur le métier. Dans les petites entreprises, ce poste est d’ailleurs souvent confié à la secrétaire, parmi mille autres tâches à exécuter », confirme Robert Maubé, directeur consultant du cabinet RRMC, spécialiste de la gestion des flottes d’entreprise et consultant pour Flottes Automobiles.
C’est le parcours suivi par Paula Opris ; affectée aux services généraux de Gutenberg Networks, cette gestionnaire de flotte automobile et mobiles, définit également sa carrière comme atypique. Avec une formation de secrétaire médicale en poche, Paula Opris a enchaîné plusieurs missions dans ce métier avant d’être recrutée chez Gutenberg Networks comme secrétaire. Chez ce spécialiste des prestations dans la production publicitaire, elle a évolué en occupant des fonctions dans la partie commerciale, la fabrication, les devis, puis dans la logistique photos.
« Lors d’une restructuration, le poste de gestionnaire de parc a été créé et m’a été proposé. Alors que n’avais pas mon permis de conduire et aucune expérience en la matière, j’ai pris le défi à bras-le-corps. On ne se rend pas compte de tous les enjeux de ce métier », assure Paula Opris qui admet avoir passé quelques nuits blanches au début de sa carrière à la tête d’un parc de 80 VP et VU.
Un millefeuille de compétences et d’expériences
« Être gestionnaire constitue un vrai métier dont je n’ai sûrement pas encore saisi toutes les subtilités et qui devrait être davantage mis en avant de par sa richesse », souligne Paula Opris. Et pour ces autodidactes de la profession, tous les moyens de perfectionnement sont bons : réseau professionnel, presse spécialisée, internet, tables rondes, conférences et formations. « Le métier demeure finalement atypique dans le sens où aucune formation spécifique n’est vraiment requise. Mais ce métier regroupe tout un même un panel très complet de compétences », conclut la représentante de Gutenberg Networks.
S’ils tombent d’accord sur la diversité des parcours et sur l’absence de formation universitaire spécifique, les gestionnaires de parc interrogés s’accordent aussi sur les bagages et compétences indispensables pour exercer leur métier. Des compétences en gestion restent l’un des premiers atouts requis, avec un outil indispensable et bien connu, Excel. De la déclaration de la TVS à la mise à la route des véhicules en passant par les restitutions, les sinistres et les amendes ou encore le calcul des avantages en nature, être gestionnaire de parc suppose une parfaite maîtrise des processus inhérents à la fonction. Un gestionnaire se veut aussi une personne bien informée et réactive, entre autres sur les aspects fiscaux et législatifs, des éléments par définition fluctuants.
Une responsabilité dispersée dans l’entreprise
« Une des plus grandes compétences que doit posséder le gestionnaire ? La diplomatie ! Il en faut pour instaurer une relation professionnelle équilibrée avec chacune des parties prenantes », insiste Olivier Fricaudet, pour Coca-Cola. Un bon relationnel, beaucoup d’aplomb, une force de négociation mais aussi de persuasion, voilà à quoi pourrait en somme ressembler les qualités du gestionnaire idéal.
« Comment reconnaître un gestionnaire de parc dans une entreprise ? C’est simple, il s’agit du collaborateur qui passe toutes ses journées au téléphone, avec à chaque fois un interlocuteur différent », illustre Robert Maubé. Une vision validée par nos témoins : « Être gestionnaire de flotte, c’est s’appuyer sur une organisation et un sens de la coordination sans faille, tant les interlocuteurs se font nombreux. Collaborer avec plusieurs parties prenantes implique d’intégrer une multitude de paramètres », avance Marie-Laure Tamas-Danfa, responsable flotte automobile de Cisco, soit plusieurs milliers de véhicules pour la zone EMEAR (Europe, Moyen-Orient, Afrique et Russie).
Au carrefour de plusieurs fonctions, le gestionnaire ne procède jamais seul. En interne, il travaille en coordination avec le DRH, mais aussi les directeurs administratifs et financiers, la comptabilité et les achats ; et il doit aussi entretenir des liens forts avec les conducteurs.
Une interface entre clients internes et fournisseurs
« Dans une entreprise, le véhicule reste toujours un sujet sensible : afin de contenter tout le monde en interne, il faut arriver à satisfaire les salariés tout en optimisant les coûts », résume clairement Hélène Billon, directrice Facilities & Mobility Management pour Orange, à la tête des 35 000 véhicules du groupe. Car le véhicule de fonction se pose comme un double investissement, à la fois outil de travail du salarié et partie de sa rémunération en tant qu’avantage en nature. Sans oublier l’aspect social lié au véhicule qui n’est en rien négligeable.
S’ajoutent à cela les relations avec les prestataires, qu’ils soient loueurs, pétroliers, assureurs ou encore constructeurs. Sans oublier, toujours en externe, les liens avec les trois administrations que sont le fisc, l’Ursaaf ou encore la police pour la gestion des amendes. Autant d’interactions qui rendent parfois difficile la définition du métier et brouillent la délimitation de son périmètre d’action. « Gérer une flotte est un véritable travail d’équipe », synthétise Paula Opris pour Gutenberg Networks.
Avec des responsabilités aussi éclatées et un périmètre d’action mal délimité, le gestionnaire de flotte doit malgré tout trouver sa place et asseoir son autorité. « Une solution : rattacher ce responsable à un manager de haut niveau qui possède tous les pouvoirs dont la délimitation de la car policy, mais aussi la gestion des achats et de l’administratif », argumente le consultant Robert Maubé. « Sans le soutien de la direction, le gestionnaire aura du mal à établir une véritable stratégie », confirme Olivier Fricaudet, pour Coca-Cola.
Une reconnaissance de la fonction toujours en attente ?
De fait, le gestionnaire de flotte souffre parfois d’un manque de reconnaissance d’autant plus paradoxal au vu du poids financier des véhicules au sein d’une entreprise ou d’une collectivité. Pour certaines sociétés, notamment du secteur tertiaire, la flotte peut aller jusqu’à représenter le second poste de dépenses, derrière les salaires et les charges sociales.
« Pourtant, ce coût reste méconnu, ce qui met en difficulté le gestionnaire pour imposer ses actions. Lors de mes audits, 90 % des entreprises sont incapables de chiffrer précisément ce que leur coûte la flotte, ne serait-ce que pour indiquer à la première demande, et en dix jours ouvrables, la totalité des comptes fournisseurs qui composent le TCO de l’exercice précédent », détaille Robert Maubé.
Pour Robert Maubé, la flotte demeure bel et bien la famille d’achats de frais généraux la plus compliquée à gérer : « Il faut réussir à obtenir la reconnaissance du périmètre de responsabilité budgétaire et l’autorité qui va avec, mais aussi les moyens techniques d’assurer la mission. Bref, ce qui se fait pour tous les autres postes de dépenses. » Et cela n’est pas si simple… « Le manque de reconnaissance est frappant dans ce métier », nous confie un gestionnaire qui, lors de sa prise de poste, a vu son véhicule de fonction lui être supprimé. Pour la profession, la route est encore longue.