
À l’occasion d’une conférence de presse, le gouvernement a présenté la stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France, lancée dans le cadre du plan France Relance, avec pour ambition d’en faire « l’énergie de la France », selon la ministre de la transition écologique Barbara Pompili.
Pour la ministre, si l’hydrogène ne résoudra pas tout et ne peut se substituer à « un changement dans nos manières de consommer de l’énergie dans la recherche d’une plus grande sobriété », il représente toutefois une « opportunité stratégique pour massifier et accélérer la décarbonation des secteurs et des activités les plus difficiles à décarboner, en particulier dans l’industrie et les transports. » Pour rappel, la stratégie nationale bas carbone et la programmation pluriannuelle de l’énergie ont fixé pour objectif la neutralité carbone en 2050.
Le plan de relance prévoit ainsi de consacrer 7,2 milliards euros de soutien public à la filière hydrogène d’ici 2030 dont 2 milliards sur la période 2020-2022, dans le but de construire une filière française de l’hydrogène décarboné de portée internationale. À la clé : « plus de 6 millions de tonnes de CO2 économisées par an dès 2030, soit l’équivalent des émissions annuelles de CO2 de la ville de Paris », a affirmé Barbara Pompili.
6,5 GW d’électrolyse d’ici 2030
En pratique, la stratégie nationale vise tout d’abord à faire passer la production d’hydrogène par électrolyse à une échelle industrielle sur le territoire français. « En cohérence avec notre stratégie nationale bas carbone, nous visons 6,5 GW d’électrolyse installés d’ici la fin de la décennie et nous voulons développer une filière compétitive de production d’électrolyseurs en France, a précisé Barbara Pompili. L’objectif est de convertir l’hydrogène d’origine fossile en hydrogène décarboné le plus rapidement possible dans les usages actuels qui sont les usages industriels. »
La stratégie prévoit de mettre en place plusieurs mécanismes : un soutien des projets de verdissement de l’hydrogène dans le secteur du raffinage, un système de garanties d’origine ou encore un complément de rémunération pour combler le différentiel des coûts de production de l’hydrogène par électrolyse avec ceux de l’hydrogène fossile.
Développer la mobilité hydrogène « lourde »
Par la suite, le gouvernement veut développer les usages les plus adaptés à l’hydrogène en particulier dans l’industrie et pour la mobilité dite « lourde », à savoir le transport de marchandise et le transport collectif de passagers. Sont donc concernés les véhicules utilitaires légers, les poids lourds, les bus, les bennes à ordures ménagères mais aussi les trains et même les bateaux. « Ce secteur (constructeurs et équipementiers automobiles) représente un enjeu économique important avec un chiffre d’affaires de plus de 100 milliards d’euros et 225 000 emplois », pointe le gouvernement.
Soutenir la chaîne de valeur et la R&D
En parallèle, « nous accélérerons la montée en puissance de toute la chaîne de valeur française sur des composants clés : systèmes de pile à combustible, réservoirs haute pression et matériaux afin d’améliorer leur robustesse et leur durée de vie tout en réduisant les coûts », a complété Barbara Pompili. Cela passera selon elle par une mutualisation des infrastructures et des projets.
Le gouvernement estime entre 50 000 et 150 000 le nombre d’emplois directs et indirects générés en France par le développement de la filière. Enfin, la stratégie nationale veut anticiper les usages de demain en soutenant la R&D.
Sur la période 2020-2023, 3,4 milliards d’euros seront ainsi débloqués dont 54 % destinés à la décarbonation de l’industrie, 27 % au développement de la mobilité professionnelle hydrogène et 19 % au soutien à la recherche, l’innovation et le développement de compétences.
Des appels à projets en préparation
Plusieurs appels à projets sont d’ores et déjà prévus. Dans les prochains mois, l’Ademe lancera deux appels à projets à échéance 2023. Le premier, doté de 275 millions d’euros, accompagnera le déploiement de hubs territoriaux d’hydrogène. Le second financera quant à lui à hauteur de 350 millions d’euros le développement de briques technologiques et de démonstrateurs liés à la production et au transfert d’hydrogène ou à ses usages.
En parallèle, 1,5 milliard d’euros seront investis dans un projet d’intérêt européen commun sur l’hydrogène. L’idée est, comme pour les batteries, de « créer un airbus de l’hydrogène et s’engager dans la compétition mondiale », notamment avec des partenaires allemands, a expliqué Philippe Boucly, président de l’Association Française pour l’hydrogène et les piles à combustible (Afhypac). Côté R&D, 65 millions d’euros seront destiné à un appel à manifestation d’intérêt en 2021 dans le cadre du programme prioritaire de recherche « Applications de l’hydrogène ». Enfin, 30 millions d’euros iront au développement de campus des métiers et des qualifications.