Tout conducteur s’est déjà trouvé dans la délicate situation d’une perte de contrôle. S’il n’y a pas eu de conséquence, il en a gardé le désagréable sentiment de ne pas avoir conservé la maîtrise de son véhicule, sans avoir pour autant commis de faute dans la plupart des cas. Malheureusement, ce n’est souvent pas l’avis des gendarmes et des assureurs.
Les stages de conduite enseignent aux conducteurs comment se tirer d’une situation d’urgence. Il faut ne pas freiner et immédiatement contrebraquer en mettant les roues dans la direction où l’on veut aller. À ce moment, il convient de débrayer et enfin de freiner. Une voiture s’écartant de plus de 45/50 ° de sa direction (donc se plaçant en travers) n’est pas rattrapable. Laissez la technique de remise des gaz aux pilotes de course car il faut parfaitement la maîtriser. La formation est utile mais saura-ton l’appliquer lorsqu’on se trouve en situation d’urgence ? Aussi, le stage commence par les mesures à prendre...
Éviter la perte de contrôle
Les stages de conduite enseignent aux conducteurs comment se tirer d’une situation d’urgence. Il faut ne pas freiner et immédiatement contrebraquer en mettant les roues dans la direction où l’on veut aller. À ce moment, il convient de débrayer et enfin de freiner. Une voiture s’écartant de plus de 45/50 ° de sa direction (donc se plaçant en travers) n’est pas rattrapable. Laissez la technique de remise des gaz aux pilotes de course car il faut parfaitement la maîtriser. La formation est utile mais saura-ton l’appliquer lorsqu’on se trouve en situation d’urgence ? Aussi, le stage commence par les mesures à prendre pour éviter de se mettre dans une telle situation.
Les multiples causes de la perte de contrôle
Quand on se penche sur cette question de la perte de contrôle, on ne peut manquer de tomber sur l’article R413-17 du Code de la route qui impose de rester maître de sa vitesse, manquement souvent à l’origine de la perte de contrôle. Il ne faut toutefois pas omettre le R412-6 qui prévoit que l’on doit, à tout instant, être en position d’exécuter sans délai les manœuvres requises par la circulation.
Ce dernier article a été complété par un R412-6.1 qui interdit l’usage à la main du téléphone portable lorsque l’on conduit sous peine d’une amende de 135 euros. Le bluetooth sera prochainement interdit lorsqu’il comporte une oreillette nuisant à la perception de l’environnement. Le système main libre restera admis et l’on comprend bien sa nécessité professionnelle. Mais à la différence de la radio, il mobilise l’attention du conducteur qui écoute et répond, ce qui l’incite à avoir un regard fixe alors que la conduite nécessite qu’il balaie l’espace devant lui.
La première cause de perte de contrôle reste de fait le défaut d’attention, celle-ci étant captée par une activité étrangère à la conduite (régler la radio, rechercher une cigarette, consulter un plan, ramasser un objet tombé, manger, etc.). Ce n’est certes pas la seule cause et trois autres situations peuvent être incriminées :
Les phénomènes climatiques (verglas, brouillard, neige) qui rendent la chaussée glissante ou diminuent la visibilité. Ce ne sont pas toujours des cas de force majeure et le conducteur doit adapter sa vitesse et son comportement aux conditions extérieures.
L’état de la chaussée qui peut être rendue dangereuse par la présence d’un obstacle (exemple : branche d’arbre : CAA Bordeaux 3° ch 28 novembre 2006, n° 04BX00738) ou d’une substance glissante. Il appartient à l’autorité responsable de la route de démontrer qu’elle a rempli son obligation d’entretien. Quoique la responsabilité soit présumée, il est souvent difficile d’obtenir gain de cause faute de pouvoir établir les faits, la police n’intervenant qu’en cas de corporel ou l’autorité gestionnaire de la chaussée refusant de signer un constat amiable. La garantie « défense-recours » devrait assister l’assuré mais souvent l’assureur, qui ne peut lui-même démontrer les circonstances, déclare forfait.
L’état du véhicule qu’il s’agisse des pneus (usure, sous-gonflage) ou de la direction (exemple : défaut de la crémaillère). Les dispositifs optimisant l’adhérence à la chaussée (ESP) ou corrigeant la trajectoire ne peuvent se substituer au conducteur qui doit veiller au bon entretien du véhicule et à son utilisation conforme. Le véhicule qui appartient à une flotte, récent et bien entretenu, ne devrait pas manifester ce type de défaut, sauf vice d’origine.
Du côté des assureurs
Le barème de l’IRSA (convention d’indemnisation et de recours entre sociétés d’assurance automobiles) traite peu de la perte contrôle dont les circonstances sont difficiles à établir ; il retient la position et la direction des véhicules sans se préoccuper de savoir si elles découlent d’un défaut de maîtrise ou d’une volonté délibérée du conducteur. Cependant, il tend à mettre la responsabilité (cas n° 51) à la charge du conducteur qui se « met en travers » (volontairement ou involontairement), sauf à ce que son adversaire ait commis un manquement supérieur (exemple : circulation en sens interdit, franchissement d’un feu au rouge).
Y perd le contrôle et se met en travers. Il est heurté à l’arrière par X. Pour la responsabilité, application du cas n°51: X: 0 / Y: 100.
Suite à sa perte de contrôle, un véhicule peut être heurté à l’arrière par l’autre conducteur, ce qui entraînerait la responsabilité totale de celui-ci (cas n° 10). Aussi, l’IRSA prévoit-elle que, dans ce cas, la mise en travers et donc le cas 51 seront retenus (voir ci-contre).
Lorsque la perte de contrôle est imputable à un phénomène climatique tel que le verglas, l’accident peut être considéré comme « responsable », même s’il n’y a pas d’autre véhicule impliqué, car le conducteur devait adapter sa vitesse et sa conduite aux conditions de circulation. S’il a un contrat soumis au bonus-malus, il subira une majoration car la clause réglementaire n’exonère d’un malus que s’il y a force majeure ou responsabilité totale d’un tiers (clause type articles 6 & 7, article A121-1 Code de l’assurance).
Une perte de contrôle bien fautive
Indiscutable, cette responsabilité imputée à une conductrice qui perdant la maîtrise de son véhicule, se déporte et heurte un véhicule venant en sens inverse. Les juges n’ont rien oublié et lui ont reproché une vitesse inadaptée, le transport à l’arrière de cinq enfants et d’un chien, l’écoute de la radio, le fait de fumer (depuis, la loi sur la lutte contre le tabagisme interdit de fumer dans une voiture transportant des mineurs de moins de 18 ans) et de conduire avec des talons hauts. Ils ont réfuté la présence d’une plaque de verglas. Il faut dire que l’accident avait eu lieu en Corse au mois d’août… (Cass. 2 Civ. 16 janvier 2014, n° 13-12771).
Lorsque la faute doit être partagée
À la sortie d’une courbe prononcée à gauche, une conductrice circulant sur une voie limitée à 70 km/h est surprise par la présence à moins de 90 m devant elle d’un tracteur équipé d’une débroussailleuse appartenant à la commune. Elle perd le contrôle de sa voiture qui vient percuter violemment l’engin et l’accident est fatal à la conductrice et à sa passagère.
La débroussailleuse (ayant le caractère de véhicule) empiétait de 1,50 m sur la chaussée, elle était équipée d’un gyrophare mais il manquait le système tri-flash et les bandes de signalisation et aucune signalisation d’un chantier mobile ne prévenait les usagers, cette précaution n’étant imposée qu’en cas de brouillard ou de fumées.
Au pénal, le conducteur de la débroussailleuse a été relaxé du chef d’homicide par imprudence mais la cour de cassation, qui ne juge qu’en droit, a renvoyé l’affaire devant une cour d’appel pour statuer sur les responsabilités réciproques et il est à prévoir qu’elles seront partagées (Cass. Crim. 18 février 2014, n° 12-86295).
Responsable même en l’absence de choc
Un conducteur perd momentanément la maîtrise de sa voiture mais parvient à l’arrêter, sans choc, derrière un autocar. L’automobiliste qui le suit est surpris par l’arrêt de la circulation, utilise ses freins qui sont en mauvais état, et il s’ensuit un carambolage entre plusieurs véhicules. La question posée aux magistrats était de savoir si le premier véhicule se trouvait impliqué dans l’accident quoiqu’il ne soit entré en contact avec aucune des voitures accidentées. La loi Badinter (5 juillet 1985) retient l’implication de tout véhicule intervenu de quelque manière que ce soit dans une collision, même s’il n’y a pas de faute de la part de son conducteur, ce qui est le cas dans cette affaire.
L’application très particulière de cette loi fait que l’implication permet à une victime de s’adresser à tout impliqué. Mais cela n’interdit pas à son assureur de se retourner ensuite contre les autres assureurs pour se faire rembourser tout ou partie de ses débours (Cass. 2 Civ. 25 mai 1993, n° 91-21559).
Responsable : pas toujours
Devant un tribunal, la responsabilité du conducteur ayant perdu le contrôle de son véhicule n’est pas toujours retenue ainsi que le montrent les deux exemples suivants.
Par suite d’une bruine verglaçante, un conducteur glisse sur la chaussée et percute une semi-remorque. Les magistrats considèrent que les conséquences du phénomène n’étaient pas prévisibles et écartent sa faute. L’usager est donc indemnisé totalement par l’assureur de la semi-remorque par application de la loi Badinter (CA Paris 17°, 25 février 2002, n° 2001/08165).
Si l’implication est aisément retenue, elle ne signifie pas que le conducteur sera in fine responsable, c’est-à-dire privé de tout ou partie de l’indemnisation de son préjudice. Un conducteur dépasse un ensemble routier par la gauche, en prenant la voie médiane. Il fait une embardée et va heurter le terre-plein central en béton, avant de revenir percuter le côté gauche du poids lourd sans que le témoin qui rapporte les circonstances de l’accident soit en mesure d’en comprendre les causes.
Une embardée peut être causée par une faute du conducteur mais aussi par un défaut de la chaussée ou par un écart de l’ensemble routier dépassé. Le procès-verbal de gendarmerie, produit cinq mois après les faits, ne permet pas de trancher. L’absence de démonstration profite au conducteur victime car sa faute doit être prouvée pour que l’on puisse réduire son indemnisation, voire l’en exclure totalement (CA Versailles, 3° ch, 15 avril 2010, n° 09/01265).
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