
Prévue le 15 octobre 2020, l’édition lyonnaise des Rencontres Flotauto a dû être reportée. Parmi les conférences programmées, voici l’essentiel du contenu de celle sur le secteur public.
Exit le diesel dans la flotte de la ville de Lyon. À terme, la très grande majorité des poids lourds et des utilitaires devront rouler au GNV (voir aussi l’article sur la ZFE-m de Lyon). En parallèle, une étude est en cours pour l’acquisition de gros utilitaires électriques. Une conversion qui a demandé d’importants investissements : plus de 3,4 millions d’euros pour une trentaine de poids lourds et autant de véhicules utilitaires GNV. « Il ne devrait donc...
Prévue le 15 octobre 2020, l’édition lyonnaise des Rencontres Flotauto a dû être reportée. Parmi les conférences programmées, voici l’essentiel du contenu de celle sur le secteur public.
Exit le diesel dans la flotte de la ville de Lyon. À terme, la très grande majorité des poids lourds et des utilitaires devront rouler au GNV (voir aussi l’article sur la ZFE-m de Lyon). En parallèle, une étude est en cours pour l’acquisition de gros utilitaires électriques. Une conversion qui a demandé d’importants investissements : plus de 3,4 millions d’euros pour une trentaine de poids lourds et autant de véhicules utilitaires GNV. « Il ne devrait donc rester qu’un minimum de véhicules diesel pour les déplacements lointains, le GNV n’étant pas du tout adapté pour assurer un trajet jusqu’en Espagne par exemple », expose Patrick Nowicki. Ce responsable garage de la ville de Lyon vise un objectif à l’horizon 2026 : seule une dizaine de modèles diesel devrait subsister sur l’ensemble des 750 véhicules du parc.

« À terme, il ne devrait rester qu’un minimum de véhicules diesel pour les déplacements lointains, le GNV n’étant pas du tout adapté pour assurer un trajet jusqu’en Espagne par exemple. »
Patrick Nowicki, responsable garage, ville de Lyon
Le verdissement de Lyon à Dardilly
Dans la petite ville voisine, Dardilly, l’ambition de verdissement se veut encore plus radicale : « La politique de Dardilly est de bannir les moteurs thermiques et de passer au 100 % électrique », avance Sébastien Chef, responsable technique et proximité prévention. Cette commune a acquis sa première Zoé dès 2014. Entre temps, le parc électrique de la ville, qui compte une vingtaine de véhicules légers et d’utilitaires, s’est étoffé de deux autres Zoé et de quatre Kangoo Z.E. électriques, complétés par deux Yaris hybrides.

« Le problème est de trouver des modèles électriques adaptés aux missions ; par exemple, pour les travaux de déneigement, nous avons besoin d’une autonomie et d’une puissance suffisantes. »
Sébastien Chef, responsable technique et proximité prévention, ville de Dardilly
Sans surprise, les collectivités territoriales commencent souvent par introduire les modèles électriques d’abord dans les flottes partagées dont l’usage se prête par définition plus aux autonomies restreintes. « Nous avons mis en place un pool de véhicules électriques mutualisés dès 2016 pour les petits trajets : neuf Zoé, deux Kangoo Z.E. et trois Yaris hybrides », indique pour sa part Ivan Croës, directeur des moyens des services territorialisés du département de la Haute-Vienne. Sur les 180 véhicules mutualisés, seuls 5 % fonctionnent à l’électrique, mais ce taux devrait augmenter fortement à partir de 2021 avec le renouvellement des véhicules achetés entre 2009 et 2011. Une transition à laquelle Ivan Croës se prépare en équipant les bâtiments de bornes de recharge dans plusieurs sites.
Pour la Haute-Vienne, l’objectif à cinq ans est donc d’atteindre une soixantaine de véhicules électriques, même si certains usages ne sont pas compatibles comme avec les astreintes. Dans ce département rural où des agents peuvent être amenés à parcourir 150 à 200 km par jour, l’autonomie des véhicules constitue un enjeu majeur et les nouveaux produits sur le marché commencent à peine à répondre aux besoins.
Le temps de la transition
À Lyon, le verdissement s’accélère avec le passage d’un taux de 6 % actuellement de véhicules propres dans l’ensemble du parc, à 20 % prévus fin 2021, compte tenu des commandes de renouvellement en cours. « Il y a deux ans de délai entre les décisions et le remplacement effectif, la durée moyenne entre le lancement d’une commande et la réception du véhicule oscille en général entre huit et douze mois », note Patrick Nowicki.
Ce responsable se heurte néanmoins au manque d’équipements en prises électriques pour les bornes de recharge et à la rareté des stations pour le GNV. « Pour l’heure, il n’existe qu’une station GNV poids lourd à Lyon, et deux en périphérie proche. Cela contraint les conducteurs à faire un détour de 20 km, ce qui peut facilement leur faire perdre une heure et demie dans les embouteillages », déplore Patrick Nowicki, en rappelant que la ville prospecte pour ouvrir deux stations GNV en interne. Quant à l’équipement en prises électriques des bâtiments de la ville, la procédure est en cours et le budget voté, mais le délai d’exécution devrait prendre quelques mois.
Former les conducteurs
Outre les défis techniques, les gestionnaires de flotte des collectivités doivent également surmonter des résistances au changement dans les habitudes des conducteurs. Au sein du département de la Haute-Vienne, une formation a été nécessaire pour les premiers utilisateurs de véhicules électriques afin de les familiariser avec les boîtes automatiques et la maîtrise du danger d’une motorisation silencieuse. « Après une période d’adaptation, les retours sont plutôt positifs et l’usage de l’électrique est bien entré dans les mœurs des agents », témoigne Ivan Croës.

« Nous réfléchissons à la possibilité de convertir en rétrofit des véhicules thermiques en véhicules électriques avec deux Renault Clio 3 destinées à la visite à domicile des personnes âgées. »
Ivan Croës, directeur des moyens des services territorialisés, département de la Haute-Vienne
Le constat n’est pas très différent pour la commune de Dardilly : « Au début, les premiers utilisateurs des véhicules électriques s’étaient d’abord montrés réfractaires », pointe Sébastien Chef. Des réticences désormais majoritairement levées après un temps d’adaptation. « En revanche, nous avons essuyé les plâtres de l’hybride. Quand nous nous sommes équipés, nous n’étions pas conscients que l’usage n’était pas du tout adapté à des terrains avec de forts dénivelés, comme c’est le cas de Dardilly. Résultat : la consommation de carburant avec ces hybrides est supérieure à celle des modèles essence standards », complète ce responsable.
En effet, le devoir d’exemplarité des collectivités locales les oblige parfois à devenir les testeurs de nouveautés, mais sans toujours bénéficier d’assez de recul pour juger de leur viabilité. Et souvent, les impératifs de verdissement se montrent en décalage total avec les besoins opérationnels des services d’intérêt général remplis par ces entités publiques.
« Le problème est de trouver des modèles électriques adaptés aux missions des collectivités ; par exemple, pour les travaux de déneigement, nous avons besoin d’une autonomie et d’une puissance suffisantes », soulève Sébastien Chef pour Dardilly. Ce dernier bute aussi sur l’offre de modèles électriques adaptés à l’entretien des espaces verts, aujourd’hui encore exclusivement proposés en motorisation diesel.
Le problème de la demande et de l’offre
« Nous sommes dans l’attente d’expérimenter des véhicules poly-bennes à hydrogène. Mais nous ne disposons pas encore de stations hydrogène suffisamment proches pour que ce projet soit viable », poursuit Sébastien Chef qui planche sur un projet de pompe hydrogène mutualisée avec une collectivité voisine. Sur ce sujet de l’hydrogène, Patrick Nowicki à Lyon reste plus circonspect : « Nous regardons l’hydrogène de loin, mais cette technologie fonctionne comme un prolongateur d’autonomie et nous n’avons besoin que de 100 à 150 km d’autonomie par jour. »
Cette difficulté à trouver les bons modèles a d’ailleurs été rencontrée à une autre échelle par la ville de Lyon : « Il y a encore moins de trois mois, je ne pouvais pas trouver d’utilitaire électrique où l’on puisse se tenir debout, soit l’équivalent d’un Citroën Jumpy ou d’un Renault Trafic », rappelle Patrick Nowicki. Qui s’attend à encore deux ou trois ans de complexité pendant lesquels ses services continueront eux aussi à « essuyer les plâtres ».
Faute de moyens et d’offre adaptée, les collectivités locales sont parfois poussées à faire preuve d’ingéniosité. Ainsi, le département de la Haute-Vienne étudie une expérimentation avec le rétrofit autorisé par la loi depuis avril dernier, soit la conversion d’un véhicule thermique à l’électrique. « Nous réfléchissons à la possibilité de tenter cette expérience sur deux Renault Clio 3 destinées à la visite à domicile des personnes âgées », expose Ivan Croës. Ce responsable étudie également la piste de la conversion à l’éthanol pour certains usages à la marge dans les sites à proximité de stations de biocarburant.