
Avec une part de marché du segment BtoB toujours plus élevée, les prestataires automobiles mettent tout en œuvre pour séduire et fidéliser les professionnels. Chez Euromaster, cette clientèle représente la moitié du volume de pneus écoulés. Autre statistique éloquente, un conducteur professionnel sur trois arrive dans un centre de l’enseigne dans le cadre d’accords signés avec les loueurs longue durée.
Après avoir proposé des solutions de financement, constructeurs et loueurs ont ajouté l’assistance, la forfaitisation de l’entretien en incluant ou non les pneus, le véhicule de remplacement, l’assurance et, aboutissement de la logique, des...
Avec une part de marché du segment BtoB toujours plus élevée, les prestataires automobiles mettent tout en œuvre pour séduire et fidéliser les professionnels. Chez Euromaster, cette clientèle représente la moitié du volume de pneus écoulés. Autre statistique éloquente, un conducteur professionnel sur trois arrive dans un centre de l’enseigne dans le cadre d’accords signés avec les loueurs longue durée.
Après avoir proposé des solutions de financement, constructeurs et loueurs ont ajouté l’assistance, la forfaitisation de l’entretien en incluant ou non les pneus, le véhicule de remplacement, l’assurance et, aboutissement de la logique, des contrats full services. Ce mouvement s’est amplifié avec le développement du numérique et la possibilité de dématérialiser les échanges. Enfin, des prestations comme la conciergerie et les services de jockey ont enrichi la palette. Et désormais, la télématique figure au catalogue.
En interne ou avec un prestataire
Ce qui amène à une question centrale pour les entreprises : faut-il assurer en interne la gestion de ces services ou externaliser cette tâche auprès d’un loueur pour simplifier la vie du gestionnaire et des conducteurs, et réaliser des économies ?
On s’en doute, il n’y a pas de réponse tranchée. Des secteurs d’activité auront logiquement tout intérêt à passer par un loueur, d’autres à piloter eux-mêmes les services. Avec des kilométrages élevés et des conducteurs à la conduite heurtée, une société de transport de messagerie verra ses pneus s’user plus vite. « Dans ces conditions, il peut être intéressant d’opter pour un contrat full services avec des pneus facturés au réel », illustre Laura Ostyn, Category Manager pour Euromaster.
« Avant de se poser la question des services, les entreprises doivent d’abord choisir entre achat et location, répond pour sa part Olivier Rigoni, fondateur de Cogecar, conseil spécialiste des flottes. Lorsqu’elle retient la LLD pour les véhicules de ses commerciaux, une PME de taille modeste aura plutôt tendance à confier les services à son loueur. Sans ressources spécifiques, difficile d’aller négocier des prestations techniques directement avec des interlocuteurs de métiers et de structures diversifiés. »
En d’autres termes, Olivier Rigoni estime que sa taille et le mode de financement de sa flotte, achat ou LLD, orientent le choix de l’entreprise. « Le coût reste un critère important, considère-t-il, mais la praticité constitue un critère prépondérant et l’est encore davantage quand le volume de la flotte diminue. »

Une question de taille…
En outre, la décision de l’entreprise dépend de sa stratégie d’achat. Si elle fait appel à plusieurs loueurs, elle aura tendance à piloter les services en direct pour ne pas multiplier les fournisseurs et simplifier sa gestion.
Autre élément d’appréciation pour les grandes entreprises, avec la norme comptable IFRS16 en vigueur depuis le 1er janvier 2019, la LLD perd son avantage comptable et doit être inscrite au bilan. Les entreprises peuvent alors être tentées de changer leur fusil d’épaule et de séparer financement et services pour continuer à inscrire ces derniers dans les charges.
Cas particulier mis en avant par Euromaster : les administrations. Fréquemment, celles-ci s’appuient sur leurs ateliers intégrés et se contentent d’acheter des pneus ; elles y assurent les permutations été/hiver et le changement des enveloppes usées, avec à la clé un besoin allégé en reporting. Rares sont les administrations qui misent sur les loueurs pour ces missions.
Pour prendre en main les différents services, l’entreprise doit donc se poser la question de savoir si elle possède en interne une organisation capable de les gérer. « La réponse dépend de la maturité du gestionnaire de flotte, souligne Laura Ostyn pour Euromaster. Certaines entreprises optent pour le full services car il leur garantit la sérénité et un loyer constant qui intègre tous les coûts. Plus la gestion de flotte se professionnalise, plus l’entreprise choisit l’externalisation. »
… et de maturité
« Avec les services automobiles, toutes les situations coexistent mais en règle générale, plus les organisations sont matures, moins les services sont assurés par les loueurs, répond pour sa part Stéphane Montagnon, fondateur du cabinet de conseil Holson, spécialiste des flottes. Et une fois l’organisation mise en place et le gain constaté, il ne faut pas revenir en arrière », ajoute-t-il. Deux points de vue qui ne sont pas nécessairement contradictoires : dans les deux cas, il revient au gestionnaire de flotte d’assurer le suivi très attentif de ses prestataires.
Mais si l’entreprise décide de piloter un ou plusieurs services, elle doit organiser les rendez-vous, contrôler les factures, etc. Sur ce dernier sujet, pour la plupart des prestations, l’entreprise peut choisir entre le forfait ou la facturation à l’euro l’euro, augmentée des frais de gestion avec chacun de ses prestataires. Cette formule doit être privilégiée quand l’entreprise ne connaît pas sa consommation future. Car avec une forfaitisation, les conditions de prise en charge des sous- ou sur-consommations doivent être minutieusement précisées.
Pour reprendre en main ces postes de dépenses, l’entreprise doit donc avoir développé une expertise et un outil informatique, ou s’offrir l’aide d’un fleet manager. Sans oublier de déployer ces services avec le plus grand soin avec chacun des prestataires et de former les conducteurs aux nouvelles procédures. Une démarche complexe alors qu’en face, le loueur aligne une palette de services comme le reporting ou le contrôle de gestion. Ce qui explique les allers-retours entre deux modes de gestion.
Un volume suffisant de véhicules
Dès que la flotte compte plus de 100 véhicules, les consultants estiment que l’entreprise peut réfléchir à sortir des services des contrats signés avec les loueurs. Dans ce contexte, l’achat et la gestion des pneus sont les premières prestations à être reprises en direct par les entreprises. « Elles échappent alors aux marges élevées réalisées par les loueurs dans ce domaine », observe Olivier Rigoni pour Cogecar.
Seules les flottes dont le périmètre dépasse 400 à 500 véhicules ont intérêt à superviser en interne les services automobiles. « Plus le volume de véhicules est important, plus l’entreprise peut piloter sa dépense en y consacrant des ressources », confirme Olivier Rigoni. Un parc de 50 à 60 véhicules ne dispose pas d’un gestionnaire de flotte à temps plein. Dans ces conditions, difficile de prendre en charge des missions supplémentaires. Car toute l’expertise s’incarnera dans la précision avec laquelle le cahier des charges sera rédigé et dans l’exhaustivité des lignes budgétaires prises en compte. L’exercice sera plus facile pour un professionnel dont le temps est entièrement consacré à la gestion de sa flotte. Pour un salarié qui jongle entre plusieurs postes, la mission sera plus ardue.
Ce qu’illustre Hugo Gomes, responsable des services généraux et du parc de Dentsply Sirona. Pour les 160 véhicules de ce spécialiste des produits et des solutions pour la dentisterie, Hugo Gomes a décidé de suivre en direct les pneus, l’essence et le télépéage, entre autres pour une question de rapidité. « Je peux me permettre de piloter ces postes en direct car ma flotte compte 160 véhicules. Avec 700 unités, ce serait plus difficile. Par le passé, j’ai géré une flotte de ce type. Tous les services étaient pris en charge par les loueurs. L’entreprise voulait une seule facture pour toutes les prestations dans le but de simplifier le contrôle de gestion », relate Hugo Gomes (voir aussi le témoignage).
Quel que soit le volume de véhicules à traiter, les effectifs du département de la flotte orientent donc aussi le choix des entreprises. « Le plus souvent, un parc de 1 500 véhicules est dirigé par deux à trois personnes, estime Laura Ostyn pour Euromaster. Mais ces effectifs dépendent surtout du rythme des renouvellements des véhicules. S’ils se succèdent rapidement, ils génèrent un travail important en “back office“. La loi de roulage a une incidence sur la politique de recrutement. »
L’importance de la loi de roulage
De fait, avec des kilométrages annuels de 15 à 20 000 km et des renouvellements tous les deux ans, le full service auprès d’un ou de plusieurs acteurs de la LLD ne constitue pas un choix pertinent. « Avec 60 000 km sur quatre ans, l’entreprise n’a aucun intérêt à confier l’entretien et les pneus à un loueur. Avec des espaces de révision de 40 à 50 000 km, la voiture passera seulement deux fois au garage. Dans ce cas, la valeur ajoutée du loueur est nulle. Pour les véhicules de fonction et dans ces conditions, l’intérêt des loueurs réside dans le conseil et ce, notamment, lors de modifications des contrats et des renouvellements », démontre Olivier Rigoni de Cogecar.
Avant de reprendre les services en interne, l’équation économique doit aussi être posée et la décision pesée. Selon Olivier Rigoni, la marge des loueurs varie selon les acteurs et les prestations, mais oscille entre 20 et 30 % : « Il faut rapprocher ce pourcentage de la composition du TCO, expose ce consultant. L’entretien représente 10 % du TCO et les pneus 4 %. Travailler sur des pourcentages aussi faibles suppose des volumes de véhicules suffisants pour que le gain financier justifie les efforts et les investissements consentis. »
Pour Holson, Stéphane Montagnon partage ce constat. Alors que le loyer financier, l’entretien et le carburant pèsent 70 % du TCO, l’arbitrage peut se faire sur les autres 30 %. Sur chacun de ces postes restants, le gain peut atteindre 5 à 10 %. Bref, au final, le bénéfice reste modeste comparé au TCO annuel d’un VP ou d’un VUL. « De plus, souscrire tous les services auprès du loueur offre de gérer sa flotte sur une seule plate-forme, mais cette praticité a un coût très élevé », juge Stéphane Montagnon.
La question du coût
Autre variable à prendre en compte, la marge du loueur varie en fonction de la taille de la flotte de son client. Surtout, grâce à leurs volumes, les différents acteurs négocient des remises avec leurs fournisseurs et choisissent ensuite d’en faire bénéficier leurs clients. Ou pas. « Comme les services ont tendance à être forfaitisés en France, le loueur conserve la marge, explique Stéphane Montagnon. Seule la concurrence entre loueurs peut faire baisser le montant du forfait. » Autrement dit, avant d’accorder sa confiance à un loueur, consulter le marché reste indispensable.
Mais les prestataires peuvent aussi proposer des tarifs compétitifs aux entreprises quand elles passent en direct. Ce que confirme Hugo Gomes pour Dentsply Sirona : « Nous avons négocié des remises sur les pneus auprès d’Euromaster. Cette remise n’est pas au même niveau que celle qu’aurait pu obtenir un loueur, mais de toute manière, ce dernier ne la rétrocède pas. »
Une surveillance attentive
Pour Olivier Rigoni, les acteurs de la LLD ont énormément progressé ces dernières années : « Plus une entreprise leur confie de services, mieux c’est. Mais il faut bien gérer la mise en place du contrat et bien mener la négociation. À titre d’exemple, quand un quota de pneus est prévu et que certaines enveloppes ne sont pas consommées, le remboursement doit être effectif ou le crédit reporté sur un véhicule restitué dont les pneus sont usés », recommande ce consultant.
Avant de confier des services aux loueurs ou d’en reprendre la gestion, les entreprises doivent donc soigneusement peser le pour et le contre de chacune des solutions. Le coût facturé par le loueur doit être comparé à celui de la gestion administrative nécessaire en interne pour assurer cette mission. Pour les entreprises, opter pour un forfait auprès d’un loueur assure une tranquillité. Mais choisir la facturation au réel génère des gains avec une visibilité sur les opérations réellement effectuées. Bref, chaque cas doit être étudié à la loupe et calculette en main.
Dossier - Services : la valeur ajoutée des loueurs en question
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