
Pour les gestionnaires de flotte, la sécurité routière des salariés demeure une préoccupation centrale. Un constat que ne démentiraient pas les entreprises du Club ESR 69 (Entreprises Sécurité routière du Rhône), qui portent une grande attention aux trajets domicile-travail. « Depuis 2019, à Lyon, nous constatons une recrudescence des accidents liés à des modes doux de déplacement : vélo, trottinette, etc. Nous réalisons donc de nombreuses actions de prévention avec les vélos et EDPM, sur la réglementation et la prévention pour ce type de trajets », souligne Mickaël Lopes, formateur chez le spécialiste SST Formaprev et adjoint à la secrétaire du Club ESR 69.
Ces campagnes vont aussi bénéficier aux membres de ce club régional de prévention qui cherche à mutualiser les bonnes pratiques de chacun avec, en ligne de mire, une meilleure efficacité et un gain de temps pour ses membres. « Chaque entreprise a sa problématique », rappelle toutefois Mickaël Lopes.
Sécurité des salariés : risque professionnel et routier
C’est vrai de la branche Power Services de Schneider Electric, membre du club basée à Grenoble et Saint-Priest (69). Sa politique de sécurité routière est englobée dans celle de la prévention du risque professionnel : « Pour nos salariés, les deux principaux risques identifiés sont le risque électrique et le risque routier », décrit Jérémy Lagoutte, ingénieur QSSE (qualité-santé-sécurité-environnement) au sein de cette branche du spécialiste de la gestion de l’énergie. La flotte de Schneider Electric Power Services comprend 380 véhicules dont environ 70 en Auvergne-Rhône-Alpes.
L’activité Power Services rassemble environ 200 techniciens répartis dans huit régions géographiques. « Ils conduisent des utilitaires de type Jumpy ou Transporter, ou des voitures particulière de type 5008 ou Grand Scénic », détaille cet ingénieur. Les lois de roulage approchent les 40 à 50 000 km par an et les véhicules, tous attribués, sont financés en location longue durée.
Chez Schneider Electric, la prévention du risque routier passe par le choix des véhicules et de leurs équipements, observe Jérémy Lagoutte. Par exemple, les habitables s’équipent systématiquement d’une séparation contre les risques de projection pour les utilitaires, et d’une grille de protection pour les VP. « Pour tous les collaborateurs, nous sélectionnons les modèles en fonction des équipements de sécurité systématiquement intégrés. Nous fournissons aussi des forfaits pneus hiver et été », complète Jérémy Lagoutte.
Déployer équipements et audits de sécurité routière…
En parallèle, des audits sont menés chaque année sur la conformité des véhicules en matière de sécurité. Ils sont réalisés avec une application qui guide les conducteurs dans la prise de photos de plusieurs éléments des véhicules : état global, essuie-glace, pneus, phares, etc.
Ces dispositions sont prolongées par des actions de prévention sur le risque routier autour de thèmes comme la fatigue, les effets de la drogue ou de l’alcool, et l’usage du téléphone au volant. « Cela se traduit par des formations en e-learning ou des échanges lors de “causeries sécurité“, précise le responsable. Nous avons aussi mis en place pour nos salariés quelques formations en sécurité routière avec stages des dispensés par le prestataire Centaure. » Ces stages en sécurité routière sont destinés à l’ensemble des salariés. Et ils pourraient s’étendre à des formations en éco-conduite, suite à un test réalisé par autre branche de Schneider Electric.
La prévention du risque routier passe aussi par une politique plus générale de diminution du nombre des déplacements. L’entreprise favorise ainsi l’embauche de salariés qui habitent au plus près de l’agence qui les emploie. Une meilleure supervision des tournées est aussi à l’ordre du jour. « Le planning des interventions prend notamment en compte les villes de départ de résidence du technicien, plutôt que son agence comme nous le faisions auparavant », indique Jérémy Lagoutte.
… et repenser les trajets des salariés
Pareillement, un point est fait chaque semaine sur les trajets effectués par les techniciens avec les responsables de la planification, les managers et les chefs de projet de Schneider Electric. « Au cours de cette réunion, nous avons pu nous rendre compte que nous avions parfois des aberrations dans les trajets réalisés, ce qui nous a conduits à modifier la planification », retrace l’ingénieur QSSE.

Cette réunion offre aussi l’occasion de rappeler les règles qui encadrent le travail des techniciens : « Ils sont soumis au respect de certaines amplitudes horaires pour leurs trajets, ce que nous rappelons régulièrement aux personnes en charge des plannings », décrit Jérémy Lagoutte. Car durant leurs interventions, ces plannings des interventions sont susceptibles d’être bousculés. « S’il y a des débordements importants, le technicien doit appeler son manager pour savoir si le temps demandé est compatible avec son planning », souligne le responsable.
Équipements des véhicules, formations, optimisation de l’organisation : l’ensemble de ces mesures est bénéfique pour l’entreprise en termes de sécurité routière. « Nous n’avons eu aucun accident du travail lié au risque routier ces vingt dernières années. Nous avons eu quelques accidents de trajet mais pas de déplacement professionnel », se félicite Jérémy Lagoutte.
Cetup, spécialiste de la livraison longue distance basé à Grenoble, en Isère, a aussi mis en place une politique de prévention du risque routier adaptée à son activité. Et cette politique s’organise dès le recrutement des salariés. Dans cette entreprise, les trajets parcourus pour les livraisons atteignent les 500 km en moyenne, pour des missions uniques de transport express. Et pour la prévention du risque routier, Cetup insiste avant tout sur la formation. « Nous recrutons nos chauffeurs par session de huit à dix. Ils sont systématiquement formés pendant quatre jours », avance Laurence Capossele, cofondatrice et codirigeante de ce transporteur.
Sécurité routière : former les salariés…

Ces formations sont assurées en interne par les titulaires des postes à responsabilité : « le responsable de flotte mais aussi le responsable des opérations ou le responsable QSE », énumère Laurence Capossele. À l’issue de ce cursus de quatre jours, des tests sont réalisés et une remise des clés des véhicules est effectuée en présence de tous les responsables administratifs et opérationnels de Cetup.
Pour ses 120 véhicules, l’entreprise travaille particulièrement sur les performances écologiques de son parc : 85 % des véhicules sont Euro 6. La flotte compte aussi des véhicules électriques, un modèle hydrogène et six modèles carburant au bioéthanol. « Les véhicules sont tous bridés à 130 km. Ils sont aussi révisés régulièrement par notre garage dédié à Cetup, avec lequel nous collaborons depuis 25 ans », complète la responsable.
Le pilote est ambassadeur de l’entreprise, il porte notre image et nos valeurs.
Laurence Capossele, cofondatrice et codirigeante, Cetup
Cetup soigne ses pilotes
Lors de la remise des clés de leur véhicule, les nouveaux salariés de Cetup sont crédités du titre de « pilotes ». « Chez nous, la notion de pilote englobe plus que la réalisation du transport d’un produit d’un point A vers un point B. Le pilote est ambassadeur de l’entreprise : il porte notre image et nos valeurs en termes de qualité, de sécurité, de développement durable et sociétal », insiste Laurence Capossele. Ainsi, lors de la formation de ces pilotes, les compétences de conduite sont mises en avant tout comme le « savoir-être » au volant, et les pilotes sont initiés à l’éco-conduite. Par la suite, pour assurer des « piqûres de rappel », « les pilotes sont suivis et challengés en fonction des remontées d’informations sur leur conduite, issues de la télématique embarquée », indique la dirigeante. Cet outil permet d’établir des tableaux mensuels de la conduite de chacun afin d’en tirer un bilan global. « Sur la base du tableau de bord remonté de la télématique, un pilote est récompensé chaque trimestre avec la remise d’un diplôme et des cadeaux, comme un week-end payé par l’entreprise », rappelle Laurence Capossele.
La flotte de Cetup en chiffres
120 véhicules : 60 Trafic Crit’Air 2 Euro 6 (une partie en Euro 6 D-Full de dernière génération), 40 Master à hayon Crit’Air 2 Euro 6, 10 Master débâchables. Des modèles Crit’Air 0 : des Zoé et Kangoo électriques, 1 Kangoo hydrogène, 6 Golf E85
Reste que, comme pour la branche Power Services de Schneider Electric, la responsabilité des comportements routiers ne repose pas uniquement sur les épaules des « pilotes » mais aussi sur des protocoles internes. « Pour ne pas travailler dans l’urgence et réduire les risques, pour les véhicules, les chauffeurs et les biens transportés, nous convenons des délais avec le client », précise Laurence Capossele.
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… et les accompagner
De même, l’entreprise s’implique dans une information permanente des chauffeurs sur les conditions météo du jour. « Et en cas de sinistre, nous avons une commission sécurité composée de personnes de la société : responsable opérations, responsable flotte, responsable des pilotes, responsable QSE environnement et RH. Une analyse des causes est menée et nous envisageons ce qu’il est possible de faire pour améliorer la sécurité », détaille la responsable.
Enfin, Cetup veut aussi prévenir le risque routier sur les trajets domicile-travail, entre autres en participant à un challenge mobilité dans le cadre de la Semaine de la mobilité au travail. Un levier de plus pour faire baisser la sinistralité.
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