
En tant que gestionnaire de flotte poids lourds Grand-Est chez Suez Matériel et Logistique France, Nicolas Mercelot choisit ses véhicules pour leur fonctionnalité, leur maintenance et leur TCO. Cet ancien exploitant de déchets banals ou ménagers connaît les contraintes des conducteurs de véhicules de déchets et les attentes des collectivités et des sociétés.
Flottes Automobiles : Quelle est votre mission au sein de Suez Matériels et Logistique ?

Nicolas Mercelot : Depuis 2017, je gère les entrées et sorties de toutes les cartes grises de la flotte de Suez destinées à la collecte des déchets des collectivités et des entreprises : hôpitaux, supermarchés et entreprises de biodéchets en vue de méthanisation, sur la région Est de la France. Je gère aussi pour la France un parc-relais destiné aux usages de courte ou moyenne durée, ce qui revient moins cher que des locations en courte durée. Sur un total national de 6 000 cartes grises, je gère donc un parc de 800 véhicules que je garde en moyenne six à sept ans pour les collectivités et dix à douze ans pour l’industrie, notamment les bennes amovibles Ampliroll. Pour les remplacements, je conserve un parc « mulet » racheté en préfinancement.

Comment déterminez-vous vos acquisitions de véhicules ?
Pour les collectivités, je propose des cotations de matériel pour les réponses à des appels d’offres portant sur quatre à six ans en support des commerciaux. Et je dispose de quelques mois pour acheter les matériels requis. Cela comprend les bennes à ordures ménagères (BOM), bennes à bras Ampliroll ou à grue, balayeuses, fourgons et bennes semi-remorques pour le transport de déchets. Notre service achat national a des prix protocolés avec certains fournisseurs et le cahier des charges de Suez standardise les modèles.

Cette standardisation me permet de mutualiser au niveau national les camions de notre parc qui sont peu exploités, ce qui réduit la dépense. Je peux aussi acheter des véhicules spéciaux d’occasion en bon état, notamment des porteurs carrossés en BOM Grues. Cela nous épargne les délais actuels de carrossage qui atteignent 18 mois. Mais je dois anticiper ces achats et agir en urgence car ces VI carrossés partent très vite. J’adapte aussi mes financements à la durée des marchés obtenus.
Combien de véhicules achetez-vous par an, de quelles marques et pourquoi ?
Nous travaillons principalement avec Renault Trucks et Scania car ils sont référencés au niveau national et nous achetons 300 à 400 véhicules par an. L’appel d’offres de Reims, sur lequel je travaille actuellement, concerne 28 véhicules. Le choix des véhicules est orienté par les indications de l’appel d’offres. Ainsi, à Reims, les 28 châssis au gaz Scania seront à cabine basse. La cabine basse Scania est superbe, mais son plancher n’est pas totalement plat et elle augmente le prix d’achat de 25 000 euros. Il s’agit cependant d’une demande expresse de la collectivité qui veut une BOM plus adaptée à la ville. À Strasbourg, où les conducteurs travailleront seuls, la collectivité a demandé des Renault Trucks D Wide Z.E. LEC à cabine basse et à porte à battants de bus. Cela afin d’éviter les accidents aux abords des voies cyclables.
La transition énergétique modifie-t-elle le marché ?
Elle importe de plus en plus pour les collectivités où nous devons fournir un service adapté aux ZFE-m et pour les entreprises qui gèrent leur impact sur l’environnement. Dès lors, nous commandons de moins en moins de camions au gazole. Nous limitons aussi notre usage du B100 aux véhicules longue distance car il encrasse trop les filtres à particules des BOM. Nos BOM roulent dorénavant au GNC ou à l’électricité si les tournées font moins de 100 km. Nous en avons déjà 90 en région parisienne.
Avec sa réduction du bruit et du carbone, l’électricité séduit les maires et constitue un avantage concurrentiel pour nous. La collecte de déchets avec des véhicules électriques devient donc prioritaire en ville. Les bennes Ampliroll parcourant davantage de kilomètres, nous en prenons de plus en plus qui sont des Scania hybrides au gazole ou au gaz. Elles sont Crit’Air 1 et ont accès aux ZFE-m. Leur délai de carrossage est de huit mois au lieu d’un an, elles consomment 10 % de carburant en moins et, avec leur prix plus bas, leur TCO est proche sur dix ans. Les véhicules hybrides répondent, à moindre coût, aux réglementations des ZFE-m. Et nos conducteurs les apprécient autant que les électriques.

D’après votre expérience chez Suez, quels véhicules ont le meilleur TCO selon leur énergie ?
Les BOM électriques sont chères, mais avec le contrat de maintenance et de réparation que nous prenons systématiquement, l’entretien coûte moitié moins que pour une BOM au gaz. De plus, le coût du kWh est faible alors que celui du gaz atteint 3 euros/kg. Résultat : le TCO sur dix ans de nos véhicules penche de plus en plus en faveur de l’électrique par rapport au gaz.
Mais le TCO est impacté aussi par les données que nous apporte notre logiciel d’optimisation de tournées Masternaut, et par les prix qui fluctuent actuellement, modifiant aussi les financements. Cela nous contraint à recalculer fréquemment le TCO de nos véhicules avant un achat. Il n’empêche que pour les métiers de Suez, et malgré son coût d’acquisition, le véhicule électrique offre le meilleur TCO. Il est suivi par le véhicule hybride, bien que ses coûts d’entretien et d’énergie varient aussi. Viennent ensuite le gaz et, loin derrière, le gazole.
