
Les chiffres ont de quoi motiver les moins sensibles des chefs d’entreprise. Les accidents de la route représentent aujourd’hui environ 3 % des accidents du travail. Encore plus significatif, un accident mortel au travail sur cinq survient sur la route. Au-delà des risques de dommages corporels, le conducteur est aussi exposé à des risques physiques, posturaux, chimiques et psychosociaux.
La route est l’un des facteurs de risque auquel doivent faire face les entreprises. Quelle qu’en soit la cause, les accidents sont susceptibles d’engager la responsabilité civile de l’entreprise qui peut aussi être victime de dommages aux biens. Les risques...
Les chiffres ont de quoi motiver les moins sensibles des chefs d’entreprise. Les accidents de la route représentent aujourd’hui environ 3 % des accidents du travail. Encore plus significatif, un accident mortel au travail sur cinq survient sur la route. Au-delà des risques de dommages corporels, le conducteur est aussi exposé à des risques physiques, posturaux, chimiques et psychosociaux.
La route est l’un des facteurs de risque auquel doivent faire face les entreprises. Quelle qu’en soit la cause, les accidents sont susceptibles d’engager la responsabilité civile de l’entreprise qui peut aussi être victime de dommages aux biens. Les risques opérationnels sont de natures différentes selon les métiers et peuvent toucher l’environnement comme la sécurité informatique.
Des risques assurables et non assurables
« Un risk manager doit identifier les risques avec les directions opérationnelles et en prévoir la couverture par les assurances. Parallèlement, pour les risques non assurables, il doit établir des procédures pour les réduire et les maîtriser au maximum », explique Patrick Lacroix, risk manager d’Idex Services, spécialiste des services à l’énergie et l’environnement (voir le témoignage). À noter que Patrick Lacroix est également président de la commission automobile de l’Amrae (Association pour le Management des Risques et des Assurances de l’Entreprise).
Au nombre des risques non assurables figurent les pertes de marchés, les atteintes à la réputation, etc. « La majorité des risques ne sont pas assurables », précise Patrick Lacroix. Le risk manager doit aussi être capable de gérer une crise et de bâtir un plan de continuité de l’activité de l’entreprise si nécessaire.
Par rapport à la globalité des risques, l’importance de la route varie selon la taille et le métier de l’entreprise. Pour un transporteur, les déplacements constituent son cœur de métier avec un risque routier au plus haut par rapport aux autres dangers auxquels il doit faire face. « Mais ce n’est pas parce que la flotte a un périmètre restreint que le risque routier est moins important », pointe Patrick Lacroix.
Le risque circulation fait partie intégrante des risques professionnels et doit donc être pris en compte dans l’évaluation des risques. Cette dernière se fait en quatre étapes : identification des risques, analyse des risques, élaboration du plan d’actions, mise à jour annuelle et lors d’une modification fondamentale de l’entreprise ou d’une unité de travail.
Cette évaluation doit être réalisée selon un découpage de l’entreprise en unités de travail. Les critères géographiques, par métier, par poste de travail, par degré d’autonomie peuvent être pris en compte pour cette répartition.
Des risques à identifier et à segmenter
Ensuite, par unité de travail, il faut segmenter les types de risques de circulation. À titre d’exemple, il faut définir si chaque unité est concernée ou non pour tous les moyens de déplacement : auto, engins, camions, deux-roues, circulation sur site, autres moyens de déplacement employés, circulation en région, sur toute la France, à l’étranger. Cette phase est dite d’identification.
L’évaluation du risque est un croisement d’informations entre le niveau d’exposition, la durée, les kilomètres parcourus, la fréquence d’utilisation, le contexte et le niveau de probabilité de survenance d’un accident (historique des sinistres). Le risque peut alors se scinder en catégories : faible, moyen, significatif, important.
Pour limiter les facteurs de risque sur la route, des outils de communication peuvent être construits facilement. Des indicateurs permettent de mesurer l’évolution de la sinistralité et d’impliquer les managers dans l’amélioration des résultats de leurs équipes.
Pour appréhender le risque routier, Idex a retenu un indicateur très précis : le taux de fréquence des accidents responsables avec tiers et corporels. « Les réparations de nos véhicules sont à notre charge et les dégâts causés aux tiers sont pris en charge par notre assurance », complète Patrick Lacroix. Pour la réussite d’un plan de prévention, des objectifs chiffrés doivent être fixés. De plus, l’entreprise doit communiquer sur les coûts des sinistres.
Idex a déployé plusieurs outils de prévention. Parmi ces derniers figurent les quarts d’heure sécurité où des collaborateurs de référence sensibilisent les conducteurs. « Pour qu’elles rencontrent le succès, les actions doivent être menées sur le long terme et bénéficier de l’appui de la direction », observe Patrick Lacroix.
Pour lutter contre les accidents de la route, les spécialistes de la prévention ont élaboré un programme d’actions en plusieurs étapes. La première consiste à établir un état des lieux de la sinistralité en analysant les données statistiques des deux ou trois dernières années. Ce bilan doit évaluer l’efficacité des actions déjà menées et mesurer l’influence de l’organisation du travail sur les accidents de la route. Cette première étape est fondamentale pour construire un programme d’actions adapté et efficace.
Construire un plan d’actions
Après avoir identifié et cartographié les risques liés aux accidents de la route, le risk manager peut mener des actions de prévention en lien direct avec le courtier en assurance. « Dans les grandes structures, le coût d’une assurance tous risques serait trop élevé, souligne Patrick Lacroix. Les risques conservés en auto-assurance vont alors faire l’objet d’actions de formation et de sensibilisation auprès des collaborateurs pour diminuer le coût des sinistres qui reste à la charge de l’entreprise » (voir l’article sur la responsabilité du chef d’entreprise).
Après cet état des lieux, l’entreprise définit son plan de prévention, fixe des objectifs chiffrés et évalue périodiquement les progrès réalisés pour adapter sa stratégie. Avant de former les conducteurs sur circuit, les responsables disposent de nombreux outils pour les sensibiliser : réunions d’information, communication sur intranet, e-learning, simulateur de conduite, etc. Pour les formations, les entreprises peuvent choisir de cibler les conducteurs multi-accidentés ou ceux qui ont récolté le plus de PV.
Pour éviter les accidents, chaque département de l’entreprise a un rôle bien précis à endosser. Le risk manager réalise un audit du risque routier. Les managers des entités s’assurent du respect des bonnes pratiques au quotidien. La direction générale peut les mettre en concurrence sur ce sujet précis.
Une action concertée
Avec les acheteurs, les gestionnaires de flotte peuvent négocier des équipements de sécurité plus nombreux auprès des prestataires. À titre d’exemple, dans le cas d’accidents récurrents lors du stationnement, il y a tout intérêt à référencer des véhicules dotés de radars de recul.
Le risk manager doit avoir des échanges réguliers avec l’assureur et le responsable de parc, et faire suivre les informations et les statistiques sur la sinistralité à ce dernier. « J’avais transmis le coût des sinistres de stationnement en marche arrière à notre gestionnaire de flotte pour justifier l’équipement en radars de recul », précise Patrick Lacroix.
Pour couvrir le coût des actions de prévention, les entreprises peuvent aussi recevoir des aides de la part de leur assurance. Chaque année, les assureurs doivent verser 0,3 % des primes de la responsabilité civile pour mener des actions de prévention. Si les aides sont souvent allouées au grand public, les entreprises peuvent également obtenir un coup de pouce.
Moins spectaculaire que les risques naturels, environnementaux et informatiques, le risque automobile ne doit pas pour autant être négligé. Souvent, les véhicules portent l’identité de l’entreprise et les accidents peuvent nuire à son image de marque. Et dans certains cas, le risque routier engage la responsabilité pénale du chef d’entreprise (voir l’article). Enfin, les coûts liés aux accidents de la route peuvent être importants, diffus et difficilement mesurables dans leur globalité.
Une assurance toujours plus chère
La prévention des risques routiers ne cesse de gagner en importance : de plus en plus d’appels d’offres prennent en compte cet aspect pour départager les concurrents. « Et les entreprises ont tout intérêt à lancer et à poursuivre des actions de prévention des risques routiers alors que les conditions d’assurance des flottes vont se durcir. Les résultats des assureurs baissent du fait de l’augmentation des indemnisations pour les dommages corporels et des frais de réparation », fait remarquer Patrick Lacroix.
Les entreprises doivent maîtriser le coût de l’assurance en développant des actions de prévention. Pour Patrick Lacroix, « il n’y a pas de recette miracle : seule la sensibilisation des conducteurs et des managers peut réduire le risque. » Et ce, sur la route comme dans toutes les situations où les salariés sont confrontés au danger.
Dossier - Risk management : la route, un risque comme un autre ?
- Risk management : la route, un risque comme un autre ?
- La responsabilité du chef d’entreprise
- Patrick Lacroix, Idex Services : « Le management doit s’emparer du risque routier »