
Réalisé en collaboration avec le CNRS et le CEA, ce projet remonte en fait à novembre 2015. Après deux années de recherche, les chercheurs et industriels du Réseau français sur le stockage électrochimique de l’énergie (RS2E), porté par le CNRS, avaient réussi à mettre au point un premier prototype de batterie sodium-ion (Na-ion).
L’idée date des années 80, mais le lithium (Li) avait alors été préféré au sodium pour sa tension de 3,5 V, lui conférant en théorie une plus grande énergie, et pour sa légèreté (les ions lithium sont trois fois plus légers que les ions sodium). Or, le lithium est classé parmi les matériaux rares, présent dans 0,06 % de la croûte terrestre. De plus, il est accessible uniquement dans quelques régions du globe, avec deux tiers des ressources mondiales situées en Argentine, au Chili et en Bolivie. En comparaison, le sodium (Na) est présent dans 2,6 % de la croûte terrestre, mais aussi dans l’eau de mer sous forme de chlorure de sodium (NaCl), composé à la base du sel de cuisine. Une disponibilité qui le rend bien moins coûteux.
Une recharge dix fois plus rapide sur les prototypes

Six mois seulement ont été nécessaires aux chercheurs du CNRS et du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) pour développer un prototype fonctionnel. Ce dernier bénéficie de temps de charge et de recharge dix fois plus rapides que ses équivalents au lithium sur le marché, et d’une décharge à 0 volt. « Sa densité d’énergie (la quantité d’électricité que l’on peut stocker par kilogramme de batterie) atteint 90 Wh/kg, un chiffre comparable à celui des batteries lithium-ion à leurs débuts, a indiqué le CNRS. Quant à sa durée de vie, exprimée en nombre maximum de cycles de charge et de décharge sans perte significative de performance, elle est de plus de 2 000 cycles. » Soit une espérance de vie annoncée supérieure à 10 ans dans des conditions d’usage continu, contre trois ou quatre ans pour les batteries au lithium. Et ce n’est qu’un début…
Des applications sur le marché des VE
Dans la continuité de ces recherches, avec sept brevets déjà déposés et plusieurs dizaines de prototypes fonctionnels, le réseau RS2E a soutenu en 2017 la création de Tiamat. Basée à Amiens, la jeune pousse est chargée de fabriquer et tester les prototypes, avec en ligne de mire le marché des véhicules électriques, principalement Start & Stop ou micro-hybrides, et celui du stockage stationnaire massif des énergies renouvelables intermittentes (éolien et solaire).
« Son objectif cependant n’est pas de détrôner les batteries lithium-ion qui équipent déjà la plupart des appareils électriques mobiles, précise le CNRS. Tiamat s’intéresse notamment aux flottes de véhicules de location qui requièrent des temps de recharge courts et nécessitent une continuité de service aux usagers. La technologie sodium-ion permet aussi d’envisager de nouveaux usages du quotidien, tels des véhicules électriques avec 200 km d’autonomie qui se rechargent en quelques minutes. » La start-up prévoit de fabriquer 20 000 cellules en 2019, si possible en France. Un développement rapide, en seulement quelques années, qui répond à la demande croissante du marché pour des batteries performantes et abordables, et pourrait dynamiser les ventes de véhicules électriques.