
En matière de financement, les pratiques des TPE restent variées mais dans l’ensemble, peu de ces petites structures sont attirées par la location longue durée. Selon l’édition 2021 du baromètre de l’Arval Mobility Observatory, seules 25 % des entreprises de moins de dix salariés projetaient ainsi de retenir ce mode de financement pour leurs véhicules. Des intentions qui ne devraient donc pas bouleverser les pratiques. Pour les artisans du bâtiment notamment, une vaste enquête menée en début d’année par la Chambre des métiers et de l’artisanat de la région Auvergne-Rhône-Alpes indiquait que seulement 5 % d’entre eux pratiquent la LLD pour...
En matière de financement, les pratiques des TPE restent variées mais dans l’ensemble, peu de ces petites structures sont attirées par la location longue durée. Selon l’édition 2021 du baromètre de l’Arval Mobility Observatory, seules 25 % des entreprises de moins de dix salariés projetaient ainsi de retenir ce mode de financement pour leurs véhicules. Des intentions qui ne devraient donc pas bouleverser les pratiques. Pour les artisans du bâtiment notamment, une vaste enquête menée en début d’année par la Chambre des métiers et de l’artisanat de la région Auvergne-Rhône-Alpes indiquait que seulement 5 % d’entre eux pratiquent la LLD pour leurs véhicules. Et cette proportion demeure encore inférieure pour les véhicules utilitaires.
La question de la LLD
Pour la majorité des TPE, les raisons de ce peu d’attrait pour la LLD sont bien connues. Beaucoup, surtout chez les artisans, redoutent des frais de restitution élevés en fin de contrat. Et d’une manière générale, les TPE demeurent peu familières de ce mode de financement : même dans les concessions auxquelles ces petites entreprises s’adressent prioritairement pour renouveler leurs véhicules, la LLD n’est pas forcément mise en avant. « Dans notre réseau, les vendeurs de secteur sont plus axés sur la vente du crédit-bail », confirme Jean Ria, directeur général délégué de Diac Location, la captive de Renault.
Et ces TPE sont d’autant moins informées sur la LLD que certaines d’entre elles ne se tournent pas forcément vers une concession pour acquérir leurs véhicules. « J’ai acheté mon utilitaire directement à un particulier, soit un fourgon L2H2 », retrace Cédric Roullier qui vient de lancer cette année son entreprise de peinture après 34 années d’activité salariée. Pour ce véhicule, qui affiche 165 000 km au compteur, l’artisan a choisi la solution qui lui semblait la plus simple : un financement au comptant dans le cadre du prêt sur quatre ans souscrit pour la création de son entreprise.
Dans le cas de Cédric Roullier, ce ne sont ni les frais de restitution, ni le manque de connaissance du mode de financement en LLD, voire en crédit-bail qui l’ont orienté vers l’achat au comptant. Pour sa voiture personnelle, il a d’ailleurs choisi la location avec option d’achat (LOA). Mais pour son véhicule professionnel, compte tenu du manque de visibilité sur l’avenir du fait de la jeunesse de son entreprise, un achat direct lui paraissait la solution la plus adaptée. À l’image de nombreux autres artisans, il est probable que Cédric Roullier reparte sur un prêt bancaire pour ses futurs véhicules.
La solution de l’acquisition
Aujourd’hui retraité, un électricien anonyme basé à Auray dans le Morbihan (56), a pratiqué le prêt bancaire tout au long de la vie de son entreprise. « J’apportais de mon côté 30 % de la somme et le reste était ensuite financé par un emprunt sur trois ans et pas plus », détaille-t-il. Au-delà des trois ans, le véhicule déjà acheté d’occasion est plus susceptible de casses mécaniques, estime cet électricien, et avec l’usure, ce véhicule est également susceptible d’être recalé aux contrôles techniques. Autant de contraintes qui orientaient cet artisan vers un financement du prêt sur une durée réduite. Mais ce choix prudent n’empêche pas que la détention de l’utilitaire s’étale souvent dans le temps chez les artisans. Jusqu’à ce que les pannes ou les dégradations deviennent trop coûteuses à réparer ou immobilisent trop souvent le véhicule.
Le choix des artisans pour un véhicule d’occasion à moindre coût conduit certains d’entre eux à éplucher les annonces des particuliers. Mais beaucoup préfèrent pousser la porte d’un concessionnaire qui offre plus de garanties sur l’état du véhicule. Et avec les concessionnaires, la plupart de ces artisans ont des habitudes bien établies. Pour son utilitaire, l’électricien que nous venons d’évoquer s’orientait ainsi systématiquement vers un unique fournisseur : « une concession qui commercialise des véhicules peu kilométrés, le dernier affichait 30 000 km au compteur, et bien entretenus avec des carnets des entretiens réalisés dans le garage », expose cet artisan.
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Mercedes Sprinter avec la speed delivery door
La place de la concession
Cette volonté de se tourner vers une concession de confiance est aussi partagée par Philippe Rouiller, à la tête d’Auton’Home, un spécialiste de l’isolation écologique basée à Silfiac, dans le Morbihan pareillement. Cette entreprise a démarré son activité il y a une dizaine d’années. Pour son premier utilitaire, Philippe Rouiller s’est adressé à une concession où il est retourné pour l’achat de son nouveau véhicule, un Trafic L1H1.
Pour son activité, ce professionnel n’a pas besoin d’un grand contenant. « Tous les matériels et matériaux (isolant, machine à souffler, compresseurs) sont directement amenés sur les chantiers par la coopérative à laquelle j’appartiens », explique Philippe Rouiller. Le modèle retenu correspond donc à des besoins de chargement en matériel plutôt limités et ce Trafic L1H1 est suffisamment bas pour passer sous les portiques. Un modèle qui a aussi le mérite de consommer modérément, se félicite Philippe Rouiller : de l’ordre de 7,3 l/100 km, même chargé. Enfin, les aménagements à l’intérieur restent peu nombreux : quelques étagères et tiroirs pour la visserie.
« Le concessionnaire m’avait indiqué un tarif d’environ 11 000 euros pour cet utilitaire », rappelle Philippe Rouiller. C’est ensuite auprès de la banque que le patron d’Auton’Home a obtenu un prêt sur quatre ans pour le financement, à hauteur d’environ 300 euros par mois. « Je pense faire 20 000 à 25 000 km par an avec ce Trafic », indique Philippe Rouiller. Et pour son prochain véhicule, cet artisan envisage de répéter la démarche. « J’en reprendrai un autre avec des critères inchangés : pas de neuf ni de location qui reviennent trop cher », estime Philippe Rouiller.
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Opel Vivaro-e
La LLD pour les TPE
Reste que si les artisans sont peu tournés vers la LLD, les TPE la retiennent plus volontiers. C’est entre autres vrai des entreprises dont la flotte peut comprendre plusieurs véhicules particuliers. C’est par exemple le cas chez V2A, une société basée à Villefranche-sur-Saône (69), qui développe des programmes d’automates pour l’industrie : pharmacie, chimie et traitement de l’eau. Le premier véhicule employé au démarrage de l’entreprise en 2013 avait été financé à crédit. « Le choix de la LLD s’est fait ensuite avec les voitures acquises pour nos premiers salariés », relate Aurélien Verne, président de l’entreprise. Au total, le parc de V2A rassemble actuellement six véhicules de fonction.
La LLD facilite la gestion, avance Aurélien Verne, notamment parce qu’elle libère l’entreprise de la gestion de la revente du véhicule. Fidèle à la marque Peugeot et au concessionnaire local, ce dirigeant a souscrit le contrat de LLD auprès de la captive du constructeur pour cinq véhicules du parc. Avec une entorse récente à cette habitude pour la voiture de ce dirigeant acquise cette fois chez Volvo.
« Nous n’avons jamais vraiment mis en concurrence les loueurs pour nos voitures », précise Aurélien Verne. Pour les salariés, les véhicules sont des 208, « des véhicules de fonction soumis à l’avantage en nature (AEN) », complète ce patron. Une solution qui, selon lui, facilite la gestion. Et elle permet aussi à l’entreprise, comme le pratiquent des sociétés de taille plus importante, d’apporter aux salariés une prestation en plus de leur rémunération.
La LLD pour les salariés
« V2A propose les voitures avec un équipement de base assez confortable. Et si jamais les salariés souhaitent des options, comme changer la couleur du véhicule, les frais sont à leur charge », note Aurélien Verne. Dans ce cadre, l’ajout des options reste variable suivant les salariés mais certains peuvent aller jusqu’à opter pour des modèles dans la catégorie supérieure : un 2008 pour un des salariés. Enfin, V2A rembourse de même les frais de carburant et l’assurance du véhicule.
V2A ne fait pas jouer la concurrence avec d’autres loueurs en vue d’obtenir des loyers plus intéressants. Mais l’entreprise cherche toutefois à maîtriser les frais liés à ses contrats de location. « Nous ne prenons pas la carte carburant chez le loueur parce que nous ne voulons pas être obligés de nous alimenter en carburant dans une enseigne spécifique. Nous préférons avoir la possibilité de couvrir l’ensemble du territoire en remboursant les salariés en notes de frais », justifie Aurélien Verne.
Autre service que cette entreprise ne souscrit pas auprès de son loueur, celui des pneumatiques. V2A demande à ses salariés d’équiper leurs véhicules en pneus hiver (voir aussi l’article sur la sécurité routière) mais veut leur laisser le choix du réseau pour effectuer les permutations. Là encore, les remboursements se font sur la base des notes de frais. « Il ne faut pas que ces changements constituent une trop forte contrainte pour les salariés, pointe Aurélien Verne. Et chez les loueurs, nous trouvions les pneus trop complexes à gérer. » Enfin, du côté des contrats souscrits, V2A a aussi décidé de ne pas prendre l’assurance chez le loueur et a préféré la regrouper avec celle de ses activités. Seule prestation à rester dans le “package” de la location : l’entretien annuel des véhicules.
Quelle gestion de flotte ?
Malgré la multiplication des notes de frais, Aurélien Verne n’estime pas consacrer trop de temps à la gestion de son parc. « Pour cette gestion, les périodes les plus prenantes sont celles des changements de véhicules, lorsqu’il y a des allers-retours avec le loueur pour réajuster la commande. Mais en gestion mensuelle, le recours aux notes de frais rend l’exercice fluide dans l’ensemble », observe ce dirigeant. Quant à la gestion des contrats en cours pour s’assurer du respect des lois de roulage, « nous vérifions les kilométrages parcourus une fois par an pour voir s’ils correspondent à nos contrats. Et nous faisons un avenant si nécessaire », ajoute Aurélien Verne.
À l’instar de V2A, d’autres TPE s’accommodent de la LLD qu’elles pérennisent dans la durée. Pour inciter encore un plus grand nombre d’entre elles à retenir ce financement, les différents acteurs de la location longue durée adaptent leurs offres et multiplient les services. Compte tenu du faible nombre de petites entreprises qui y souscrivent pour l’instant, ce marché suppose en effet un potentiel de croissance important.
Pour limiter les coûts liés à la LLD, jugés trop élevés par nombre de TPE et d’artisans, des prestataires offrent de louer, toujours en longue durée, des véhicules d’occasion. « Auprès de TPE et PME dotées de flottes de moins de 50 véhicules, nous mettons en avant des occasions récentes, de moins d’un an et de moins de 20 000 km, toutes issues des réseaux constructeurs », expose Constatin Éliard, le cofondateur de Flease, un loueur de VO créé en 2020.
Le véhicule d’occasion
Avec ces véhicules d’occasion, les arguments de Flease tiennent dans des loyers moins élevés, mais aussi dans une fiscalité intéressante : les avantages en nature (AEN) des salariés et les amortissements non déductibles (AND), calculés sur la valeur d’achat de ces véhicules, sont de fait réduits.
Autre élément différenciant pour ce jeune loueur, les véhicules commercialisés sont systématiquement équipés en télématique embarquée. Un outil qui aide Flease, tout comme les entreprises clientes, à optimiser les lois de roulage. « Nous n’attendons pas la fin du contrat pour signaler un dépassement de kilométrage, affirme Constantin Éliard. Nous faisons le point avec les clients quand nous observons une tendance à la hausse ou à la baisse pour voir si cette tendance va se confirmer. Si c’est le cas, nous pouvons adapter le loyer immédiatement. » Flease donne aussi à ses clients l’accès à une interface pour suivre les informations utiles afin de gérer leurs contrats : sur les loyers, la fiscalité, les échéances d’entretien, etc. « Nous allons ajouter des modules progressivement. L’idée est de remplacer les fichiers Excel, très courants dans les TPE et PME et rarement mis à jour », indique Constantin Éliard.
Enfin, concernant les restitutions, Flease les réalise en présence d’un de ses représentants et du client par le biais d’une application. Un dispositif qui vise à rendre cette étape « moins déceptive », argumente Constantin Éliard : « Contrairement aux loueurs du marché, les frais de remise en état ne font pas partie de notre modèle de revenu et de marge. Pour diminuer ces frais de restitution, nous faisons bénéficier nos clients de frais de réparation négociés avec nos prestataires partenaires. »
Améliorer la restitution
D’autres loueurs ont eux aussi innové autour de cette étape de la restitution pour une meilleure maîtrise des frais demandés en fin de contrat. Free2Move (groupe Stellantis) ou Diac Location proposent ainsi des systèmes d’épargne en vue d’anticiper le paiement des éventuels frais de restitution, Athlon ou LeasePlan misent sur des assurances qui les couvrent jusqu’à un certain montant.
Autant de services qui pourront peut-être convaincre TPE et artisans de se tourner plus vers la location longue durée. Pour y parvenir, les loueurs ont aussi besoin de mobiliser leurs forces de vente pour informer ces petites entreprises des spécificités de leurs contrats. Un travail qui génère un coût. Un coût que même les loueurs qui ciblent de petites flottes préfèrent souvent consacrer… aux plus grandes d’entre elles.